
Les difficultés macroéconomiques n’ont pas cessé de peser sur les marchés boursiers, mais les principaux indices sont toujours en hausse depuis le début de l’année. Jim Kelleher, directeur de la recherche et analyste principal des technologies à Argus Research, discute de trois facteurs qui, selon lui, soutiennent les actions.
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Les marchés sont loin des sommets de l'été, mais le S&P 500 a toujours augmenté de près de 14 % sur l'année. Selon notre invité, il y a trois éléments clés qui maintiennent les actions à flot. Jim Keleher est spécialiste de la technologie chez Argus Research. Bonjour, Jim, ça me fait plaisir de vous revoir. Bonjour, Greg. Moi aussi, ça me fait plaisir. Alors il ne manque pas de sujets de discussion en tant qu'investisseur, en tant que citoyen du monde, or, les marchés, malgré leurs hauts et leurs bas sont toujours en progression de plus de 10 % depuis le début de l'année. Selon vous, il y a trois clés. Eh bien, il y a les deux facteurs négatifs, l'inflation et les taux d'intérêt qui sont tous deux à des niveaux jamais vus depuis des décennies. L'inflation a reflué, mais demeure, et c'est frustrant, supérieure à la cible de la Fed. La Fed pourrait prolonger sa série de hausses de taux. Les trois facteurs positifs, pour les marchés... mais qui inversement pourraient amener la Fed à demeurer en phase de resserrement, c'est-à-dire en face d'augmentation de taux: il y a tout d'abord l'économie. L'économie aux États-Unis se porte très bien. Selon la Fed d'Atlanta, dans son enquête sur le PIB, c'est difficile à croire, mais on prévoit que le PIB américain progresse de 5,25 % au 3ème trimestre. C'est un niveau de croissance analogue à celui de l'Asie du Sud-Est que l'on n'a pas vue depuis longtemps, sauf pendant la période étrange de la pandémie. Selon le consensus des analystes et des économistes, on prévoit 3,5 à 4 % de croissance au 4ème trimestre alors qu'on prévoyait désormais une croissance nulle. Ce sera sans doute le meilleur trimestre de l'année, mais ce n'est pas du tout conforme au scénario de récession dont on entend parler. Le deuxième facteur, c'est l'emploi. La croissance de l'emploi aux États-Unis a semblé refluer en deçà de 200 000 nouveaux emplois pendant un ou deux mois, à la mi-2023, et puis il y a eu le record atteint en septembre, 336 000 nouveaux emplois non agricoles, y compris des révisions à la hausse de plus de 100 000 emplois, et le chômage demeure à 3,8 %, c'est-à-dire un niveau très sain. Les salaires augmentent à raison de plus de 4 % chaque année, ce qui est un peu plus ou du moins pratiquement conforme à l'évolution de l'inflation. Donc les consommateurs restent à flot, parce que leur salaire emboîte le pas à la course des coûts, ce qui n'était pas le cas il y a un an. Et puis enfin, il y a les bénéfices. Les bénéfices des entreprises du S&P 500 sont le baromètre que la plupart des analystes et des investisseurs consultent. Les bénéfices des entreprises du S&P 500 devraient augmenter légèrement au prochain trimestre. Nous pensons qu'ils vont augmenter quelque peu, compte tenu du fait que les résultats dépassent généralement les attentes. En tout cas, s'il y a une croissance des bénéfices au 3ème trimestre, pendant la saison des annonces de bénéfices, ce sera la première fois depuis le 3ème trimestre de l'an dernier. Ce serait psychologiquement positif pour le marché. On peut envisager des bénéfices bien meilleurs au 4ème trimestre. L'économie, l'emploi, les bénéfices sont tous des facteurs positifs pour l'économie, Inversement, cela pourrait convaincre la Fed de demeurer en territoire respectif. Mais il vaut mieux avoir une économie qui se porte mieux qu'une économie qui s'effondre. Bien sûr, parce que c'est l'inquiétude après la série de hausses de taux par les banques centrales, c'est l'atterrissage brutal. Quel est le potentiel dans l'avenir, que les données économiques soient très positives, et puis je veux tenir compte du rendement des obligations sur 10 ans. Jim, vous scrutez les marchés depuis longtemps, 4,93 %, quelle en est la signification? La signification, à mon avis... tout d'abord, il se peut que nous parvenions enfin une situation où la courbe du rendement s'équilibre. Chaque fois que les échéances à plus court terme, trois mois ou deux ans... ...donnent un résultat supérieur, un rendement supérieur à l'obligation à 10 ans, on appelle ça une inversion de la courbe et un indicateur potentiel d'une récession. Si l'extrémité à longue échéance de la courbe est égale à celle de l'obligation à deux ans, ce serait un indicateur positif pour l'économie. Mais, et on l'oublie souvent... ...les hausses de taux déclenchées par la Fed aux États-Unis ont un effet décalé de 6 à 12 mois, ou peut-être même plus longtemps. Nous ne commençons que maintenant à ressentir l'impact des hausses de taux. Les investisseurs et les consommateurs sont fatigués de l'inflation depuis longtemps, mais ces taux élevés sont persistants et vont avoir un impact sur les achats de biens qu'il convient de financer, comme les logements, naturellement. C'est un scénario de bonne croissance économique, mais il y a des risques dans la perspective. Jusqu'ici la consommation continue de bien se porter. Les ventes de détail affichent une croissance de 0,7 % en septembre, ce qui est exceptionnel. Donc le consommateur est toujours de bonne humeur. Le consommateur est de bonne humeur, nous abordons la saison des annonces de bénéfices, les banques aux États-Unis sont en pointe. C'est un peu mitigé, mais le secteur de la technologie, spécifiquement, va commencer à faire ses annonces. Que prévoyez-vous? Conformément à la croissance globale des bénéfices, qui est dans la balance, tout dépend des résultats supérieurs aux attentes. Nous savons que les entreprises donnent toujours des prévisions plutôt faibles parce qu'elles n'ont aucune raison de donner des prévisions précises, donc le consensus est toujours plus faible que la réalité en général. Les bénéfices du secteur de la technologie étaient en baisse depuis un ou deux trimestres, mais se rapprochent du seuil de rentabilité. Nous pensons qu'ils pourraient être proches du seuil de la rentabilité, voire positifs. Il y a un ou deux domaines dans le secteur de la technologie qui sont très négatifs, comme les sociétés comme Micron, Western Digital, les sociétés de mémoire. Les entreprises exposées aux ordinateurs personnels, Intel, AMD, les fabricants d'unité centrale, prévoient sans doute des baisses, mais il y a beaucoup d'entreprises qui affichent des bénéfices très supérieurs aux prévisions et les éditeurs de logiciels se portent bien. C'est un univers très vaste, mais globalement, nous pensons que nous pourrions avoir une certaine croissance ce trimestre, et une meilleure croissance au 4ème trimestre. Pour certains investisseurs et commentateurs, c'est étonnant de voir à quel point le secteur de la grande technologie joue un rôle de leadership. Est-ce qu'il est justifié d'être si étonné? La croissance est en pointe dans un marché lorsque le marché est en hausse, et lorsque le marché est en baisse aussi. Quand on a abordé 2022, il y avait une crise de la chaîne d'approvisionnement qui allait s'aggravant. Il y avait une inflation très élevée qui mi-2022 a atteint des niveaux records. La Fed n'avait même pas encore commencé sa campagne de hausse de taux d'intérêt mais on savait qu'elle s'en venait. Nous abordons 2023, on savait que bon nombre de ces facteurs étaient en reflux. La crise des chaînes d'approvisionnement était largement résolue, l'inflation était redescendue à la moitié du niveau qu'elle avait atteint un an auparavant et la Fed, pensait-on, avait essentiellement achevé sa campagne. À l'heure actuelle, nous prévoyons que la Fed a terminé. Donc il y avait un certain optimisme à l'abord de cette saison. Les marchés ayant remonté en 2023, le secteur de la croissance était en tête et, bien sûr, la manie de l'intelligence artificielle a joué un rôle vital.