Les actions des sociétés canadiennes de télécommunications étaient dernièrement sous pression, mais des signes d’optimisme semblent apparaître. Vince Valentini, directeur général, Recherche sur les actions, TD Cowen, discute des perspectives du secteur avec Greg Bonnell de MoneyTalk.
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Le secteur canadien des télécommunications est sous pression ces derniers temps. Notre invité d'aujourd'hui estime qu'il pourrait y avoir des signes avant-coureurs de remontée. Vince Valentini, de TD Cowen, se joint à nous. Bonjour, Vince.
Bonjour, Greg.
Le secteur des télécommunications, j'ai regardé la carte thermique sur la plate-forme avancée pour voir le rendement du secteur des télécommunications: BCE, TELUS, Rogers, Quebecor, toutes ces actions sont sous pression.
Oui, la plupart ont baissé de 20% ou davantage depuis les sommets de l'an dernier. Presque tous les facteurs négatifs sont réunis. Essentiellement, les choses ont beaucoup empiré depuis mon dernier passage sur votre plateau au mois de février. Les rendements obligataires ont encore augmenté. On en reparlait la dernière fois. Il faut que les rendements obligataires redescendent pour susciter l'intérêt de ces titres. Ce sont des titres qui ont un flux de trésorerie régulier, qui versent des dividendes. Lorsqu'il n'y a pas d'autre possibilité sous forme d'obligations sans risque, on a tendance à envisager ces actions. Or, les rendements obligataires ont progressé de 15 points de base, ce qui n'est pas favorable à ce secteur. Encore plus important, la concurrence dans l'industrie a encore empiré. Les taux d'intérêt sont demeurés plus élevés plus longtemps et les tarifs du secteur des télécommunications, surtout dans le sans-fil, sont restés plus bas plus longtemps que prévu. En avril, il y a eu un véritable dérapage des guerres de prix partout au pays, surtout au Québec. Rogers, Bell et TELUS ont essentiellement décidé de ne pas laisser Quebecor empiéter sur leur part de marché. Quebecor a maintenu des prix très bas très longtemps. Nous pensons que ces prix vont durer jusqu'à la fin de l'année, jusqu'après Noël, et en janvier, les prix vont commencer d'augmenter afin de permettre des nouvelles réductions pendant la période de promotion. Or, depuis novembre, Quebecor et Freedom n'ont pas modifié leurs prix. Nous sommes au mois de mai et le prix d'après-Noël est toujours sur le marché. C'est le cœur du problème. La plupart des intervenants pensent que Bell, Rogers et TELUS vont devoir maintenir des prix inférieurs et un rendement moyen par usager moindre afin de lutter contre la concurrence de Quebecor.
Dans l'avenir, commençons à décomposer ces facteurs. On prévoit, ou au moins les marchés prévoient des réductions de taux par la Fed plus tard cette année. Commençons par l'environnement de taux d'intérêt. Si la Fed estime qu'elle va réduire son taux directeur d'ici la fin de l'année, comment le secteur va-t-il évoluer?
Il va certainement remonter. En octobre-novembre, quand les rendements obligataires diminuaient, ces actions à ce moment-là, même s'il y avait une certaine nervosité à l'égard des tarifs dans l'industrie, -on était en pleins tarifs du Vendredi fou- mais c'est presque comme si les marchés avaient ignoré les mauvaises nouvelles au niveau fondamental, parce que les rendements obligataires diminuaient et la plupart des actions ont nettement remonté. Pendant environ six semaines. La même chose se produira cette fois-ci. Les mauvaises nouvelles sont submergées par les bonnes nouvelles macro-économiques. Il y a un rendement de dividendes de 7% pour TELUS, 8,5% pour BCE, même si ces actions sont un peu plombées par la concurrence, cela va paraître très intéressant dans un environnement où les taux d'intérêt obligataires diminuent.
Une divulgation sur les entreprises couvertes par TD Cowen. Voyez le lien à la fin de cette émission. Alors, ça, c'est pour la concurrence. Les grands joueurs n'ont pas voulu renoncer à leur part de marché. Est-ce que la concurrence pourrait s'apaiser?
Je l'espère, mais honnêtement, il ne semble pas que cela va se produire tout de suite. Nous venons d'entendre les annonces de bénéfices, il y a eu des téléconférences avec la plupart des grands opérateurs, TELUS et Quebecor ont été les deux derniers à annoncer leurs résultats jeudi dernier, on a demandé plusieurs fois à Quebecor quelle serait sa stratégie de prix, pourquoi elle est tellement agressive, car leurs chiffres dans certains cas ne sont pas excellents. Il y a eu une réduction importante de leur revenu moyen par usager dans le secteur du sans-fil à cause de prix très faibles. On leur a demandé: est-ce que vous allez lever le pied? Est-ce que vous allez augmenter les prix? Ils ont dit essentiellement non. Nous sommes là pour augmenter notre part de marché. Nous sommes le perturbateur. Leur message est en fait un peu effrayant pour certains. Je pense que cela va s'apaiser à un moment donné, il y aura un retour du balancier. J'ai vécu des périodes, depuis 25 ans que je couvre le secteur, où il y a eu des situations où l'on croit que la guerre des prix durera indéfiniment. C'est rare. À un moment donné, la sagesse prévaudra. Je devrais signaler que les trois opérateurs historiques, Rogers, Bell et TELUS, ont tous remonté leurs prix en avril. Ils sont passés de 34$ pour 50 Go de données à 39$ pour 20 Go de données, et ça, pour les marques de second rang où la tarification est généralement plus agressive. C'est donc un signe avant-coureur positif, mais Quebecor et Freedom n'ont pas emboîté le pas. On espérait que ce serait le cas, à présent, il faudra déterminer comment valoriser ces actions et quel potentiel de hausse il pourrait y avoir. Je pense que la situation ne va pas empirer, mais il faudra supposer qu'elle ne s'améliorera pas.
Certains de ces titres font l'objet d'une analyse au niveau réglementaire, le contexte réglementaire n'étant pas favorable. Est-ce que vous pensez que le CRTC va prendre des mesures favorables?
Quand je pense à la réglementation, je penserais tout d'abord aux efforts des gouvernements en matière de croissance démographique et de logement. Là, il pourrait y avoir un impact. Que ce gouvernement-ci ou un gouvernement futur impose davantage de restrictions sur les étudiants étrangers, ou les immigrants permanents, l'immigration a été un facteur très favorable pour l'industrie des télécommunications. Il y a eu une croissance record du nombre des abonnée en 2022 et 2023. S'il y a une réduction substantielle de la croissance démographique, à mon avis, ce serait le plus important risque au niveau des pouvoirs publics. S'agissant de la régulation spécifique, le CRTC ou Industrie Canada, il n'y a rien, et il ne devrait rien y avoir. La concurrence sur le marché règle tous les problèmes que voulaient régler les pouvoirs publics. Chaque fois que les statistiques de l'IPC paraissent, il y a de fortes augmentations dans le prix de la plupart des services, mais le sans-fil a baissé de 15 à 20%, le prix de l'Internet pas autant, mais tout de même diminue d'un chiffre. À la place du CRTC ou des politiques, on ne va pas féliciter l'industrie de la télécommunication, cela ne va pas attirer des électeurs, mais est-ce qu'on veut concentrer les efforts sur cela? Il y a bien d'autres chats à fouetter. Ce qui a été fait pour créer davantage de concurrence depuis 10 ans semble donner de bons résultats et il n'est pas nécessaire d'intervenir. Je ne suis pas inquiet de nouvelles décisions du CRTC, mais nous surveillons la croissance démographique et les mesures prises par le gouvernement à ce niveau-là.
Certains investisseurs pourraient se sentir frustrés s'ils détiennent certaines de ces actions et qu'ils se demandent ce qui leur arrive. À plus long terme, que faut-il envisager?
Il faut se concentrer sur les titres qui présentent la possibilité de générer un bon flux de trésorerie même si nous sommes dans un scénario de prix plus bas pour plus longtemps. Il y a un ou deux titres qui peuvent offrir ces avantages et soutenir une bonne croissance des dividendes. C'est ce que j'encouragerais les investisseurs à faire, s'intéresser aux données fondamentales. Réduction des coûts, réduction des immobilisations, qui sont parfois négligées quand on analyse cette industrie. Tout le monde s'intéresse à la croissance des abonnés, à la croissance du chiffre d'affaires depuis des années. Il ne faut pas perdre de vue le fait qu'il y a une tendance sous-jacente très positive au niveau de la structure de coût, que ce soit l'IA générative, de nouvelles technologies de réseau, l'installation qui se fait sans technicien. Il y a des réductions de coûts considérables. Beaucoup de ces entreprises ont tendance à générer une croissance du flux de trésorerie autour de 5%, même entre 5 à 10%, même si la croissance de leur chiffre d'affaires est presque nulle. Nous pouvons entrer dans le détail des titres, mais il y a en a qui sont mieux préparés.
Bonjour, Greg.
Le secteur des télécommunications, j'ai regardé la carte thermique sur la plate-forme avancée pour voir le rendement du secteur des télécommunications: BCE, TELUS, Rogers, Quebecor, toutes ces actions sont sous pression.
Oui, la plupart ont baissé de 20% ou davantage depuis les sommets de l'an dernier. Presque tous les facteurs négatifs sont réunis. Essentiellement, les choses ont beaucoup empiré depuis mon dernier passage sur votre plateau au mois de février. Les rendements obligataires ont encore augmenté. On en reparlait la dernière fois. Il faut que les rendements obligataires redescendent pour susciter l'intérêt de ces titres. Ce sont des titres qui ont un flux de trésorerie régulier, qui versent des dividendes. Lorsqu'il n'y a pas d'autre possibilité sous forme d'obligations sans risque, on a tendance à envisager ces actions. Or, les rendements obligataires ont progressé de 15 points de base, ce qui n'est pas favorable à ce secteur. Encore plus important, la concurrence dans l'industrie a encore empiré. Les taux d'intérêt sont demeurés plus élevés plus longtemps et les tarifs du secteur des télécommunications, surtout dans le sans-fil, sont restés plus bas plus longtemps que prévu. En avril, il y a eu un véritable dérapage des guerres de prix partout au pays, surtout au Québec. Rogers, Bell et TELUS ont essentiellement décidé de ne pas laisser Quebecor empiéter sur leur part de marché. Quebecor a maintenu des prix très bas très longtemps. Nous pensons que ces prix vont durer jusqu'à la fin de l'année, jusqu'après Noël, et en janvier, les prix vont commencer d'augmenter afin de permettre des nouvelles réductions pendant la période de promotion. Or, depuis novembre, Quebecor et Freedom n'ont pas modifié leurs prix. Nous sommes au mois de mai et le prix d'après-Noël est toujours sur le marché. C'est le cœur du problème. La plupart des intervenants pensent que Bell, Rogers et TELUS vont devoir maintenir des prix inférieurs et un rendement moyen par usager moindre afin de lutter contre la concurrence de Quebecor.
Dans l'avenir, commençons à décomposer ces facteurs. On prévoit, ou au moins les marchés prévoient des réductions de taux par la Fed plus tard cette année. Commençons par l'environnement de taux d'intérêt. Si la Fed estime qu'elle va réduire son taux directeur d'ici la fin de l'année, comment le secteur va-t-il évoluer?
Il va certainement remonter. En octobre-novembre, quand les rendements obligataires diminuaient, ces actions à ce moment-là, même s'il y avait une certaine nervosité à l'égard des tarifs dans l'industrie, -on était en pleins tarifs du Vendredi fou- mais c'est presque comme si les marchés avaient ignoré les mauvaises nouvelles au niveau fondamental, parce que les rendements obligataires diminuaient et la plupart des actions ont nettement remonté. Pendant environ six semaines. La même chose se produira cette fois-ci. Les mauvaises nouvelles sont submergées par les bonnes nouvelles macro-économiques. Il y a un rendement de dividendes de 7% pour TELUS, 8,5% pour BCE, même si ces actions sont un peu plombées par la concurrence, cela va paraître très intéressant dans un environnement où les taux d'intérêt obligataires diminuent.
Une divulgation sur les entreprises couvertes par TD Cowen. Voyez le lien à la fin de cette émission. Alors, ça, c'est pour la concurrence. Les grands joueurs n'ont pas voulu renoncer à leur part de marché. Est-ce que la concurrence pourrait s'apaiser?
Je l'espère, mais honnêtement, il ne semble pas que cela va se produire tout de suite. Nous venons d'entendre les annonces de bénéfices, il y a eu des téléconférences avec la plupart des grands opérateurs, TELUS et Quebecor ont été les deux derniers à annoncer leurs résultats jeudi dernier, on a demandé plusieurs fois à Quebecor quelle serait sa stratégie de prix, pourquoi elle est tellement agressive, car leurs chiffres dans certains cas ne sont pas excellents. Il y a eu une réduction importante de leur revenu moyen par usager dans le secteur du sans-fil à cause de prix très faibles. On leur a demandé: est-ce que vous allez lever le pied? Est-ce que vous allez augmenter les prix? Ils ont dit essentiellement non. Nous sommes là pour augmenter notre part de marché. Nous sommes le perturbateur. Leur message est en fait un peu effrayant pour certains. Je pense que cela va s'apaiser à un moment donné, il y aura un retour du balancier. J'ai vécu des périodes, depuis 25 ans que je couvre le secteur, où il y a eu des situations où l'on croit que la guerre des prix durera indéfiniment. C'est rare. À un moment donné, la sagesse prévaudra. Je devrais signaler que les trois opérateurs historiques, Rogers, Bell et TELUS, ont tous remonté leurs prix en avril. Ils sont passés de 34$ pour 50 Go de données à 39$ pour 20 Go de données, et ça, pour les marques de second rang où la tarification est généralement plus agressive. C'est donc un signe avant-coureur positif, mais Quebecor et Freedom n'ont pas emboîté le pas. On espérait que ce serait le cas, à présent, il faudra déterminer comment valoriser ces actions et quel potentiel de hausse il pourrait y avoir. Je pense que la situation ne va pas empirer, mais il faudra supposer qu'elle ne s'améliorera pas.
Certains de ces titres font l'objet d'une analyse au niveau réglementaire, le contexte réglementaire n'étant pas favorable. Est-ce que vous pensez que le CRTC va prendre des mesures favorables?
Quand je pense à la réglementation, je penserais tout d'abord aux efforts des gouvernements en matière de croissance démographique et de logement. Là, il pourrait y avoir un impact. Que ce gouvernement-ci ou un gouvernement futur impose davantage de restrictions sur les étudiants étrangers, ou les immigrants permanents, l'immigration a été un facteur très favorable pour l'industrie des télécommunications. Il y a eu une croissance record du nombre des abonnée en 2022 et 2023. S'il y a une réduction substantielle de la croissance démographique, à mon avis, ce serait le plus important risque au niveau des pouvoirs publics. S'agissant de la régulation spécifique, le CRTC ou Industrie Canada, il n'y a rien, et il ne devrait rien y avoir. La concurrence sur le marché règle tous les problèmes que voulaient régler les pouvoirs publics. Chaque fois que les statistiques de l'IPC paraissent, il y a de fortes augmentations dans le prix de la plupart des services, mais le sans-fil a baissé de 15 à 20%, le prix de l'Internet pas autant, mais tout de même diminue d'un chiffre. À la place du CRTC ou des politiques, on ne va pas féliciter l'industrie de la télécommunication, cela ne va pas attirer des électeurs, mais est-ce qu'on veut concentrer les efforts sur cela? Il y a bien d'autres chats à fouetter. Ce qui a été fait pour créer davantage de concurrence depuis 10 ans semble donner de bons résultats et il n'est pas nécessaire d'intervenir. Je ne suis pas inquiet de nouvelles décisions du CRTC, mais nous surveillons la croissance démographique et les mesures prises par le gouvernement à ce niveau-là.
Certains investisseurs pourraient se sentir frustrés s'ils détiennent certaines de ces actions et qu'ils se demandent ce qui leur arrive. À plus long terme, que faut-il envisager?
Il faut se concentrer sur les titres qui présentent la possibilité de générer un bon flux de trésorerie même si nous sommes dans un scénario de prix plus bas pour plus longtemps. Il y a un ou deux titres qui peuvent offrir ces avantages et soutenir une bonne croissance des dividendes. C'est ce que j'encouragerais les investisseurs à faire, s'intéresser aux données fondamentales. Réduction des coûts, réduction des immobilisations, qui sont parfois négligées quand on analyse cette industrie. Tout le monde s'intéresse à la croissance des abonnés, à la croissance du chiffre d'affaires depuis des années. Il ne faut pas perdre de vue le fait qu'il y a une tendance sous-jacente très positive au niveau de la structure de coût, que ce soit l'IA générative, de nouvelles technologies de réseau, l'installation qui se fait sans technicien. Il y a des réductions de coûts considérables. Beaucoup de ces entreprises ont tendance à générer une croissance du flux de trésorerie autour de 5%, même entre 5 à 10%, même si la croissance de leur chiffre d'affaires est presque nulle. Nous pouvons entrer dans le détail des titres, mais il y a en a qui sont mieux préparés.