Les marchés boursiers se sont fortement redressés au premier trimestre. Mais cet élan peut-il se poursuivre au cours des prochains mois? David Sykes, chef des placements à Gestion de Placements TD, discute avec Kim Parlee des conséquences à court terme et à long terme pour différentes catégories d’actif.
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Les marchés entament officiellement le deuxième trimestre. Au cours des trois premiers mois de l’année, l’indice S&P 500 a affiché le meilleur rendement du premier trimestre en cinq ans. Même la Bourse de Toronto a atteint un nouveau sommet à la fin du trimestre. À quoi peut-on s’attendre pour les trois prochains mois? J’accueille un spécialiste, David Sykes, chef des placements à Gestion de Placements TD. Ravie de vous recevoir.
Bonjour, Kim. Merci de m’avoir invité.
Commençons par revenir sur le premier trimestre, qui a été riche en événements. Les gens suivent de près les taux d’intérêt, l’IA, les Sept magnifiques, etc. Qu’avez-vous observé au premier trimestre?
Du point de vue des marchés boursiers, comme vous l’avez dit en introduction, l’année a démarré sur les chapeaux de roues. Je ne m’attends pas vraiment à ce que ça dure. Depuis le début de l’année, le S&P 500 a progressé d’environ 10,5 à 11 %, et le marché canadien est en hausse de 6 à 6,5 %. C’est une solide progression.
Si on annualise ces chiffres, même si je n’ai pas envie de le faire, parce que je ne veux pas m’emballer, ce qui a eu le plus d’impact pour les marchés au premier trimestre, ce sont les taux d’intérêt. En début d’année, du point de vue du marché, la Fed allait probablement procéder à sept baisses de taux en 2024.
Aujourd’hui, au vu des nouvelles données, qu’il s’agisse du PIB, de l’emploi ou de l’inflation, on sait qu’il n’y en aura pas sept. Le marché table maintenant sur deux ou trois baisses en 2024. À mon avis, on assiste à un bras de fer entre une croissance plus forte et son impact sur les marchés des taux.
C’est étonnant, parce qu’il y a six mois, tout le monde – je ne parle pas de vous, mais plutôt des services de détail, étaient obnubilés par les taux. Que se passe-t-il avec les taux? Beaucoup de membres de votre équipe ont fait remarquer, à juste titre, qu’il fallait aussi surveiller les bénéfices. Qu’indiquent les bénéfices? Qu’anticipez-vous pour le deuxième trimestre? Oui. Les marchés des capitaux ont raison d’être obnubilés par les taux, parce qu’en fin de compte, ils conditionnent le prix de l’argent. C’est le prix le plus important sur les marchés des capitaux et dans le monde. Mais à mon sens, l’erreur de compréhension fondamentale, c’est que les entreprises peuvent survivre malgré des taux plus élevés. Les entreprises peuvent tout de même prospérer.
Du point de vue des bénéfices, c’est vraiment un facteur clé pour le marché boursier. Au dernier trimestre, les bénéfices étaient plus élevés que prévu. On doit en partie ces résultats à l’IA, mais aussi en grande partie à la croissance économique et à la consommation qui restent fortes aux États-Unis. Les dépenses de consommation ont bien résisté.
Du côté des dépenses publiques, les États-Unis ont voté la loi CHIPS, la loi sur les infrastructures et la loi sur la réduction de l’inflation. Elles datent d’il y a un peu plus d’un an, mais l’impact sur les dépenses commence tout juste à se faire sentir.
En plus, il y a eu beaucoup de dépenses en immobilisations liées à l’IA, aux unités de traitement graphique, à l’ensemble de l’infrastructure. Tout compte fait, les chiffres sont très solides et l’économie a surpassé les attentes. Le contexte n’est pas idéal pour une baisse de taux mais très favorable à l’activité économique et aux revenus des entreprises. Les bénéfices ont vraiment été au rendez-vous, ce qui a permis au marché boursier d’atteindre de nouveaux sommets.
Qu’en est-il des perspectives à plus long terme? C’est intéressant, car les marchés se sont fortement redressés. Bien sûr, il ne faut pas présumer de la tournure que prendront les événements. Les marchés ne montent pas indéfiniment. Mais si on réfléchit à ce qui nous attend, disons d’ici 6 à 12 mois, vous dites que la Fed va sans doute baisser les taux mais moins qu’on le pensait. Et la Banque du Canada? Que voyez-vous de ce côté? Oui. Les données sont intéressantes du côté canadien. Le PIB a fléchi. Au quatrième trimestre, il se situait aux alentours de 1 %. On vient de recevoir les données pour janvier et février, et les résultats semblent meilleurs que prévu. L’inflation a également été plus faible que prévu deux fois de suite au Canada.
Selon nous, la Banque du Canada procédera à deux ou trois réductions cette année. Bien sûr, le taux du financement à un jour est un peu plus élevé ici qu’aux États-Unis. On s’attend à davantage de baisses de taux au Canada qu’aux États-Unis, parce qu’on est beaucoup plus sensibles aux taux d’intérêt. On a beaucoup de dettes à la consommation et de dettes hypothécaires.
On observe un léger ralentissement, je dirais un ralentissement plus marqué au Canada qu’aux États-Unis. L’inflation semble un peu meilleure au Canada qu’aux États-Unis, mais ces différences sont ténues. Selon moi, je crois qu’on aura une baisse de taux de plus au Canada par rapport aux États-Unis.
Quelques questions, dont une sur l’IA. L’IA a suscité énormément d’enthousiasme. Je ne vais pas parler de frénésie, mais plutôt d’enthousiasme à l’égard de l’IA, des fabricants de puces, etc. Vous avez dit que vous attendiez de voir l’impact à plus long terme de l’IA sur les bénéfices, comment les entreprises vont l’utiliser, l’effet sur la productivité, etc. Est-ce que ça commence à se concrétiser? Quand va-t-on voir ces premiers impacts?
Je pense qu’on peut dire qu’on les observe déjà, mais prenons un peu de recul. Quand on a parlé de la vigueur des marchés boursiers l’an dernier, en 2023, tout tournait autour de la technologie, des Sept Magnifiques. C’était l’année des entreprises purement axées sur l’IA, celles qui concourent à son émergence, comme les fabricants de puces, de semi-conducteurs, celles qui permettent à la magie de l’IA d’opérer, si je puis dire.
Les années 2024, 2025, 2026 et au-delà seront celles de ceux qui l’adoptent. Quelles sociétés vont adopter cette technologie? Je crois qu’au niveau le plus élémentaire, l’IA analyse simplement d’immenses jeux de données pour repérer une tendance ou essayer de trouver un renseignement précis, pour ensuite rendre les processus plus efficaces.
Du point de vue des entreprises, c’est extrêmement puissant, parce que l’accroissement de la productivité, c’est presque le Saint-Graal. Pour moi, l’IA est une réalité. Mais rappelons quelque chose. À mon avis, l’IA n’en est qu’à ses débuts.
Pendant la fin de semaine, on m’a envoyé une petite vidéo amusante de 1994. C’était une émission-débat sur Internet, sur ce qu’était Internet, ce que représentait le symbole « @ ». C’était il y a 30 ans. À l’époque, les détaillants n’avaient pas de site Web.
Aujourd’hui, on voit comment Internet a transformé la productivité, les bénéfices des sociétés, etc. Je crois qu’on en est au même point avec l’IA. Elle va clairement transformer l’ensemble de l’économie, qu’il s’agisse de la médecine, de l’agriculture ou de la finance, avec de vastes et d’immenses répercussions. Je ne pense pas qu’on en mesurera l’impact en 2024, mais plutôt dans 5, 10 ou 15 ans.
À mon avis, l’IA est une réalité. Elle va réduire les coûts et accroître la productivité, ce qui va considérablement porter les bénéfices.
Une petite question rapide sur les facteurs politiques et géopolitiques, dans un horizon plus immédiat qu’à 15 ans. On a donc la déferlante de l’IA qui va accroître la productivité, mais il y a aussi les élections américaines, la situation au Moyen-Orient, etc. Tout arrive en même temps. Que surveillez-vous pour comprendre ce qui est important pour les marchés? D’accord. Pour moi, le principal enjeu des élections américaines, ce n’est pas tant de savoir qui occupera le bureau ovale, mais à quoi va ressembler le Congrès. Si on a une forte majorité républicaine ou démocrate, la composition du Congrès va vraiment influer sur la politique, ce qui va alimenter les marchés des capitaux.
Malheureusement, on ne peut qu’attendre de voir. En ce qui concerne la géopolitique, je suis très heureux de voir que, par exemple, le président Xi et le président Biden ont eu un appel téléphonique. La communication passe. C’est la première étape pour éviter des conséquences désastreuses.
Mais la principale difficulté pour moi et pour tous ceux qui tentent d’investir, c’est qu’on ne sait jamais quel événement majeur va se produire. D’où l’importance de la répartition des actifs, de la construction du portefeuille et d’une bonne diversification. On sait que des événements vont se produire, mais malheureusement, on ne peut pas savoir lesquels.
Au Comité de répartition des actifs de Gestion de patrimoine TD, vous examinez les opportunités potentielles avec votre équipe. Vous venez de mentionner toute une série de choses qui se produisent sur les marchés. Que se passe-t-il? Commençons par les titres à revenu fixe. Que constatez-vous? D’accord. Pour ce qui est des titres à revenu fixe, le Comité de répartition des actifs se réunit tous les mois. On discute et on débat de la façon dont on devrait se positionner du point de vue du portefeuille global. Je crois qu’on est très optimistes à l’égard des titres à revenu fixe, principalement pour deux raisons.
D’abord, les taux sont très différents des taux d’il y a deux, trois ou quatre ans. Pendant longtemps, les taux sont restés très faibles. Aujourd’hui, les taux des obligations d’État se situent entre 3 et 4 %. Ceux des obligations à rendement élevé et de sociétés se situent dans une fourchette de 5, 6 ou 7 %. Au bout du compte, je pense qu’on peut compter sur de bons rendements constants dans les 12 à 18 mois à venir.
Ensuite, comme je l’ai dit, il va y avoir des baisses de taux, probablement au second semestre de cette année, ce qui va donner un petit coup de fouet aux titres à revenu fixe. On peut donc s’attendre à des rendements à un chiffre moyen à élevé.
Et les actions?
Pour les actions, tout dépend vraiment des régions. Je pense que dans l’ensemble – D’une part, comme je l’ai dit, les cours des actions ont fortement augmenté. À l’échelle mondiale, depuis la fin d’octobre 2023, elles ont progressé d’environ 25 %. Soyons réalistes. Cette tendance ne va sans doute pas se poursuivre pendant le reste de l’année.
Mais on a atteint des sommets inégalés en Europe. On a atteint des sommets inégalés en Amérique du Nord. Par contre, nous ne sommes pas particulièrement optimistes pour la Chine. Elle souffre de problèmes liés au marché de l’habitation, d’endettement, etc.
On va donc probablement sous-pondérer les actions chinoises. Les marchés nord-américains semblent bien se comporter. Le problème fondamental, ce que les évaluations commencent à sembler un peu excessives, avec des ratios cours-bénéfice de 21 ou 22. Ça ne veut pas dire qu’on s’en va vers une chute colossale, mais à partir de maintenant, je ne me réjouirais pas trop de la hausse des ratios.
On va voir une croissance des bénéfices, on va voir des hausses, mais soyons réalistes. Il n’y a pas eu de recul de 5 ou 10 % depuis longtemps. Ça va finir par arriver. Je pense qu’il est temps de s’armer de courage et de reconnaître qu’un bon repli de 7, 8 ou 9 % offrirait un excellent point d’entrée pour les actions pour le reste de l’année.
Faites une liste des titres que vous aimez et ouvrez l’œil.
Tout à fait.
Les placements alternatifs? Oui. Pour nous, les placements alternatifs sont de fantastiques blocs de construction parce qu’ils sont loin d’être aussi corrélés avec les titres à revenu fixe et les actions. On adore la diversification qu’ils procurent. Et je rappelle que les placements alternatifs ne se limitent pas à l’immobilier, bien qu’on apprécie les biens immobiliers industriels ou multirésidentiels. Il y a aussi les infrastructures.
On a un fonds d’infrastructures mondiales dont on est très fiers. Il y a aussi les prêts hypothécaires commerciaux, la dette privée. De mon point de vue, ces occasions semblent très solides. Les immeubles de bureaux connaissent quelques difficultés au Canada et en Amérique du Nord à cause du retour au travail après la COVID, et on est encore aux prises avec les répercussions. Mais une proportion de 10, 15 ou 20 % de placements alternatifs nous paraît idéale dans un portefeuille d’investissement.
Et pour finir, les équivalents de trésorerie.
Les espèces souffrent parfois d’une très mauvaise réputation. Il me semble très important de dire qu’elles ont leur place dans un portefeuille, peut-être à hauteur de 1, 2 ou 3 %. L’avantage des espèces, c’est qu’elles offrent des options.
Comme on l’a dit, personne ne peut prédire l’avenir. Personne. J’aimerais bien, mais c’est impossible. C’est bien d’avoir des espèces pour avoir la possibilité de saisir une occasion sur le marché. Malheureusement, je vois trop de gens dont le portefeuille se compose à 15, 20 ou même 25 % d’espèces.
Si quelqu’un de 43 ans épargne en vue de prendre sa retraite à 60 ou 65 ans et détient autant d’espèces, il va manquer énormément d’opportunités. Les espèces sont importantes, mais à petite dose dans le contexte actuel.
Je crois que ce n’est pas évident en ce moment, parce que les gens ont vu à quel point les marchés sont volatils. Comme vous le dites, beaucoup s’inquiètent du fait qu’on ne peut rien prédire. Comment se forger cette mentalité d’acier pour bien répartir ses actifs? Oui. C’est difficile parce que, bien sûr, c’est de l’argent réel. C’est très concret pour les gens. Ce qui échappe aux gens, c’est qu’on peut obtenir un rendement garanti sur un an ou deux ans, mais il faut mettre ces rendements en perspective avec ceux d’un panier d’actions plus diversifié au cours des 10, 15 ou 20 prochaines années, surtout compte tenu des facteurs favorables dont on a parlé, à savoir l’effet de l’IA sur la productivité et la croissance des entreprises.
Je pense qu’il faut vraiment avoir une conversation franche. Cet argent est destiné à un usage à long terme. Il vaut mieux laisser l’intérêt composé faire son œuvre plutôt que d’opter pour des placements à rendement relativement faible juste pour jouer la sécurité.
David, c’est toujours un plaisir de vous recevoir. Merci.
Merci, Kim. [LOGO SONORE] [MUSIQUE]
Les marchés entament officiellement le deuxième trimestre. Au cours des trois premiers mois de l’année, l’indice S&P 500 a affiché le meilleur rendement du premier trimestre en cinq ans. Même la Bourse de Toronto a atteint un nouveau sommet à la fin du trimestre. À quoi peut-on s’attendre pour les trois prochains mois? J’accueille un spécialiste, David Sykes, chef des placements à Gestion de Placements TD. Ravie de vous recevoir.
Bonjour, Kim. Merci de m’avoir invité.
Commençons par revenir sur le premier trimestre, qui a été riche en événements. Les gens suivent de près les taux d’intérêt, l’IA, les Sept magnifiques, etc. Qu’avez-vous observé au premier trimestre?
Du point de vue des marchés boursiers, comme vous l’avez dit en introduction, l’année a démarré sur les chapeaux de roues. Je ne m’attends pas vraiment à ce que ça dure. Depuis le début de l’année, le S&P 500 a progressé d’environ 10,5 à 11 %, et le marché canadien est en hausse de 6 à 6,5 %. C’est une solide progression.
Si on annualise ces chiffres, même si je n’ai pas envie de le faire, parce que je ne veux pas m’emballer, ce qui a eu le plus d’impact pour les marchés au premier trimestre, ce sont les taux d’intérêt. En début d’année, du point de vue du marché, la Fed allait probablement procéder à sept baisses de taux en 2024.
Aujourd’hui, au vu des nouvelles données, qu’il s’agisse du PIB, de l’emploi ou de l’inflation, on sait qu’il n’y en aura pas sept. Le marché table maintenant sur deux ou trois baisses en 2024. À mon avis, on assiste à un bras de fer entre une croissance plus forte et son impact sur les marchés des taux.
C’est étonnant, parce qu’il y a six mois, tout le monde – je ne parle pas de vous, mais plutôt des services de détail, étaient obnubilés par les taux. Que se passe-t-il avec les taux? Beaucoup de membres de votre équipe ont fait remarquer, à juste titre, qu’il fallait aussi surveiller les bénéfices. Qu’indiquent les bénéfices? Qu’anticipez-vous pour le deuxième trimestre? Oui. Les marchés des capitaux ont raison d’être obnubilés par les taux, parce qu’en fin de compte, ils conditionnent le prix de l’argent. C’est le prix le plus important sur les marchés des capitaux et dans le monde. Mais à mon sens, l’erreur de compréhension fondamentale, c’est que les entreprises peuvent survivre malgré des taux plus élevés. Les entreprises peuvent tout de même prospérer.
Du point de vue des bénéfices, c’est vraiment un facteur clé pour le marché boursier. Au dernier trimestre, les bénéfices étaient plus élevés que prévu. On doit en partie ces résultats à l’IA, mais aussi en grande partie à la croissance économique et à la consommation qui restent fortes aux États-Unis. Les dépenses de consommation ont bien résisté.
Du côté des dépenses publiques, les États-Unis ont voté la loi CHIPS, la loi sur les infrastructures et la loi sur la réduction de l’inflation. Elles datent d’il y a un peu plus d’un an, mais l’impact sur les dépenses commence tout juste à se faire sentir.
En plus, il y a eu beaucoup de dépenses en immobilisations liées à l’IA, aux unités de traitement graphique, à l’ensemble de l’infrastructure. Tout compte fait, les chiffres sont très solides et l’économie a surpassé les attentes. Le contexte n’est pas idéal pour une baisse de taux mais très favorable à l’activité économique et aux revenus des entreprises. Les bénéfices ont vraiment été au rendez-vous, ce qui a permis au marché boursier d’atteindre de nouveaux sommets.
Qu’en est-il des perspectives à plus long terme? C’est intéressant, car les marchés se sont fortement redressés. Bien sûr, il ne faut pas présumer de la tournure que prendront les événements. Les marchés ne montent pas indéfiniment. Mais si on réfléchit à ce qui nous attend, disons d’ici 6 à 12 mois, vous dites que la Fed va sans doute baisser les taux mais moins qu’on le pensait. Et la Banque du Canada? Que voyez-vous de ce côté? Oui. Les données sont intéressantes du côté canadien. Le PIB a fléchi. Au quatrième trimestre, il se situait aux alentours de 1 %. On vient de recevoir les données pour janvier et février, et les résultats semblent meilleurs que prévu. L’inflation a également été plus faible que prévu deux fois de suite au Canada.
Selon nous, la Banque du Canada procédera à deux ou trois réductions cette année. Bien sûr, le taux du financement à un jour est un peu plus élevé ici qu’aux États-Unis. On s’attend à davantage de baisses de taux au Canada qu’aux États-Unis, parce qu’on est beaucoup plus sensibles aux taux d’intérêt. On a beaucoup de dettes à la consommation et de dettes hypothécaires.
On observe un léger ralentissement, je dirais un ralentissement plus marqué au Canada qu’aux États-Unis. L’inflation semble un peu meilleure au Canada qu’aux États-Unis, mais ces différences sont ténues. Selon moi, je crois qu’on aura une baisse de taux de plus au Canada par rapport aux États-Unis.
Quelques questions, dont une sur l’IA. L’IA a suscité énormément d’enthousiasme. Je ne vais pas parler de frénésie, mais plutôt d’enthousiasme à l’égard de l’IA, des fabricants de puces, etc. Vous avez dit que vous attendiez de voir l’impact à plus long terme de l’IA sur les bénéfices, comment les entreprises vont l’utiliser, l’effet sur la productivité, etc. Est-ce que ça commence à se concrétiser? Quand va-t-on voir ces premiers impacts?
Je pense qu’on peut dire qu’on les observe déjà, mais prenons un peu de recul. Quand on a parlé de la vigueur des marchés boursiers l’an dernier, en 2023, tout tournait autour de la technologie, des Sept Magnifiques. C’était l’année des entreprises purement axées sur l’IA, celles qui concourent à son émergence, comme les fabricants de puces, de semi-conducteurs, celles qui permettent à la magie de l’IA d’opérer, si je puis dire.
Les années 2024, 2025, 2026 et au-delà seront celles de ceux qui l’adoptent. Quelles sociétés vont adopter cette technologie? Je crois qu’au niveau le plus élémentaire, l’IA analyse simplement d’immenses jeux de données pour repérer une tendance ou essayer de trouver un renseignement précis, pour ensuite rendre les processus plus efficaces.
Du point de vue des entreprises, c’est extrêmement puissant, parce que l’accroissement de la productivité, c’est presque le Saint-Graal. Pour moi, l’IA est une réalité. Mais rappelons quelque chose. À mon avis, l’IA n’en est qu’à ses débuts.
Pendant la fin de semaine, on m’a envoyé une petite vidéo amusante de 1994. C’était une émission-débat sur Internet, sur ce qu’était Internet, ce que représentait le symbole « @ ». C’était il y a 30 ans. À l’époque, les détaillants n’avaient pas de site Web.
Aujourd’hui, on voit comment Internet a transformé la productivité, les bénéfices des sociétés, etc. Je crois qu’on en est au même point avec l’IA. Elle va clairement transformer l’ensemble de l’économie, qu’il s’agisse de la médecine, de l’agriculture ou de la finance, avec de vastes et d’immenses répercussions. Je ne pense pas qu’on en mesurera l’impact en 2024, mais plutôt dans 5, 10 ou 15 ans.
À mon avis, l’IA est une réalité. Elle va réduire les coûts et accroître la productivité, ce qui va considérablement porter les bénéfices.
Une petite question rapide sur les facteurs politiques et géopolitiques, dans un horizon plus immédiat qu’à 15 ans. On a donc la déferlante de l’IA qui va accroître la productivité, mais il y a aussi les élections américaines, la situation au Moyen-Orient, etc. Tout arrive en même temps. Que surveillez-vous pour comprendre ce qui est important pour les marchés? D’accord. Pour moi, le principal enjeu des élections américaines, ce n’est pas tant de savoir qui occupera le bureau ovale, mais à quoi va ressembler le Congrès. Si on a une forte majorité républicaine ou démocrate, la composition du Congrès va vraiment influer sur la politique, ce qui va alimenter les marchés des capitaux.
Malheureusement, on ne peut qu’attendre de voir. En ce qui concerne la géopolitique, je suis très heureux de voir que, par exemple, le président Xi et le président Biden ont eu un appel téléphonique. La communication passe. C’est la première étape pour éviter des conséquences désastreuses.
Mais la principale difficulté pour moi et pour tous ceux qui tentent d’investir, c’est qu’on ne sait jamais quel événement majeur va se produire. D’où l’importance de la répartition des actifs, de la construction du portefeuille et d’une bonne diversification. On sait que des événements vont se produire, mais malheureusement, on ne peut pas savoir lesquels.
Au Comité de répartition des actifs de Gestion de patrimoine TD, vous examinez les opportunités potentielles avec votre équipe. Vous venez de mentionner toute une série de choses qui se produisent sur les marchés. Que se passe-t-il? Commençons par les titres à revenu fixe. Que constatez-vous? D’accord. Pour ce qui est des titres à revenu fixe, le Comité de répartition des actifs se réunit tous les mois. On discute et on débat de la façon dont on devrait se positionner du point de vue du portefeuille global. Je crois qu’on est très optimistes à l’égard des titres à revenu fixe, principalement pour deux raisons.
D’abord, les taux sont très différents des taux d’il y a deux, trois ou quatre ans. Pendant longtemps, les taux sont restés très faibles. Aujourd’hui, les taux des obligations d’État se situent entre 3 et 4 %. Ceux des obligations à rendement élevé et de sociétés se situent dans une fourchette de 5, 6 ou 7 %. Au bout du compte, je pense qu’on peut compter sur de bons rendements constants dans les 12 à 18 mois à venir.
Ensuite, comme je l’ai dit, il va y avoir des baisses de taux, probablement au second semestre de cette année, ce qui va donner un petit coup de fouet aux titres à revenu fixe. On peut donc s’attendre à des rendements à un chiffre moyen à élevé.
Et les actions?
Pour les actions, tout dépend vraiment des régions. Je pense que dans l’ensemble – D’une part, comme je l’ai dit, les cours des actions ont fortement augmenté. À l’échelle mondiale, depuis la fin d’octobre 2023, elles ont progressé d’environ 25 %. Soyons réalistes. Cette tendance ne va sans doute pas se poursuivre pendant le reste de l’année.
Mais on a atteint des sommets inégalés en Europe. On a atteint des sommets inégalés en Amérique du Nord. Par contre, nous ne sommes pas particulièrement optimistes pour la Chine. Elle souffre de problèmes liés au marché de l’habitation, d’endettement, etc.
On va donc probablement sous-pondérer les actions chinoises. Les marchés nord-américains semblent bien se comporter. Le problème fondamental, ce que les évaluations commencent à sembler un peu excessives, avec des ratios cours-bénéfice de 21 ou 22. Ça ne veut pas dire qu’on s’en va vers une chute colossale, mais à partir de maintenant, je ne me réjouirais pas trop de la hausse des ratios.
On va voir une croissance des bénéfices, on va voir des hausses, mais soyons réalistes. Il n’y a pas eu de recul de 5 ou 10 % depuis longtemps. Ça va finir par arriver. Je pense qu’il est temps de s’armer de courage et de reconnaître qu’un bon repli de 7, 8 ou 9 % offrirait un excellent point d’entrée pour les actions pour le reste de l’année.
Faites une liste des titres que vous aimez et ouvrez l’œil.
Tout à fait.
Les placements alternatifs? Oui. Pour nous, les placements alternatifs sont de fantastiques blocs de construction parce qu’ils sont loin d’être aussi corrélés avec les titres à revenu fixe et les actions. On adore la diversification qu’ils procurent. Et je rappelle que les placements alternatifs ne se limitent pas à l’immobilier, bien qu’on apprécie les biens immobiliers industriels ou multirésidentiels. Il y a aussi les infrastructures.
On a un fonds d’infrastructures mondiales dont on est très fiers. Il y a aussi les prêts hypothécaires commerciaux, la dette privée. De mon point de vue, ces occasions semblent très solides. Les immeubles de bureaux connaissent quelques difficultés au Canada et en Amérique du Nord à cause du retour au travail après la COVID, et on est encore aux prises avec les répercussions. Mais une proportion de 10, 15 ou 20 % de placements alternatifs nous paraît idéale dans un portefeuille d’investissement.
Et pour finir, les équivalents de trésorerie.
Les espèces souffrent parfois d’une très mauvaise réputation. Il me semble très important de dire qu’elles ont leur place dans un portefeuille, peut-être à hauteur de 1, 2 ou 3 %. L’avantage des espèces, c’est qu’elles offrent des options.
Comme on l’a dit, personne ne peut prédire l’avenir. Personne. J’aimerais bien, mais c’est impossible. C’est bien d’avoir des espèces pour avoir la possibilité de saisir une occasion sur le marché. Malheureusement, je vois trop de gens dont le portefeuille se compose à 15, 20 ou même 25 % d’espèces.
Si quelqu’un de 43 ans épargne en vue de prendre sa retraite à 60 ou 65 ans et détient autant d’espèces, il va manquer énormément d’opportunités. Les espèces sont importantes, mais à petite dose dans le contexte actuel.
Je crois que ce n’est pas évident en ce moment, parce que les gens ont vu à quel point les marchés sont volatils. Comme vous le dites, beaucoup s’inquiètent du fait qu’on ne peut rien prédire. Comment se forger cette mentalité d’acier pour bien répartir ses actifs? Oui. C’est difficile parce que, bien sûr, c’est de l’argent réel. C’est très concret pour les gens. Ce qui échappe aux gens, c’est qu’on peut obtenir un rendement garanti sur un an ou deux ans, mais il faut mettre ces rendements en perspective avec ceux d’un panier d’actions plus diversifié au cours des 10, 15 ou 20 prochaines années, surtout compte tenu des facteurs favorables dont on a parlé, à savoir l’effet de l’IA sur la productivité et la croissance des entreprises.
Je pense qu’il faut vraiment avoir une conversation franche. Cet argent est destiné à un usage à long terme. Il vaut mieux laisser l’intérêt composé faire son œuvre plutôt que d’opter pour des placements à rendement relativement faible juste pour jouer la sécurité.
David, c’est toujours un plaisir de vous recevoir. Merci.
Merci, Kim. [LOGO SONORE] [MUSIQUE]