L’inflation se situant à des sommets inégalés depuis plusieurs décennies, on espère de plus en plus que les pressions sur les prix pourraient culminer. Greg Bonnell discute avec Scott Colbourne, directeur général, Titres à revenu fixe à gestion active, Gestion de Placements TD, des raisons pour lesquelles le pic d’inflation pourrait ne pas soulager immédiatement les marchés financiers.
Les banques centrales ont procédé à des hausses de taux d’une ampleur considérable pour tenter de contrôler l’inflation. On peut affirmer que l’inflation a peut-être atteint un pic, mais notre invité affirme que la hausse des prix à la consommation n’est pas près de disparaître. Voici Scott Coleman le directeur général de gestion actif des titres à revenu fixe chez gestion de placements TD. Bienvenue à nouveau. L’inflation, on en parle beaucoup à leur actuelle. On dit qu’on a peut-être atteint un pic, mais vous dites qu’il ne faut pas être trop emballé même si le pic commence à baisser. On va devoir faire face à cette situation durant un certain temps.
- Oui. On peut essayer de trouver des nouvelles positives du point de vue de l’inflation. C’est vrai qu’on a vu une amélioration des chaînes d’approvisionnement, ce qui peut permettre de penser qu’il y aura une stabilisation de l’inflation. Elles sont en effet de retour aux niveaux qu’elles avaient vers le milieu de l’été. Donc ce sont de bonnes nouvelles. Et puis le prix des produits de base est également en baisse et donc, on est sans doute arrivé à un pic de l’inflation globale. Mais le défi pour les décideurs politiques et les investisseurs, c’est de savoir ce qui va se passer pour les salaires, le logement et les soins de santé. Ces secteurs ne sont pas assujettis aux montées et aux descentes de la demande, mais ils sont stables. Et donc ce sera la grande question pour les investisseurs et les banques centrales de voir comment cela va évoluer. On voit que pour l’inflation de base, elle risque de rester un certain temps. Jusqu’à l’année prochaine.
Alors, est-ce que les banques centrales peuvent faire quelque chose avec cette inflation de base? C’est une chose de faire augmenter les taux d’intérêt, mais on a vu dans le marché immobilier que la demande commence à ralentir. Les gens se demandent quoi faire. Mais est-ce que les banques centrales ont un pouvoir pour ce qui est d’avoir une incidence sur les salaires, par exemple?
- Non. On ne peut pas changer ce qui se passe du côté offre, les banques centrales vont se centrer sur le côté de la demande, et on voit la réponse de la banque du Canada avec l’augmentation la semaine dernière, et on va voir également ce que la réserve fédérale fera aux États-Unis. Et on va avoir une croissance beaucoup plus lente et cela va avoir une incidence sur les salaires, sur le logement. On va voir donc un ajustement. On voit que dans les données qui sont publiées fréquemment, il y a un ralentissement. Cela prendra du temps, mais les banques centrales font du rattrapage. Celles-ci ont tardé à réagir et à faire face au changement de dynamique de l’inflation. Donc, elles ont encore du chemin à faire avant de mettre un terme au cycle de resserrement.
- Et cela prendra un certain temps. Alors, la réserve fédérale la semaine prochaine pourrait augmenter ses taux d’intérêt de 0,75 %, peut-être même 200 points de base. Est-ce qu’il y a une justification par rapport aux données qui surveillent la réserve fédérale?
- Oui. Alors c’est intéressant. On a eu une augmentation de 25 points de base puis de 50, maintenant on passe à 75 ou 100. Et je pense que la réserve fédérale va augmenter de 75. Il y a un certain ressac de la part de certains gouverneurs et de la réserve fédérale qui ne veulent pas aller trop loin. Et le taux terminal auquel on arrivera au Canada ou aux États-Unis d’ici la fin de cette année ou l’année prochaine est autour de 3,5 à 3,75 %. Donc, je pense que la réserve fédérale voudra aller au-dessus.
Donc, peut-être qu’il y aura des aides à l’horizon. Ou peut-être qu’on pourra souffler et que, plus tard, on pourra voir à nouveau une baisse des taux d’intérêt parce que les banques centrales ont beaucoup augmenté et continue d’augmenter, mais on ne peut pas s’attendre à ce qu’elles augmentent ad vitam aeternam.
Oui. Il y a ce risque qu’elles aillent trop loin et que du coup, il y ait une récession. Et l’inclination des marchés, c’est de prendre en compte des baisses. Alors, on a parlé de l’inflation qui avait persisté, cela va continuer d’être en vent contraire. Et donc, pour les investisseurs, alors qu’on va avoir une croissance qui va ralentir et que l’inflation de basse va rester élevée, quelles sont les options pour les investisseurs? Et pour les décideurs et le gouvernement? - Alors que nous arrivons peut-être dans un environnement de récession, étant donné que l’inflation continue d’augmenter, il y a peu de marge de manœuvre pour le gouvernement et les investisseurs.
Alors, on parle beaucoup de stagflation. C’est un mot qu’on prononce beaucoup. Est-ce qu’il s’agit d’une prédiction trop pessimiste?
- Oui. Alors, la stagflation, est-ce que c’est une récession? On se pose beaucoup de questions. Le Canada a son propre talon d’Achille avec le marché de l’immobilier. En Europe, il y a ce même conflit et le problème du gaz par le pipeline Nord trime. En Chine, on a une croissance zéro et une politique de COVID zéro. Donc, si on regarde les différentes régions du monde, on peut considérer que l’Europe et l’Asie n’ont pas les mêmes pressions inflationnistes que nous avons en Amérique du Nord. Ça va être différent d’une région à l’autre du monde. Il est important de voir ce qui se passe dans chaque région du monde, autant pour le reste de l’année que pour l’année prochaine.
Alors, est-ce que c’est là qu’on peut avoir une certaine clarté? L’épisode a débuté en montrant à l’audience une remontée du marché. C’est vrai qu’il est très difficile de savoir ce qui va se passer demain si on se fie aux conditions avec lesquelles on continue de vivre. Pourquoi ne peut-on pas avoir une certaine clarté sur ce qui se passe dans le monde? Est-ce que c’est d’être trop optimiste de penser qu’un jour on en aura une idée?
Nous voulons vraiment avoir une certaine clarté. Avant, on avait un environnement avec peu d’inflation, et une bonne croissance, et pour le moment, ce n’est plus le cas. Il y a beaucoup d’incertitudes et beaucoup de risques géopolitiques qui ne peuvent pas nécessairement maîtriser les décideurs politiques. Ce sera mieux s’il y a une résolution du conflit, la guerre, ou un certain relâchement du côté des produits de base, mais il y a toujours des problèmes avec une pénurie de la main-d’œuvre, toujours des problèmes avec la chaîne d’approvisionnement dans le monde, et donc, cela ne va pas se résoudre du jour au lendemain.