Greg Bonnell de MoneyTalk s’entretient avec Jim Stillwagon, gestionnaire de portefeuille chez T. Rowe Price, pour en savoir plus sur les perspectives dans le secteur des médias et sur l’impact de l’intelligence artificielle sur le secteur de l’Internet grand public.
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Les grandes sources de profit des médias traditionnels, à savoir les abonnements et la publicité, subissent de fortes pressions depuis plusieurs années. On comptait 100 millions de foyers abonnés à des chaînes payantes aux États-Unis en 2012. Ils ne sont plus qu’environ 70 millions, et rien ne semble enrayer cette chute libre. Netflix a prospéré quand les consommateurs se sont détournés de l’ancien modèle de télévision payante au profit des services de diffusion en continu.
Mais si on revient sur les dernières années de pandémie jusqu’à la réouverture, on peut faire deux constats contre-intuitifs. D’abord, avec le recul, les confinements ont desservi Netflix. Deuxièmement, la fin de l’ère des capitaux faciles s’est avérée très positive. Prenons ces deux points l’un après l’autre. D’abord, Netflix a effectivement bénéficié d’une hausse du nombre d’abonnés pendant les confinements, mais la COVID a aussi déclenché une vague de concurrence chez les médias traditionnels.
Les cinémas étaient fermés. Les parcs d’attractions aussi. Tous les studios, presque à l’unisson, ont décidé de miser sur la diffusion en continu. Disney, Warner, Universal, Paramount – tous ont retiré leurs contenus sous licence de Netflix pour lancer leurs propres services de diffusion à des prix en dessous du seuil de rentabilité. Puis ils ont commercialisé ces services si agressivement que les coûts d’acquisition d’abonnés ont gonflé dans tout le secteur.
Dans le même temps, le pic de demande dû à la COVID a en réalité masqué des problèmes naissants au sein même de Netflix et de ses activités. Du propre aveu de Netflix, il aurait fallu freiner plus tôt le partage de mots de passe, bien avant d’arriver à 100 millions d’utilisateurs qui regardent sans payer. Netflix n’a donc pas profité de la pandémie. Deuxièmement, comment expliquer que Netflix ait profité de la hausse des taux d’intérêt?
C’est un peu paradoxal, sachant que Netflix a brûlé des liquidités et profité des marchés à haut rendement pendant une bonne partie de la dernière décennie. Mais Netflix a su se développer pour devenir le seul service à proposer exclusivement de la diffusion continue à 250 millions d’abonnés à l’échelle mondiale. En comparaison, les médias traditionnels tentent toujours de comprendre comment étendre leur service de diffusion en étant rentables.
Disney+, Hulu, Paramount+, Max – Tous ont collectivement perdu 25 milliards de dollars ces 3 dernières années. Cette situation ne peut pas durer, surtout dans un contexte de hausse des taux et de baisse du nombre d’abonnés aux chaînes payantes. Les concurrents de Netflix ont donc battu en retraite. Après la guerre des services de diffusion, on entre plutôt dans une période de détente.
Prenons l’exemple de Warner, qui vient de réaccorder des licences à Netflix pour des contenus de premier plan. DC Comics, Dune et Frères d’armes sont maintenant sur Netflix. Warner doit effacer ses problèmes de surendettement de son bilan. Netflix a sorti son carnet de chèques.
Dans l’ensemble, l’écosystème médiatique est en pleine mutation. Mais selon nous, Netflix est bien placée pour tirer parti de cette phase de rationalisation concurrentielle dans le secteur de la diffusion en continu.
Qu’en est-il du segment de l’Internet grand public? Si je peux regarder tous ces films dans mon salon, sur ma grande télé, c’est parce que je consomme des services Internet. À cela s’ajoute l’intelligence artificielle. Que se passe-t-il de ce côté?
Je dirais qu’on a assisté à des évolutions majeures dans les architectures informatiques au cours des quatre dernières décennies : les ordinateurs centraux, les PC, les mobiles et l’infonuagique. Il est encore tôt, mais l’IA pourrait entraîner un autre changement de paradigme, et elle s’annonce incroyablement gourmande en ressources informatiques.
Notre priorité absolue est donc de nous concentrer sur les équipements. Ceci dit, on ne sait pas quelle application grand public sera à terme la grande gagnante de l’ère de l’IA. On ne sait même pas si le modèle Gemini de Google surpassera GPT-4 quand il sortira début 2024. En revanche, on sait que tous les acteurs en lice à ce stade vont utiliser beaucoup de processeurs graphiques haut de gamme et d’équipement de réseau.
Cette dynamique a profité à des sociétés comme Nvidia et AMD. Mais il faut commencer à se demander qui achète toutes ces puces haut de gamme. Et comment vont-ils parvenir à tirer un bon rendement? À un moment donné, l’enthousiasme qui entoure l’IA va devoir céder la place à une monétisation concrète. Heureusement, dans le segment de l’Internet grand public à grande capitalisation, on constate que cette monétisation s’opère sous nos yeux.
J’ai deux exemples à vous donner. D’abord, l’IA accroît l’engagement sur l’ensemble des médias sociaux, notamment sur les services de vidéos courtes comme TikTok, ou les « Reels » d’Instagram. Tous s’appuient tous sur des algorithmes de recommandation fondés sur l’IA. Traditionnellement, les fils des médias sociaux proviennent d’un contenu restreint, qui se limite aux publications de vos amis et des membres de votre famille.
Imaginez le pas à franchir en termes de complexité pour recommander du contenu dans un univers de vidéos courtes ultra-rapide où il faut choisir parmi des milliards de publications issues de l’économie de création de contenu mondiale. Or, on sait que les vidéos courtes sont beaucoup plus attrayantes que les flux de médias sociaux classiques en vase clos. L’utilisateur moyen de TikTok passe plus de 90 minutes par jour dans l’application.
Instagram a vu l’engagement total monter de 40 % depuis 2020, quand la société a lancé son clone de TikTok, Instagram Reels. En fin de compte, plus de consommation équivaut à un surcroît d’engagement monétisable pour les médias sociaux. Le deuxième exemple, c’est la façon dont l’IA est en train de remodeler la technologie publicitaire sur l’Internet grand public. L’ancienne approche de pistage des utilisateurs individuels d’après les données du navigateur ou de l’appareil...
On vous suit partout où vous allez sur Internet.
Tout à fait. Cette approche périclite en partie à cause des nouvelles normes de confidentialité. À la place, les plateformes les plus performantes mettent en œuvre une approche de ciblage et d’attribution probabiliste, basée sur des cohortes. Elles utilisent l’IA pour lancer de grandes campagnes en respectant la vie privée.
Google offre les campagnes Performance Max. Meta propose Advantage+. Elles intègrent de plus en plus profondément l’IA à leurs technologies publicitaires. Au final, le but est d’éliminer la complexité pour les petits et moyens annonceurs qui veulent se lancer dans le marketing à la performance.
Dans l’idéal, les annonceurs qui choisissent ces grandes plateformes arrivent déjà avec une base créative, avec des seuils de rendement cibles, et ils remettent les clés à Google ou Meta pour l’exécution de leur campagne. Imaginez à quel point l’IA pourrait faciliter la création publicitaire.
On peut tout à fait se trouver dans une situation où des novices en marketing lancent de grandes campagnes vidéo à partir de zéro. Si l’expérimentation devient accessible, on fait monter les enchères publicitaires. C’est d’ailleurs l’une des grandes leçons de la dernière décennie pour Meta, qui est d’un million d’annonceurs actifs à plus de 11 millions aujourd’hui. Les petites plateformes de médias sociaux, comme Snapchat, Pinterest comptent moins d’un million d’annonceurs. Un grand réseau de diffusion peut avoir quelques centaines de grands annonceurs. Selon nous, l’IA pourrait débloquer la densité des enchères publicitaires, alors que Google et Meta aident les annonceurs à commercialiser leurs produits et leurs services en ligne.
Si Google a créé un bouleversement il y a tant d’années, c’est parce que les gens ont soudain découvert qu’ils préféraient ce moteur de recherche à tous les autres. Ils ont trouvé une formule, et les gens parlent maintenant de recherche Google pour désigner les recherches sur Internet. Quel sera l’impact de l’IA sur la recherche Google?
C’est une excellente question. Pour moi, l’IA va faire évoluer la recherche dans le sens d’un assistant personnel plus conversationnel, et bien plus créatif qu’un champ de texte et dix liens bleus. Mais actuellement, la grande question est de savoir si l’IA va perturber ou renforcer la position dominante de Google dans le domaine de la recherche.
Je crois qu’il est juste de dire que Google a été pris au dépourvu l’an dernier face à la rapidité à laquelle le grand public a adopté ChatGPT. L’application a battu un record, avec 100 millions d’utilisateurs en deux mois. Puis Microsoft, le partenaire et le plus grand investisseur externe d’OpenAI, a parlé de la façon dont l’IA pourrait faire vaciller la recherche Google.
Et soudain, on s’est posé des questions sur la durabilité de l’avance de Google dans le domaine de la recherche. Google allait-il céder du terrain au partenariat entre OpenAI et Bing? Google pourrait-il compenser le coût des requêtes par grands modèles de langage? Ces doutes planaient sur l’entreprise pionnière à l’origine de tant d’avancées majeures dans le domaine de l’IA ces dix dernières années.
Dans « ChatGPT », le T signifie « Transformer », l’architecture de réseau neuronal que Google a inventée en 2017. Après ce creux de pessimisme lié aux effets de l’IA sur Google début 2023, le moteur a remarquablement bien maintenu sa position et contrôle toujours environ 93 % des recherches à l’échelle mondiale. Bing ne décolle pas des 3 %. Les consommateurs n’ont pas vraiment changé leurs habitudes de recherche.
Les investisseurs qui sont restés fidèles à Google ont donc été récompensés. Mais ce n’est pas le moment de se reposer sur ses lauriers. Il faut surveiller de près le risque de prolifération des robots conversationnels. Et si vous aviez un outil de recherche qui intègre l’IA sur presque tous les supports numériques, tant chez les consommateurs qu’en entreprise?
Regardez ce que fait Microsoft en intégrant Copilot dans la suite Office. Que signifie l’IA sur le plan de la monétisation des risques liés à la recherche? N’oublions pas que Google a passé les 20 dernières années à optimiser chaque pixel de sa page de résultats de recherche. Si l’interface évoluait en interface de type robot conversationnel, les revenus publicitaires de Google pourraient s’en trouver perturbés.
On tente donc d’avoir une vision équilibrée pour la recherche Google. L’IA engendre clairement des risques à surveiller. Mais il existe un potentiel de rajustement à la hausse si Google parvient à s’écarter du statut de retardataire présumé à celui de vainqueur de l’IA en 2024 et au-delà. [LOGO SONORE] [MUSIQUE]
Les grandes sources de profit des médias traditionnels, à savoir les abonnements et la publicité, subissent de fortes pressions depuis plusieurs années. On comptait 100 millions de foyers abonnés à des chaînes payantes aux États-Unis en 2012. Ils ne sont plus qu’environ 70 millions, et rien ne semble enrayer cette chute libre. Netflix a prospéré quand les consommateurs se sont détournés de l’ancien modèle de télévision payante au profit des services de diffusion en continu.
Mais si on revient sur les dernières années de pandémie jusqu’à la réouverture, on peut faire deux constats contre-intuitifs. D’abord, avec le recul, les confinements ont desservi Netflix. Deuxièmement, la fin de l’ère des capitaux faciles s’est avérée très positive. Prenons ces deux points l’un après l’autre. D’abord, Netflix a effectivement bénéficié d’une hausse du nombre d’abonnés pendant les confinements, mais la COVID a aussi déclenché une vague de concurrence chez les médias traditionnels.
Les cinémas étaient fermés. Les parcs d’attractions aussi. Tous les studios, presque à l’unisson, ont décidé de miser sur la diffusion en continu. Disney, Warner, Universal, Paramount – tous ont retiré leurs contenus sous licence de Netflix pour lancer leurs propres services de diffusion à des prix en dessous du seuil de rentabilité. Puis ils ont commercialisé ces services si agressivement que les coûts d’acquisition d’abonnés ont gonflé dans tout le secteur.
Dans le même temps, le pic de demande dû à la COVID a en réalité masqué des problèmes naissants au sein même de Netflix et de ses activités. Du propre aveu de Netflix, il aurait fallu freiner plus tôt le partage de mots de passe, bien avant d’arriver à 100 millions d’utilisateurs qui regardent sans payer. Netflix n’a donc pas profité de la pandémie. Deuxièmement, comment expliquer que Netflix ait profité de la hausse des taux d’intérêt?
C’est un peu paradoxal, sachant que Netflix a brûlé des liquidités et profité des marchés à haut rendement pendant une bonne partie de la dernière décennie. Mais Netflix a su se développer pour devenir le seul service à proposer exclusivement de la diffusion continue à 250 millions d’abonnés à l’échelle mondiale. En comparaison, les médias traditionnels tentent toujours de comprendre comment étendre leur service de diffusion en étant rentables.
Disney+, Hulu, Paramount+, Max – Tous ont collectivement perdu 25 milliards de dollars ces 3 dernières années. Cette situation ne peut pas durer, surtout dans un contexte de hausse des taux et de baisse du nombre d’abonnés aux chaînes payantes. Les concurrents de Netflix ont donc battu en retraite. Après la guerre des services de diffusion, on entre plutôt dans une période de détente.
Prenons l’exemple de Warner, qui vient de réaccorder des licences à Netflix pour des contenus de premier plan. DC Comics, Dune et Frères d’armes sont maintenant sur Netflix. Warner doit effacer ses problèmes de surendettement de son bilan. Netflix a sorti son carnet de chèques.
Dans l’ensemble, l’écosystème médiatique est en pleine mutation. Mais selon nous, Netflix est bien placée pour tirer parti de cette phase de rationalisation concurrentielle dans le secteur de la diffusion en continu.
Qu’en est-il du segment de l’Internet grand public? Si je peux regarder tous ces films dans mon salon, sur ma grande télé, c’est parce que je consomme des services Internet. À cela s’ajoute l’intelligence artificielle. Que se passe-t-il de ce côté?
Je dirais qu’on a assisté à des évolutions majeures dans les architectures informatiques au cours des quatre dernières décennies : les ordinateurs centraux, les PC, les mobiles et l’infonuagique. Il est encore tôt, mais l’IA pourrait entraîner un autre changement de paradigme, et elle s’annonce incroyablement gourmande en ressources informatiques.
Notre priorité absolue est donc de nous concentrer sur les équipements. Ceci dit, on ne sait pas quelle application grand public sera à terme la grande gagnante de l’ère de l’IA. On ne sait même pas si le modèle Gemini de Google surpassera GPT-4 quand il sortira début 2024. En revanche, on sait que tous les acteurs en lice à ce stade vont utiliser beaucoup de processeurs graphiques haut de gamme et d’équipement de réseau.
Cette dynamique a profité à des sociétés comme Nvidia et AMD. Mais il faut commencer à se demander qui achète toutes ces puces haut de gamme. Et comment vont-ils parvenir à tirer un bon rendement? À un moment donné, l’enthousiasme qui entoure l’IA va devoir céder la place à une monétisation concrète. Heureusement, dans le segment de l’Internet grand public à grande capitalisation, on constate que cette monétisation s’opère sous nos yeux.
J’ai deux exemples à vous donner. D’abord, l’IA accroît l’engagement sur l’ensemble des médias sociaux, notamment sur les services de vidéos courtes comme TikTok, ou les « Reels » d’Instagram. Tous s’appuient tous sur des algorithmes de recommandation fondés sur l’IA. Traditionnellement, les fils des médias sociaux proviennent d’un contenu restreint, qui se limite aux publications de vos amis et des membres de votre famille.
Imaginez le pas à franchir en termes de complexité pour recommander du contenu dans un univers de vidéos courtes ultra-rapide où il faut choisir parmi des milliards de publications issues de l’économie de création de contenu mondiale. Or, on sait que les vidéos courtes sont beaucoup plus attrayantes que les flux de médias sociaux classiques en vase clos. L’utilisateur moyen de TikTok passe plus de 90 minutes par jour dans l’application.
Instagram a vu l’engagement total monter de 40 % depuis 2020, quand la société a lancé son clone de TikTok, Instagram Reels. En fin de compte, plus de consommation équivaut à un surcroît d’engagement monétisable pour les médias sociaux. Le deuxième exemple, c’est la façon dont l’IA est en train de remodeler la technologie publicitaire sur l’Internet grand public. L’ancienne approche de pistage des utilisateurs individuels d’après les données du navigateur ou de l’appareil...
On vous suit partout où vous allez sur Internet.
Tout à fait. Cette approche périclite en partie à cause des nouvelles normes de confidentialité. À la place, les plateformes les plus performantes mettent en œuvre une approche de ciblage et d’attribution probabiliste, basée sur des cohortes. Elles utilisent l’IA pour lancer de grandes campagnes en respectant la vie privée.
Google offre les campagnes Performance Max. Meta propose Advantage+. Elles intègrent de plus en plus profondément l’IA à leurs technologies publicitaires. Au final, le but est d’éliminer la complexité pour les petits et moyens annonceurs qui veulent se lancer dans le marketing à la performance.
Dans l’idéal, les annonceurs qui choisissent ces grandes plateformes arrivent déjà avec une base créative, avec des seuils de rendement cibles, et ils remettent les clés à Google ou Meta pour l’exécution de leur campagne. Imaginez à quel point l’IA pourrait faciliter la création publicitaire.
On peut tout à fait se trouver dans une situation où des novices en marketing lancent de grandes campagnes vidéo à partir de zéro. Si l’expérimentation devient accessible, on fait monter les enchères publicitaires. C’est d’ailleurs l’une des grandes leçons de la dernière décennie pour Meta, qui est d’un million d’annonceurs actifs à plus de 11 millions aujourd’hui. Les petites plateformes de médias sociaux, comme Snapchat, Pinterest comptent moins d’un million d’annonceurs. Un grand réseau de diffusion peut avoir quelques centaines de grands annonceurs. Selon nous, l’IA pourrait débloquer la densité des enchères publicitaires, alors que Google et Meta aident les annonceurs à commercialiser leurs produits et leurs services en ligne.
Si Google a créé un bouleversement il y a tant d’années, c’est parce que les gens ont soudain découvert qu’ils préféraient ce moteur de recherche à tous les autres. Ils ont trouvé une formule, et les gens parlent maintenant de recherche Google pour désigner les recherches sur Internet. Quel sera l’impact de l’IA sur la recherche Google?
C’est une excellente question. Pour moi, l’IA va faire évoluer la recherche dans le sens d’un assistant personnel plus conversationnel, et bien plus créatif qu’un champ de texte et dix liens bleus. Mais actuellement, la grande question est de savoir si l’IA va perturber ou renforcer la position dominante de Google dans le domaine de la recherche.
Je crois qu’il est juste de dire que Google a été pris au dépourvu l’an dernier face à la rapidité à laquelle le grand public a adopté ChatGPT. L’application a battu un record, avec 100 millions d’utilisateurs en deux mois. Puis Microsoft, le partenaire et le plus grand investisseur externe d’OpenAI, a parlé de la façon dont l’IA pourrait faire vaciller la recherche Google.
Et soudain, on s’est posé des questions sur la durabilité de l’avance de Google dans le domaine de la recherche. Google allait-il céder du terrain au partenariat entre OpenAI et Bing? Google pourrait-il compenser le coût des requêtes par grands modèles de langage? Ces doutes planaient sur l’entreprise pionnière à l’origine de tant d’avancées majeures dans le domaine de l’IA ces dix dernières années.
Dans « ChatGPT », le T signifie « Transformer », l’architecture de réseau neuronal que Google a inventée en 2017. Après ce creux de pessimisme lié aux effets de l’IA sur Google début 2023, le moteur a remarquablement bien maintenu sa position et contrôle toujours environ 93 % des recherches à l’échelle mondiale. Bing ne décolle pas des 3 %. Les consommateurs n’ont pas vraiment changé leurs habitudes de recherche.
Les investisseurs qui sont restés fidèles à Google ont donc été récompensés. Mais ce n’est pas le moment de se reposer sur ses lauriers. Il faut surveiller de près le risque de prolifération des robots conversationnels. Et si vous aviez un outil de recherche qui intègre l’IA sur presque tous les supports numériques, tant chez les consommateurs qu’en entreprise?
Regardez ce que fait Microsoft en intégrant Copilot dans la suite Office. Que signifie l’IA sur le plan de la monétisation des risques liés à la recherche? N’oublions pas que Google a passé les 20 dernières années à optimiser chaque pixel de sa page de résultats de recherche. Si l’interface évoluait en interface de type robot conversationnel, les revenus publicitaires de Google pourraient s’en trouver perturbés.
On tente donc d’avoir une vision équilibrée pour la recherche Google. L’IA engendre clairement des risques à surveiller. Mais il existe un potentiel de rajustement à la hausse si Google parvient à s’écarter du statut de retardataire présumé à celui de vainqueur de l’IA en 2024 et au-delà. [LOGO SONORE] [MUSIQUE]