L’année de l’indice TSX a été marquée par la volatilité en raison des incertitudes budgétaires et économiques persistantes. Michael O’Brien, chef de l’équipe des actions canadiennes de base, Gestion de Placements TD parle avec Greg Bonnell de MoneyTalk des grandes tendances qui influent sur les actions canadiennes et explique ce à quoi il faut s’attendre pour l’année à venir.
Publié initialement le 7 décembre 2023
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La bourse de Toronto a connu des turbulences, mais selon notre invité, il est important de n'être ni trop optimiste ni trop pessimiste quant à l'année à venir, compte tenu de cette volatilité. Michael O'Brien, responsable des actions canadiennes de base à Gestion de placements TD se joint à nous. Bonjour, Greg. Ni trop optimiste ni trop pessimiste, cela me plaît. Je souffre du même problème. Ah, quel mois excellent nous avons eu en novembre. Ah, quel mois terrible nous avons eu en octobre. De quoi... C'est le traitement que je ne m'administre à moi-même. Lorsqu'on se retrouve dans ce genre de période avec d'importantes fluctuations des marchés, ça peut être désorientant. On oublie les principes fondamentaux de l'investissement. Et on ne prend pas suffisamment de recul. Le mois de novembre a été un mois énorme, mais comme vous l'avez dit, septembre et octobre étaient plutôt sombres. Je suis toujours étonné de voir à quel point la confiance peut fluctuer. Ce n'est pas que les données fondamentales n'étaient pas au rendez-vous, c'est que lorsque la confiance reflue ou progresse, il peut y avoir des mouvements extrêmes, c'est là où il faut prendre du recul. En dépit des hauts et des bas, quand on prend justement du recul, ces marchés n'ont guère fluctué depuis deux ans. L'indice TSX a atteint un pic en avril 2022, il y a presque deux ans. L'indice S&P a atteint son pic en janvier 2022. Donc pendant presque deux ans, il y a eu un marché qui connaît des hauts et des bas, certes, mais dans une fourchette assez étroite. Cela a du bon sens car cela coïncide avec le début des séries de hausses de taux aux États-Unis et au Canada. Dans ce contexte, cela a du bon sens. Ces fluctuations, dans une fourchette assez étroite sont attribuables au fait que les investisseurs cherchent à démêler les mesures que prendront les banques centrales, le comportement de l'économie. Nous ne savons pas au juste comment tout cela se terminera, mais alors que l'année 2024 approche, nous sommes un peu plus près de la conclusion. Mais il est toujours utile de prendre du recul et d'essayer de situer les péripéties au quotidien dans le contexte général. Nous avons beaucoup pédalé depuis deux ans, mais nous n'avons pas fait beaucoup de chemin. À l'approche de l'an prochain, il y a deux idées que j'ai à l'esprit en prenant connaissance des rapports et des commentaires. Il y aura sans doute des coupures de taux par les banques centrales, y compris la nôtre, peut-être dès le printemps dans le cas de la Banque du Canada. Il y aura également un ralentissement de l'économie. Si je conjugue ces deux éléments, que dois-je en conclure au sujet de l'avenir de la bourse de Toronto? Vous avez raison. L'évolution des quelques dernières semaines est largement attribuable à l'espoir chez les investisseurs que les coupures de taux s'en viennent, mais en même temps, les investisseurs souhaitent que les taux soient réduits, mais sans souhaiter la raison habituelle d'une réduction de taux, c'est-à-dire un ralentissement brutal de l'économie. Il y a donc une certaine incohérence dans l'attitude du marché. Plus généralement, on considère que les hausses de taux sont terminées, mais la question est de savoir quand les coupures de taux vont intervenir. Je dirais que dans le contexte canadien, il est à soupçonner qu'il y aura des coupures de taux d'ici le milieu de l'année, car à mon avis l'économie en a besoin. Il devient de plus en plus apparent que l'économie canadienne ralentit. Quand on se projette en avant, il y a des facteurs négatifs assez évidents que nous devrons surmonter. Tout n'est pas sombre, mais les perspectives pour 2024 doivent être marquées par la sobriété. La croissance au Canada sera plutôt mitigée. On ne doit pas s'attendre à une année de bénéfices exceptionnels pour la plupart des entreprises canadiennes. Il s'agira de surmonter de nombreux facteurs négatifs. Parlons d'un secteur en particulier pour illustrer vos pronostics. Qu'arrive-t-il aux banques? Les banques viennent d'annoncer leurs bénéfices Elles nous ont avertis que l'année prochaine serait plus difficile. Oui, il faut avoir un point de vue équilibré justement. D'une part, les bénéfices des banques étaient quelque peu décevants. Mettons qu'il y avait... des résultats variables. Il y a eu une augmentation des provisions pour pertes sur créances. Celles-ci ne sont pas encore alarmantes, mais la tendance est à la hausse. La croissance des prêts ralentit. Il y a également une certaine pression qui s'exerce sur les fonds propres. Bref, personne ne veut baisser la garde. Tous ces facteurs se coalisent pour exercer une certaine pression sur les perspectives de bénéfices. Trois des six banques ont dépassé les attentes, les trois autres ne les ont pas atteints. Le plus important toutefois, ce sont les prévisions de bénéfices pour l'année civile 2024 et l'exercice 2024, qui sont toujours en baisse, en réduction. Et les attentes pour l'année sont assez modestes. En revanche, beaucoup des banques sont cotées à moins de 10 % les bénéfices futurs, avec des dividendes de quelque 5 %. Il y a beaucoup de pronostics défavorables qui sont incorporés dans ces cours. Les facteurs qui seraient normalement les plus alarmants, l'évolution du crédit, la nécessité pour les banques de réunir des capitaux supplémentaires, sur ces plans-là, les banques sont toujours très solides. La situation de crédit se maintient mieux que les pessimistes ne l'auraient redouté. Au niveau des fonds propres, naturellement, chacun veut protéger son capital dans cet environnement, mais les banques ont des fonds propres extrêmement solides. Donc les risques extrêmes de baisse ne semblent pas probables, ce qui est très rassurant. Comme je l'ai dit, la saison des annonces des bénéfices des banques n'était pas reluisante, les perspectives ne le sont pas non plus, mais elles ne sont pas catastrophiques non plus. Donc encore une fois, un marché qui va continuer de fluctuer, mais dans une fourchette assez limitée, notamment pour les banques jusqu'à ce que les investisseurs se persuadent que le pire est passé. Je vais peut-être être trop optimiste, vous venez de me dire qu'il faut être ni trop optimiste ni pessimiste, mais si nous parvenons à l'atterrissage parfait l'an prochain, sans écrasement, si la Banque du Canada peut desserrer sa politique trop restrictive, est-ce que cela voudrait dire que l'indice TSX pourrait se comporter mieux que nous ne le prévoyons, puisque le secteur financier y joue un rôle tellement important? La réponse est oui. S'il y a un atterrissage en douceur, si l'inflation diminue sans perte d'emplois excessive, si la croissance économique touche le fond à un niveau raisonnable, puis commence à remonter, si les taux d'intérêt sont réduits par les banques centrales, alors oui, il y a certainement une possibilité de hausse sur le marché. La question qu'il faut toujours se poser, c'est le réalisme de ce scénario. Ce n'est pas impossible, mais ce n'est sans doute pas le scénario le plus probable. Il y aura sans doute une ou deux péripéties imprévues à un moment donné. C'est ainsi que je vois la situation. Les marchés sont parvenus à un point où dans le contexte canadien les valorisations ne sont pas excessives. Elles reflètent la prudence des attentes. C'est simplement que le scénario le plus probable en fonction des données dont nous disposons aujourd'hui, c'est que l'année prochaine sera difficile au niveau de la croissance des bénéfices. L'année prochaine sera sans doute difficile pour l'économie canadienne, pour le consommateur canadien, pour les ménages canadiens, dont les prêts hypothécaires arriveront à échéance en 2024, 2025, 2026, ce qui comprimera le flux de trésorerie qu'ils peuvent dépenser pour le divertissement, pour l'alimentation, pour les voitures neuves. Nous entrons sans doute dans une période où la croissance sera plutôt morose pendant quelque temps.