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La Banque du Canada a augmenté son taux du financement à un jour de 50 points de base dans le but de contrer la flambée de l’inflation. Anthony Okolie discute des répercussions possibles de la hausse des taux avec Alexandra Gorewicz, gestionnaire de portefeuille, Titres à revenu fixe à gestion active, Gestion de Placements TD.
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- Comme prévu, la Banque du Canada a relevé les taux d’intérêt de 50 points de base. C’est la première fois en plus de 20 ans. Alex, qu’est-ce que tu en penses?
- En un mot, il y a clairement une peur de l’inflation, et cette inflation provient de plusieurs sources. Il ne s’agit pas seulement des perturbations continues des chaînes d’approvisionnement mondiales soulignées dans le communiqué de la BdC,mais aussi l’inflation alimentaire et énergétique qui a vraiment monté en flèche, surtout avec le début de la guerre en Ukraine. Voilà pourquoi les révisions des prévisions d’inflation de la banque pour cette année et l’an prochain ont été revues fortement à la hausse.
Aussi, avec la forte reprise de la main-d’œuvre liée aux réouvertures après les mesures de confinement d’Omicron, la reprise du marché de l’emploi a été plus vigoureuse que prévu. La Banque avait aussi assez d’information pour réviser à la hausse ses prévisions de PIB, au moins pour cette année. La combinaison de ces deux facteurs a donc fait en sorte que la BdC se sente confiante qu’une hausse de taux plus ferme était nécessaire.
- OK. La Banque du Canada a également annoncé le début d’une réduction de son bilan, ou un resserrement quantitatif le 25 avril. Est-ce une surprise compte tenu de l’ampleur de la hausse de taux?
- Peut-être que pour certains, oui. Je dirais que certains anticipaient, par exemple, une hausse de taux de 25 points de base, en combinaison avec un resserrement quantitatif, ou RQ. Les 50 points de base en plus du QT pourraient donc être vus comme une réaction ferme.
Toutefois, j’aimerais souligner quelques points à ce sujet. Les avoirs dans le bilan sont principalement axés sur les actifs à plus court terme. Si vous examinez le profil des échéances de la Banque du Canada, nous avons environ 130 milliards de dollars qui arrivent à échéance au moment du bilan ou qui n’y sont pas inclus, entre cette année et l’an prochain. Et, compte tenu du budget annoncé par le gouvernement du Canada, qui présente un déficit plus faible que celui qui était attendu, la Banque a eu l’assurance qu’elle pourrait aller de l’avant avec des répercussions minimales sur les marchés.
- Comment les marchés obligataires ont-ils réagi à toutes ces nouvelles? Et que révèlent actuellement les courbes de taux aux investisseurs sur l’économie et la possibilité d’autres hausses de taux à l’avenir?
- C’est une bonne question. À en juger par la réaction qui a suivi l’annonce de la Banque : c’était un peu désorganisé. Mais dans l’ensemble, la courbe semble vouloir s’aplatir. Je veux dire par là que les taux d’intérêt, les taux à long terme, par exemple sur 10 ans, ne progressent pas, ou chutent beaucoup plus rapidement que les taux d’intérêt à court terme.
L’aplatissement observé en ce moment – donc, si je prends l’écart de taux entre l’obligation du Canada à 2 ans et l’obligation du Canada à 10 ans – c’est un peu moins de 30 points de base ou 0,3 %. C’est relativement stable, étant donné que ce n’est que la deuxième augmentation de taux, bien qu’il s’agisse d’une hausse de taux de 50 points de base de la Banque du Canada.
Normalement, le type d’aplatissement que nous observons aujourd’hui sur la courbe des taux et que nous avons observé comme tendance générale au cours des derniers mois, se produirait une fois que la Banque aurait procédé à une série de hausses de taux, et pas seulement deux. Cet aplatissement est une façon qu’a le marché obligataire de dire à la Banque du Canada : vous pouvez augmenter les taux d’intérêt, mais jusqu’à un certain point, au-delà de cette limite, et je dirais que ce niveau est d’environ 3 %, c’est la croissance qui commencera à être touchée sérieusement.
Il sera difficile de répondre aux attentes de croissance, qui demeurent positives, tant le consensus général au sein du marché que la Banque du Canada.
- Bien sûr, nous savons que la Banque augmente les taux d’intérêt pour réduire l’inflation. Les attentes des consommateurs canadiens face à l’inflation ont augmenté le mois dernier, et la Banque du Canada a reconnu que les risques pesant sur ces attentes deviennent de plus en plus ancrés vont en augmentant. Croyez-vous que les attentes d’inflation à long terme demeurent ancrées à ce stade-ci?
Prenons le sondage auprès des consommateurs; je crois que c’est de la Banque du Canada dont vous parlez, elle indiquerait qu’à long terme, ou à moyen terme à tout le moins, si on considère une période de cinq ans comme moyen terme, ces attentes sont bien ancrées. Mais les attentes à court terme, d’un an ou deux, ces attentes sont très élevées.
La question pour la Banque en ce moment est de savoir à quel point ces attentes à court terme se répercutent- elles sur les attentes à long terme, particulièrement lorsque l’incertitude entourant l’inflation est si grande? Prenons, par exemple, le sondage sur les perspectives des entreprises que la Banque a également publié, un nombre record d’entreprises signalent des problèmes de capacité dûs à la main-d’œuvre et aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement. La Banque est donc contrainte, en quelque sorte, de continuer à passer la hausse des coûts et des coûts des intrants aux consommateurs.
À quel moment cela change-t-il les attentes du consommateur ou du ménage moyen à propos des attentes d’inflation à long terme? Et à quel moment cela commence-t-il à avoir un effet sur les dépenses discrétionnaires actuelles, en particulier lorsque l’incertitude entourant l’inflation laisse entrevoir d’autres révisions à venir, tant sur le marché que par la Banque du Canada, à la hausse?
C’est un point très important que nous surveillons. Ce sera un facteur clé dans la façon dont les choses continuent de se développer sur le plan économique.
- OK. Au-delà de l’inflation, qu’est-ce que vous surveillez d’autre? Quels risques importants pèsent sur le mouvement des taux de la Banque du Canada?
- Les deux plus grands risques que je vais souligner alimentent en fait l’inflation. D’abord, nous sommes toujours dans une pandémie. Et même si le nombre de cas augmente, ce n’est pas aussi préoccupant que ce qui se passe en Asie en général, et en Chine, plus précisément.
L’approche de la Chine à l’égard des cas de COVID-19 repose sur une tolérance zéro. Ils prennent des mesures de confinement très strictes. À l’heure actuelle, toutes les villes et les régions qui sont en confinement regroupées, représentent environ 40 % de l’économie chinoise.
Et donc si ces mesures de confinement sont prolongées ou que la durée de celles-ci est plus longue que prévu, les chaînes d’approvisionnement mondiales pourraient subir d’autres perturbations et, évidemment, il y a la guerre en Ukraine, qui a créé une nouvelle source de perturbations pour les chaînes d’approvisionnement mondiales et les sanctions à la Russie qui ont perturbé les marchés mondiaux des produits de base. Par conséquent, ces deux risques finissent par se refléter dans une hausse de l’inflation, mais pas nécessairement dans une hausse de la croissance.
Cela mettra la Banque du Canada au défi de continuer à relever les taux d’intérêt. D’une part, ça serait nécessaire si l’inflation continuait d’augmenter. En revanche, il serait très difficile de le faire si les perspectives de croissance se détériorent.
- OK. Qu’anticipez-vous pour le huard? Comment devrait-il évoluer, selon vous?
- Le dollar canadien est l’une des monnaies les plus performantes depuis le début de l’année par rapport aux principaux concurrents du marché, car les prix des produits de base ont augmenté, surtout les prix de l’énergie, améliorant les perspectives de notre économie.
En revanche, par rapport au dollar américain, par exemple, notre dollar a été relativement stable en raison de l’appétit mondial pour le risque, en particulier après le début de la guerre en Ukraine. Donc, dans un contexte de risque négatif, le dollar américain a tendance à surpasser toutes les autres monnaies.
Si la confiance à l’égard du risque ne se détériore pas davantage, les conditions sont favorables au commerce, en raison de la vigueur des produits de base, donc, cela signifie que le dollar canadien s’apprécie ou profite de la situation du moins. Si la fourchette était un peu étroite depuis le début de l’année, entre 0,78 $ et 0,80 $, nous pourrions voir ces chiffres augmenter pour le reste de l’année.
- Alex, merci de nous avoir accordé de votre temps.
- Merci beaucoup, Tony.
[MUSIQUE]
- En un mot, il y a clairement une peur de l’inflation, et cette inflation provient de plusieurs sources. Il ne s’agit pas seulement des perturbations continues des chaînes d’approvisionnement mondiales soulignées dans le communiqué de la BdC,mais aussi l’inflation alimentaire et énergétique qui a vraiment monté en flèche, surtout avec le début de la guerre en Ukraine. Voilà pourquoi les révisions des prévisions d’inflation de la banque pour cette année et l’an prochain ont été revues fortement à la hausse.
Aussi, avec la forte reprise de la main-d’œuvre liée aux réouvertures après les mesures de confinement d’Omicron, la reprise du marché de l’emploi a été plus vigoureuse que prévu. La Banque avait aussi assez d’information pour réviser à la hausse ses prévisions de PIB, au moins pour cette année. La combinaison de ces deux facteurs a donc fait en sorte que la BdC se sente confiante qu’une hausse de taux plus ferme était nécessaire.
- OK. La Banque du Canada a également annoncé le début d’une réduction de son bilan, ou un resserrement quantitatif le 25 avril. Est-ce une surprise compte tenu de l’ampleur de la hausse de taux?
- Peut-être que pour certains, oui. Je dirais que certains anticipaient, par exemple, une hausse de taux de 25 points de base, en combinaison avec un resserrement quantitatif, ou RQ. Les 50 points de base en plus du QT pourraient donc être vus comme une réaction ferme.
Toutefois, j’aimerais souligner quelques points à ce sujet. Les avoirs dans le bilan sont principalement axés sur les actifs à plus court terme. Si vous examinez le profil des échéances de la Banque du Canada, nous avons environ 130 milliards de dollars qui arrivent à échéance au moment du bilan ou qui n’y sont pas inclus, entre cette année et l’an prochain. Et, compte tenu du budget annoncé par le gouvernement du Canada, qui présente un déficit plus faible que celui qui était attendu, la Banque a eu l’assurance qu’elle pourrait aller de l’avant avec des répercussions minimales sur les marchés.
- Comment les marchés obligataires ont-ils réagi à toutes ces nouvelles? Et que révèlent actuellement les courbes de taux aux investisseurs sur l’économie et la possibilité d’autres hausses de taux à l’avenir?
- C’est une bonne question. À en juger par la réaction qui a suivi l’annonce de la Banque : c’était un peu désorganisé. Mais dans l’ensemble, la courbe semble vouloir s’aplatir. Je veux dire par là que les taux d’intérêt, les taux à long terme, par exemple sur 10 ans, ne progressent pas, ou chutent beaucoup plus rapidement que les taux d’intérêt à court terme.
L’aplatissement observé en ce moment – donc, si je prends l’écart de taux entre l’obligation du Canada à 2 ans et l’obligation du Canada à 10 ans – c’est un peu moins de 30 points de base ou 0,3 %. C’est relativement stable, étant donné que ce n’est que la deuxième augmentation de taux, bien qu’il s’agisse d’une hausse de taux de 50 points de base de la Banque du Canada.
Normalement, le type d’aplatissement que nous observons aujourd’hui sur la courbe des taux et que nous avons observé comme tendance générale au cours des derniers mois, se produirait une fois que la Banque aurait procédé à une série de hausses de taux, et pas seulement deux. Cet aplatissement est une façon qu’a le marché obligataire de dire à la Banque du Canada : vous pouvez augmenter les taux d’intérêt, mais jusqu’à un certain point, au-delà de cette limite, et je dirais que ce niveau est d’environ 3 %, c’est la croissance qui commencera à être touchée sérieusement.
Il sera difficile de répondre aux attentes de croissance, qui demeurent positives, tant le consensus général au sein du marché que la Banque du Canada.
- Bien sûr, nous savons que la Banque augmente les taux d’intérêt pour réduire l’inflation. Les attentes des consommateurs canadiens face à l’inflation ont augmenté le mois dernier, et la Banque du Canada a reconnu que les risques pesant sur ces attentes deviennent de plus en plus ancrés vont en augmentant. Croyez-vous que les attentes d’inflation à long terme demeurent ancrées à ce stade-ci?
Prenons le sondage auprès des consommateurs; je crois que c’est de la Banque du Canada dont vous parlez, elle indiquerait qu’à long terme, ou à moyen terme à tout le moins, si on considère une période de cinq ans comme moyen terme, ces attentes sont bien ancrées. Mais les attentes à court terme, d’un an ou deux, ces attentes sont très élevées.
La question pour la Banque en ce moment est de savoir à quel point ces attentes à court terme se répercutent- elles sur les attentes à long terme, particulièrement lorsque l’incertitude entourant l’inflation est si grande? Prenons, par exemple, le sondage sur les perspectives des entreprises que la Banque a également publié, un nombre record d’entreprises signalent des problèmes de capacité dûs à la main-d’œuvre et aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement. La Banque est donc contrainte, en quelque sorte, de continuer à passer la hausse des coûts et des coûts des intrants aux consommateurs.
À quel moment cela change-t-il les attentes du consommateur ou du ménage moyen à propos des attentes d’inflation à long terme? Et à quel moment cela commence-t-il à avoir un effet sur les dépenses discrétionnaires actuelles, en particulier lorsque l’incertitude entourant l’inflation laisse entrevoir d’autres révisions à venir, tant sur le marché que par la Banque du Canada, à la hausse?
C’est un point très important que nous surveillons. Ce sera un facteur clé dans la façon dont les choses continuent de se développer sur le plan économique.
- OK. Au-delà de l’inflation, qu’est-ce que vous surveillez d’autre? Quels risques importants pèsent sur le mouvement des taux de la Banque du Canada?
- Les deux plus grands risques que je vais souligner alimentent en fait l’inflation. D’abord, nous sommes toujours dans une pandémie. Et même si le nombre de cas augmente, ce n’est pas aussi préoccupant que ce qui se passe en Asie en général, et en Chine, plus précisément.
L’approche de la Chine à l’égard des cas de COVID-19 repose sur une tolérance zéro. Ils prennent des mesures de confinement très strictes. À l’heure actuelle, toutes les villes et les régions qui sont en confinement regroupées, représentent environ 40 % de l’économie chinoise.
Et donc si ces mesures de confinement sont prolongées ou que la durée de celles-ci est plus longue que prévu, les chaînes d’approvisionnement mondiales pourraient subir d’autres perturbations et, évidemment, il y a la guerre en Ukraine, qui a créé une nouvelle source de perturbations pour les chaînes d’approvisionnement mondiales et les sanctions à la Russie qui ont perturbé les marchés mondiaux des produits de base. Par conséquent, ces deux risques finissent par se refléter dans une hausse de l’inflation, mais pas nécessairement dans une hausse de la croissance.
Cela mettra la Banque du Canada au défi de continuer à relever les taux d’intérêt. D’une part, ça serait nécessaire si l’inflation continuait d’augmenter. En revanche, il serait très difficile de le faire si les perspectives de croissance se détériorent.
- OK. Qu’anticipez-vous pour le huard? Comment devrait-il évoluer, selon vous?
- Le dollar canadien est l’une des monnaies les plus performantes depuis le début de l’année par rapport aux principaux concurrents du marché, car les prix des produits de base ont augmenté, surtout les prix de l’énergie, améliorant les perspectives de notre économie.
En revanche, par rapport au dollar américain, par exemple, notre dollar a été relativement stable en raison de l’appétit mondial pour le risque, en particulier après le début de la guerre en Ukraine. Donc, dans un contexte de risque négatif, le dollar américain a tendance à surpasser toutes les autres monnaies.
Si la confiance à l’égard du risque ne se détériore pas davantage, les conditions sont favorables au commerce, en raison de la vigueur des produits de base, donc, cela signifie que le dollar canadien s’apprécie ou profite de la situation du moins. Si la fourchette était un peu étroite depuis le début de l’année, entre 0,78 $ et 0,80 $, nous pourrions voir ces chiffres augmenter pour le reste de l’année.
- Alex, merci de nous avoir accordé de votre temps.
- Merci beaucoup, Tony.
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