Les marchés boursiers ont chuté suite à la fermeté du président de la Fed Powell sur les hausses de taux. Greg Bonnell discute avec Chris Whelan, stratège principal, Taux Canada à VMTD, de la fin potentielle des hausses de taux de la Fed et de la réaction des marchés.
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Les marchés tentent de se redresser après une chute de trois jours suite à l’intervention très attendue du président de la réserve fédérale Jerome Powell à Jackson Hole. Pour discuter de la possibilité que la Fed s’éloigne des hausses de taux et ce qui se passe sur le marché obligataire, on accueille Chris Whelan, stratège principal, Taux Canada à Valeurs Mobilières TD. C’est un plaisir de vous avoir avec nous. Bienvenue au Programme! Merci, Greg. Merci à vous. Commençons par la grande question de l’été et la théorie du virage de la Fed, qui a semblé… Jerome Powell semblait prendre toutes les mesures nécessaires pour calmer le jeu et expliquer que cela allait être compliqué. Comment les marchés anticipent-ils et interprètent-ils la situation et plus précisément le marché des obligations? Je pense que le marché obligataire a réagi bien à l’avance. Il a devancé la réunion. Le marché boursier digère toujours le ton audacieux et ferme de la réunion. Selon le marché obligataire, que les banques centrales décident ou non d’adopter une position ferme, ce qui est maintenant évident, après Jackson Hole… c’est que ces difficultés ne vont pas durer aussi longtemps ou que quelque chose va changer dans l’économie. Le marché obligataire est… le taux des obligations américaines à 10 ans est à environ 3,1 %. Les sommets sont à environ 3 et 1/2 %. On tient bon… le marché obligataire n’a pas réagi fortement après l’épisode de Jackson Hole. Je pense que le marché obligataire nous indique que les difficultés ne vont pas durer aussi longtemps qu’on le pense, ou que l’économie va se replier ou bien que les données vont s’adoucir, ou bien l’inflation va fléchir. Donc même si le grand public est effrayé par Jackson Hole, on ne sait pas vraiment ce qui va se passer. Mais la réserve fédérale ne pourra maintenir cette orientation ferme pendant longtemps, c’est-ce que le marché obligataire nous indique. Est-ce que cela suffit pour ramener le mot virage dans la discussion? Ou bien est-ce qu’il est aussi en train de devenir temporaire? À un moment donné, il n’était plus utile dans la discussion sur les marchés. On ne parle plus trop de virage, mais plutôt du moment où les choses vont se terminer. Le virage n’est plus d’actualité. La Fed ne va pas effectuer un virage. Maintenant, on parle du moment où ça va se terminer et à quoi ressemblera l’avenir. Tout comme… Je pense que l’inflation est… le marché obligataire semble nous indiquer que l’inflation va fléchir. On espère tous un atterrissage en douceur. Mais il est difficile de savoir si le marché obligataire prévoit un atterrissage brutal et une inflation soutenue, ou autre chose. Enfin on mise quand même certainement sur… Pardon, le virage est terminé, c’est plus la fin qui nous intéresse. Et le marché obligataire indique que le cycle de hausse va bientôt se terminer. Il devrait se terminer avant le printemps de l’année prochaine. Parce que ce qui est fascinant, évidemment, c’est lorsque les banques centrales… prennent des mesures à l’égard des taux, soit avec de fortes hausses récemment, ou à la baisse au début de la pandémie. On est censés avoir un peu de temps avant que cela se fasse pleinement sentir. Et on a vu des sauts massifs, monstres… je ne sais même plus quel adjectif utiliser, par exemple, des sauts de 75 points de base ou 100 points de base dans ce pays. Cela prendra un certain temps, n’est-ce pas? Mais à un moment donné, les banques centrales examinent la situation pour voir les répercussions dans l’économie. On commence déjà à voir des signes de l’impact. Je pense que les stocks accumulés… Aujourd’hui, le PIB canadien… l’estimation rapide indique une contraction de 0,1 %. Et au cours du prochain mois, les données commenceront à fléchir dans l’ensemble. Et c’est là-dessus que le marché obligataire se base avec des extrapolations prospectives… qui indiquent que ces hausses fonctionnent. Elles réduisent les attentes d’inflation et contribuent au ralentissement de l’activité globale de la consommation. Évidemment, Jerome Powell affirme qu’il faudra beaucoup de temps pour contenir l’inflation et revenir à un niveau souhaitable. Bien sûr, idéalement, il faudrait se situer dans les 2 %. Est-ce que c’est difficile? J’ai entendu des personnes dire qu’on allait probablement voir l’inflation baisser de manière significative au cours des prochains mois, mais que cette dernière ligne droite pourrait être la plus difficile. À mon avis, c’est le problème, on va se retrouver dans une zone d’inconfort qui va durer. On prévoit un sommet pour l’inflation : environ 8,6 % aux États-Unis et 8,1 % au Canada. On va donc passer dans les 5 au premier trimestre de l’année prochaine, et dans les 3 au deuxième trimestre. Il y aura des problèmes au 1er trimestre de l’année prochaine selon le marché obligataire. L’inflation demeure compliquée pour les banques centrales, bien au-dessus de la cible de 2 % et on devrait voir des signes de détérioration de la croissance. Je pense que le premier trimestre sera pénible… ce sera un moment difficile. Et je pense que cet écart de 5 % par rapport à 2 % est la raison pour laquelle les taux demeurent autour de 3 et 1/2 %, 3,75 %, 3 et 1/2 % au Canada, 3,75 % aux États-Unis, si nos prévisions se maintiennent aux premier et deuxième trimestres. Les réductions devraient avoir lieu aux 3e et 4e trimestres de l’année prochaine. Si certains investisseurs maintiennent cette idée de virage, ce sera le moment qui mettra à l’épreuve la détermination des banques centrales. Comme vous l’avez dit, lorsque l’économie ralentit… le nombre de chômeurs peut commencer à augmenter, le marché du travail commence à fléchir, est-ce qu’elles resteront déterminées? Réussiront-elles à regarder la situation en face, à voir la douleur qu’elles ont causée et à se dire qu’elles doivent continuer pour réduire l’inflation? Oui, malheureusement, je pense que cette douleur… Je pense qu’il est plus facile de parler de douleur que de ressentir de la douleur. Donc on verra. [RIRES] On verra ce que ça donne au premier trimestre de l’année prochaine. Mais, pour revenir à ce que vous disiez, le virage… Ceux qui pensent que les banques centrales ont cessé d’augmenter leurs taux. Et je pense qu’au Canada, on a… Les marchés s’entendent pour dire qu’on a une avance de 75 pdb et qu’il y aura une augmentation de 50 pdb pour les deux prochaines réunions aux États-Unis. Dans les deux cas, il y a donc une hausse d’environ 100 pdb, au moins au Canada et aux États-Unis au cours des prochains mois. Je pense donc que cette idée de virage est terminée, car 100 pdb, ce n’est pas rien. Comme vous l’avez dit, il s’agit de fortes hausses. Cette notion de virage a donc disparu, et on va… parler des 100 pdb dans le futur. À long terme, et je sais qu’il est très difficile de prédire ce qui va se produire à l’avenir. Mais j’ai l’impression que ça fait dix ans ou plus depuis la crise financière, que les banques centrales sont toujours au premier plan de la politique monétaire. Pourra-t-on un jour avoir un régime de taux d’intérêt normalisé? Quelque chose, enfin sait-on même ce qui est normal, pour le coût d’emprunt? Oui, alors. Je me rappelle quand j’étais à l’université, je pensais que la politique monétaire, c’était simple. On monte un peu, on réduit un peu, puis on a eu 2008, et tout s’est écroulé. Je pense que, malheureusement, on est encore dans les cycles d’expansion et de repli, et les cycles d’expansion et de récession… ce serait vraiment bien d’avoir un atterrissage en douceur cette fois-ci. Mais on a vraiment accéléré la cadence pendant la COVID, à cause des craintes d’une grande récession en 2008, Puis, on s’est rendu compte que c’était un peu trop dur. Mais on ne le savait pas à ce moment-là. Et maintenant, il faut relever des taux d’intérêt qu’on n’avait pas vu depuis longtemps, alors qu’on commençait à s’habituer à zéro. On pensait tous que zéro était la norme. On était tous bloqués à zéro. Je ne vais plus jamais payer pour de l’argent. L’argent ne coûte plus rien. L’argent est gratuit. Mais que c’est difficile quand on parle de hausses, plus on monte, plus la distance est courte avant la prochaine réduction. Pour l’instant, le marché obligataire est extrêmement volatil. Et c’est un phénomène qu’on observe depuis un an… depuis la COVID. La volatilité des marchés obligataires indique que ça pourrait être long avant de retrouver des taux d’intérêt calmes. Je pense donc qu’on va devoir composer avec ces cycles pendant un bon moment. [MUSIQUE]