L’inquiétude des investisseurs grandit face aux mesures répressives de la Chine sur le secteur des technologies. Anthony Okolie et Christian Medeiros, gestionnaire adjoint de portefeuille, Gestion de Placements TD, se demandent si cette répression représente une occasion pour les licornes des marchés émergents.
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ANTHONY OKOLIE [00:00:03] Christian, les tensions entre les États-Unis et la Chine ne faiblissent pas sous la présidence de Biden, et les deux pays s’affrontent principalement sur la technologie. Comment cela s’explique-t-il?
CHRISTIAN MEDEIROS [00:00:12] Bonjour, Tony. Oui, c’est une très bonne question, et c’est l’un des problèmes majeurs que nous avons observés sur les marchés ce mois-ci. Il y a eu les mesures réglementaires chinoises contre DiDi, récemment cotée aux États-Unis, contre ses pratiques de cybersécurité. La Chine a également durci le ton contre le lucratif secteur éducatif qui a été paralysé. Ces deux phénomènes ont entraîné d’importantes contre-performances des actions chinoises et des actions des marchés émergents en général. De nombreux investisseurs se demandent ce qui se passe. Comment doivent-ils agir? Je pense qu’il est important de prendre un peu de recul et d’évaluer la situation et l’angle géopolitique. Beaucoup d’investisseurs espèrent qu’après Trump, nous allions retrouver des relations pacifiées avec la Chine. En réalité, Washington ne change pas de position, nous développons une grande rivalité avec la Chine. Cela fera partie des grandes tendances de notre époque. Certes, l’administration Biden n’est pas aussi agressive que celle de Trump, mais elle conserve un grand nombre de politiques similaires. Elle aborde même de nouveaux problèmes, comme la technologie, les droits de l’homme et introduit de nombreuses alliances traditionnelles étasuniennes dans l’équation. Alors, même si c’est plus calme, les relations continuent d’être compliquées et la rivalité s’étend. Par conséquent, pour la Chine comme pour les États-Unis, il s’agit d’un effort sociétal. En Chine, on réexamine comment fonctionner davantage par soi-même et comment donner la priorité aux intérêts nationaux. Ce faisant, on doit adapter son économie locale, afin que tout le monde soit sur la même longueur d’onde. Et certains des principaux problèmes auxquels il faut s’attaquer sont des enjeux sociaux et de technologie, ce qui représente un terrain d’affrontement important. La Chine ne va pas nécessairement se concentrer sur les marchés de capitaux pour atteindre ses objectifs géopolitiques à long terme. Elle se concentrera sur ce qui compte pour le pays. Nous allons donc avoir des répercussions négatives au niveau des politiques.
ANTHONY OKOLIE [00:02:11] Je suis content que vous ayez mentionné la technologie parce que nous avons vu les mesures répressives du gouvernement chinois sur les technologies. Considérez-vous cette répression comme une tendance temporaire ou est-ce un véritable signal d’alerte pour les investisseurs?
CHRISTIAN MEDEIROS [00:02:23] C’est une excellente question. Sur le plan tactique, je pense qu’à court terme, certaines inquiétudes des investisseurs sont exagérées. Il n’y a pas de risque important à court terme pour les inscriptions aux États-Unis et les sociétés technologiques chinoises. Je crois que les choses se calmeront un peu, d’autant plus que nous assistons à une retraite du leadership en Chine actuellement. Mais à long terme, nous devons garder cela à l’esprit : il y aura d’autres politiques aux États-Unis et en Chine qui affecteront les sociétés technologiques chinoises. C’est ce qui s’est produit sous Trump avec Huawei et TikTok. Le Congrès mène actuellement des actions contre les sociétés chinoises cotées aux États-Unis. Et puis en Chine, certains problèmes persistent. On entend maintenant des rumeurs de menaces sur le secteur des jeux vidéo et d’autres secteurs moins importants. Nous pouvons donc nous attendre à ce que cela continue. En Chine, les plus grandes sociétés technologiques contrôlent la plus grande partie des technologies de pointe. Elles contrôlent beaucoup de données sur les consommateurs et elles sont également importantes pour le bien-être social de la population chinoise moyenne. Si la Chine s’inquiète des problèmes sociaux dans le pays, de la façon dont sont utilisées les données et de l’alignement de la technologie avec les intérêts nationaux, il faudra réglementer. Nous pouvons donc nous attendre à une réglementation et les investisseurs ne doivent pas faire preuve de complaisance à cet égard.
ANTHONY OKOLIE [00:03:41] Les dernières mesures répressives de Chine pourraient-elles forcer les investisseurs à s’intéresser aux licornes technologiques des marchés émergents?
CHRISTIAN MEDEIROS [00:03:49] Certainement. Je pense à quelque chose sur lequel nous nous disputons depuis un moment avec Vitaly : l’indice de référence des marchés émergents, en particulier dans le segment des actions, est dominé par la Chine et par les sociétés à forte croissance chinoises. Beaucoup d’investisseurs sont concentrés là-dessus et ne s’intéressent pas aux autres pays de cet indice. Je pense que c’est une erreur parce qu’il y a beaucoup d’autres sociétés vraiment intéressantes. Maintenant qu’il devrait y avoir une prime de risque de politique plus élevée sur les actions chinoises, espérons que les investisseurs vont s’intéresser à d’autres pays. Et, par exemple, de nombreuses sociétés dont nous avons parlé par le passé offrent des plateformes semblables à celles de Chine, mais elles ont de plus en plus de marchés émergents à intégrer avec les différentes technologies qu’elles déploient. Nous voyons des sociétés comme Mercado Libre et Sea Limited en Amérique latine et Asie du Sud-Est, qui se portent relativement bien malgré le repli des marchés émergents. Nous observons également dans d’autres pays, comme l’Inde, qu’il y a de nombreuses nouvelles inscriptions et de PAPE parce qu’il y a de nombreuses licornes technologiques qui arrivent sur le marché. En vous intéressant à un plus grand nombre de marchés émergents, sans vous cantonner à la Chine, vous avez accès à beaucoup de sociétés intéressantes qui non seulement offrent, plus tôt dans leur parcours de croissance, de nouvelles technologies intéressantes, mais qui sont également négligées par de nombreux investisseurs. Je pense que beaucoup d’investisseurs dans l’espace des marchés émergents doivent s’intéresser aux autres marchés émergents pour trouver de nouveaux titres de croissance.
ANTHONY OKOLIE [00:05:11] C’est très intéressant, Christian. Les répressions réglementaires de la Chine rendent-elles également les actions technologiques chinoises moins intéressantes par rapport à celles des marchés émergents?
CHRISTIAN MEDEIROS [00:05:19] C’est une bonne question. Vous devez payer une prime de risque plus importante lorsque vous investissez dans les sociétés technologiques chinoises en partie en raison de la structure d’entité à détenteurs de droits variables, et je ne pense pas que cela soit remis en question en ce moment. Mais il pourrait s’agir d’un risque litigieux à l’avenir. L’autre problème, c’est la législation du Congrès américain. En vertu de laquelle les sociétés chinoises qui sont cotées aux États-Unis doivent faire l’objet d’un examen plus approfondi en matière de contrôle fiscal. Il y a donc un risque qu’elles soient radiées de la cote à l’avenir. Compte tenu de cet obstacle, de la multiplication des mesures de réglementation et de contrôle exercées par la Chine pour adapter la technologie à ses intérêts nationaux et renforcer cette rivalité avec les États-Unis, vous devrez compter avec de nombreux risques liés aux politiques. Par conséquent, je pense que cela engendrera une prime de risque plus importante que ce que les investisseurs payaient par le passé.
ANTHONY OKOLIE [00:06:13] Alors compte tenu de tous ces défis, est-ce que vous considérez qu’il s’agit d’un marché pour les investisseurs axés sur la sélection des titres?
CHRISTIAN MEDEIROS [00:06:18] Oui, absolument. Je pense que dans un monde caractérisé par plus de dissociations, plus de politiques et plus de géopolitique, vous devez vraiment choisir vos titres et vous devez trouver des occasions dans différentes régions du globe. Il n’y a pas qu’un seul système global. Nous aurons des sphères d’influence entre les États-Unis et la Chine et les marchés entre les deux. Et les mesures politiques devront être surveillées, car il suffit d’une mesure réglementaire de la Chine ou d’une nouvelle priorité législative des États-Unis, ou de tout type de conflit, pour que les marchés ralentissent à court terme. Par conséquent, il faut s’intéresser aux marchés émergents et aux entreprises à forte croissance des marchés développés qui sont négligés en dehors des États-Unis et de la Chine parce qu’ils vont se développer indépendamment des sociétés américaines et chinoises qui seront de plus en plus influencées par l’État. Il ne faudra également pas oublier que la pollinisation croisée de la technologie entre les États-Unis et la Chine n’existera plus vraiment. Il y aura donc des opportunités distinctes dans les deux marchés pour les investisseurs. Il y a différents marchés et des occasions diverses, et cela donne aux investisseurs les moyens d’être plus mondialisés. Il faudra aussi tenir compte des politiques.
ANTHONY OKOLIE [00:07:27] Christian, Merci du temps que vous nous avez accordé.
CHRISTIAN MEDEIROS [00:07:31] Merci, Anthony.
CHRISTIAN MEDEIROS [00:00:12] Bonjour, Tony. Oui, c’est une très bonne question, et c’est l’un des problèmes majeurs que nous avons observés sur les marchés ce mois-ci. Il y a eu les mesures réglementaires chinoises contre DiDi, récemment cotée aux États-Unis, contre ses pratiques de cybersécurité. La Chine a également durci le ton contre le lucratif secteur éducatif qui a été paralysé. Ces deux phénomènes ont entraîné d’importantes contre-performances des actions chinoises et des actions des marchés émergents en général. De nombreux investisseurs se demandent ce qui se passe. Comment doivent-ils agir? Je pense qu’il est important de prendre un peu de recul et d’évaluer la situation et l’angle géopolitique. Beaucoup d’investisseurs espèrent qu’après Trump, nous allions retrouver des relations pacifiées avec la Chine. En réalité, Washington ne change pas de position, nous développons une grande rivalité avec la Chine. Cela fera partie des grandes tendances de notre époque. Certes, l’administration Biden n’est pas aussi agressive que celle de Trump, mais elle conserve un grand nombre de politiques similaires. Elle aborde même de nouveaux problèmes, comme la technologie, les droits de l’homme et introduit de nombreuses alliances traditionnelles étasuniennes dans l’équation. Alors, même si c’est plus calme, les relations continuent d’être compliquées et la rivalité s’étend. Par conséquent, pour la Chine comme pour les États-Unis, il s’agit d’un effort sociétal. En Chine, on réexamine comment fonctionner davantage par soi-même et comment donner la priorité aux intérêts nationaux. Ce faisant, on doit adapter son économie locale, afin que tout le monde soit sur la même longueur d’onde. Et certains des principaux problèmes auxquels il faut s’attaquer sont des enjeux sociaux et de technologie, ce qui représente un terrain d’affrontement important. La Chine ne va pas nécessairement se concentrer sur les marchés de capitaux pour atteindre ses objectifs géopolitiques à long terme. Elle se concentrera sur ce qui compte pour le pays. Nous allons donc avoir des répercussions négatives au niveau des politiques.
ANTHONY OKOLIE [00:02:11] Je suis content que vous ayez mentionné la technologie parce que nous avons vu les mesures répressives du gouvernement chinois sur les technologies. Considérez-vous cette répression comme une tendance temporaire ou est-ce un véritable signal d’alerte pour les investisseurs?
CHRISTIAN MEDEIROS [00:02:23] C’est une excellente question. Sur le plan tactique, je pense qu’à court terme, certaines inquiétudes des investisseurs sont exagérées. Il n’y a pas de risque important à court terme pour les inscriptions aux États-Unis et les sociétés technologiques chinoises. Je crois que les choses se calmeront un peu, d’autant plus que nous assistons à une retraite du leadership en Chine actuellement. Mais à long terme, nous devons garder cela à l’esprit : il y aura d’autres politiques aux États-Unis et en Chine qui affecteront les sociétés technologiques chinoises. C’est ce qui s’est produit sous Trump avec Huawei et TikTok. Le Congrès mène actuellement des actions contre les sociétés chinoises cotées aux États-Unis. Et puis en Chine, certains problèmes persistent. On entend maintenant des rumeurs de menaces sur le secteur des jeux vidéo et d’autres secteurs moins importants. Nous pouvons donc nous attendre à ce que cela continue. En Chine, les plus grandes sociétés technologiques contrôlent la plus grande partie des technologies de pointe. Elles contrôlent beaucoup de données sur les consommateurs et elles sont également importantes pour le bien-être social de la population chinoise moyenne. Si la Chine s’inquiète des problèmes sociaux dans le pays, de la façon dont sont utilisées les données et de l’alignement de la technologie avec les intérêts nationaux, il faudra réglementer. Nous pouvons donc nous attendre à une réglementation et les investisseurs ne doivent pas faire preuve de complaisance à cet égard.
ANTHONY OKOLIE [00:03:41] Les dernières mesures répressives de Chine pourraient-elles forcer les investisseurs à s’intéresser aux licornes technologiques des marchés émergents?
CHRISTIAN MEDEIROS [00:03:49] Certainement. Je pense à quelque chose sur lequel nous nous disputons depuis un moment avec Vitaly : l’indice de référence des marchés émergents, en particulier dans le segment des actions, est dominé par la Chine et par les sociétés à forte croissance chinoises. Beaucoup d’investisseurs sont concentrés là-dessus et ne s’intéressent pas aux autres pays de cet indice. Je pense que c’est une erreur parce qu’il y a beaucoup d’autres sociétés vraiment intéressantes. Maintenant qu’il devrait y avoir une prime de risque de politique plus élevée sur les actions chinoises, espérons que les investisseurs vont s’intéresser à d’autres pays. Et, par exemple, de nombreuses sociétés dont nous avons parlé par le passé offrent des plateformes semblables à celles de Chine, mais elles ont de plus en plus de marchés émergents à intégrer avec les différentes technologies qu’elles déploient. Nous voyons des sociétés comme Mercado Libre et Sea Limited en Amérique latine et Asie du Sud-Est, qui se portent relativement bien malgré le repli des marchés émergents. Nous observons également dans d’autres pays, comme l’Inde, qu’il y a de nombreuses nouvelles inscriptions et de PAPE parce qu’il y a de nombreuses licornes technologiques qui arrivent sur le marché. En vous intéressant à un plus grand nombre de marchés émergents, sans vous cantonner à la Chine, vous avez accès à beaucoup de sociétés intéressantes qui non seulement offrent, plus tôt dans leur parcours de croissance, de nouvelles technologies intéressantes, mais qui sont également négligées par de nombreux investisseurs. Je pense que beaucoup d’investisseurs dans l’espace des marchés émergents doivent s’intéresser aux autres marchés émergents pour trouver de nouveaux titres de croissance.
ANTHONY OKOLIE [00:05:11] C’est très intéressant, Christian. Les répressions réglementaires de la Chine rendent-elles également les actions technologiques chinoises moins intéressantes par rapport à celles des marchés émergents?
CHRISTIAN MEDEIROS [00:05:19] C’est une bonne question. Vous devez payer une prime de risque plus importante lorsque vous investissez dans les sociétés technologiques chinoises en partie en raison de la structure d’entité à détenteurs de droits variables, et je ne pense pas que cela soit remis en question en ce moment. Mais il pourrait s’agir d’un risque litigieux à l’avenir. L’autre problème, c’est la législation du Congrès américain. En vertu de laquelle les sociétés chinoises qui sont cotées aux États-Unis doivent faire l’objet d’un examen plus approfondi en matière de contrôle fiscal. Il y a donc un risque qu’elles soient radiées de la cote à l’avenir. Compte tenu de cet obstacle, de la multiplication des mesures de réglementation et de contrôle exercées par la Chine pour adapter la technologie à ses intérêts nationaux et renforcer cette rivalité avec les États-Unis, vous devrez compter avec de nombreux risques liés aux politiques. Par conséquent, je pense que cela engendrera une prime de risque plus importante que ce que les investisseurs payaient par le passé.
ANTHONY OKOLIE [00:06:13] Alors compte tenu de tous ces défis, est-ce que vous considérez qu’il s’agit d’un marché pour les investisseurs axés sur la sélection des titres?
CHRISTIAN MEDEIROS [00:06:18] Oui, absolument. Je pense que dans un monde caractérisé par plus de dissociations, plus de politiques et plus de géopolitique, vous devez vraiment choisir vos titres et vous devez trouver des occasions dans différentes régions du globe. Il n’y a pas qu’un seul système global. Nous aurons des sphères d’influence entre les États-Unis et la Chine et les marchés entre les deux. Et les mesures politiques devront être surveillées, car il suffit d’une mesure réglementaire de la Chine ou d’une nouvelle priorité législative des États-Unis, ou de tout type de conflit, pour que les marchés ralentissent à court terme. Par conséquent, il faut s’intéresser aux marchés émergents et aux entreprises à forte croissance des marchés développés qui sont négligés en dehors des États-Unis et de la Chine parce qu’ils vont se développer indépendamment des sociétés américaines et chinoises qui seront de plus en plus influencées par l’État. Il ne faudra également pas oublier que la pollinisation croisée de la technologie entre les États-Unis et la Chine n’existera plus vraiment. Il y aura donc des opportunités distinctes dans les deux marchés pour les investisseurs. Il y a différents marchés et des occasions diverses, et cela donne aux investisseurs les moyens d’être plus mondialisés. Il faudra aussi tenir compte des politiques.
ANTHONY OKOLIE [00:07:27] Christian, Merci du temps que vous nous avez accordé.
CHRISTIAN MEDEIROS [00:07:31] Merci, Anthony.