De nombreux indicateurs économiques récents donnent à penser que la croissance pourrait commencer à ralentir. Daniel Ghali, stratège principal, Produits de base, Valeurs Mobilières TD, explique pourquoi un tel ralentissement pourrait ne pas entraîner de baisse des prix pour les produits de base.
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Alors que la réserve fédérale devrait maintenir ses taux, lors de sa décision annoncée mercredi, il faudrait peut-être un certain temps avant qu'ils ne commencent à baisser. Dans le contexte de ces taux plus élevés, nous commençons à percevoir des signes de ralentissement de la croissance mondiale. Qu'est-ce que cela signifie pour le cours des matières premières en 2024? Daniel Ghali de Valeurs mobilières TD nous rejoint pour en discuter. Bonjour, Daniel. Bonjour Anthony. Daniel, vous estimez que les cours des produits de base demeureront soutenus, malgré les taux élevés et le ralentissement de la croissance. Pourquoi? Si vous y songez, les cours des produits de base, depuis un an, sont essentiellement inchangés. Le cours du pétrole, bien qu'il ait beaucoup baissé, demeure relativement inchangé sur 12 mois. La même chose s'applique aux métaux de base. Tous ces produits sont très sensibles à la croissance économique mondiale. L'an dernier, le monde pensait qu'une récession était imminente, cela ne s'est pas concrétisé, la Chine a déconfiné, toutes sortes de facteurs haussiers se sont depuis inversés. En Chine... le pays se trouve dans une spirale descendante du secteur immobilier, lequel est l'un des secteurs qui consomme le plus de produits de base au monde. Or les cours sont essentiellement inchangés. Malgré les taux d'intérêt élevés, malgré le ralentissement de la croissance mondiale, les cours de produits de base ont fait preuve d'une résilience incroyable. Il s'agit d'une question d'offre structurelle qu'il est important de pouvoir discerner. Dans ce contexte... comment les défis à court terme s'articulent-ils avec le potentiel à long terme pour les produits de base? D'abord, les cours des produits de base sont très cycliques. Ils se comportent de manière cyclique. C'est la nature même de cette catégorie d'actifs. Or, il y a deux cycles qui sont en jeu: d'abord, le cycle d'affaires qui affecte toutes les catégories d'actifs, et puis il y a ce que l'on appelle assez souvent le super cycle. Qu'est-ce que le super cycle? Il s'agit de périodes pendant lesquelles il y a un déséquilibre structurel sur le marché. Il y a un déficit structurel ou un excédent structurel d'un produit de base. Le cours de celui-ci reflète les incitations à investir dans tel ou tel produit. La dernière fois, c'était l'entrée de la Chine dans les échanges commerciaux dans le monde, qui a débloqué une énorme demande de produits de base. Nous en sommes à un point très intéressant. Le cycle d'affaires est en baisse. L'année 2024 pourrait marquer le creux de ce cycle. Alors que nous abordons un super cycle des produits de base, car les investissements mondiaux dans l'offre de produits de base ont été structurellement insuffisants depuis plusieurs années, nous allons nous retrouver au bord d'un précipice en ce qui concerne l'approvisionnement en produits de base. Très bien, parlons des taux d'intérêt. Quand la Fed adoptera une position plus souple, qu'est-ce que cela signifiera pour les produits de base? Typiquement, quand la Fed met de l'eau dans son vin, c'est très favorable pour les produits de base. Cela suscite la croissance mondiale, les taux d'intérêt plus bas stimulent la demande future, mais en outre, et c'est particulièrement important en l'occurrence, alors que la Fed a relevé les taux de façon beaucoup plus énergique que jamais, le coût de détenir des stocks physiques est extrêmement élevé pour les négociants. Si vous êtes un gestionnaire de fonds, vous pouvez acheter des produits semblables aux liquidités qui vous procurent un taux de rendement très élevé, ou bien payer pour stocker et financer le stockage de produits de base. Il s'agit d'un arbitrage difficile, et malgré cela, les cours des produits de base sont demeurés résilients encore une fois, montrant que nous sommes au début d'un super cycle et que ça a un impact sur les cours. Vous avez parlé de la Chine. Quelles sont les perspectives de la demande de produits de base en Chine? Pensez-vous que les mesures de relance prises par le gouvernement augmenteront l'appétit de la Chine pour les produits de base? Oui, nous le croyons. Depuis un an, nous avons adopté une approche prudente. Puisque les mesures de relance en Chine ont été très ciblées, il ne s'agit pas des mesures de relance généralisée qui ont été prises dans le passé. La Chine redoute le piège de l'endettement qui a été créé par ces mesures dans le passé et cherche à l'éviter. En revanche, le gouvernement central est de plus en plus sous pression pour mettre en œuvre des mesures de relance budgétaire afin de créer un plancher pour l'économie, laquelle semble enfermée dans une spirale descendante à cause de la forte intensité de l'immobilier au sein de l'économie. Sauver le secteur immobilier de cette spirale descendante est essentiel pour le gouvernement central et, de plus en plus, on voit qu'ils prennent des mesures dans ce but. Par ailleurs, les mesures de relance ciblées prises depuis un an ont été beaucoup plus favorables aux produits de base que nous ne l'avions prévu à l'origine. Le secteur de l'immobilier s'est intéressé à l'achèvement de produits, ce qui exige beaucoup de cuivre et d'aluminium. Le stade de l'achèvement consomme beaucoup plus de ces métaux que les premiers stades de la construction. Même les secteurs traditionnels ont été soutenus par les mesures de relance en Chine, mais les mesures de relance ciblée ont de plus en plus porté sur de nouveaux secteurs énergétiques, la production d'énergie solaire, la transition à l'énergie propre, mais cette transition énergétique en Chine est vraiment en pointe dans le monde. La quantité d'énergie solaire ou de capacités de production d'énergie d'origine solaire mise en place depuis un an dépasse même de loin les objectifs très ambitieux déjà du gouvernement central et nous pensons que ce phénomène va se poursuivre bien que les véhicules électriques sont sans doute le secteur le plus important sur lequel la Chine cherche à agir.