Kim Parlee et John Tobin, directeur général et gestionnaire de portefeuille, Epoch Investment Partners, expliquent pourquoi, dans le contexte inflationniste actuel, le concept de durée – une mesure du risque de taux d’intérêt généralement appliquée aux obligations – est également important pour évaluer les actions.
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[MUSIQUE]
Lorsque nous parlons de durée, nous le faisons habituellement dans le contexte des obligations. Et c’est une façon de mesurer la façon dont les prix des obligations sont susceptibles de changer si les taux d’intérêt fluctuent. Mon invité affirme que dans le contexte actuel, la durée est très pertinente lorsqu’il est question d’actions.
John Tobin est ici pour nous en parler davantage. Il est directeur général et gestionnaire de portefeuille à Epoch Investment Partners. Il nous rejoint de New York. John, merci d’être des nôtres. Commençons par les notions de base. En quoi consiste la durée lorsque vous parlez d’actions?
Bien sûr. Eh bien, Kim, merci de m’avoir invité. Et vous avez tout à fait raison. Quand on parle d’obligations, on pense habituellement à la durée. Ça s’applique aux titres à revenu fixe. Et quand on pense à une obligation, on reçoit des coupons tous les six mois pendant la durée de sa vie.
La durée correspond donc à la période pendant laquelle il faut attendre pour obtenir ces coupons. Est-ce que c’est cinq ans? 10 ans, 30 ans? Pendant combien de temps cette série de coupons va-t-elle durer? Et la durée, comme vous l’avez mentionné, c’est une mesure du taux d’intérêt et du risque. On parle souvent des principes relatifs aux obligations. Et ces principes sont simples. Ça dit que lorsque les taux augmentent, les prix des obligations diminuent. Ça dit aussi que l’impact d’une hausse des taux d’intérêt sur les obligations à long terme est plus important que pour les obligations à court terme. Et la stratégie standard d’un gestionnaire de portefeuille d’obligations consiste à réduire la durée lorsqu’on prévoit que les taux vont augmenter.
Alors qu’est-ce que tout ça a à voir avec les actions? Eh bien, ce qu’on dit, c’est que si vous regardez les actions plutôt que les coupons, vous pouvez penser aux dividendes que vous recevriez au fil du temps. Bien sûr, les dividendes sont versés à même les bénéfices. En fin de compte, lorsqu’on applique ce concept aux actions, on tient compte du moment et du montant des bénéfices futurs.
Bien sûr, certaines sociétés, tout comme certaines obligations, ont des bénéfices très lointains. Et peut-être que les bénéfices et les flux de trésorerie pourraient être faibles ou nuls à court terme. Et selon nous, si on commence à considérer la durée comme un concept qui s’applique aux actions, ça permet de la considérer comme un facteur de risque.
Les actions d’une société dont la plupart des flux de trésorerie sont à venir sont des actions à long terme. Le cours de l’action va réagir davantage à une variation donnée des taux d’intérêt que le cours de l’action d’une société qui génère des bénéfices et des flux de trésorerie et qui verse des dividendes aujourd’hui et dans l’avenir immédiat. Donc j’espère que ça vous aide à répondre à cette question.
Oui, en effet. John, peut-être que je simplifie à outrance, mais je me dis presque que les actions à court terme permettent de faire de l’argent aujourd’hui. Avec des actions à long terme, peut-être qu’on ne fera pas d’argent aujourd’hui, mais qu’on en fera demain. Et c’est ce à quoi on doit faire face. Et je crois que c’est une excellente analogie.
Oui.
Ce à quoi vous faisiez référence, c’est que les sociétés et les actions ayant une longue durée pourraient être les plus durement touchées par la hausse des taux.
C’est exact. Selon nous, le contexte interchangeable auquel on va probablement être confrontés au cours des prochaines années va être très différent de celui qu’on a connu au cours des dernières années. Les économies mondiales se remettent de la pandémie. Même si la croissance ralentit, la croissance du PIB va demeurer supérieure à la tendance dans les pays développés au cours des prochaines années.
Et c’est en réaction au fait qu’on voit les banques centrales du monde entier agir pour normaliser les politiques et annuler certaines des mesures d’urgence qu’elles ont mises en place en réaction à la pandémie, réduire leurs achats d’actifs et discuter du moment où elles pourraient commencer à relever les taux d’intérêt de référence. Et puis, bien sûr, l’inflation se révèle peut-être moins transitoire, après tout.
Donc, pour nous, ces facteurs nous convainquent de manière plutôt persuasive que les taux devraient augmenter de façon générale à l’avenir. Et la faiblesse des taux d’intérêt qu’on a connue au cours des dernières années, qui a eu un effet très favorable sur les actions à long terme, va devenir un obstacle aux évaluations de ces actions.
J’aimerais, si possible, présenter un tableau que vous avez apporté, John. Et je pense qu’il nous montre comment les actions de différentes durées se sont comportées par le passé, au fur et à mesure de l’augmentation des taux. Vous pourriez peut-être nous en dire un peu plus sur ce qu’on regarde.
Bien sûr. Le tableau qu’on vous montre ici, ce sont les ratios cours/bénéfice. Et on revient un peu en arrière, en janvier 2020. Et ce que vous voyez sur ce graphique, c’est le ratio cours/bénéfice de l’indice MSCI Monde, c’est-à-dire la ligne du haut, et l’indice MSCI Monde rendement en dividendes élevé, c’est la ligne du milieu, puis, au bas, cette ligne que vous voyez, c’est le taux des obligations du Trésor américain à 10 ans.
Et ce qu’on a mis en évidence, ce qu’on a encerclé dans ce graphique, c’est le récent épisode, plus tôt cette année, où le taux de référence des obligations du Trésor à 10 ans est passé de façon plutôt décisive d’environ 1 % en janvier à environ 1,7 % à la fin de mars, et ça nous a induit en erreur, comme on le sait tous, car on a effectué une rotation vers des actions qui devraient profiter de la reprise économique et de la réouverture des marchés, plutôt que vers certaines des actions populaires des sociétés de technologie et du commerce électronique à mégacapitalisation.
On y faisait souvent référence en parlant de la rotation de la croissance vers la valeur. Mais je pense que ce qu’on essaie de suggérer ici, c’est un autre point de vue, c’est-à-dire qu’il s’agit d’un passage d’actions à long terme à des actions à court terme.
Donc, si on examine ce graphique et ce qu’on a mis en évidence, on constate qu’il y a eu une compression du ratio cours/bénéfice, qui a été beaucoup plus prononcée sur l’ensemble du marché que pour l’indice MSCI Monde rendement en dividendes élevé. Maintenant, cet indice-là, qui met l’accent sur les sociétés versant des dividendes, est structuré de manière à inclure des actions qui sont vraiment de courte durée. Et il devrait vraiment tenir compte, dans le cadre d’un vote par procuration, de l’univers des actions à court terme. Donc ça montre la différence dans l’impact de la variation des taux observée plus tôt cette année.
John, il ne me reste que 45 secondes. Je m’en excuse. Mais je sais que vous avez ici quelques titres qui, selon vous, appartiennent à la catégorie des actions à court terme. Ce sont des actions que vous détenez dans le Fonds de rendement mondial pour actionnaires Epoch, que vous gérez. Pourriez-vous, en 30 secondes, nous les présenter et nous expliquer pourquoi ils appartiennent à cette catégorie?
Bien sûr. J’ai donc quelques titres ici... c’est un portefeuille qui met l’accent sur les sociétés dont les flux de trésorerie augmentent et qui versent des dividendes croissants intéressants. Le portefeuille comprend environ 100 actions qui pourraient être utilisées comme exemples d’actions à court terme.
Je vais parler d’une société en particulier, Toyota. On détient des actions de Toyota. C’est l’un des plus grands fabricants d’automobiles au monde; il a une franchise mondiale dominante, et vend environ neuf millions de voitures par année. Au cours des 12 derniers mois, ses activités ont généré des flux de trésorerie de 30 G$, des dividendes de 6 G$ et, soit dit en passant, des rachats d’actions d’une valeur approximative de 2,5 G$.
On pourrait comparer Toyota à Tesla. Et c’est presque le parfait contraste entre les actions à courte durée et celles à longue durée. Dans le cas de Tesla, ses revenus se sont chiffrés à environ 30 G$ l’an dernier, et son BAIIA, à un peu moins de 5 G$. En comparaison, les revenus de Toyota s’élèvent à 250 G$, et son BAIIA, à 35 G$.
Tesla va donc, de toute évidence, générer à l’avenir des revenus et des flux de trésorerie beaucoup plus importants qu’ils ne le sont actuellement, espérons-le.
John, c’est un excellent exemple. Merci de nous avoir présenté ce tableau. Merci encore d’avoir été des nôtres.
Merci de m’avoir invité, Kim. On se reparle bientôt.
[MUSIQUE]
Lorsque nous parlons de durée, nous le faisons habituellement dans le contexte des obligations. Et c’est une façon de mesurer la façon dont les prix des obligations sont susceptibles de changer si les taux d’intérêt fluctuent. Mon invité affirme que dans le contexte actuel, la durée est très pertinente lorsqu’il est question d’actions.
John Tobin est ici pour nous en parler davantage. Il est directeur général et gestionnaire de portefeuille à Epoch Investment Partners. Il nous rejoint de New York. John, merci d’être des nôtres. Commençons par les notions de base. En quoi consiste la durée lorsque vous parlez d’actions?
Bien sûr. Eh bien, Kim, merci de m’avoir invité. Et vous avez tout à fait raison. Quand on parle d’obligations, on pense habituellement à la durée. Ça s’applique aux titres à revenu fixe. Et quand on pense à une obligation, on reçoit des coupons tous les six mois pendant la durée de sa vie.
La durée correspond donc à la période pendant laquelle il faut attendre pour obtenir ces coupons. Est-ce que c’est cinq ans? 10 ans, 30 ans? Pendant combien de temps cette série de coupons va-t-elle durer? Et la durée, comme vous l’avez mentionné, c’est une mesure du taux d’intérêt et du risque. On parle souvent des principes relatifs aux obligations. Et ces principes sont simples. Ça dit que lorsque les taux augmentent, les prix des obligations diminuent. Ça dit aussi que l’impact d’une hausse des taux d’intérêt sur les obligations à long terme est plus important que pour les obligations à court terme. Et la stratégie standard d’un gestionnaire de portefeuille d’obligations consiste à réduire la durée lorsqu’on prévoit que les taux vont augmenter.
Alors qu’est-ce que tout ça a à voir avec les actions? Eh bien, ce qu’on dit, c’est que si vous regardez les actions plutôt que les coupons, vous pouvez penser aux dividendes que vous recevriez au fil du temps. Bien sûr, les dividendes sont versés à même les bénéfices. En fin de compte, lorsqu’on applique ce concept aux actions, on tient compte du moment et du montant des bénéfices futurs.
Bien sûr, certaines sociétés, tout comme certaines obligations, ont des bénéfices très lointains. Et peut-être que les bénéfices et les flux de trésorerie pourraient être faibles ou nuls à court terme. Et selon nous, si on commence à considérer la durée comme un concept qui s’applique aux actions, ça permet de la considérer comme un facteur de risque.
Les actions d’une société dont la plupart des flux de trésorerie sont à venir sont des actions à long terme. Le cours de l’action va réagir davantage à une variation donnée des taux d’intérêt que le cours de l’action d’une société qui génère des bénéfices et des flux de trésorerie et qui verse des dividendes aujourd’hui et dans l’avenir immédiat. Donc j’espère que ça vous aide à répondre à cette question.
Oui, en effet. John, peut-être que je simplifie à outrance, mais je me dis presque que les actions à court terme permettent de faire de l’argent aujourd’hui. Avec des actions à long terme, peut-être qu’on ne fera pas d’argent aujourd’hui, mais qu’on en fera demain. Et c’est ce à quoi on doit faire face. Et je crois que c’est une excellente analogie.
Oui.
Ce à quoi vous faisiez référence, c’est que les sociétés et les actions ayant une longue durée pourraient être les plus durement touchées par la hausse des taux.
C’est exact. Selon nous, le contexte interchangeable auquel on va probablement être confrontés au cours des prochaines années va être très différent de celui qu’on a connu au cours des dernières années. Les économies mondiales se remettent de la pandémie. Même si la croissance ralentit, la croissance du PIB va demeurer supérieure à la tendance dans les pays développés au cours des prochaines années.
Et c’est en réaction au fait qu’on voit les banques centrales du monde entier agir pour normaliser les politiques et annuler certaines des mesures d’urgence qu’elles ont mises en place en réaction à la pandémie, réduire leurs achats d’actifs et discuter du moment où elles pourraient commencer à relever les taux d’intérêt de référence. Et puis, bien sûr, l’inflation se révèle peut-être moins transitoire, après tout.
Donc, pour nous, ces facteurs nous convainquent de manière plutôt persuasive que les taux devraient augmenter de façon générale à l’avenir. Et la faiblesse des taux d’intérêt qu’on a connue au cours des dernières années, qui a eu un effet très favorable sur les actions à long terme, va devenir un obstacle aux évaluations de ces actions.
J’aimerais, si possible, présenter un tableau que vous avez apporté, John. Et je pense qu’il nous montre comment les actions de différentes durées se sont comportées par le passé, au fur et à mesure de l’augmentation des taux. Vous pourriez peut-être nous en dire un peu plus sur ce qu’on regarde.
Bien sûr. Le tableau qu’on vous montre ici, ce sont les ratios cours/bénéfice. Et on revient un peu en arrière, en janvier 2020. Et ce que vous voyez sur ce graphique, c’est le ratio cours/bénéfice de l’indice MSCI Monde, c’est-à-dire la ligne du haut, et l’indice MSCI Monde rendement en dividendes élevé, c’est la ligne du milieu, puis, au bas, cette ligne que vous voyez, c’est le taux des obligations du Trésor américain à 10 ans.
Et ce qu’on a mis en évidence, ce qu’on a encerclé dans ce graphique, c’est le récent épisode, plus tôt cette année, où le taux de référence des obligations du Trésor à 10 ans est passé de façon plutôt décisive d’environ 1 % en janvier à environ 1,7 % à la fin de mars, et ça nous a induit en erreur, comme on le sait tous, car on a effectué une rotation vers des actions qui devraient profiter de la reprise économique et de la réouverture des marchés, plutôt que vers certaines des actions populaires des sociétés de technologie et du commerce électronique à mégacapitalisation.
On y faisait souvent référence en parlant de la rotation de la croissance vers la valeur. Mais je pense que ce qu’on essaie de suggérer ici, c’est un autre point de vue, c’est-à-dire qu’il s’agit d’un passage d’actions à long terme à des actions à court terme.
Donc, si on examine ce graphique et ce qu’on a mis en évidence, on constate qu’il y a eu une compression du ratio cours/bénéfice, qui a été beaucoup plus prononcée sur l’ensemble du marché que pour l’indice MSCI Monde rendement en dividendes élevé. Maintenant, cet indice-là, qui met l’accent sur les sociétés versant des dividendes, est structuré de manière à inclure des actions qui sont vraiment de courte durée. Et il devrait vraiment tenir compte, dans le cadre d’un vote par procuration, de l’univers des actions à court terme. Donc ça montre la différence dans l’impact de la variation des taux observée plus tôt cette année.
John, il ne me reste que 45 secondes. Je m’en excuse. Mais je sais que vous avez ici quelques titres qui, selon vous, appartiennent à la catégorie des actions à court terme. Ce sont des actions que vous détenez dans le Fonds de rendement mondial pour actionnaires Epoch, que vous gérez. Pourriez-vous, en 30 secondes, nous les présenter et nous expliquer pourquoi ils appartiennent à cette catégorie?
Bien sûr. J’ai donc quelques titres ici... c’est un portefeuille qui met l’accent sur les sociétés dont les flux de trésorerie augmentent et qui versent des dividendes croissants intéressants. Le portefeuille comprend environ 100 actions qui pourraient être utilisées comme exemples d’actions à court terme.
Je vais parler d’une société en particulier, Toyota. On détient des actions de Toyota. C’est l’un des plus grands fabricants d’automobiles au monde; il a une franchise mondiale dominante, et vend environ neuf millions de voitures par année. Au cours des 12 derniers mois, ses activités ont généré des flux de trésorerie de 30 G$, des dividendes de 6 G$ et, soit dit en passant, des rachats d’actions d’une valeur approximative de 2,5 G$.
On pourrait comparer Toyota à Tesla. Et c’est presque le parfait contraste entre les actions à courte durée et celles à longue durée. Dans le cas de Tesla, ses revenus se sont chiffrés à environ 30 G$ l’an dernier, et son BAIIA, à un peu moins de 5 G$. En comparaison, les revenus de Toyota s’élèvent à 250 G$, et son BAIIA, à 35 G$.
Tesla va donc, de toute évidence, générer à l’avenir des revenus et des flux de trésorerie beaucoup plus importants qu’ils ne le sont actuellement, espérons-le.
John, c’est un excellent exemple. Merci de nous avoir présenté ce tableau. Merci encore d’avoir été des nôtres.
Merci de m’avoir invité, Kim. On se reparle bientôt.
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