La Banque d’Angleterre est intervenue encore une fois sur le marché obligataire et a émis des mises en garde au sujet des risques pesant sur le système financier du Royaume-Uni. Greg Bonnell s’entretient avec Scott Colbourne, directeur général, Titres à revenu fixe mondiaux à gestion active, Gestion de Placements TD, à propos de l’incertitude financière à laquelle est confronté le marché obligataire mondial.
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Il y a plus de signes de tension dans le système financier. La Banque d’Angleterre a dû encore une fois intervenir sur le marché obligataire et signaler un « risque important » pour la stabilité. Mais ces fissures donnent-elles à penser que les banques centrales vont s’éloigner des hausses de taux? Est-ce un scénario qui revient sur la table?
Je reçois à l’instant Scott Colbourne, directeur général, Titres à revenu fixe à gestion active, Gestion de Placements TD, qui va nous en dire plus sur le sujet. C’est toujours un plaisir de vous recevoir, Scott.
La Banque d’Angleterre a dû intervenir de nouveau. Une seule fois n’aura pas suffi. Comment devrait-on interpréter ça en tant qu’investisseurs?
Oui, je pense que c’est un sujet important à suivre. Je parle de tout le débat visant à déterminer si la Fed demeure baissière et déterminée à suivre le mantra du combat contre l’inflation et les fissures, qu’on commence à voir sur le marché. Et c’est un exemple de pressions qui s’exercent sur le marché boursier, où la situation est chaotique et où la Banque d’Angleterre intervient. Je pense que c’est un peu ce qui unit le marché, ce concept de stabilité financière et les inquiétudes qu’il pourrait susciter.
Et cela nous ramène vraiment à ce qui est le plus important pour les gouvernements. Et c’est la capacité de financer leurs dettes. Et s’ils ne peuvent pas avoir un marché de la dette qui fonctionne, alors tout le reste devient superflu. Et un marché des obligations défaillant, c’est très préoccupant.
La Banque d’Angleterre utilise cet outil ou en élargit la portée pour atténuer la volatilité sur le marché des obligations d’État du Royaume-Uni. Et c’est un exemple. Évidemment, c’est aussi le cas au Japon, où on a recours au contrôle de la courbe des taux, mais où les marchés obligataires sont également dysfonctionnels, sur lesquels la négociation ne se fait pas bien.
C’est donc quelque chose à retenir. Mais en fin de compte, est-ce que c’est la preuve ou le catalyseur d’un revirement? Je penche du côté du non. Je ne pense pas que ce soit suffisant pour s’opposer à la Fed en ce moment. Et il y a diverses raisons pour lesquelles on peut se pencher là-dessus.
Faisons ça alors, parce que la Fed et toutes les autres banques centrales du monde occidental, dans la plupart des cas, ont adopté la même stratégie. Écoutez, on sait que vous pourriez perdre votre emploi. C’est difficile, il faut le faire. On doit maîtriser l’inflation. On sait qu’on pourrait tomber en récession. C’est le désagrément qu’on doit simplement accepter. Mais les gens se demandent, eh bien, une fois que ça atteint le marché obligataire, peuvent-ils vraiment ignorer ça?
Oui, pour le moment, je pense qu’il est trop tôt pour parler de volte-face et qu’il est trop tôt pour parler de la fermeté de la Fed en ce qui a trait aux sommets. Depuis Jackson Hole, les porte-parole de la Fed ont constamment répété la même chose. Il n’y a pas de place aux nuances ici. On s’en tient à l’inflation et on va maintenir ce qu’on dit.
Comme vous l’avez dit plus tôt, on va connaître l’IPC ce jeudi. Il est encore trop élevé. Il a atteint un sommet. Je suis dans ce camp-là. Mais il est encore très élevé. Il est en baisse. L’inflation de base demeure élevée. Oui, elle est en baisse, mais certains signes montrent qu’elle est un peu tenace.
Donc pour l’instant, compte tenu de ça, la croissance est bonne. On a vu une croissance raisonnable des emplois non agricoles la semaine dernière. Je pense que les problèmes à l’extérieur des États-Unis, comme ils disent, notre dollar, c’est votre problème, n’est-ce pas? Ce n’est pas suffisant pour créer un problème systématique sur les marchés. Ça n’a rien brisé au pays. Ça n’a rien changé à leur perception de la croissance ou de l’inflation.
On peut donc penser qu’on se rapproche d’un point d’inflexion, mais je ne crois pas qu’il va y avoir de changement. On est à environ 125 points de base d’ici la fin de l’année. Je suis à peu près certain qu’on va y parvenir, et même davantage l’an prochain.
Est-ce qu’on se retrouve dans... et c’est l’autre débat aussi, n’est-ce pas? Une fois qu’ils vont finalement avoir atteint le niveau qu’ils voulaient atteindre à ce taux final, et qu’ils font ensuite une pause, parce qu’ils vont en quelque sorte être à la fin de la mission, il y a des gens qui vont dire, eh bien, ils vont aussi réduire les taux assez rapidement par la suite. Et je n’ai pas reçu beaucoup de gens récemment qui m’ont dit qu’il fallait s’attendre à une réduction par la suite. Les choses vont probablement se maintenir. Est-ce que c’est comme ça qu’on voit les choses?
Je pense que c’est ce à quoi on peut raisonnablement s’attendre pour le moment. Quand on regarde la majeure partie de cette année, le passage d’une hausse marquée des taux à une réduction rapide, ça semble un peu exagéré. Je pense que dans ce contexte, on est dans un régime inflationniste. On n’est pas dans ce régime depuis longtemps et ça a changé la fonction de réaction des banques centrales.
Il ne faut pas s’attendre à ce qu’ils passent rapidement d’un taux final à une réduction des taux sans qu’il y ait de rupture significative, surtout sur le marché américain, et, non, la Fed ne réduira pas rapidement les taux. Mais on commence à voir des nuances un peu partout dans le monde dans d’autres banques centrales. Elles ne sont pas aussi fermes. Mais je pense que la Fed suit sa voie et qu’elle peut rester ferme pour l’instant.
Cela nous amène à nous demander si d’autres banques centrales vont emboîter le pas. C’est l’Australie, je crois, qui a imposé une hausse, mais peut-être pas aussi importante que prévu. Y a-t-il d’autres régions du monde, en raison de leur situation particulière, qui disent : « On sait que la Fed fait telle ou telle chose, mais on prend nos propres mesures. »
Oui, je pense qu’il y a quelques petites nuances. Il y a différentes nuances entre les banques centrales. Par exemple, la BRA était censée relever son taux de 50 points de base, mais elle l’a relevé de 25 points. Ça donc été une surprise. Si on compare les prix au Canada à ceux aux États-Unis, on constate qu’un écart s’est creusé entre ces deux pays.
Même si je disais que la Banque du Canada et Tiff Macklem sont fermes parmi les banques centrales, les marchés disent qu’il y a place à une différenciation l’an prochain, où la Fed pourrait atteindre 4,75 % ou 5 %, et la Banque du Canada pourrait se situer à 4,25 %, peut-être 4,5 %. Et cet écart qui se creuse, c’est un peu comme dire : il y a des choses ici au pays qui vont changer la donne, peut-être le marché de l’habitation, et l’effet de l’inflation sur les dépenses de consommation.
Il y avait eu des rumeurs selon lesquelles l’Allemagne songerait à souscrire une obligation dans l’ensemble de l’UE pour soutenir le marché de l’énergie, ou amortir le choc énergétique que l’Europe a subi. Et on voit des signes qu’à la limite, il va y avoir des prises de position nuancées légèrement différentes de celles de la Fed.
Donc, oui, il y a des preuves, et du côté le plus conciliant, il y a la Banque du Japon.
Parlons-en un peu plus. Parce que c’est bizarre, n’est-ce pas? Essentiellement, il ne semble pas y avoir de marché pour les obligations japonaises en ce moment. Que se passe-t-il et quelle est la gravité de la situation?
C’est très grave. Quand on voit ces pertes épisodiques dans le dollar américain, le yen remonte ou les marchés à risque remontent, on est dans un marché baissier, et le dollar américain est roi. Et, à l’occasion, on observe des remontées de l’humeur des investisseurs ou des positions boursières.
Et on a vu un bref épisode où la Banque du Japon est intervenue sur le marché pour endiguer la dépréciation de la monnaie, car, essentiellement, elle est le seul acheteur d’obligations d’État japonaises. Et elle contrôle la courbe des taux et plafonne les taux d’intérêt. Et elle continue de faire ça pendant que le reste du monde, en particulier la Fed, voit l’écart des taux d’intérêt s’élargir et que des pressions continuent de peser sur sa devise. Et donc ça va à l’encontre de la tendance mondiale. Mais ça entraîne une dépréciation de sa devise et un fonctionnement déficient sur le marché des obligations d’État japonaises. On n’a pas participé au marché des obligations d’État japonaises depuis de longues décennies, et on ne le fera pas. Il est dysfonctionnel et repose principalement sur un seul acheteur.
Mais certains diront que c’est un exemple; si les marchés des obligations d’État éclatent et que vous avez besoin de soutien, le contrôle de la courbe des taux pourrait augmenter ailleurs. Et dans quelle mesure... l’intervention de la Banque d’Angleterre ne consistait pas en un contrôle de la courbe des taux ni un assouplissement quantitatif. Mais a-t-on besoin de ça pour plafonner les taux à long terme et stabiliser le financement gouvernemental sur les marchés obligataires? C’est une question intéressante à explorer, et certaines personnes la soulèvent.
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Il y a plus de signes de tension dans le système financier. La Banque d’Angleterre a dû encore une fois intervenir sur le marché obligataire et signaler un « risque important » pour la stabilité. Mais ces fissures donnent-elles à penser que les banques centrales vont s’éloigner des hausses de taux? Est-ce un scénario qui revient sur la table?
Je reçois à l’instant Scott Colbourne, directeur général, Titres à revenu fixe à gestion active, Gestion de Placements TD, qui va nous en dire plus sur le sujet. C’est toujours un plaisir de vous recevoir, Scott.
La Banque d’Angleterre a dû intervenir de nouveau. Une seule fois n’aura pas suffi. Comment devrait-on interpréter ça en tant qu’investisseurs?
Oui, je pense que c’est un sujet important à suivre. Je parle de tout le débat visant à déterminer si la Fed demeure baissière et déterminée à suivre le mantra du combat contre l’inflation et les fissures, qu’on commence à voir sur le marché. Et c’est un exemple de pressions qui s’exercent sur le marché boursier, où la situation est chaotique et où la Banque d’Angleterre intervient. Je pense que c’est un peu ce qui unit le marché, ce concept de stabilité financière et les inquiétudes qu’il pourrait susciter.
Et cela nous ramène vraiment à ce qui est le plus important pour les gouvernements. Et c’est la capacité de financer leurs dettes. Et s’ils ne peuvent pas avoir un marché de la dette qui fonctionne, alors tout le reste devient superflu. Et un marché des obligations défaillant, c’est très préoccupant.
La Banque d’Angleterre utilise cet outil ou en élargit la portée pour atténuer la volatilité sur le marché des obligations d’État du Royaume-Uni. Et c’est un exemple. Évidemment, c’est aussi le cas au Japon, où on a recours au contrôle de la courbe des taux, mais où les marchés obligataires sont également dysfonctionnels, sur lesquels la négociation ne se fait pas bien.
C’est donc quelque chose à retenir. Mais en fin de compte, est-ce que c’est la preuve ou le catalyseur d’un revirement? Je penche du côté du non. Je ne pense pas que ce soit suffisant pour s’opposer à la Fed en ce moment. Et il y a diverses raisons pour lesquelles on peut se pencher là-dessus.
Faisons ça alors, parce que la Fed et toutes les autres banques centrales du monde occidental, dans la plupart des cas, ont adopté la même stratégie. Écoutez, on sait que vous pourriez perdre votre emploi. C’est difficile, il faut le faire. On doit maîtriser l’inflation. On sait qu’on pourrait tomber en récession. C’est le désagrément qu’on doit simplement accepter. Mais les gens se demandent, eh bien, une fois que ça atteint le marché obligataire, peuvent-ils vraiment ignorer ça?
Oui, pour le moment, je pense qu’il est trop tôt pour parler de volte-face et qu’il est trop tôt pour parler de la fermeté de la Fed en ce qui a trait aux sommets. Depuis Jackson Hole, les porte-parole de la Fed ont constamment répété la même chose. Il n’y a pas de place aux nuances ici. On s’en tient à l’inflation et on va maintenir ce qu’on dit.
Comme vous l’avez dit plus tôt, on va connaître l’IPC ce jeudi. Il est encore trop élevé. Il a atteint un sommet. Je suis dans ce camp-là. Mais il est encore très élevé. Il est en baisse. L’inflation de base demeure élevée. Oui, elle est en baisse, mais certains signes montrent qu’elle est un peu tenace.
Donc pour l’instant, compte tenu de ça, la croissance est bonne. On a vu une croissance raisonnable des emplois non agricoles la semaine dernière. Je pense que les problèmes à l’extérieur des États-Unis, comme ils disent, notre dollar, c’est votre problème, n’est-ce pas? Ce n’est pas suffisant pour créer un problème systématique sur les marchés. Ça n’a rien brisé au pays. Ça n’a rien changé à leur perception de la croissance ou de l’inflation.
On peut donc penser qu’on se rapproche d’un point d’inflexion, mais je ne crois pas qu’il va y avoir de changement. On est à environ 125 points de base d’ici la fin de l’année. Je suis à peu près certain qu’on va y parvenir, et même davantage l’an prochain.
Est-ce qu’on se retrouve dans... et c’est l’autre débat aussi, n’est-ce pas? Une fois qu’ils vont finalement avoir atteint le niveau qu’ils voulaient atteindre à ce taux final, et qu’ils font ensuite une pause, parce qu’ils vont en quelque sorte être à la fin de la mission, il y a des gens qui vont dire, eh bien, ils vont aussi réduire les taux assez rapidement par la suite. Et je n’ai pas reçu beaucoup de gens récemment qui m’ont dit qu’il fallait s’attendre à une réduction par la suite. Les choses vont probablement se maintenir. Est-ce que c’est comme ça qu’on voit les choses?
Je pense que c’est ce à quoi on peut raisonnablement s’attendre pour le moment. Quand on regarde la majeure partie de cette année, le passage d’une hausse marquée des taux à une réduction rapide, ça semble un peu exagéré. Je pense que dans ce contexte, on est dans un régime inflationniste. On n’est pas dans ce régime depuis longtemps et ça a changé la fonction de réaction des banques centrales.
Il ne faut pas s’attendre à ce qu’ils passent rapidement d’un taux final à une réduction des taux sans qu’il y ait de rupture significative, surtout sur le marché américain, et, non, la Fed ne réduira pas rapidement les taux. Mais on commence à voir des nuances un peu partout dans le monde dans d’autres banques centrales. Elles ne sont pas aussi fermes. Mais je pense que la Fed suit sa voie et qu’elle peut rester ferme pour l’instant.
Cela nous amène à nous demander si d’autres banques centrales vont emboîter le pas. C’est l’Australie, je crois, qui a imposé une hausse, mais peut-être pas aussi importante que prévu. Y a-t-il d’autres régions du monde, en raison de leur situation particulière, qui disent : « On sait que la Fed fait telle ou telle chose, mais on prend nos propres mesures. »
Oui, je pense qu’il y a quelques petites nuances. Il y a différentes nuances entre les banques centrales. Par exemple, la BRA était censée relever son taux de 50 points de base, mais elle l’a relevé de 25 points. Ça donc été une surprise. Si on compare les prix au Canada à ceux aux États-Unis, on constate qu’un écart s’est creusé entre ces deux pays.
Même si je disais que la Banque du Canada et Tiff Macklem sont fermes parmi les banques centrales, les marchés disent qu’il y a place à une différenciation l’an prochain, où la Fed pourrait atteindre 4,75 % ou 5 %, et la Banque du Canada pourrait se situer à 4,25 %, peut-être 4,5 %. Et cet écart qui se creuse, c’est un peu comme dire : il y a des choses ici au pays qui vont changer la donne, peut-être le marché de l’habitation, et l’effet de l’inflation sur les dépenses de consommation.
Il y avait eu des rumeurs selon lesquelles l’Allemagne songerait à souscrire une obligation dans l’ensemble de l’UE pour soutenir le marché de l’énergie, ou amortir le choc énergétique que l’Europe a subi. Et on voit des signes qu’à la limite, il va y avoir des prises de position nuancées légèrement différentes de celles de la Fed.
Donc, oui, il y a des preuves, et du côté le plus conciliant, il y a la Banque du Japon.
Parlons-en un peu plus. Parce que c’est bizarre, n’est-ce pas? Essentiellement, il ne semble pas y avoir de marché pour les obligations japonaises en ce moment. Que se passe-t-il et quelle est la gravité de la situation?
C’est très grave. Quand on voit ces pertes épisodiques dans le dollar américain, le yen remonte ou les marchés à risque remontent, on est dans un marché baissier, et le dollar américain est roi. Et, à l’occasion, on observe des remontées de l’humeur des investisseurs ou des positions boursières.
Et on a vu un bref épisode où la Banque du Japon est intervenue sur le marché pour endiguer la dépréciation de la monnaie, car, essentiellement, elle est le seul acheteur d’obligations d’État japonaises. Et elle contrôle la courbe des taux et plafonne les taux d’intérêt. Et elle continue de faire ça pendant que le reste du monde, en particulier la Fed, voit l’écart des taux d’intérêt s’élargir et que des pressions continuent de peser sur sa devise. Et donc ça va à l’encontre de la tendance mondiale. Mais ça entraîne une dépréciation de sa devise et un fonctionnement déficient sur le marché des obligations d’État japonaises. On n’a pas participé au marché des obligations d’État japonaises depuis de longues décennies, et on ne le fera pas. Il est dysfonctionnel et repose principalement sur un seul acheteur.
Mais certains diront que c’est un exemple; si les marchés des obligations d’État éclatent et que vous avez besoin de soutien, le contrôle de la courbe des taux pourrait augmenter ailleurs. Et dans quelle mesure... l’intervention de la Banque d’Angleterre ne consistait pas en un contrôle de la courbe des taux ni un assouplissement quantitatif. Mais a-t-on besoin de ça pour plafonner les taux à long terme et stabiliser le financement gouvernemental sur les marchés obligataires? C’est une question intéressante à explorer, et certaines personnes la soulèvent.
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