Le plus récent rapport sur l’emploi aux États-Unis montre que les employeurs ont réduit leurs embauches le mois dernier. Les marchés, à la recherche de signes d’une éventuelle baisse des taux d’intérêt, ont accueilli favorablement les résultats. James Marple, économiste principal à la TD, discute de ce que ces données signifient pour l’économie américaine.
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Les marchés, comme nous venons de le voir, commencent la semaine sur une note positive, le rapport sur l'emploi américain plus faible que prévu ayant suscité l'espoir d'une réduction des taux d'intérêt par la Fed. James Marple, économiste principal à la Banque TD, nous rejoint pour en discuter. Bonjour, James. Bien entendu, l'emploi aux États-Unis fait les manchettes. Quelle est votre réaction?
C'était vraiment un rapport Boucle d'or. 175 000 emplois, ce qui n'est pas un chiffre défavorable, mais on s'attendait à 240 000. Donc les chiffres étaient un peu inférieurs aux prévisions. Mais par ailleurs, on a vu que la croissance des salaires, laquelle, compte tenu des statistiques de l'inflation et de l'attention qu'y porte la Fed, était inférieure aux prévisions, avec un ralentissement sur un mois et sur 12 mois. Dans les deux cas, le chiffre s'est établi à moins de 3%. C'est un autre élément positif. Le taux de chômage a légèrement progressé, passant à 3,9% par rapport à 3,8, mais en fait, c'était à la deuxième décimale. C'était un changement très mineur.
Il s'agit toujours d'un creux historique.
Oui. Le taux de chômage est inférieur à 4% depuis plus de 18 mois. Il demeure stable. Le taux de croissance des emplois dans l'enquête auprès des ménages a ralenti. Le chiffre est positif mais inférieur au taux de croissance de la population active, ce qui fait progresser légèrement le taux de chômage. C'est un rapport qui est encourageant. Il y a un signe de ralentissement de l'emploi, mais ce après la création de non moins de 350 000 emplois au mois de mars avec une révision à la hausse. À l'origine, c'était 303 000 et puis ce chiffre a été révisé à la hausse. Une légère baisse en janvier. Il était nécessaire qu'il y ait un ralentissement. Celui-ci est moins prononcé que prévu, mais il n'y a pas lieu de s'inquiéter que l'économie a des ennuis de santé. Mais en revanche, pour la Fed, qui suit de près le volet emploi de son mandat, un certain ralentissement de la croissance de l'emploi et des salaires devraient convaincre la Fed de pouvoir entamer un desserrement de sa politique.
Parlons des attentes. Vous dites que les attentes en matière de croissance de l'emploi sont en hausse. Qu'est-ce que ce rapport signifie pour la tendance?
C'est intéressant, parce que si l'on considère la moyenne mobile sur six mois, au deuxième semestre de l'an dernier, elle était légèrement supérieure à celle de ce rapport. 180 000. Bien sûr, chaque mois, l'emploi est supérieur à ce chiffre. La moyenne était de 310 000 pendant le deuxième semestre. Et puis, depuis le début de cette année, les trois premiers mois de l'année, les attentes ont commencé à augmenter et à se rapprocher de la moyenne du deuxième semestre de l'an dernier, avec 275 000 emplois en moyenne chaque mois pendant cette année. C'était beaucoup plus que prévu. Il y a donc une surprise à la hausse systématique qui se répercute sur les 240 000 emplois de l'an dernier. Ce que nous allons constater dans l'avenir, c'est qu'il y aura un taux de croissance de plus en plus durable au plan de l'emploi et les attentes devraient emboîter le pas. Mais 175 000 emplois, c'est très bien. Notre pronostic, c'est de diminuer encore un peu plus. L'économie a besoin d'un rééquilibrage au fur et à mesure que la politique relative au taux d'intérêt la ralentit, mais 175 000 emplois, même si c'était 150 000, le taux de chômage n'augmente pas de manière appréciable. On suit le rythme de la croissance de la population active sous-jacente. Il s'agit d'un scénario Boucle d'or.
Tenons-nous-en au marché américain de l'emploi. Vous avez parlé de la productivité aux États-Unis. Qu'est-ce qu'il se passe? Les chiffres de productivité aux États-Unis sont parmi les meilleurs parmi les économies avancées depuis la pandémie.
Eh bien, les États-Unis se démarquent par rapport à tous les autres pays. Les États-Unis sont le seul pays où la productivité de la main-d'œuvre accélère par rapport à la tendance sur la décennie qui a précédé la pandémie, à raison de 1,5% dans les quatre ans, y compris la pandémie. Contre 1% auparavant. La croissance au Canada était semblable à celle des États-Unis pendant la décennie qui a précédé la pandémie, mais depuis la pandémie, la croissance de la productivité est négative. La croissance de la production économique s'explique par l'augmentation de la population active et des heures travaillées. Le Royaume-Uni se distingue parce qu'il a le rendement économique le plus bas par rapport à tous ses pairs. En Europe, il y a tout de même un gain de productivité. On le voit de plus en plus au niveau des attentes en matière de politique monétaire mais également du taux de change, où les États-Unis ont surclassé tous les autres pays. La question se pose de savoir dans quelle mesure ce taux de croissance récent peut durer. Les données de la semaine dernière parues sur le premier trimestre montrent un ralentissement notable dans le rythme de la croissance de la productivité aux États-Unis, mais toujours sur 12 mois, il s'établit à 2,9%, ce qui est extraordinaire et ce qui soutient le rythme de la croissance économique. Il y aura sans doute un ralentissement, mais à un niveau largement supérieur à celui de tous les autres pays. Et peut-être, avec l'adoption de l'intelligence artificielle, des grands modèles linguistiques, il se pourrait qu'il y ait un taux de croissance de productivité plus élevé et durable même si cela prendra davantage de temps à s'installer.
Compte tenu de tous ces éléments, quelles sont vos perspectives au niveau de l'inflation et des taux d'intérêt? Commençons par les États-Unis.
Aux États-Unis, l'inflation a été persistante, surtout pendant les trois premiers mois de l'année. Il y a eu une surprise à la hausse au niveau de l'emploi et également une surprise à la hausse au niveau de l'inflation. Pendant le courant de l'année, par simple arithmétique, l'indicateur que scrute la Fed, c'est l'indice des prix de la consommation personnelle. Il va sans doute demeurer proche de ce niveau de 3%, ce qui reflète la manière dont les données paraissent chaque mois et l'accélération qui a eu lieu en début d'année. Ce que cela signifie pour les taux d'intérêt, c'est qu'il faudra sans doute plus longtemps avant que la Fed ne soit convaincue de pouvoir commencer à normaliser la politique monétaire. Le taux directeur est à 5,5%. Nous ne pensons pas que la Fed va réduire le taux avant décembre de cette année et peut-être seulement une coupure de 25 points de base. Pendant le cours de l'année 2025, lorsque l'amélioration se rapprochera de 2%, cela devrait donner à la Fed la possibilité d'accélérer le rythme des coupures de taux et de parvenir à un point où elle réduit le taux directeur de 25 points de base par mois, ce qui devrait permettre de parvenir à un taux de 3,5%. Mais il faudra pour cela attendre la fin de l'année prochaine. Au Canada, c'est différent. L'économie faiblit, l'inflation globale s'établit à 2,9%, mais sous la surface, certains des indicateurs de base de la Banque du Canada ont beaucoup ralenti, surtout en moyenne mobile sur trois mois ou six mois. Plus récemment, l'économie ne connaît une croissance que de 1%. Le taux de chômage a nettement augmenté au Canada, s'établissant à 6,1%, c'est-à-dire plus de 1% de plus que son creux à la mi-2022. La Banque du Canada va sans doute réduire les taux avant la Fed, sans doute d'ici le mois de juillet. C'est à ce moment qu'interviendra la première coupure de taux par la Banque du Canada, et puis, il n'y aura peut-être pas de réduction de taux à chaque réunion compte tenu de ce que fait ou ne fait pas la Fed, mais il y aura sans doute plusieurs coupures de taux d'ici la fin de l'année. Ce rythme se poursuivra en 2025. Nous estimons que nous nous rapprochons du début des coupures de taux, et sans doute davantage au Canada.
Bien sûr, au Canada, le rapport sur l'emploi va paraître vendredi. À quoi vous attendez-vous?
Il y a eu des chiffres assez négatifs sur l'emploi. Un peu plus de 2000 pertes d'emploi au mois de mars. Pour avril, nous pensons qu'il se pourrait que le chiffre soit modestement positif. Il y a beaucoup de volatilité dans les statistiques mensuelles de l'emploi au Canada, mais au fond, la croissance de l'emploi est plus lente que celle de la population active. Il y aura sans doute un mouvement à la hausse qui se poursuivra dans le taux de chômage. Peut-être pas en avril, car il y a eu un bond notable au mois de mars, mais la tendance globale va continuer d'exister, c'est-à-dire le taux de chômage va progressivement augmenter à cause de la croissance démographique.
C'était vraiment un rapport Boucle d'or. 175 000 emplois, ce qui n'est pas un chiffre défavorable, mais on s'attendait à 240 000. Donc les chiffres étaient un peu inférieurs aux prévisions. Mais par ailleurs, on a vu que la croissance des salaires, laquelle, compte tenu des statistiques de l'inflation et de l'attention qu'y porte la Fed, était inférieure aux prévisions, avec un ralentissement sur un mois et sur 12 mois. Dans les deux cas, le chiffre s'est établi à moins de 3%. C'est un autre élément positif. Le taux de chômage a légèrement progressé, passant à 3,9% par rapport à 3,8, mais en fait, c'était à la deuxième décimale. C'était un changement très mineur.
Il s'agit toujours d'un creux historique.
Oui. Le taux de chômage est inférieur à 4% depuis plus de 18 mois. Il demeure stable. Le taux de croissance des emplois dans l'enquête auprès des ménages a ralenti. Le chiffre est positif mais inférieur au taux de croissance de la population active, ce qui fait progresser légèrement le taux de chômage. C'est un rapport qui est encourageant. Il y a un signe de ralentissement de l'emploi, mais ce après la création de non moins de 350 000 emplois au mois de mars avec une révision à la hausse. À l'origine, c'était 303 000 et puis ce chiffre a été révisé à la hausse. Une légère baisse en janvier. Il était nécessaire qu'il y ait un ralentissement. Celui-ci est moins prononcé que prévu, mais il n'y a pas lieu de s'inquiéter que l'économie a des ennuis de santé. Mais en revanche, pour la Fed, qui suit de près le volet emploi de son mandat, un certain ralentissement de la croissance de l'emploi et des salaires devraient convaincre la Fed de pouvoir entamer un desserrement de sa politique.
Parlons des attentes. Vous dites que les attentes en matière de croissance de l'emploi sont en hausse. Qu'est-ce que ce rapport signifie pour la tendance?
C'est intéressant, parce que si l'on considère la moyenne mobile sur six mois, au deuxième semestre de l'an dernier, elle était légèrement supérieure à celle de ce rapport. 180 000. Bien sûr, chaque mois, l'emploi est supérieur à ce chiffre. La moyenne était de 310 000 pendant le deuxième semestre. Et puis, depuis le début de cette année, les trois premiers mois de l'année, les attentes ont commencé à augmenter et à se rapprocher de la moyenne du deuxième semestre de l'an dernier, avec 275 000 emplois en moyenne chaque mois pendant cette année. C'était beaucoup plus que prévu. Il y a donc une surprise à la hausse systématique qui se répercute sur les 240 000 emplois de l'an dernier. Ce que nous allons constater dans l'avenir, c'est qu'il y aura un taux de croissance de plus en plus durable au plan de l'emploi et les attentes devraient emboîter le pas. Mais 175 000 emplois, c'est très bien. Notre pronostic, c'est de diminuer encore un peu plus. L'économie a besoin d'un rééquilibrage au fur et à mesure que la politique relative au taux d'intérêt la ralentit, mais 175 000 emplois, même si c'était 150 000, le taux de chômage n'augmente pas de manière appréciable. On suit le rythme de la croissance de la population active sous-jacente. Il s'agit d'un scénario Boucle d'or.
Tenons-nous-en au marché américain de l'emploi. Vous avez parlé de la productivité aux États-Unis. Qu'est-ce qu'il se passe? Les chiffres de productivité aux États-Unis sont parmi les meilleurs parmi les économies avancées depuis la pandémie.
Eh bien, les États-Unis se démarquent par rapport à tous les autres pays. Les États-Unis sont le seul pays où la productivité de la main-d'œuvre accélère par rapport à la tendance sur la décennie qui a précédé la pandémie, à raison de 1,5% dans les quatre ans, y compris la pandémie. Contre 1% auparavant. La croissance au Canada était semblable à celle des États-Unis pendant la décennie qui a précédé la pandémie, mais depuis la pandémie, la croissance de la productivité est négative. La croissance de la production économique s'explique par l'augmentation de la population active et des heures travaillées. Le Royaume-Uni se distingue parce qu'il a le rendement économique le plus bas par rapport à tous ses pairs. En Europe, il y a tout de même un gain de productivité. On le voit de plus en plus au niveau des attentes en matière de politique monétaire mais également du taux de change, où les États-Unis ont surclassé tous les autres pays. La question se pose de savoir dans quelle mesure ce taux de croissance récent peut durer. Les données de la semaine dernière parues sur le premier trimestre montrent un ralentissement notable dans le rythme de la croissance de la productivité aux États-Unis, mais toujours sur 12 mois, il s'établit à 2,9%, ce qui est extraordinaire et ce qui soutient le rythme de la croissance économique. Il y aura sans doute un ralentissement, mais à un niveau largement supérieur à celui de tous les autres pays. Et peut-être, avec l'adoption de l'intelligence artificielle, des grands modèles linguistiques, il se pourrait qu'il y ait un taux de croissance de productivité plus élevé et durable même si cela prendra davantage de temps à s'installer.
Compte tenu de tous ces éléments, quelles sont vos perspectives au niveau de l'inflation et des taux d'intérêt? Commençons par les États-Unis.
Aux États-Unis, l'inflation a été persistante, surtout pendant les trois premiers mois de l'année. Il y a eu une surprise à la hausse au niveau de l'emploi et également une surprise à la hausse au niveau de l'inflation. Pendant le courant de l'année, par simple arithmétique, l'indicateur que scrute la Fed, c'est l'indice des prix de la consommation personnelle. Il va sans doute demeurer proche de ce niveau de 3%, ce qui reflète la manière dont les données paraissent chaque mois et l'accélération qui a eu lieu en début d'année. Ce que cela signifie pour les taux d'intérêt, c'est qu'il faudra sans doute plus longtemps avant que la Fed ne soit convaincue de pouvoir commencer à normaliser la politique monétaire. Le taux directeur est à 5,5%. Nous ne pensons pas que la Fed va réduire le taux avant décembre de cette année et peut-être seulement une coupure de 25 points de base. Pendant le cours de l'année 2025, lorsque l'amélioration se rapprochera de 2%, cela devrait donner à la Fed la possibilité d'accélérer le rythme des coupures de taux et de parvenir à un point où elle réduit le taux directeur de 25 points de base par mois, ce qui devrait permettre de parvenir à un taux de 3,5%. Mais il faudra pour cela attendre la fin de l'année prochaine. Au Canada, c'est différent. L'économie faiblit, l'inflation globale s'établit à 2,9%, mais sous la surface, certains des indicateurs de base de la Banque du Canada ont beaucoup ralenti, surtout en moyenne mobile sur trois mois ou six mois. Plus récemment, l'économie ne connaît une croissance que de 1%. Le taux de chômage a nettement augmenté au Canada, s'établissant à 6,1%, c'est-à-dire plus de 1% de plus que son creux à la mi-2022. La Banque du Canada va sans doute réduire les taux avant la Fed, sans doute d'ici le mois de juillet. C'est à ce moment qu'interviendra la première coupure de taux par la Banque du Canada, et puis, il n'y aura peut-être pas de réduction de taux à chaque réunion compte tenu de ce que fait ou ne fait pas la Fed, mais il y aura sans doute plusieurs coupures de taux d'ici la fin de l'année. Ce rythme se poursuivra en 2025. Nous estimons que nous nous rapprochons du début des coupures de taux, et sans doute davantage au Canada.
Bien sûr, au Canada, le rapport sur l'emploi va paraître vendredi. À quoi vous attendez-vous?
Il y a eu des chiffres assez négatifs sur l'emploi. Un peu plus de 2000 pertes d'emploi au mois de mars. Pour avril, nous pensons qu'il se pourrait que le chiffre soit modestement positif. Il y a beaucoup de volatilité dans les statistiques mensuelles de l'emploi au Canada, mais au fond, la croissance de l'emploi est plus lente que celle de la population active. Il y aura sans doute un mouvement à la hausse qui se poursuivra dans le taux de chômage. Peut-être pas en avril, car il y a eu un bond notable au mois de mars, mais la tendance globale va continuer d'exister, c'est-à-dire le taux de chômage va progressivement augmenter à cause de la croissance démographique.