Les marchés semblent réévaluer objectivement le moment où la Réserve fédérale américaine serait prête à commencer à baisser les taux d’intérêt, et il semble de moins en moins probable qu’elle prenne une telle mesure en mars. Scott Colbourne, chef, Titres à revenu fixe à gestion active, Gestion de Placements TD, parle des facteurs qui font persister l’inflation et de ce que cela signifie pour la politique monétaire.
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Les marchés s'attendaient à ce que des réductions de taux d'intérêt soient envisagées en début d'année, mais l'inflation continuant d'être persistante, cela change-t-il la donne? Scott Colbourne de Gestion de placements TD nous rejoint pour en discuter. -Bonjour, Scott. -Bonjour, Greg. Alors, nous commençons à peine 2024, il est difficile de voir comment les choses se dérouleront, mais nous avions des attentes. Tandis que l'on considère les données économiques qui paraissent, surtout aux États-Unis, c'est la résilience qui est à l'ordre du jour. Est-ce que ce sera un défi par rapport aux attentes? Oui. Il y a eu un peu de retour par rapport à l'enthousiasme de la fin de 2023. Les trois dernières statistiques sur l'inflation aux États-Unis, au Canada, au Royaume-Uni, cette dernière étant parue ce matin, l'inflation, comme vous l'avez dit, est persistante. Comme vous l'avez noté. L'enthousiasme que nous avions vu à la fin de l'an dernier, quand il y a eu le changement de cap de la Fed, l'inflation descendait très bien, les bons du Trésor voyaient leur rendement s'améliorer, tout cela nous a donné d'excellentes raisons de finir l'année 2023 en beauté. Mais là, nous revenons un petit peu en arrière sur cet enthousiasme. Je pense que la perspective de réduction de taux ne disparaît pas. C'est plutôt le calendrier. L'inflation un peu plus persistante, surtout en ce qui concerne le logement et les services, et puis, en revanche, il y a une déflation des biens et de l'énergie, ce qui équilibre la situation totale de l'inflation. Certaines banques centrales affirment donc que nous nous ne renonçons pas aux coupures de taux. En fait, la Fed et la BCE ont toutes deux reconnu qu'il y aurait des coupures de taux cette année, mais c'est peut-être le calendrier. Nous sommes passés de 85% de possibilité à 50%, ce qui, compte tenu de la distribution des probabilités, semble une distribution assez juste. On est un peu revenu sur l'enthousiasme de la fin de l'année dernière. Comme vous l'avez noté, le rendement obligataire a augmenté depuis quelques sessions. Il s'agit donc de revenir un petit peu sur cet enthousiasme. Mais il y aura des coupures de taux cette année, c'est certain. La croissance dans le monde hors États-Unis est médiocre au mieux. Les cours de l'énergie sont mitigés. Si vous considérez le marché des swaps sur l'inflation, il est possible de spéculer sur l'inflation d'un mois sur l'autre. Selon ce marché, l'inflation de base se situerait autour de 2,5% d'ici le deuxième semestre. Quand on considère la réaction, la fonction de réaction de la Fed, la Fed n'attendra pas de parvenir à 2% avant de réduire les taux. Nous y parviendrons. Nous sommes sur cette trajectoire. Nous avons davantage confiance. Les données plus récentes nous permettent d'escompter des coupures de taux mais un peu plus tardives. Les statistiques les plus récentes, les ventes de détail; personnellement, j'aborde la saison des fêtes en me disant: Je vais faire preuve de discipline budgétaire, mais ce sont les fêtes, alors les gens desserrent les cordons de la bourse, et en rétrospective, on voit qu'on a beaucoup dépensé. Mais le chiffre était résilient. N'est-il pas étonnant que le consommateur américain ait pu, malgré la hausse des coûts d'emprunt, décider de continuer à dépenser? Oui, c'est un thème systématique en 2023, dans la mesure où cela se poursuit à la marge. Le consommateur américain nous étonne. Nous ne devrions plus être étonnés par ce fait, mais globalement, le poids de la croissance mondiale s'exercera sur l'inflation et nous allons sans doute voir une croissance américaine acceptable. Les données que nous connaissons sont conformes à cette perspective. Mais compte tenu de ce qui est pris en compte dans les cours du marché, on s'attendait peut-être à une croissance beaucoup moins élevée que prévu et les rendements du marché obligataire actuel le reflètent peut-être. Sur le marché des titres à revenu fixe, il y a des perspectives quant aux réductions de taux, leur signification pour chaque portefeuille de titres à revenu fixe, mais également le fait que les rendements sont toujours relativement élevés. Quand on conjugue tous ces éléments, qu'est-ce que cela signifie pour les titres à revenu fixe? Ce sera une très bonne année. Selon le point de la courbe de rendement où vous investissez, le type de solution que vous avez, vous avez 4, 4,5, 5%, 6% de rendement global. Parfois avec la duration, parfois sans duration. Si vous le prenez avec la duration, je crois que vous aurez peut-être encore 50 points de base de remontée au cours de l'année. Ceci vous donne encore peut-être 2% quant au rendement total. Donc vous pourriez avoir des rendements dans le haut de la fourchette de 0 à 10% pour les titres à revenu fixe. Au pire, vous aurez, je crois, un rendement semblable à celui d'un coupon. Par rapport au point où nous étions au creux de la pandémie, la fourchette de 4 à 6%, c'est raisonnablement bien. Cela a encore beaucoup de bon sens pour un portefeuille. Est-ce que ce sera suffisant pour convaincre les investisseurs qui se sont cantonnés dans la liquidité et la prudence en 2023? L'année dernière, on commentait beaucoup le fait que bien des investisseurs se cantonnaient dans la liquidité ou le très court terme. Est-ce que cela leur donnera le courage de se lancer? Oui. Ces liquidités vont finalement être placées ailleurs lorsqu'un coup de pouce leur sera donné. Quand un coup de pouce leur sera-t-il donné? Quand les banques centrales réduiront les taux. Il faudra peut-être attendre un tiers de l'année avant que nous ne parvenions à un mouvement significatif, mais pour le moment, que ce soit dans les liquidités ou les obligations de sociétés à court terme ou les actifs à duration longue, les investisseurs, dans les titres à revenu fixe, auront de quoi choisir cette année. Cette année, les risques sont géopolitiques, politiques même, aux États-Unis par exemple. Il y a beaucoup d'éléments dont il faut tenir compte. Quels sont ceux dont il faut se rappeler? Il y a les coupures de taux en perspective, on obtient un rendement semblable à celui d'un coupon. Qu'est-ce qui pourrait mal se passer? Bonne question. D'abord, il y a les cours des produits de base. Qu'est-ce qu'ils nous disent vraiment? Si, malgré la résilience de la croissance américaine, les produits de base demeurent faibles, est-ce que cela nous dit quelque chose au sujet de la demande, est-ce que ça nous dit quelque chose au sujet d'un affaiblissement accru de l'économie mondiale? Je ne le sais pas pour l'instant, mais je surveille. Par ailleurs, au niveau des titres à revenu fixe, dans la construction de portefeuille, j'étudie trois choses. Tout d'abord, c'est liquide. Vous pouvez passer des titres à revenu fixe aux liquidités aux placements alternatifs aux actions. C'est toujours pertinent. Nous avons le revenu, dont on a parlé, mais c'est la corrélation entre les actions et les titres à revenu fixe. Dans un environnement d'inflation élevée que nous avons vécu, cette corrélation disparaît, cette valeur de couverture disparaît et il n'y a pas de demande naturelle de titres à revenu fixe lorsque les actifs à risque diminuent. Quand nous abordons un environnement de plus faible inflation, nous pensons que cette corrélation recommencera d'augmenter. Si ce n'est pas le cas, c'est un risque, compte tenu du fait que les gouvernements aident à financer leur dette sur le marché obligataire. Pour moi, en tant qu'investisseur dans les titres à revenu fixe, c'est un risque que la demande d'obligation pourrait ne pas être au rendez-vous. C'est un risque qui dépasse la géopolitique traditionnelle.