Le 16 avril, le gouvernement libéral déposera le budget fédéral de 2024. James Orlando, directeur et économiste principal à la TD, discute avec Kim Parlee des principaux thèmes auxquels il s’attend et des répercussions sur l’économie.
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* Le 16 avril, le gouvernement libéral déposera le budget fédéral de 2024. On a déjà reçu des annonces qui portent surtout sur le logement. Mon invité a coécrit un aperçu du budget intitulé Réduire les dépenses en période d’inflation. James Orlando est économiste principal à la TD et se joint à nous aujourd’hui. La retenue ne semble pas vraiment à l’ordre du jour. J’ai l’impression que de nouvelles annonces font constamment les manchettes. * Oui. Quand on a analysé ce qu’on pouvait attendre de ce budget, on a constaté que l’économie résistait bien. Elle ne s’est pas effondrée. L’inflation demeure élevée, ce qui signifie qu’il y a eu plus de croissance économique et plus de recettes pour le gouvernement. Le gouvernement a donc les poches plus remplies. * Ce que le gouvernement affirme, c’est qu’il va faire preuve de retenue. Il va dépenser cet argent prudemment, justement parce qu’il a de l’argent en poche. Mais dans les faits, que se passe-t-il quand un gouvernement a tout cet argent? Est-ce qu’il le garde précieusement, avec une furieuse envie de le dépenser? Ou est-ce qu’il va réellement le dépenser? * Depuis qu’on a rédigé ce rapport, le gouvernement fait presque chaque jour une nouvelle annonce. On va mettre en place une nouvelle politique. On va faire telle ou telle chose pour soutenir l’économie. On va apporter telle ou telle aide. Le gouvernement martèle qu’il fera preuve de retenue dans le prochain budget, mais tout ce qu’on entend en ce moment, c’est qu’il vaut mieux se préparer à de nouvelles dépenses. * Si on les énumère, et vous en parlez d’ailleurs dans le rapport que vous avez publié en mars, les dépenses sont bien plus élevées que prévu. Ces annonces précèdent même celle sur l’IA. Ce n’est pas énorme, mais quand même, 2,4 milliards. Pour la défense, j’ai fait un calcul rapide. Je pense qu’on arrive à 8 milliards de dépenses supplémentaires dans un avenir assez proche. Et enfin le logement, avec 22,5 milliards. Ils n’arrêtent pas d’en rajouter. * Ça fait beaucoup de dépenses. Je pense qu’on doit revenir sur les dépenses réellement engagées au cours de l’année dernière. L’énoncé économique de l’automne indiquait qu’on allait tenter de maintenir le déficit budgétaire à 40 milliards pour l’exercice en cours. Il faut savoir qu’on a des outils de suivi. Chaque mois, on reçoit des données pour suivre l’évolution des budgets. * Et chaque mois, on reçoit de nouvelles données. Ces données nous indiquent que le gouvernement dépense plus qu’il ne s’y attendait lui-même il y a seulement quelques mois. C’est ce qui nous amène à nous demander combien il va rester d’argent au gouvernement pour ces dépenses, sachant qu’il a déjà tellement dépensé avant ces nouvelles politiques. Toutes les politiques que vous avez citées ne sont même pas incluses là-dedans. * On se demande ce qu’il va se passer à l’annonce du budget la semaine prochaine. Comment le gouvernement va-t-il réussir à atteindre ses cibles actuelles, tout en comptant dépenser autant à l’avenir? * D’accord. Alors, que va-t-il se passer? * On s’attend à ce que ces nouvelles politiques qu’on nous annonce tous les jours finissent par peser lourd. Il y aura bien sûr des politiques liées au logement. La plupart des politiques portent sur la manière dont on peut construire plus de logements locatifs, de logements neufs. Comment développer l’infrastructure autour du logement? Il y a le programme d’assurance-médicaments. Il y a le budget de la défense. * Les dépenses vont augmenter. Je m’attends à ce qu’on n’engage pas ces dépenses cette année, mais à ce qu’on les repousse. Elles seront étalées dans le temps. Le gouvernement va les annoncer maintenant et les étaler pour alléger le fardeau budgétaire. De cette façon, le tableau ne sera pas trop négatif concernant l’atteinte des cibles budgétaires, à savoir éviter l’explosion du ratio de la dette par rapport au PIB et s’assurer qu’à long terme, le montant du déficit par rapport à la taille de l’économie n’excède pas 1 %. * Et vous pensez toujours que c’est atteignable, compte tenu de ce qu’on entend? * C’est possible. Chrystia Freeland a déclaré qu’ils atteindraient leurs objectifs. Vous pouvez la croire sur parole quand elle affirme que c’est ce qu’ils anticipent. Le gouvernement en sait plus que nous sur sa propre situation financière en ce moment. Il va déposer le budget. C’est à ce moment-là qu’on découvrira l’état des finances publiques. Le gouvernement peut atteindre ces cibles. Sans aucun doute. Ce sera intéressant de voir les manœuvres fiscales qu’il va déployer pour y parvenir. * Oui. Est-ce qu’on s’inquiète de... Vous avez dit que l’économie se porte un peu mieux, et donc que le gouvernement engrange plus d’argent. A-t-on des raisons de craindre qu’il cherche à en engranger encore plus en prenant des mesures fiscales pour accroître les revenus? * Oui. On n’a rien entendu au sujet des mesures fiscales. En général, le gouvernement se garde de laisser fuiter ces nouvelles à l’avance. * C’est vrai. * Beaucoup de gens craignent une hausse d’impôt. Par le passé, le gouvernement a déjà ciblé certains secteurs pour accroître ses recettes fiscales. Nous n’avons rien repéré de précis nous permettant de dire avec certitude qu’il y aura des hausses d’impôt, mais je sais que tout le monde va rester aux aguets. * Est-ce que quelque chose se trame? On va rester attentifs, comme tout le monde. * Oui. Par ailleurs, ce budget tient compte des prochaines élections. Il perdra toute sa pertinence si le gouvernement n’est plus là pour le mener à bien. * Oui. Je crois que c’est une bonne façon de le formuler. C’est un budget pré-électoral. Le gouvernement ne veut pas trop dépenser avant ce budget. Il ne veut pas prendre de mesures risquant de contrarier trop d’électeurs potentiels. Il va donc présenter ce budget et celui de l’an prochain juste avant les élections. * Comment veut-il se positionner pour être perçu le plus favorablement possible aux yeux des Canadiens, pour montrer qu’il fait de son mieux pour améliorer l’économie et le Canada dans son ensemble? Je crois que le gouvernement lance tout un tas de fléchettes sur plusieurs cibles pour essayer de faire fonctionner l’assurance-médicaments, la défense, le logement. * Je crois que tout bouge la bonne direction. Mais on s’attend avant tout à un budget qui présentera le gouvernement sous un jour positif pour accroître ses chances de réélection. [MUSIQUE]