
e prix de l’or a profité des perspectives de fin de la hausse des taux d’intérêt par la Réserve fédérale américaine. Daniel Ghali, stratège principal, Produits de base à Valeurs Mobilières TD, explique pourquoi le métal précieux pourrait atteindre un sommet sans précédent au cours des prochains trimestres.
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[LOGO SONORE] * Le prix de l’or profite des données sur l’inflation américaine de cette semaine qui ont été plus maîtrisées que prévu. Si on regarde les six derniers mois, il a augmenté. Bien sûr, le métal précieux a subi des pressions après avoir atteint la barre des 2 000 $ fin octobre. Mais mon invité affirme que l’or pourrait atteindre un nouveau sommet record au premier semestre de 2024. Daniel Ghali est stratège principal, Produits de base à Valeurs Mobilières TD. Daniel, je suis heureux de vous revoir dans ce programme. * Merci de m’avoir invité de nouveau. * Très bien. Si on anticipe un nouveau sommet au premier semestre de l’année prochaine, on va commencer par ça. Jusqu’où pourrait-il monter? Et qu’est-ce qui permettrait à l’or d’atteindre ces niveaux? * Eh bien, les prix de l’or devraient atteindre 2 100 $ l’once. C’est une moyenne trimestrielle. Donc, sur le plan tactique, cela peut être largement exagéré. En réalité, ce qu’on voit, c’est une sous-évaluation importante de tous les scénarios macroéconomiques, à l’exception d’un atterrissage en douceur. * On prévoit une récession aux États-Unis au premier semestre de l’année prochaine. On commence à voir des fissures dans les données. Les investisseurs sont fortement sous-positionnés sur les marchés de l’or. C’est particulièrement marquant, soit dit en passant, alors que les corrélations entre les actions et les obligations sont anormalement élevées. La diversification traditionnelle des portefeuilles que les gens ont tendance à privilégier ne fonctionne plus aussi bien. C’est donc sous l’angle des produits de base qu’on peut aborder le problème. * Vous avez mentionné l’économie américaine. Vous avez dit que la seule chose sur laquelle le marché compte vraiment, c’est un atterrissage en douceur et le fait qu’on sortira tous indemnes de cette crise. Les dernières années ont été riches en péripétie. Donc, si vous pensez qu’il y aura une récession, cela veut dire que l’économie américaine a atteint un sommet. Elle a été solide jusqu’à maintenant. Qu’est-ce que cela signifie pour les prix de l’or à long terme? Quelles sont les corrélations ici? * Alors, le rapport sur le PIB du troisième trimestre était très positif. Et je pense qu’intuitivement, les participants au marché ont vu la croissance tendancielle des derniers trimestres et qu’ils commencent à anticiper en fonction. Mais en réalité, la qualité de ce rapport sur le PIB était plutôt médiocre. Et on pense qu’on a déjà atteint un sommet aux États-Unis. * On prévoit une importante détérioration des perspectives de croissance à partir du quatrième trimestre, mais qui se poursuivra au premier semestre de l’année prochaine. Et, selon nous, le marché compte déjà que la Fed procédera à des baisses préventives. Mais comme les perspectives de récession se précisent, il faudra que cela continue. La Fed devra effectuer des réductions plus importantes que ce que le marché prévoit. * Vous avez dit à deux reprises qu’il y aurait des réductions. Beaucoup de gens veulent savoir quand elles auront lieu. Non seulement la Fed a terminé son cycle d’augmentations, mais c’est le cas depuis un certain temps. Il n’y a pas eu de hausse depuis plusieurs mois. En même temps, lorsque les réductions seront annoncées… alors, d’abord, dites-nous quand elles pourraient arriver. Si la condition est une récession, quand la Fed ressentira-t-elle le besoin d’agir? * C’est ce qui est difficile à comprendre pour les gens. Le président Powell a déjà indiqué que le FOMC souhaite regarder les taux des fonds fédéraux en chiffres réels. Si la Fed maintient les taux nominaux à un niveau constant, et que l’inflation diminue au premier semestre de l’année prochaine, on s’attend à ce que les taux réels des fonds fédéraux augmentent considérablement. * C’est un resserrement important de la politique monétaire de la Fed, ce qui n’est pas nécessaire lorsque la croissance se détériore déjà, lorsque l’inflation se rapproche de plus en plus de sa cible chaque mois. L’idée de baisses préventives a déjà été communiquée. Mais en cas de récession, comme on le prévoit, on pense que le marché anticipera un cycle de réductions beaucoup plus important. * Parlons du cycle de réductions. Lorsque les réductions auront lieu, l’idée que, à l’aube de ce cycle de hausse des taux… on dit généralement que les banques centrales agissent par tranche de 25 points de base. Elles prennent leur temps. Elles ne veulent pas ébranler l’économie. Or, l’inflation est devenue incontrôlable et elles ont dû ébranler l’économie. C’était audacieux et bref. Quand elles penseront que la mission est terminée ou même qu’une récession arrive, à quel point pourraient-elles être audacieuses dans les réductions? * Eh bien, les banques centrales ont tendance à regarder les données quand elles arrivent. Donc, elles vont accuser un retard quant aux perspectives de croissance. Elles doivent voir un affaiblissement réel dans les données avant de réduire. Il en résulte une détérioration de l’économie entre temps et on va voir ce phénomène s’accélérer. Cela nécessitera probablement des réductions plus importantes. * Et une fois qu’on est dans cette situation, on parle de l’or. C’est là où vous voyez la thèse se concrétiser, n’est-ce pas? L’or atteindra de nouveaux sommets record. * Oui, tout à fait. Ce qui est intéressant dans les marchés aurifères, c’est que le potentiel de hausse des taux d’intérêt qu’on a observés a tendance à avoir un effet négatif sur les prix de l’or. Mais les prix de l’or aujourd’hui stagnent. Si on prend du recul, les marchés ont tendance à stagner autour des sommets historiques. * La détérioration de cette relation indique une demande très importante des banques centrales qui a faussé cette relation, étant donné que c’est en grande partie les investisseurs qui ont tendance à regarder du côté des taux d’intérêt, ce qui se transmet au capital, puis à l’or. * Les banques centrales n’ont pas tendance à voir les choses de cette façon. En fait, on pense qu’il s’agit d’une tendance structurelle liée à un changement de mentalité dans les pays du Sud où toutes les banques centrales de la Chine au Moyen-Orient, en passant par la Turquie, etc. cherchent à ajouter l’or à leurs réserves de change. Pour revenir au contexte, la demande des banques centrales demeure aussi forte qu’elle a été ou simplement solide dans l’ensemble et la demande des investisseurs arrive au moment de la perspective de baisse des taux d’intérêt, et les perspectives pour l’or ont tendance à être positives. * Il ne me reste qu’une minute, Daniel. Mais comme vous êtes là, je dois vous poser des questions sur l’or noir, le pétrole, ce qu’on observe sur le marché en ce moment et ce vers quoi on pourrait se diriger. * Oui, les prix du pétrole ont subi des pressions importantes. Toutefois, on s’attend à ce qu’ils demeurent dans cette fourchette de prix élevés au cours de la prochaine année. On prévoit que le prix du pétrole dépassera 90 $ le baril. Et c’est une histoire d’offre. Contrairement à ce qu’on a connu l’an dernier, avec des contraintes structurelles en matière d’offre, cette année on a un resserrement artificiel des marchés pétroliers. * C’est lié à l’accord musclé de l’OPEP visant à réduire la production et ses partenaires, l’Arabie saoudite et la Russie, qui se sont engagés à réduire leur offre ce qui, selon nous, persistera au cours du premier semestre de l’année prochaine, à tout le moins. * Parce que les prix du pétrole sont sous pression, s’ils abandonnaient l’accord comme prévu au début de l’année, les prix du pétrole se détérioreraient considérablement. Et cela nuirait aux efforts des six derniers mois. * Ils sont dans une situation où ils doivent maintenir un resserrement de l’offre. Ils adoptent maintenant le rôle de producteur d’appoint, étant donné que les investissements dans la nouvelle offre ont été limités en Occident. Et, par conséquent, ils occupent une part dominante de la capacité de réserve mondiale. [LOGO SONORE] [MUSIQUE]