Cette année, les marchés boursiers ont souffert des vagues de volatilité et d’incertitudes. Comment les investisseurs sauront-ils si l’on s’approche du creux? Greg Bonnell reçoit Christian Medeiros, gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD, pour discuter des signes que les investisseurs devraient surveiller.
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L’année a été difficile pour les marchés boursiers, mais quelques fortes hausses ont ponctué le recul général. Au milieu de ces reprises sur marchés baissiers, quels signes pourraient annoncer qu’on s’approche d’un creux? Notre invité d’aujourd’hui a sa propre liste de contrôle qu’il surveille de près. Pour en savoir plus, j’accueille Christian Meadows, gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD. Bienvenue à l’émission, Christian.
Merci.
Bien. Il y a quatre points qu’on va révéler un par un dans l’ordre de votre liste pour tenter de savoir quand on va sortir de cette mauvaise passe. Prenons-les un par un. Le premier point de la liste, c’est l’inflation.
L’inflation, oui. C’est l’une des mesures les plus importantes. Elle ne figurait pas dans la liste pour les marchés baissiers précédents, parce que ces vingt dernières années, l’inflation était faible et régulière. Ça ne préoccupait pas grand monde. Aujourd’hui bien sûr, l’inflation est assez forte et difficile à maîtriser.
La Fed est déterminée à réduire l’inflation, et la hausse des taux se dresse en obstacle majeur pour les marchés. Donc, tant que l’inflation n’est pas jugulée, on voit mal comment les marchés vont se redresser.
Alors, comment aborde-t-on l’inflation? Comment est-ce qu’on la mesure dans cette liste? On a repris une analogie qui nous semble très judicieuse de John Williams, de la Fed. L’inflation, c’est comme un oignon. À l’extérieur, on a les produits de base à l’échelle mondiale.
On a pris l’habitude de voir les prix grimper au cours de l’année passée. Le bois d’œuvre était cher. Le pétrole s’est envolé. Le prix de l’essence a causé d’immenses difficultés. Ce sont de nouveaux facteurs qui figurent dans notre liste, et on observe une normalisation.
La deuxième couche, c’est l’inflation des biens. On s’est habitués aux difficultés d’approvisionnement, au coût élevé des biens durables. Là aussi, on constate une amélioration.
Si on examine les données à évolution rapide, les chaînes d’approvisionnement mondiales repartent, les retards se résorbent, et les prix des biens commencent à diminuer. La dernière couche, c’est le marché de l’habitation. On voit qu’aux États-Unis, les loyers sont très élevés depuis douze mois, et ils continuent de grimper. Mais les indices qui reflètent plus rapidement les loyers montrent une baisse marginale. Et l’année prochaine, on s’attend à une normalisation.
Mais on arrive ensuite au cœur de l’oignon. C’est là que se situe le problème, au niveau de l’indicateur d’inflation globale. L’inflation des services de base est encore très, très élevée. La consommation est trop forte. On le voit dans les données sur les dépenses de consommation et les cartes de paiement. Les consommateurs dépensent toujours autant malgré des taux plus élevés. L’emploi se porte bien. Les salaires sont élevés.
La Fed a vraiment la maîtrise de l’inflation salariale dans son viseur. Il faudra qu’elle relève encore les taux par rapport aux taux actuels.
Par conséquent, dans notre liste de contrôle globale, l’inflation est en recul après un sommet, mais elle ne se situe pas encore à un niveau satisfaisant compte tenu de la vigueur de la consommation et des salaires.
Oui, les niveaux sont encore très élevés. J’ai vu qu’aujourd’hui au Canada, l’inflation se situait à 6,9 %, et à 10,1 % au Royaume-Uni. Bien, voilà pour l’inflation. C’est le premier point de la liste. Passons au deuxième : la croissance. Quel signe devez-vous voir?
Oui. La croissance, c’est une mesure essentielle dans toute liste de contrôle. En fin de compte, c’est le moteur des marchés à long terme. On suit de près les indicateurs qui évoluent rapidement, comme les sondages auprès des directeurs d’achats et l’activité des consommateurs. Du côté de la croissance, le signe que l’on espère, c’est une forte chute des indicateurs, suivie d’une inflexion.
Quand on verra cette inflexion des données qui évoluent rapidement, on aura davantage l’assurance que l’on atteint un creux. Jusqu’à maintenant, de nombreux indices des directeurs d’achats sont tombés d’un niveau très élevé à un niveau moyen, à peu près neutre. Mais dans un scénario de récession, dans un scénario où l’inflation serait maîtrisée, on a besoin que ces indicateurs de croissance tombent bien plus bas que le niveau neutre, disons dans une fourchette de 40 ou 30 pour l’indice PMI.
Il y a encore du chemin à faire, mais on est en bonne voie. On s’attend à ce que la croissance faiblisse au cours des prochains mois, jusqu’au milieu de 2023, puis on espère une inflexion des indicateurs de croissance.
Bien. L’inflation, la croissance – voilà pour les deux premiers points. Ensuite, l’attitude face au risque. Qu’observe-t-on dans ce domaine?
Oui. C’est un point très intéressant. D’après beaucoup de sondages auprès de gestionnaires de fonds et d’investisseurs individuels, l’aversion est à son paroxysme. Ce n’est pas surprenant, compte tenu de ce qui s’est passé sur les marchés cette année. Et si on regarde la volatilité, qui révèle bien les craintes des investisseurs, on observe aussi des niveaux élevés.
Mais dans le cadre de notre liste de contrôle, on attend vraiment de voir une explosion de la volatilité, des niveaux très élevés. Et pour le moment, ce n’est pas arrivé cette année. La volatilité a été forte, mais en fin de compte relativement maîtrisée. Les marchés ont lentement reculé tout au long de l’année.
On attend de voir des niveaux bien plus élevés d’aversion au risque chez les investisseurs et une crainte bien plus forte d’un effondrement ou d’un repli des marchés. Ça concorderait davantage avec un creux des marchés boursiers.
Bien. Trois sur quatre. Le dernier point de la liste, pour savoir si le pire est derrière nous, ce sont les bénéfices et les évaluations. C’est intéressant, puisqu’on est en plein dans la période d’annonce des bénéfices.
Tout à fait. C’est important parce qu’on veut connaître les paramètres fondamentaux des sociétés dans les marchés boursiers. Ça nous aide à déterminer si dans leurs prix, les investisseurs anticipent correctement le creux du marché. Cette année, le repli du marché boursier s’explique surtout par la baisse des évaluations. Elles sont tombées d’environ 25 % à environ 15 %. C’est donc une chute importante des évaluations des sociétés américaines. Selon nous, on voit le bout de cette baisse.
Mais le deuxième facteur, c’est celui des bénéfices et des révisions de bénéfices. Il s’agit des prévisions des analystes pour les bénéfices de l’ensemble des sociétés. En réalité, on ne voit pas vraiment de mouvement remarquable. Ce n’est que récemment que l’on a commencé à voir des révisions à la baisse. Et en ce moment, en l’état des choses, on n’observe qu’une baisse à un chiffre des bénéfices.
Selon nous, ça ne suffit pas à anticiper une récession. En cas de légère récession, on approcherait de 10 %. Et en cas de récession normale et plus profonde, la baisse peut frôler les 20 %. Malheureusement, on est encore loin de voir des révisions des bénéfices qui, selon notre liste, indiqueraient clairement que le marché a touché le fond.
Bien. Les investisseurs se posent toujours la même question quand ils voient ces remontées. Et votre collègue Michael Craig, qui était assis à votre place, a dit qu’en l’absence de grand revirement, il continuerait de parler de reprises sur marché baissier. L’inflation, la croissance, l’attitude face au risque, les bénéfices et les évaluations.
Une fois ces quatre cases cochées, est-ce qu’on attend patiemment le redressement? Ça reste toujours difficile d’anticiper un marché. Il y a bien sûr des critères qui permettent de dire que le pire est derrière nous. Mais une fois ces quatre critères réunis, est-ce qu’on peut se dire que c’est fini.
Oui. C’est exact. C’est très difficile d’affirmer que le marché a touché un creux. On ne sait pas si cette liste nous donnera le jour du creux et les prix exacts. Mais on recommencera à investir avec plus de confiance dans les actifs à risque quand ces critères sont réunis.
On a énuméré ces critères. On s’attend à ce que l’inflation soit maîtrisée, surtout l’inflation des services de base, pour que la Fed puisse lever le pied voire interrompre les hausses, ou changer de cap.
En ce qui concerne la croissance, on doit voir un creux puis une inflexion. Il faut que les investisseurs soient beaucoup plus réfractaires au risque et on doit voir plus de crainte sur les marchés boursiers.
Enfin, on espère que les analystes poursuivront les révisions à la baisse pour refléter l’évolution du contexte économique que montrent les indicateurs de croissance. Il reste encore du chemin à parcourir.
C’est plus une question d’orientation. On n’a pas besoin de prédire le jour exact du creux, mais on a besoin de voir une inflexion des indicateurs. Et c’est conforme aux cycles économiques et aux replis passés.
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L’année a été difficile pour les marchés boursiers, mais quelques fortes hausses ont ponctué le recul général. Au milieu de ces reprises sur marchés baissiers, quels signes pourraient annoncer qu’on s’approche d’un creux? Notre invité d’aujourd’hui a sa propre liste de contrôle qu’il surveille de près. Pour en savoir plus, j’accueille Christian Meadows, gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD. Bienvenue à l’émission, Christian.
Merci.
Bien. Il y a quatre points qu’on va révéler un par un dans l’ordre de votre liste pour tenter de savoir quand on va sortir de cette mauvaise passe. Prenons-les un par un. Le premier point de la liste, c’est l’inflation.
L’inflation, oui. C’est l’une des mesures les plus importantes. Elle ne figurait pas dans la liste pour les marchés baissiers précédents, parce que ces vingt dernières années, l’inflation était faible et régulière. Ça ne préoccupait pas grand monde. Aujourd’hui bien sûr, l’inflation est assez forte et difficile à maîtriser.
La Fed est déterminée à réduire l’inflation, et la hausse des taux se dresse en obstacle majeur pour les marchés. Donc, tant que l’inflation n’est pas jugulée, on voit mal comment les marchés vont se redresser.
Alors, comment aborde-t-on l’inflation? Comment est-ce qu’on la mesure dans cette liste? On a repris une analogie qui nous semble très judicieuse de John Williams, de la Fed. L’inflation, c’est comme un oignon. À l’extérieur, on a les produits de base à l’échelle mondiale.
On a pris l’habitude de voir les prix grimper au cours de l’année passée. Le bois d’œuvre était cher. Le pétrole s’est envolé. Le prix de l’essence a causé d’immenses difficultés. Ce sont de nouveaux facteurs qui figurent dans notre liste, et on observe une normalisation.
La deuxième couche, c’est l’inflation des biens. On s’est habitués aux difficultés d’approvisionnement, au coût élevé des biens durables. Là aussi, on constate une amélioration.
Si on examine les données à évolution rapide, les chaînes d’approvisionnement mondiales repartent, les retards se résorbent, et les prix des biens commencent à diminuer. La dernière couche, c’est le marché de l’habitation. On voit qu’aux États-Unis, les loyers sont très élevés depuis douze mois, et ils continuent de grimper. Mais les indices qui reflètent plus rapidement les loyers montrent une baisse marginale. Et l’année prochaine, on s’attend à une normalisation.
Mais on arrive ensuite au cœur de l’oignon. C’est là que se situe le problème, au niveau de l’indicateur d’inflation globale. L’inflation des services de base est encore très, très élevée. La consommation est trop forte. On le voit dans les données sur les dépenses de consommation et les cartes de paiement. Les consommateurs dépensent toujours autant malgré des taux plus élevés. L’emploi se porte bien. Les salaires sont élevés.
La Fed a vraiment la maîtrise de l’inflation salariale dans son viseur. Il faudra qu’elle relève encore les taux par rapport aux taux actuels.
Par conséquent, dans notre liste de contrôle globale, l’inflation est en recul après un sommet, mais elle ne se situe pas encore à un niveau satisfaisant compte tenu de la vigueur de la consommation et des salaires.
Oui, les niveaux sont encore très élevés. J’ai vu qu’aujourd’hui au Canada, l’inflation se situait à 6,9 %, et à 10,1 % au Royaume-Uni. Bien, voilà pour l’inflation. C’est le premier point de la liste. Passons au deuxième : la croissance. Quel signe devez-vous voir?
Oui. La croissance, c’est une mesure essentielle dans toute liste de contrôle. En fin de compte, c’est le moteur des marchés à long terme. On suit de près les indicateurs qui évoluent rapidement, comme les sondages auprès des directeurs d’achats et l’activité des consommateurs. Du côté de la croissance, le signe que l’on espère, c’est une forte chute des indicateurs, suivie d’une inflexion.
Quand on verra cette inflexion des données qui évoluent rapidement, on aura davantage l’assurance que l’on atteint un creux. Jusqu’à maintenant, de nombreux indices des directeurs d’achats sont tombés d’un niveau très élevé à un niveau moyen, à peu près neutre. Mais dans un scénario de récession, dans un scénario où l’inflation serait maîtrisée, on a besoin que ces indicateurs de croissance tombent bien plus bas que le niveau neutre, disons dans une fourchette de 40 ou 30 pour l’indice PMI.
Il y a encore du chemin à faire, mais on est en bonne voie. On s’attend à ce que la croissance faiblisse au cours des prochains mois, jusqu’au milieu de 2023, puis on espère une inflexion des indicateurs de croissance.
Bien. L’inflation, la croissance – voilà pour les deux premiers points. Ensuite, l’attitude face au risque. Qu’observe-t-on dans ce domaine?
Oui. C’est un point très intéressant. D’après beaucoup de sondages auprès de gestionnaires de fonds et d’investisseurs individuels, l’aversion est à son paroxysme. Ce n’est pas surprenant, compte tenu de ce qui s’est passé sur les marchés cette année. Et si on regarde la volatilité, qui révèle bien les craintes des investisseurs, on observe aussi des niveaux élevés.
Mais dans le cadre de notre liste de contrôle, on attend vraiment de voir une explosion de la volatilité, des niveaux très élevés. Et pour le moment, ce n’est pas arrivé cette année. La volatilité a été forte, mais en fin de compte relativement maîtrisée. Les marchés ont lentement reculé tout au long de l’année.
On attend de voir des niveaux bien plus élevés d’aversion au risque chez les investisseurs et une crainte bien plus forte d’un effondrement ou d’un repli des marchés. Ça concorderait davantage avec un creux des marchés boursiers.
Bien. Trois sur quatre. Le dernier point de la liste, pour savoir si le pire est derrière nous, ce sont les bénéfices et les évaluations. C’est intéressant, puisqu’on est en plein dans la période d’annonce des bénéfices.
Tout à fait. C’est important parce qu’on veut connaître les paramètres fondamentaux des sociétés dans les marchés boursiers. Ça nous aide à déterminer si dans leurs prix, les investisseurs anticipent correctement le creux du marché. Cette année, le repli du marché boursier s’explique surtout par la baisse des évaluations. Elles sont tombées d’environ 25 % à environ 15 %. C’est donc une chute importante des évaluations des sociétés américaines. Selon nous, on voit le bout de cette baisse.
Mais le deuxième facteur, c’est celui des bénéfices et des révisions de bénéfices. Il s’agit des prévisions des analystes pour les bénéfices de l’ensemble des sociétés. En réalité, on ne voit pas vraiment de mouvement remarquable. Ce n’est que récemment que l’on a commencé à voir des révisions à la baisse. Et en ce moment, en l’état des choses, on n’observe qu’une baisse à un chiffre des bénéfices.
Selon nous, ça ne suffit pas à anticiper une récession. En cas de légère récession, on approcherait de 10 %. Et en cas de récession normale et plus profonde, la baisse peut frôler les 20 %. Malheureusement, on est encore loin de voir des révisions des bénéfices qui, selon notre liste, indiqueraient clairement que le marché a touché le fond.
Bien. Les investisseurs se posent toujours la même question quand ils voient ces remontées. Et votre collègue Michael Craig, qui était assis à votre place, a dit qu’en l’absence de grand revirement, il continuerait de parler de reprises sur marché baissier. L’inflation, la croissance, l’attitude face au risque, les bénéfices et les évaluations.
Une fois ces quatre cases cochées, est-ce qu’on attend patiemment le redressement? Ça reste toujours difficile d’anticiper un marché. Il y a bien sûr des critères qui permettent de dire que le pire est derrière nous. Mais une fois ces quatre critères réunis, est-ce qu’on peut se dire que c’est fini.
Oui. C’est exact. C’est très difficile d’affirmer que le marché a touché un creux. On ne sait pas si cette liste nous donnera le jour du creux et les prix exacts. Mais on recommencera à investir avec plus de confiance dans les actifs à risque quand ces critères sont réunis.
On a énuméré ces critères. On s’attend à ce que l’inflation soit maîtrisée, surtout l’inflation des services de base, pour que la Fed puisse lever le pied voire interrompre les hausses, ou changer de cap.
En ce qui concerne la croissance, on doit voir un creux puis une inflexion. Il faut que les investisseurs soient beaucoup plus réfractaires au risque et on doit voir plus de crainte sur les marchés boursiers.
Enfin, on espère que les analystes poursuivront les révisions à la baisse pour refléter l’évolution du contexte économique que montrent les indicateurs de croissance. Il reste encore du chemin à parcourir.
C’est plus une question d’orientation. On n’a pas besoin de prédire le jour exact du creux, mais on a besoin de voir une inflexion des indicateurs. Et c’est conforme aux cycles économiques et aux replis passés.
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