Alors que les entreprises trouvent des moyens de développer l’intelligence artificielle, les gouvernements cherchent à réglementer son impact. Kevin Hebner, stratège en placements mondiaux à Epoch TD, discute avec Kim Parlee de l’état de la réglementation et des conséquences pour les sociétés à l’avant-garde de l’innovation en matière d’IA.
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Alors que les entreprises cherchent des moyens de développer l’IA, les gouvernements se penchent sur les façons de réglementer ses répercussions. L’UE est l’une des premières à avoir récemment approuvé un important ensemble de règles. Mais tout le monde ne s’accorde pas pour dire que c’est la meilleure approche. Kevin Hebner, stratège en placements mondiaux à TD Epoch, nous rejoint pour nous livrer son analyse. Kevin, c’est toujours un plaisir de vous recevoir. Pour commencer, que pensez-vous de l’efficacité de certaines des mesures législatives proposées par l’UE pour ce qui est de réglementer l’IA?
Je ne pense pas que ça sera très efficace. Leur réglementation comporte de bonnes choses. Par exemple, pour ce qui est du contenu généré par l’IA, le fait qu’il faudra indiquer qu’il s’agit d’IA et qu’il n’a pas été créé par une personne. Ou, si vous vous adressez à un robot de conversation, on vous indiquera que vous parlez à un robot et pas à une vraie personne. Cela me paraît bien. Mais dans l’ensemble, ils tentent de réglementer cette technologie très large.
C’est un peu comme réglementer l’électricité, l’informatique ou Internet plutôt que de réglementer leurs utilisations spécifiques. Si vous tentez de contrer chaque problème potentiel d’une technologie aussi vaste que l’intelligence artificielle, la loi devient tellement vaste et couvre tellement d’activités, qu’elle n’est pas efficace. De plus, l’IA se développe si rapidement qu’on ne sait pas où on en sera dans deux, cinq ou dix ans. Et je pense que c’est un gros problème. Chaque fois que la réglementation est prématurée et trop générale, elle finit par faire beaucoup plus de mal que de bien.
On peut discuter… il y a des approches différentes. On sait qu’aux États-Unis, on fait preuve d’un peu plus de laisser-aller, du moins pour l’instant, sur la réglementation. On va y revenir dans une minute, Mais si on examine ce qui est ressorti de l’organisme de réglementation de l’UE, ils ont indiqué que le monde devrait se tourner vers l’UE pour obtenir un modèle de base de l’équilibre entre liberté et sécurité et ne pas se concentrer juste sur la technologie, mais sur les risques de ses utilisations. Oui.
Que pensez-vous de ça?
Oui, c’est le point de vue de l’architecte principal de la législation de l’UE. On met beaucoup l’accent sur le risque, les dommages potentiels, mais on ne porte pas suffisamment attention aux avantages et à l’innovation qui accompagnent l’IA. Je pense que c’est un grand problème. Les pays de l’UE se réglementent alors qu’ils comptent très peu de sociétés technologiques. Il y a beaucoup d’excellents spécialistes de l’IA en Europe. Mais la plupart d’entre eux travaillent maintenant aux États-Unis. Il y a quelques petites sociétés en Europe, mais relativement peu.
Étant donné que c’est grâce à ces grandes innovations technologiques qu’on est riches, qu’on a des emplois et qu’on est relativement bien rémunérés, c’est très problématique. Cela nuira en particulier aux jeunes dans l’UE. Ils n’auront pas les occasions que les gens au Canada, aux États-Unis et dans d’autres régions auront.
C’est fascinant. Mais j’aimerais vous poser une question. Si on examine la réglementation aux États-Unis, ils semblent actuellement laisser le secteur s’autoréglementer. Je suis certain qu’il y a des critiques de ce côté-là aussi, une approche qui va trop loin dans l’autre sens. Qu’en pensez-vous? Oui. Chaque région fait sa propre erreur en matière de réglementation d’un domaine aussi vaste que l’IA. Les États-Unis ont une approche non interventionniste sur la réglementation en général, mais particulièrement dans le cas de l’IA. Cela témoigne en partie du pouvoir et de l’influence énormes du secteur des technologies, du montant qu’il dépense pour faire du lobbying à Washington et même des réseaux sociaux. Les dommages causés sont très bien documentés, depuis 10 ans au moins, particulièrement chez les enfants.
Il y a deux ans, la Kids Online Safety Act a été créée. Cela n’a mené à rien. Et c’est terrible. Même dans les cas flagrants où l’IA et la technologie numérique nuisent, on a beaucoup de difficulté à rédiger un règlement efficace. Il est donc difficile d’espérer que les États-Unis s’engagent dans la bonne direction afin de réglementer même les cas de préjudice évidents.
Eh bien, vous avez les deux extrêmes. Je pense que les choses finiront par se stabiliser et qu’on trouvera un juste équilibre. Mais tournons-nous vers le sujet de l’IA sur les marchés si vous le voulez bien. La promesse d’intelligence artificielle est convaincante, c’est le moins qu’on puisse dire. Il suffit de regarder les marchés pour le voir. Oui.
Sommes-nous dans une bulle?
Il y a trois raisons qui nous font penser qu’on est dans une bulle. Premièrement, les évaluations sont excessives. Le deuxième facteur est le degré de concentration. 10 % des sociétés les plus performantes représentent 75 % de la capitalisation boursière. Cela ne s’est produit que deux fois auparavant, une fois à la fin des années 1920 et la deuxième à la fin des années 1990. Dans les deux cas, ça s’est mal terminé. Troisièmement, c’est l’engouement général suscité par l’IA.
Ce sont les raisons qui font penser que nous sommes dans une bulle. Mais il y a deux raisons de penser que cette fois-ci est différente. D’abord, le secteur des technologies produit beaucoup de flux de trésorerie disponibles, des rendements très impressionnants du capital investi et des marges dans les 20%. C’est très bien et c’est très différent de la technologie de la fin des années 90. Ensuite, quand nos analystes se rendent dans des sociétés, au moins la moitié d’entre elles offrent de façon proactive des exemples à nos analystes et à d’autres personnes de ce qu’elles font avec l’IA pour améliorer l’efficacité et la productivité, et les répercussions sur les résultats.
Il peut s’agir du codage ou de la rédaction de texte marketing. Il peut s’agir de contenu créatif, de vidéos, de musique ou d’autres façons de faire. Et c’est très prometteur. Il faudra du temps pour que ça se propage et se diffuse et pour voir un impact important sur la productivité globale et les bénéfices. Mais ça va se faire. Et ça se passe dans beaucoup d’entreprises. Il est fort possible que ce phénomène soit, en fait, sous-évalué sur le marché.
J’aimerais bien, Kevin… vous nous avez apporté des graphiques, j’aimerais qu’on les regarde. Le premier examine les raisons pour lesquelles on peut penser qu’il s’agit d’une bulle. Quand on compare avec les bulles du passé, en haut, c’est vraiment flamboyant. Mais si on passe au prochain graphique, pour revenir à ce que vous dites, on voit que le rendement de certains d’entre eux est également incroyable.
Oui, si vous regardez la différence entre les deux lignes, le rendement du capital investi par rapport au coût du capital, cela représente la valeur économique ajoutée par ces sociétés. Et c’est énorme. Si on regarde les sociétés de l’indice S&P qui ne font pas partie de ces sept sociétés, elles peinent toutes à obtenir un rendement supérieur à leur coût du capital.
Il se passe quelque chose de spécial, pas seulement dans les sociétés technologiques, mais aussi celles qui peuvent mettre en œuvre l’IA de façons qui améliorent leur efficacité, soit en aidant à réaliser des bénéfices, soit en réduisant les coûts. Et on voit beaucoup d’exemples. Mais il faudra un certain temps pour que cela se traduise par des rendements. Pour l’instant, ce sont les sociétés d’infrastructures, infonuagiques, les plateformes, les semi-entreprises qui profitent grandement de la période initiale, de la ruée vers l’or vers l’intelligence artificielle. [LOGO AUDIO]
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Alors que les entreprises cherchent des moyens de développer l’IA, les gouvernements se penchent sur les façons de réglementer ses répercussions. L’UE est l’une des premières à avoir récemment approuvé un important ensemble de règles. Mais tout le monde ne s’accorde pas pour dire que c’est la meilleure approche. Kevin Hebner, stratège en placements mondiaux à TD Epoch, nous rejoint pour nous livrer son analyse. Kevin, c’est toujours un plaisir de vous recevoir. Pour commencer, que pensez-vous de l’efficacité de certaines des mesures législatives proposées par l’UE pour ce qui est de réglementer l’IA?
Je ne pense pas que ça sera très efficace. Leur réglementation comporte de bonnes choses. Par exemple, pour ce qui est du contenu généré par l’IA, le fait qu’il faudra indiquer qu’il s’agit d’IA et qu’il n’a pas été créé par une personne. Ou, si vous vous adressez à un robot de conversation, on vous indiquera que vous parlez à un robot et pas à une vraie personne. Cela me paraît bien. Mais dans l’ensemble, ils tentent de réglementer cette technologie très large.
C’est un peu comme réglementer l’électricité, l’informatique ou Internet plutôt que de réglementer leurs utilisations spécifiques. Si vous tentez de contrer chaque problème potentiel d’une technologie aussi vaste que l’intelligence artificielle, la loi devient tellement vaste et couvre tellement d’activités, qu’elle n’est pas efficace. De plus, l’IA se développe si rapidement qu’on ne sait pas où on en sera dans deux, cinq ou dix ans. Et je pense que c’est un gros problème. Chaque fois que la réglementation est prématurée et trop générale, elle finit par faire beaucoup plus de mal que de bien.
On peut discuter… il y a des approches différentes. On sait qu’aux États-Unis, on fait preuve d’un peu plus de laisser-aller, du moins pour l’instant, sur la réglementation. On va y revenir dans une minute, Mais si on examine ce qui est ressorti de l’organisme de réglementation de l’UE, ils ont indiqué que le monde devrait se tourner vers l’UE pour obtenir un modèle de base de l’équilibre entre liberté et sécurité et ne pas se concentrer juste sur la technologie, mais sur les risques de ses utilisations. Oui.
Que pensez-vous de ça?
Oui, c’est le point de vue de l’architecte principal de la législation de l’UE. On met beaucoup l’accent sur le risque, les dommages potentiels, mais on ne porte pas suffisamment attention aux avantages et à l’innovation qui accompagnent l’IA. Je pense que c’est un grand problème. Les pays de l’UE se réglementent alors qu’ils comptent très peu de sociétés technologiques. Il y a beaucoup d’excellents spécialistes de l’IA en Europe. Mais la plupart d’entre eux travaillent maintenant aux États-Unis. Il y a quelques petites sociétés en Europe, mais relativement peu.
Étant donné que c’est grâce à ces grandes innovations technologiques qu’on est riches, qu’on a des emplois et qu’on est relativement bien rémunérés, c’est très problématique. Cela nuira en particulier aux jeunes dans l’UE. Ils n’auront pas les occasions que les gens au Canada, aux États-Unis et dans d’autres régions auront.
C’est fascinant. Mais j’aimerais vous poser une question. Si on examine la réglementation aux États-Unis, ils semblent actuellement laisser le secteur s’autoréglementer. Je suis certain qu’il y a des critiques de ce côté-là aussi, une approche qui va trop loin dans l’autre sens. Qu’en pensez-vous? Oui. Chaque région fait sa propre erreur en matière de réglementation d’un domaine aussi vaste que l’IA. Les États-Unis ont une approche non interventionniste sur la réglementation en général, mais particulièrement dans le cas de l’IA. Cela témoigne en partie du pouvoir et de l’influence énormes du secteur des technologies, du montant qu’il dépense pour faire du lobbying à Washington et même des réseaux sociaux. Les dommages causés sont très bien documentés, depuis 10 ans au moins, particulièrement chez les enfants.
Il y a deux ans, la Kids Online Safety Act a été créée. Cela n’a mené à rien. Et c’est terrible. Même dans les cas flagrants où l’IA et la technologie numérique nuisent, on a beaucoup de difficulté à rédiger un règlement efficace. Il est donc difficile d’espérer que les États-Unis s’engagent dans la bonne direction afin de réglementer même les cas de préjudice évidents.
Eh bien, vous avez les deux extrêmes. Je pense que les choses finiront par se stabiliser et qu’on trouvera un juste équilibre. Mais tournons-nous vers le sujet de l’IA sur les marchés si vous le voulez bien. La promesse d’intelligence artificielle est convaincante, c’est le moins qu’on puisse dire. Il suffit de regarder les marchés pour le voir. Oui.
Sommes-nous dans une bulle?
Il y a trois raisons qui nous font penser qu’on est dans une bulle. Premièrement, les évaluations sont excessives. Le deuxième facteur est le degré de concentration. 10 % des sociétés les plus performantes représentent 75 % de la capitalisation boursière. Cela ne s’est produit que deux fois auparavant, une fois à la fin des années 1920 et la deuxième à la fin des années 1990. Dans les deux cas, ça s’est mal terminé. Troisièmement, c’est l’engouement général suscité par l’IA.
Ce sont les raisons qui font penser que nous sommes dans une bulle. Mais il y a deux raisons de penser que cette fois-ci est différente. D’abord, le secteur des technologies produit beaucoup de flux de trésorerie disponibles, des rendements très impressionnants du capital investi et des marges dans les 20%. C’est très bien et c’est très différent de la technologie de la fin des années 90. Ensuite, quand nos analystes se rendent dans des sociétés, au moins la moitié d’entre elles offrent de façon proactive des exemples à nos analystes et à d’autres personnes de ce qu’elles font avec l’IA pour améliorer l’efficacité et la productivité, et les répercussions sur les résultats.
Il peut s’agir du codage ou de la rédaction de texte marketing. Il peut s’agir de contenu créatif, de vidéos, de musique ou d’autres façons de faire. Et c’est très prometteur. Il faudra du temps pour que ça se propage et se diffuse et pour voir un impact important sur la productivité globale et les bénéfices. Mais ça va se faire. Et ça se passe dans beaucoup d’entreprises. Il est fort possible que ce phénomène soit, en fait, sous-évalué sur le marché.
J’aimerais bien, Kevin… vous nous avez apporté des graphiques, j’aimerais qu’on les regarde. Le premier examine les raisons pour lesquelles on peut penser qu’il s’agit d’une bulle. Quand on compare avec les bulles du passé, en haut, c’est vraiment flamboyant. Mais si on passe au prochain graphique, pour revenir à ce que vous dites, on voit que le rendement de certains d’entre eux est également incroyable.
Oui, si vous regardez la différence entre les deux lignes, le rendement du capital investi par rapport au coût du capital, cela représente la valeur économique ajoutée par ces sociétés. Et c’est énorme. Si on regarde les sociétés de l’indice S&P qui ne font pas partie de ces sept sociétés, elles peinent toutes à obtenir un rendement supérieur à leur coût du capital.
Il se passe quelque chose de spécial, pas seulement dans les sociétés technologiques, mais aussi celles qui peuvent mettre en œuvre l’IA de façons qui améliorent leur efficacité, soit en aidant à réaliser des bénéfices, soit en réduisant les coûts. Et on voit beaucoup d’exemples. Mais il faudra un certain temps pour que cela se traduise par des rendements. Pour l’instant, ce sont les sociétés d’infrastructures, infonuagiques, les plateformes, les semi-entreprises qui profitent grandement de la période initiale, de la ruée vers l’or vers l’intelligence artificielle. [LOGO AUDIO]
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