L’administration Biden a augmenté les droits de douane sur 18 milliards de dollars de produits chinois, intensifiant les relations commerciales déjà tendues entre Washington et Beijing. Haining Zha, vice-président et directeur, Répartition des actifs, Gestion de Placements TD, discute des répercussions possibles sur l’économie et les marchés.
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* [MUSIQUE] * Nous commençons l’émission d’aujourd’hui en parlant de la Chine. Et les investisseurs de l’indice de Shanghai l’ont vu augmenter de près de 10 % au cours des trois derniers mois. Mais il est quelque peu déconcertant d’apprendre que le président américain Joe Biden impose de nouveaux droits de douane très élevés sur les importations chinoises, y compris sur les véhicules électriques, les puces et les panneaux solaires. Haining Zha, vice-président et directeur, Répartition des actifs à Gestion de Placements TD, est ici pour nous donner son point de vue à ce sujet et sur bien d’autres aspects. Ravie de vous recevoir. * Merci de m’avoir invité. * Commençons par examiner en profondeur vos perspectives globales sur la Chine et ce que vous voyez en ce moment, mais commençons par cette première décision importante de l’administration américaine. Je sais que certains des tarifs douaniers vont atteindre jusqu’à 100 % sur les véhicules électriques. Qu’en pensez-vous? * Eh bien, c’est certainement très dommageable pour les relations commerciales. Mais, vous savez, ce n’est pas une surprise. Tout le monde l’a vu venir. Et la raison en est que l’écart de coût entre les produits américains et les produits chinois est beaucoup trop important. Prenons l’exemple des véhicules électriques. Le fabricant chinois, BYD. Leurs véhicules électriques sont en fait 15 % moins chers que le modèle semblable de Tesla et entre 30 % et 40 % moins chers que d’autres fabricants d’automobiles européens et américains. * Et ces chiffres sont en fait légèrement sous-estimés. Les voitures électriques vendues en Chine coûtent en moyenne 20 000 $ US, contre environ 50 000 $ aux États-Unis. Récemment, pour ce qui est des ventes de véhicules électriques sur le marché intérieur chinois, le prix intérieur, il est passé sous 15 000. Donc, comme vous pouvez l’imaginer, même avec un droit de douane de 100 %, les coûts pourraient demeurer concurrentiels, et même avec plus de fonctionnalités. * Un autre exemple : les panneaux solaires. Par exemple, sur une base par watt, les panneaux solaires chinois sont 60 % moins chers que ceux des États-Unis. Le prix du produit chinois est donc d’environ 0,15 $ par watt, et celui du produit américain est d’environ 0,40 $ par watt. Encore une fois, si on double la tarification en fonction d’un droit de douane de 100 %, ça reste encore très concurrentiel au niveau des prix. * En passant, dans le plan qui vient d’être annoncé, le droit de douane de Biden sur les panneaux solaires et les cellules photovoltaïques n’est que de 50 %. Et pour ce qui est de l’impact sur les véhicules électriques, je pense qu’il est probablement minime, parce que tout le monde le sait. Tout le monde s’y attend. L’exportation de véhicules électriques vers les États-Unis est minime. * Dans le domaine des panneaux solaires, c’est là qu’on peut avoir une surprise, car les importations de panneaux solaires ont augmenté d’environ 80 % l’an dernier. Parmi celles-ci, environ 85 % proviennent d’un fabricant chinois qui exerce ses activités dans des pays de l’Asie du Sud-Est. * C’est incroyable. En fait, si l’on additionne tout ce que la Chine peut faire et ses prouesses dans le secteur manufacturier, on constate qu’elle a tellement progressé, si rapidement et beaucoup plus que les États-Unis, ce qui explique ces situations. Puis-je vous demander de revenir un peu en arrière et de nous dire, si on regarde la Chine en ce moment, en ce qui a trait aux exportations... cela aura un impact sur les exportations. Et je m’attends à ce que d’autres pays emboîtent le pas. À l’heure actuelle, la Chine est-elle solide dans les secteurs de l’immobilier et de l’emploi? * Eh bien, écoutez... En fait, même avant l’imposition de ce droit de douane, les exportations chinoises éprouvaient déjà un peu de difficulté. Par exemple, en mars, le nombre d’exportations sur 12 mois a diminué de 7,5 %, même si ce chiffre est probablement un peu sous-estimé, car l’année dernière, en 2023, après la COVID, la base était particulièrement très élevée. * Donc, progressivement après cet effet de base élevé en avril, selon les chiffres récents, la croissance a recommencé, à 1,5 % sur 12 mois. Après avoir atténué tous les effets saisonniers, le taux de croissance cumulatif depuis le début de l’année est de 2,2 %. C’est un taux correct, mais ce n’est pas très élevé. * Mais pour l’avenir, on s’attend à ce que les exportations s’améliorent un peu. L’élément clé, la principale tendance qu’on a remarquée, c’est que le secteur manufacturier mondial sort d’un cycle de déstockage de deux ans, et il semble maintenant que ce cycle de déstockage soit sur le point de prendre fin et que les stocks commencent à se reconstituer. C’est pourquoi, récemment, l’indice mondial des directeurs d’achats a rebondi de plus de 50 points, et cela est de bon augure pour les activités d’exportation. * Intéressant. Je vais mentionner certains points. Dites-moi si c’est un facteur défavorable ou favorable pour la Chine. Mais l’immobilier s’est révélé être défavorable. Est-ce que ça continue d’être le cas? * On estime qu’il continue d’être défavorable. Pour vous donner un exemple, les placements immobiliers ont reculé de 10 % depuis le début de l’année. Donc si on ajoute à cela les répercussions en aval, cela représente probablement 20 % du PIB. Il y a donc un frein de 2 % sur le PIB. Donc, en termes absolus, il est certain que les choses ne vont pas bien. * Mais la question qu’on se pose est la suivante : l’immobilier s’améliore-t-il progressivement? La réponse est que nous n’avons pas suffisamment de données probantes. Par exemple, les ventes de biens immobiliers à haute fréquence se sont légèrement améliorées au cours des dernières semaines. Mais, encore une fois, on pense que c’est probablement dû au facteur saisonnier après le congé de la fête du Travail en Chine. Sur une base cumulative depuis le début de l’année, les ventes de maisons neuves ont encore diminué de 40 % sur 12 mois, tandis que les ventes de maisons secondaires existantes ont diminué de 20 % sur 12 mois. * Une autre preuve, c’est que pour que le marché immobilier descende, il faut vraiment que les stocks soient liquidés. Toutefois, à l’heure actuelle, les stocks se situent autour de 25 mois. Par le passé, la moyenne des 10 dernières années était d’environ 15. On a donc encore beaucoup de stocks à absorber. * Une autre observation qu’on a faite concerne le marché secondaire; l’augmentation du volume d’opérations est généralement conjuguée à d’importantes réductions de prix. Cela signifie que le marché tente toujours de trouver un plancher en termes de prix. * Fascinant. Il ne me reste que quelques minutes. Je vais vous poser une question. Je formule ici une hypothèse selon laquelle les problèmes immobiliers influent sur la demande intérieure et sur le sentiment de richesse des gens, qu’ils dépensent ou non. Mais lorsqu’on revient en arrière, et comme je l’ai mentionné plus tôt, l’indice de Shanghai a augmenté de 10 % au cours des trois derniers mois, à quoi vous attendez-vous? À quel type de rendement peut-on s’attendre? Ou à quoi vous attendez-vous pour, disons, la prochaine année? * Oui. Je crois que depuis quelque temps, divers facteurs influencent ce rendement de 10 %. Par exemple, sur le plan fondamental, comme je l’ai mentionné, l’indice mondial des directeurs d’achats est passé au-dessus de 50 points, tout comme l’indice chinois des directeurs d’achats. Et sur le plan de l’actualité, à la fin d’avril, il y a eu la réunion du Politburo. Au cours de cette réunion, le ton a été plus conciliant, signalant une plus grande marge de manœuvre monétaire, ce qui est une bonne chose, même si le rythme de cet assouplissement pourrait ne pas être à la hauteur des attentes des gens. * De plus, en juillet, il y aura la troisième réunion plénière, ce qui est un autre catalyseur. En ce qui concerne les flux de trésorerie, les investisseurs mondiaux sont très pessimistes à l’égard des actions chinoises. Et l’évaluation a été vraiment faible. Et depuis, on passe à une phase de stabilisation. Maintenant, l’argent du fonds de couverture revient en place, puis les prix augmentent. Et puis, pour le seul gestionnaire de portefeuille à long terme des marchés émergents, qui tire de l’arrière par rapport à l’indice de référence, la sous-pondération de la Chine est jumelée. * Tout cela est valable, mais en ce qui concerne l’avenir, notre priorité est de déterminer si cette remontée va se poursuivre. La remontée va-t-elle être plus durable? Et en raison de l’effet négatif de l’immobilier qu’on a mentionné, on ne pense pas qu’on soit suffisamment en confiance. * Haining, c’est toujours un plaisir de discuter avec vous. Merci beaucoup d’avoir été des nôtres. * Merci de m’avoir invité. [MUSIQUE]