La lutte du gouvernement chinois contre les titans chinois de la technologie et leurs fondateurs milliardaires soulève des préoccupations à l’égard des titres chinois cotés en bourse aux États-Unis. Kim Parlee et Haining Zha, gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD, discutent des conséquences plus larges.
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- Je veux commencer par une mise en contexte. Le gouvernement chinois a sévi contre plusieurs géants du secteur technologique. Les organismes de réglementation ont annulé le premier appel public à l’épargne d’Ant. Ils ont ensuite imposé une amende de plusieurs milliards de dollars à Alibaba. Mais c’est DiDi qui a subi les mesures les plus directes et les plus extrêmes. Comment percevez-vous la situation? Oui. Juste pour vous situer, DiDi est essentiellement l’équivalent chinois d’Uber. L’entreprise détient environ 80 % des parts du marché des services de voiturage. Et les gens s’attendaient à ce que son premier appel public à l’épargne rapporte beaucoup.
Mais deux jours après l’annonce des sanctions, le cours de son action a déjà perdu 30 %. C’est un cas très intéressant et particulier parce que l’application DiDi a directement été retirée des boutiques d’applications, ce qui est très rare. C’est probablement la sanction réglementaire la plus sévère jamais vue. On peut pratiquement déduire de cette situation que DiDi n’a pas passé tous les tests des organismes de réglementation nationaux avant son premier appel public à l’épargne.
Et la chronologie de l’appel comporte des traces de cet état de fait. DiDi a déposé sa déclaration d’enregistrement auprès de la SEC le 10 juin. L’entreprise a ensuite commencé à vendre ses actions avant le 30 juin. Ça semble un peu précipité. Et, bien sûr, ça a généré de grandes inquiétudes sur la sécurité et la souveraineté des données.
- Donc, le problème est-il du côté de DiDi? Ou pensez-vous que les sociétés inscrites en Chine sont de plus en plus surveillées?
- Le problème est plus probablement du côté de DiDi. Parce que normalement, et c’est le cas notamment d’Alibaba et de Tencent, les entreprises font l’objet d’une enquête, mais elles peuvent tout de même poursuivre leurs activités normalement. Leurs applications sont encore dans les boutiques d’applications. Mais ce n’est de toute évidence pas le cas de DiDi.
- On voit de plus en plus d’intérêt et de mesures réglementaires, je dirais, pour toutes sortes d’entreprises en ce moment, pas seulement pour des entreprises technologiques. J’ai lu que cela va au-delà du secteur technologique en Chine. Comment percevez-vous la situation?
- Oui. Comme vous l’avez mentionné, les changements réglementaires ne se limitent pas au secteur technologique. Depuis le début de l’année, on voit des changements importants dans plusieurs secteurs. Ainsi, dans le secteur des services éducatifs primaires et secondaires, le gouvernement a mis en place de nouvelles mesures pour réduire le fardeau des étudiants et des familles qui travaillent.
Du côté des soins de santé, le gouvernement a lancé plusieurs vagues de centralisation de l’approvisionnement dans le but de diminuer les coûts des soins. Du côté de l’immobilier, le gouvernement a mis des limites claires aux promoteurs immobiliers pour contrôler leur marge de manœuvre et freiner l’augmentation des prix des logements.
Donc oui, je dirais que les changements sont généralisés.
- Pouvez-vous nous expliquer dans les grandes lignes pourquoi ces changements se produisent? Qu’est-ce que le gouvernement essaie de faire d’un point de vue démocratique ou dans une perspective gouvernementale pour aider les gens? Et, en même temps, quelles entreprises seront touchées par ces types de changement?
- Oui. Superficiellement, pour chaque secteur, l’objectif est légèrement différent. Dans le secteur technologique, on veut empêcher les monopoles et uniformiser les règles du jeu. Dans les secteurs des soins de santé et de l’éducation, on vise le bien-être de la famille moyenne.
Mais un thème général s’applique à toutes ces mesures : si elles peuvent avantager la majorité aux dépens d’un petit groupe ayant des intérêts acquis, le gouvernement les mettra en place pour tenter de restaurer un équilibre. La perspective du gouvernement, c’est que, sans mesures de contrôle, le seul objectif des entreprises sera de faire plus de profits, peu importe les conséquences sur la société.
Par exemple, dans le monde technologique, une entreprise technologique, pour faire croître davantage ses revenus, pourrait être tentée d’abuser de ses pouvoirs et d’adopter des comportements anticoncurrentiels. Dans le secteur des soins de santé, une entreprise pharmaceutique, dans le but de garder le prix des médicaments élevé, pourrait choisir d’augmenter ses dépenses de marketing au lieu d’abaisser le prix des médicaments.
Au final, les petites entreprises et les ménages se portent moins bien, ce qui va à l’encontre de la vision gouvernementale.
- Alors, permettez-moi de vous poser une question. Le gouvernement tantôt apporte des changements, tantôt met en place plus de mesures de surveillance dans l’intérêt général de ses citoyens, mais quelles sont les implications de ces changements et mesures pour les entreprises et les investisseurs? On a vu plusieurs entreprises chinoises connaître un recul important. Est-ce que c’est là une bonne occasion? Ou est-ce que les investisseurs vont devoir se préparer à accuser ces pertes?
- Oui. Donc, une poignée d’entreprises ont vu le rendement du cours de leurs actions dégringoler cette année. Par exemple, du côté des services de tutorat extrascolaire, deux entreprises, TAL Education et New Oriental Education, ont vu le cours de leurs actions baisser d’environ 70 % depuis le début de l’année. Bien sûr, cela a porté tout un coup à la confiance des investisseurs.
Toutefois, ce n’est pas surprenant, parce qu’à court terme, il y a toujours une forte corrélation entre la confiance des investisseurs et la fluctuation du cours des actions. Mais si on regarde certaines de ces entreprises, par exemple du côté technologique, ce sont des sociétés de grande qualité affichant de solides fondamentaux. Donc, je ne m’inquiéterais pas trop pour leurs perspectives à long terme.
- J’imagine qu’elles dépendent plutôt de la gestion active qui est effectuée. Il faut savoir de quelles entreprises on parle. Haining, il ne nous reste plus de temps. Merci beaucoup de vous être joint à nous.
- Tout le plaisir était pour moi. Merci.
[MUSIQUE]
Mais deux jours après l’annonce des sanctions, le cours de son action a déjà perdu 30 %. C’est un cas très intéressant et particulier parce que l’application DiDi a directement été retirée des boutiques d’applications, ce qui est très rare. C’est probablement la sanction réglementaire la plus sévère jamais vue. On peut pratiquement déduire de cette situation que DiDi n’a pas passé tous les tests des organismes de réglementation nationaux avant son premier appel public à l’épargne.
Et la chronologie de l’appel comporte des traces de cet état de fait. DiDi a déposé sa déclaration d’enregistrement auprès de la SEC le 10 juin. L’entreprise a ensuite commencé à vendre ses actions avant le 30 juin. Ça semble un peu précipité. Et, bien sûr, ça a généré de grandes inquiétudes sur la sécurité et la souveraineté des données.
- Donc, le problème est-il du côté de DiDi? Ou pensez-vous que les sociétés inscrites en Chine sont de plus en plus surveillées?
- Le problème est plus probablement du côté de DiDi. Parce que normalement, et c’est le cas notamment d’Alibaba et de Tencent, les entreprises font l’objet d’une enquête, mais elles peuvent tout de même poursuivre leurs activités normalement. Leurs applications sont encore dans les boutiques d’applications. Mais ce n’est de toute évidence pas le cas de DiDi.
- On voit de plus en plus d’intérêt et de mesures réglementaires, je dirais, pour toutes sortes d’entreprises en ce moment, pas seulement pour des entreprises technologiques. J’ai lu que cela va au-delà du secteur technologique en Chine. Comment percevez-vous la situation?
- Oui. Comme vous l’avez mentionné, les changements réglementaires ne se limitent pas au secteur technologique. Depuis le début de l’année, on voit des changements importants dans plusieurs secteurs. Ainsi, dans le secteur des services éducatifs primaires et secondaires, le gouvernement a mis en place de nouvelles mesures pour réduire le fardeau des étudiants et des familles qui travaillent.
Du côté des soins de santé, le gouvernement a lancé plusieurs vagues de centralisation de l’approvisionnement dans le but de diminuer les coûts des soins. Du côté de l’immobilier, le gouvernement a mis des limites claires aux promoteurs immobiliers pour contrôler leur marge de manœuvre et freiner l’augmentation des prix des logements.
Donc oui, je dirais que les changements sont généralisés.
- Pouvez-vous nous expliquer dans les grandes lignes pourquoi ces changements se produisent? Qu’est-ce que le gouvernement essaie de faire d’un point de vue démocratique ou dans une perspective gouvernementale pour aider les gens? Et, en même temps, quelles entreprises seront touchées par ces types de changement?
- Oui. Superficiellement, pour chaque secteur, l’objectif est légèrement différent. Dans le secteur technologique, on veut empêcher les monopoles et uniformiser les règles du jeu. Dans les secteurs des soins de santé et de l’éducation, on vise le bien-être de la famille moyenne.
Mais un thème général s’applique à toutes ces mesures : si elles peuvent avantager la majorité aux dépens d’un petit groupe ayant des intérêts acquis, le gouvernement les mettra en place pour tenter de restaurer un équilibre. La perspective du gouvernement, c’est que, sans mesures de contrôle, le seul objectif des entreprises sera de faire plus de profits, peu importe les conséquences sur la société.
Par exemple, dans le monde technologique, une entreprise technologique, pour faire croître davantage ses revenus, pourrait être tentée d’abuser de ses pouvoirs et d’adopter des comportements anticoncurrentiels. Dans le secteur des soins de santé, une entreprise pharmaceutique, dans le but de garder le prix des médicaments élevé, pourrait choisir d’augmenter ses dépenses de marketing au lieu d’abaisser le prix des médicaments.
Au final, les petites entreprises et les ménages se portent moins bien, ce qui va à l’encontre de la vision gouvernementale.
- Alors, permettez-moi de vous poser une question. Le gouvernement tantôt apporte des changements, tantôt met en place plus de mesures de surveillance dans l’intérêt général de ses citoyens, mais quelles sont les implications de ces changements et mesures pour les entreprises et les investisseurs? On a vu plusieurs entreprises chinoises connaître un recul important. Est-ce que c’est là une bonne occasion? Ou est-ce que les investisseurs vont devoir se préparer à accuser ces pertes?
- Oui. Donc, une poignée d’entreprises ont vu le rendement du cours de leurs actions dégringoler cette année. Par exemple, du côté des services de tutorat extrascolaire, deux entreprises, TAL Education et New Oriental Education, ont vu le cours de leurs actions baisser d’environ 70 % depuis le début de l’année. Bien sûr, cela a porté tout un coup à la confiance des investisseurs.
Toutefois, ce n’est pas surprenant, parce qu’à court terme, il y a toujours une forte corrélation entre la confiance des investisseurs et la fluctuation du cours des actions. Mais si on regarde certaines de ces entreprises, par exemple du côté technologique, ce sont des sociétés de grande qualité affichant de solides fondamentaux. Donc, je ne m’inquiéterais pas trop pour leurs perspectives à long terme.
- J’imagine qu’elles dépendent plutôt de la gestion active qui est effectuée. Il faut savoir de quelles entreprises on parle. Haining, il ne nous reste plus de temps. Merci beaucoup de vous être joint à nous.
- Tout le plaisir était pour moi. Merci.
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