Le modèle de travail hybride peut être une option intéressante pour les employés de bureau. Cela a aussi rendu le contexte plus difficile pour l’immobilier commercial, surtout en ce qui a trait aux taux d’inoccupation. Colin Lynch, chef, Placements immobiliers mondiaux à Gestion de Placements TD, discute des perspectives du secteur et explique pourquoi certains marchés plus petits pourraient avoir un avantage par rapport aux grandes villes comme Toronto.
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Le taux d'inoccupation des bureaux à Toronto a récemment augmenté, mais notre invité affirme que si l'on regarde au-delà de la plus grande ville du Canada, il y a des signes de vigueur pour le secteur de l'immobilier de bureau. Colin Lynch de Gestion de placements TD nous rejoint pour en parler. Bonjour, Colin. Bonjour, Greg. Ça me fait plaisir de passer à votre émission. J'ai hâte de participer à cet entretien, parce que nous allons quitter le périmètre de Toronto, mais il faut commencer par cette ville, c'est le plus important marché immobilier. Il n'y a peut-être pas un rebond aussi important qu'on l'avait espéré. Commençons donc par la ville de Toronto. C'est un marché intéressant car il s'agit d'un marché qui comporte un grand nombre de segments. Il y a le quartier financier, il y a la rue Bloor, puis l'avenue St. Clair, l'avenue Eglinton, et puis North York Centre. Il s'agit de cinq ou six noyaux le long d'une seule rue avant de se diriger vers l'est ou vers l'ouest, d'arriver jusqu'à Scarborough, Mississauga, Vaughan. Il se passe beaucoup de choses, mais vous avez raison, le taux d'inoccupation est en hausse, mais pas uniformément. Différentes régions connaissent des phénomènes différents. L'un des secteurs qui se portent le mieux, c'est justement le noyau autour de la rue Yonge et de l'avenue St. Clair. C'est un secteur qui se porte très bien même si ce n'est pas un quartier auquel on songe typiquement quand on pense aux bureaux. Il s'agit d'un quartier très aisé, des restaurants qui s'installent, beaucoup de vitalité. La rue Bloor éprouve quelques difficultés supplémentaires, surtout la galerie souterraine qui s'étend entre la rue Yonge et la rue Bay. Mais chaque immeuble évolue différemment. Quand on va vers le sud, dans le quartier financier où nous nous trouvons à l'heure actuelle, il y a deux volets. Tout d'abord, il y a la question de la qualité. Comme dans toute période de perturbations économiques, comme celle que nous vivons aujourd'hui, même si la pandémie de COVID est terminée, on a assisté à une fuite vers la qualité. Si vous êtes locataire et que vous occupez un local de catégorie B, un peu plus ancien, un peu moins bien relié au transport en commun, un peu moins rutilant, un peu moins bien classé au niveau de l'environnement, du social et de la gouvernance, vous payez tel loyer mais ensuite vous pouvez payer un loyer inférieur pour emménager dans un immeuble plus neuf et mieux relié au réseau de métro, c'est exactement ce que vous allez faire. C'est la fuite vers la qualité. Ceci dit, il y a encore des immeubles, même dans le quartier financier du centre-ville, qui ne correspondent pas à ce modèle de l'immeuble rutilant de nouvelle génération très bien relié au réseau de transport en commun et ces immeubles sont en difficulté. Il y a une augmentation notable, beaucoup plus notable de l'inoccupation dans ces immeubles. Il s'agit d'une dynamique de la fuite vers la qualité et on le voit pendant chaque période de perturbations économiques. Toutefois, pour passer de l'inoccupation à l'occupation à présent, il y a une augmentation progressive, lente, de l'occupation. Depuis fin 2021, c'est un phénomène progressif mais régulier. Pas tellement les mardis, mercredis et jeudis au centre-ville, car nous avons atteint une gamme qui est proche de la normale; c'est plutôt les lundis qu'il y a une augmentation progressive. Donc nous sommes passés au mode de travail hybride, que nous ne quitterons pas, à mon avis, mais la nature de ce travail quant au nombre de jours au bureau en moyenne subit un ajustement. Mes recherches consistent à prendre le train tous les matins. Aujourd'hui, lundi matin, il y avait plusieurs personnes sur le quai mais je n'étais toujours pas inquiet quant à la possibilité d'avoir une place assise. Nous avons parlé de Toronto. À présent, faisons le tour du pays, les autres grandes villes. Est-ce qu'il y a toujours une hésitation à retourner au bureau? La question est intéressante. Bien souvent, on se concentre sur Toronto ou Montréal ou même sur d'autres marchés. Bien sûr, ce sont des villes très connues auxquelles on pense beaucoup en raison de leur importance, mais on oublie qu'il y a d'autres villes. Des villes comme Winnipeg, Saskatoon, Régina, Calgary, Edmonton, Halifax, Saint John's. Dans ces villes-là, il y a un retour au bureau qui est beaucoup plus prononcé. À Régina et Saskatoon, par exemple, la plupart des gens travaillent au bureau quatre à cinq jours par semaine. À Winnipeg, c'est presque quatre à cinq jours. À Calgary et Edmonton, c'est entre trois et quatre jours par semaine en moyenne. Nous mesurons ces éléments en fonction des heures passées au bureau par semaine, le plafond étant d'environ 37,5 car, sur une semaine de 40 heures, tout le monde prend une demi-heure pour déjeuner tous les jours. Mais pourquoi? Est-ce que les gens aiment le café au bureau? Pourquoi veulent-ils retourner au bureau? Oui, le café, c'est vrai, c'est très important, mais la clé, ce sont les délais de navettage ou de transport quotidiens. À Saskatoon ou Régina, c'est peut-être 10 minutes, tandis qu'à Toronto, pour beaucoup de gens, 10 minutes en voiture, ça vous permettrait de franchir 5% du trajet vers votre lieu de travail. C'est donc un facteur très important. Les petites villes ont des temps de transport quotidien plus courts et les obstacles au retour au bureau sont moins importants que dans les grands centres. Ce que cela signifie, c'est qu'il y a davantage de gens au bureau, et au niveau des taux d'inoccupation, au niveau des baux de location et au niveau de la confiance à l'égard de l'immobilier de bureau, c'est que l'on est beaucoup plus optimiste dans ces petites villes que dans les grands centres comme Toronto, Ottawa, Montréal. À Vancouver, il y a toujours un travail hybride dans une certaine mesure, mais même là, pour différentes raisons, il y a davantage de gens qui vivent parmi les tours de bureaux. Il y a donc beaucoup plus de gens qui n'ont pas de trajet quotidien très long à Vancouver. Il y a donc un retour au bureau un peu plus prononcé là-bas. Une dynamique passionnante! Si cette année se déroule comme les commentateurs l'ont prédit, ce sera l'année des coupures de taux par les banques centrales. Lorsque ces coupures de taux interviennent, quel effet ont-elles sur les bureaux? C'est une autre excellente question. Nous pensons que les coupures de taux seront positives pour la valeur des immeubles à bureaux, mais la raison, la question qu'il faut se poser, c'est la raison des coupures de taux. Les coupures de taux interviennent lorsqu'il y a de graves perturbations économiques. Historiquement, ce n'est pas très favorable pour les bureaux car, encore une fois, les bureaux, comme les autres types d'immobilier, sont au service de l'économie. S'il y a moins d'emploi, moins de gens qui travaillent dans les différentes entreprises, ce n'est pas positif. Toutefois, certains estiment que s'il y a des perturbations économiques graves, les gens auront davantage de raisons de se rendre physiquement au bureau pour s'y montrer. Nous n'avons jamais connu cette dynamique dans le passé. Il est difficile de la quantifier, mais beaucoup affirment que ce sera le cas. Mettons que l'on exclut un atterrissage brutal et qu'il y a des coupures de taux parce que nous vivons un atterrissage en douceur, que ce soit une croissance modeste de l'emploi, une croissance nulle de l'emploi, dans ce scénario, compte tenu de la valorisation des immeubles, il est certain que c'est positif pour le secteur des bureaux tout comme pour les autres secteurs de l'immobilier. Essentiellement, parce que si l'on prend un peu de recul, les investisseurs sur le marché immobilier ont de nombreux choix. Pas seulement l'immobilier, ils pourraient choisir d'investir dans des actions de sociétés ouvertes en fonction du rendement en dividende, pourraient investir dans les obligations, dont ils considèrent également le rendement. Si les taux diminuent, cela rabaisse le seuil de la concurrence pour l'immobilier, c'est-à-dire que pour les immeubles de bureaux qui donnent un bon rendement, un bon revenu et un bon flux de trésorerie, ceux-ci deviennent plus intéressants pour les investisseurs qui cherchent un rendement. Certains bureaux donneront donc de bien meilleurs résultats. Il y aura toujours des immeubles de bureaux qui seront en difficulté. Que les taux diminuent de 100 points de base ou 200 points de base, en définitive, si le revenu est faible, alors la valorisation sera toujours faible. En raison du faible revenu. Il faut donc toujours tenir compte des données fondamentales de chaque immeuble, le taux d'occupation, le taux de location, sans trop entrer dans le détail, mais il y a les loyers bruts et les loyers réels que les locataires payent, car en général, les propriétaires consentent des rabais. En cas de perturbations économiques, ces rabais deviennent de plus en plus importants, ce qui veut dire que même si le loyer global est inchangé, le loyer réel que reçoit le propriétaire diminue. Donc il faut tenir compte de cet écart-là aussi. Pour les immeubles qui sont en difficulté, cet écart est beaucoup plus présent que pour les immeubles qui sont moins en difficulté. Même dans un environnement de baisse des taux, oui, c'est favorable en général au secteur des bureaux, mais il faut évaluer chaque immeuble individuellement en fonction de sa qualité.