Les grandes banques canadiennes renouent avec leurs bonnes habitudes, annonçant des résultats supérieurs aux attentes pour ce trimestre. Kim Parlee et Mario Mendonca, directeur général, Valeurs Mobilières TD, discutent des perspectives pour les banques canadiennes en contexte de hausse des taux d’intérêt.
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[MUSIQUE]
Les plus grandes banques canadiennes viennent toutes de déclarer des bénéfices supérieurs aux attentes. Et tout ça alors que la Banque du Canada se prépare à relever les taux d’intérêt au cours des prochains mois, après l’avoir déjà fait une fois. Mario Mendonca se joint à nous maintenant.
Il est directeur général à Valeurs Mobilières TD et va nous expliquer ce qui s’est passé et ce qu’il va surveiller à l’avenir.
Mario, ravie de vous accueillir. Je vais commencer tout de suite. Au dernier trimestre, si je ne m’abuse, trois des six grandes banques n’avaient pas atteint les estimations. Ce trimestre-ci, elles les ont toutes dépassé. Qu’est-ce qui a changé?
Eh bien, comme je le dis dans mon rapport, les quatrièmes trimestres ne sont souvent pas très bons. En règle générale, à la fin de l’année, les résultats ne sont tout simplement pas très bons. Très souvent, les banques prévoient beaucoup de dépenses au quatrième trimestre. Le montant de leurs dépenses peut être très élevé. Ça mène à ce que j’appelle des trimestres difficiles.
Les résultats des premiers trimestres sont généralement très solides. C’est le début de l’année. Les revenus des marchés des capitaux sont habituellement très bons au premier trimestre. Et c’est ce qu’on a vu ce trimestre-ci. Les revenus de négociation de chaque banque ont été nettement supérieurs à ce à quoi on s’attendait, à ce à quoi les financiers s’attendaient. Et je pense que c’est ce qui a le plus contribué aux très bons résultats. Et vous avez tout à fait raison, les six banques ont toutes surpassé les estimations. Et elles les ont surpassé de 10 % en moyenne, ce qui est un chiffre significatif.
Mario, vous dites dans votre rapport cette fois-ci que les banques vont changer de voie. Qu’est-ce que vous entendez par là?
Depuis de nombreuses années que je surveille ces banques, elles restent habituellement dans la même voie, comme je dis. Et ce que j’entends par là, c’est... par exemple, la Banque Royale, la Banque Nationale, ce sont des banques très solides sur les marchés des capitaux. Elles s’en tiennent à leur voie.
La Banque Scotia, les banques internationales et la CIBC, ce sont généralement plus des banques de détail. Au cours des 12 derniers mois environ, j’ai remarqué certains changements. Dans le cas de la CIBC, elle a accru ses prêts commerciaux et de gros à un rythme beaucoup plus rapide que la banque moyenne. En fait, j’indique dans mon rapport que la CIBC a ajouté pour 31 milliards de dollars de prêts autres que ceux à la consommation au cours des 12 derniers mois. C’est plus élevé que les 17 milliards de dollars que la Banque Royale a ajoutés. Et la Banque Royale est environ 60 % plus grande que la CIBC. C’est donc une banque qui change clairement de voie et qui devient beaucoup plus un prêteur commercial et de gros.
Dans le cas de la Banque de Montréal, on peut voir que 24 % des revenus de ses activités sur les marchés des capitaux proviennent maintenant des marchés des capitaux. C’est plus élevé qu’où la Banque Royale est habituée d’être, et plus élevé qu’où elle se trouve maintenant. Donc la BMO, et je l’appelle ainsi dans le rapport, est la nouvelle banque des marchés des capitaux au Canada. Ces changements de voie, si vous voulez, pour la CIBC et la BMO, ont joué un rôle déterminant dans l’augmentation de leurs bénéfices avant impôts et provisions à un rythme bien supérieur à ceux de certaines des grandes banques comme la Banque Scotia et la Banque Royale. En fait, les autres banques changent aussi de voie à certains égards.
La Banque Scotia a éliminé certaines de ses activités en Amérique latine au cours des dernières années. Elle passe du crédit non garanti au crédit garanti. Et dans le cas de la Banque Royale, on a observé une perte de part de marché pour la banque au cours des 12 derniers mois. Ce n’est pas normal de voir ça pour la Banque Royale. C’est ce que je voulais dire, quand j’ai mentionné qu’on observe un changement de voie parmi nos grandes banques canadiennes.
Est-ce qu’il y a un risque à ça? De toute évidence, les banques essaient de nouvelles choses et empruntent une voie différente, comme vous le dites. Quel est le risque d’exécution potentiel, ou quoi que ce soit d’autre qui pourrait en découler?
Oui, on connaît l’expression « il n’y a rien de gratuit dans la vie. » Et pour la CIBC et la BMO, réaliser ce type de bénéfices avant impôts et provisions selon leur rythme... et on peut le voir dans le cours de leurs actions. Ce sont les banques les plus performantes du groupe cette année. Pour créer ce genre d’élan dans les bénéfices avant impôts et provisions, ça comporte un risque. Et le risque dans le cas de la CIBC, c’est qu’elle prête beaucoup plus à ce qu’on appelle des services de promotion financière, ou essentiellement des sociétés de capital-investissement. Ça comporte un peu plus de risque.
La BMO, par exemple, a récemment annoncé que 50 % de sa part du portefeuille correspond aux revenus de souscription, et qu’environ 50 % de ses revenus de souscription proviennent de ces services de promotion financière. Alors oui, il y a un risque ici. Mais une chose par rapport à laquelle je veux me montrer prudent, et c’est ce que j’ai fait dans mon rapport.
Je ne pense pas que cette nouvelle croissance pour ces deux banques va entraîner des charges importantes, comme ce qu’on a vu avec la CIBC en 2008, lorsqu’elle a pris une grosse charge à l’égard de ses TACHR, ou la Banque Nationale, lorsqu’elle a pris une charge à l’égard de ses placements dans des sociétés pétrolières et gazières. Je ne pense pas que ces banques vont prendre des charges importantes. Je pense simplement qu’à un moment donné, elles vont réexaminer leur stratégie de croissance, et on pourrait traverser une période où leur croissance va ralentir. C’est ce que j’ai suggéré dans mon rapport.
Intéressant. Laissez-moi vous demander... vous avez parlé un peu de la CIBC au cours du trimestre, et ce que vous remarquez, ou ce que vous pourriez ajouter par rapport à la CIBC en termes de nouvelle croissance, et de la direction qu’elle prend. Mais y a-t-il autre chose?
Non. La CIBC n’a clairement pas peur de croître. Elle est prête à sortir un peu de sa voie et à prendre de l’expansion de façon plus musclée dans le secteur des prêts autres que ceux à la consommation. Et elle investit là-dedans. Et on s’attend à ce qu’elle croisse dans ce secteur. Mais oui, c’est le principal point que je voulais soulever à propos de la CIBC.
La BMO.
La Banque de Montréal, on en a parlé un peu aussi. La Banque a affiché un excellent rendement au cours des dernières années. Elle a une entente avec Bank of the West, qui va être conclue plus tard cette année. Elle pourrait avoir un effet très positif sur les bénéfices de la société en 2024, pouvant atteindre 10 %, voire plus de 10 % en 2024. La BMO est donc dans une très bonne position. Elle affiche en ce moment une excellente dynamique dans ses activités. Elle va aussi profiter de l’acquisition, qui pourrait avoir des retombées importantes en 2024.
Qu’en est-il de la Banque Scotia? Et corrigez-moi si je me trompe, mais il semble que vous l’avez rétrogradée à une position de conservation.
Oui. Revenons en arrière. En mars 2020, j’ai augmenté toutes les notes. Et on a répondu que les titres étaient tous trop bon marché. C’était le moment de les acheter. La logique, c’était que je ne croyais pas qu’elles allaient réduire leurs dividendes ou faire appel au marché public.
La Banque Scotia a participé à la hausse comme tout le monde. Oui, son titre a progressé, mais son rendement a été à la traîne. Et en abaissant la note de la Banque Scotia ce matin, en la faisant passer d’une position d’achat à une de conservation, j’ai observé certaines choses. Premièrement, elle n’est plus à un cours inférieur à celui du groupe sur une base prospective, par rapport au ratio C/B.
En fait, elle effectue des opérations de négociation par l’intermédiaire de la CIBC et de la BMO, deux banques qui, selon moi, affichent de meilleurs bénéfices que la Banque Scotia. Mais j’ai observé deux ou trois autres choses. Je ne crois pas que ses marges vont augmenter autant dans ses activités bancaires internationales que celles des banques canadiennes dans leurs activités aux États-Unis. Et ça pourrait faire une grande différence en 2022 et en 2023.
Si les marges dans les activités internationales n’augmentent pas, comme c’est le cas des activités aux États-Unis des banques homologues, les bénéfices de ces banques pourraient être nettement supérieurs à ceux de la Banque Scotia. Enfin, il convient de souligner que la Banque Scotia n’a pas tout à fait le même capital excédentaire que des banques comme la Banque Royale et la BMO, par exemple. Et je pense que le manque de capital excédentaire va lui être défavorable au cours des prochaines années, comme en 2024 ou 2025. Ce capital excédentaire va jouer un rôle important dans la croissance des bénéfices de la BMO et de la Banque Royale. Et cela pourrait ne pas se produire de la même façon pour la Banque Scotia. C’est ce que je voulais démontrer en abaissant le titre.
Intéressant. On ne peut pas parler de la TD pour des raisons évidentes. Mais la Banque Royale, vous avez mentionné qu’elle perdait une part de marché dans certaines catégories de prêts. Qu’en est-il du reste de ses activités? Est-ce que c’est une préoccupation pour vous?
La Banque Royale a donc clairement perdu une part de 50 à 100 points de base dans les secteurs des prêts personnels et des prêts commerciaux au cours des 12 derniers mois. Elle a perdu une petite part de marché du côté des prêts hypothécaires. Et ça ne ressemble pas à la Banque Royale que j’ai surveillée au fil des ans. Je vais vous dire ceci... Par le passé, lorsque la Banque Royale semblait avoir décéléré ou perdu une part de marché, comme on l’a vu au cours des années précédentes, elle revenait habituellement en grande force. Cette banque-là prend très mal le fait de perdre une part de marché. Je m’attends donc à ce que la Banque Royale revienne en grande force et reprenne cette part de marché en restructurant sa gamme de produits.
Mais au-delà de la croissance des prêts, il faut reconnaître que la Banque Royale réussit extrêmement bien dans l’acquisition de dépôts. Ses activités de gestion de patrimoine sont très solides. Et je dirais que lorsque les taux d’intérêt vont augmenter, la sensibilité de la Banque Royale aux taux d’intérêt plus élevés pourrait vraiment avoir un effet positif sur la croissance du revenu d’intérêts net et la croissance des bénéfices avant impôts et provisions. À mon avis, la Banque Royale est très bien positionnée pour commencer le deuxième semestre de cette année.
Eh bien, c’était la question suivante : compte tenu de la hausse des taux, qui avantage de façon disproportionnée la Banque Royale? Qui d’autre?
La Banque Royale... je crois que la BMO, dans une certaine mesure, dans ses activités aux États-Unis. Je place ces deux-là peut-être à l’extrémité la plus haute. Évidemment, on ne va pas faire de commentaire sur la TD. Mais la Banque Royale et la BMO seraient complètement en haut. Je crois que la Banque Scotia, et la Banque Nationale, sont plus près de l’autre extrémité, en ce sens qu’elles sont moins sensibles à la hausse des taux, et la CIBC se situe quelque part entre les deux.
Qu’est-ce que vous surveillez... je veux dire, quand vous songez à tous les facteurs de croissance? On observe des acquisitions dans ce secteur en ce moment, et une partie de ce capital est déployée. Mais d’autres facteurs défavorables, favorables, je veux dire... le monde est compliqué en ce moment, alors, Mario, que se passe-t-il?
Eh bien, je vais quand même partir du principe que, malgré ce qui se passe en Europe, les taux continuent d’augmenter et que les banques centrales du monde entier continuent de relever les taux. Et si c’est le cas, la hausse des taux et l’amélioration des marges vont être les thèmes dominants en 2022 tout comme l’accélération de la croissance des prêts commerciaux, et aussi la croissance des cartes de crédit. Ça devrait être déterminant.
Mais quand on pense au-delà de 2022, on devrait commencer à se préparer à un ralentissement. En 2023, il est tout à fait concevable que les pertes sur créances reviennent à la normale. Les pertes sur créances sont incroyablement faibles en ce moment en raison de tout le soutien offert par le gouvernement aux consommateurs et aux sociétés. D’ici 2023, on s’attend à ce que le crédit se normalise, même qu’il commence à se détériorer.
Ça pourrait jouer un rôle dans le ralentissement de la croissance des bénéfices en 2023 et en 2024, ce qui signifie que les acquisitions actuelles des banques vont jouer un rôle très important dans la croissance des bénéfices, parce qu’une normalisation du crédit va réduire une partie de la croissance de nos banques canadiennes. C’est ce que je crois fermement pour 2023 et 2024.
Oui.
Ça nuit à la croissance pour tout le monde. Mario, merci beaucoup pour votre temps aujourd’hui.
Merci, Kim.
[MUSIQUE]
Les plus grandes banques canadiennes viennent toutes de déclarer des bénéfices supérieurs aux attentes. Et tout ça alors que la Banque du Canada se prépare à relever les taux d’intérêt au cours des prochains mois, après l’avoir déjà fait une fois. Mario Mendonca se joint à nous maintenant.
Il est directeur général à Valeurs Mobilières TD et va nous expliquer ce qui s’est passé et ce qu’il va surveiller à l’avenir.
Mario, ravie de vous accueillir. Je vais commencer tout de suite. Au dernier trimestre, si je ne m’abuse, trois des six grandes banques n’avaient pas atteint les estimations. Ce trimestre-ci, elles les ont toutes dépassé. Qu’est-ce qui a changé?
Eh bien, comme je le dis dans mon rapport, les quatrièmes trimestres ne sont souvent pas très bons. En règle générale, à la fin de l’année, les résultats ne sont tout simplement pas très bons. Très souvent, les banques prévoient beaucoup de dépenses au quatrième trimestre. Le montant de leurs dépenses peut être très élevé. Ça mène à ce que j’appelle des trimestres difficiles.
Les résultats des premiers trimestres sont généralement très solides. C’est le début de l’année. Les revenus des marchés des capitaux sont habituellement très bons au premier trimestre. Et c’est ce qu’on a vu ce trimestre-ci. Les revenus de négociation de chaque banque ont été nettement supérieurs à ce à quoi on s’attendait, à ce à quoi les financiers s’attendaient. Et je pense que c’est ce qui a le plus contribué aux très bons résultats. Et vous avez tout à fait raison, les six banques ont toutes surpassé les estimations. Et elles les ont surpassé de 10 % en moyenne, ce qui est un chiffre significatif.
Mario, vous dites dans votre rapport cette fois-ci que les banques vont changer de voie. Qu’est-ce que vous entendez par là?
Depuis de nombreuses années que je surveille ces banques, elles restent habituellement dans la même voie, comme je dis. Et ce que j’entends par là, c’est... par exemple, la Banque Royale, la Banque Nationale, ce sont des banques très solides sur les marchés des capitaux. Elles s’en tiennent à leur voie.
La Banque Scotia, les banques internationales et la CIBC, ce sont généralement plus des banques de détail. Au cours des 12 derniers mois environ, j’ai remarqué certains changements. Dans le cas de la CIBC, elle a accru ses prêts commerciaux et de gros à un rythme beaucoup plus rapide que la banque moyenne. En fait, j’indique dans mon rapport que la CIBC a ajouté pour 31 milliards de dollars de prêts autres que ceux à la consommation au cours des 12 derniers mois. C’est plus élevé que les 17 milliards de dollars que la Banque Royale a ajoutés. Et la Banque Royale est environ 60 % plus grande que la CIBC. C’est donc une banque qui change clairement de voie et qui devient beaucoup plus un prêteur commercial et de gros.
Dans le cas de la Banque de Montréal, on peut voir que 24 % des revenus de ses activités sur les marchés des capitaux proviennent maintenant des marchés des capitaux. C’est plus élevé qu’où la Banque Royale est habituée d’être, et plus élevé qu’où elle se trouve maintenant. Donc la BMO, et je l’appelle ainsi dans le rapport, est la nouvelle banque des marchés des capitaux au Canada. Ces changements de voie, si vous voulez, pour la CIBC et la BMO, ont joué un rôle déterminant dans l’augmentation de leurs bénéfices avant impôts et provisions à un rythme bien supérieur à ceux de certaines des grandes banques comme la Banque Scotia et la Banque Royale. En fait, les autres banques changent aussi de voie à certains égards.
La Banque Scotia a éliminé certaines de ses activités en Amérique latine au cours des dernières années. Elle passe du crédit non garanti au crédit garanti. Et dans le cas de la Banque Royale, on a observé une perte de part de marché pour la banque au cours des 12 derniers mois. Ce n’est pas normal de voir ça pour la Banque Royale. C’est ce que je voulais dire, quand j’ai mentionné qu’on observe un changement de voie parmi nos grandes banques canadiennes.
Est-ce qu’il y a un risque à ça? De toute évidence, les banques essaient de nouvelles choses et empruntent une voie différente, comme vous le dites. Quel est le risque d’exécution potentiel, ou quoi que ce soit d’autre qui pourrait en découler?
Oui, on connaît l’expression « il n’y a rien de gratuit dans la vie. » Et pour la CIBC et la BMO, réaliser ce type de bénéfices avant impôts et provisions selon leur rythme... et on peut le voir dans le cours de leurs actions. Ce sont les banques les plus performantes du groupe cette année. Pour créer ce genre d’élan dans les bénéfices avant impôts et provisions, ça comporte un risque. Et le risque dans le cas de la CIBC, c’est qu’elle prête beaucoup plus à ce qu’on appelle des services de promotion financière, ou essentiellement des sociétés de capital-investissement. Ça comporte un peu plus de risque.
La BMO, par exemple, a récemment annoncé que 50 % de sa part du portefeuille correspond aux revenus de souscription, et qu’environ 50 % de ses revenus de souscription proviennent de ces services de promotion financière. Alors oui, il y a un risque ici. Mais une chose par rapport à laquelle je veux me montrer prudent, et c’est ce que j’ai fait dans mon rapport.
Je ne pense pas que cette nouvelle croissance pour ces deux banques va entraîner des charges importantes, comme ce qu’on a vu avec la CIBC en 2008, lorsqu’elle a pris une grosse charge à l’égard de ses TACHR, ou la Banque Nationale, lorsqu’elle a pris une charge à l’égard de ses placements dans des sociétés pétrolières et gazières. Je ne pense pas que ces banques vont prendre des charges importantes. Je pense simplement qu’à un moment donné, elles vont réexaminer leur stratégie de croissance, et on pourrait traverser une période où leur croissance va ralentir. C’est ce que j’ai suggéré dans mon rapport.
Intéressant. Laissez-moi vous demander... vous avez parlé un peu de la CIBC au cours du trimestre, et ce que vous remarquez, ou ce que vous pourriez ajouter par rapport à la CIBC en termes de nouvelle croissance, et de la direction qu’elle prend. Mais y a-t-il autre chose?
Non. La CIBC n’a clairement pas peur de croître. Elle est prête à sortir un peu de sa voie et à prendre de l’expansion de façon plus musclée dans le secteur des prêts autres que ceux à la consommation. Et elle investit là-dedans. Et on s’attend à ce qu’elle croisse dans ce secteur. Mais oui, c’est le principal point que je voulais soulever à propos de la CIBC.
La BMO.
La Banque de Montréal, on en a parlé un peu aussi. La Banque a affiché un excellent rendement au cours des dernières années. Elle a une entente avec Bank of the West, qui va être conclue plus tard cette année. Elle pourrait avoir un effet très positif sur les bénéfices de la société en 2024, pouvant atteindre 10 %, voire plus de 10 % en 2024. La BMO est donc dans une très bonne position. Elle affiche en ce moment une excellente dynamique dans ses activités. Elle va aussi profiter de l’acquisition, qui pourrait avoir des retombées importantes en 2024.
Qu’en est-il de la Banque Scotia? Et corrigez-moi si je me trompe, mais il semble que vous l’avez rétrogradée à une position de conservation.
Oui. Revenons en arrière. En mars 2020, j’ai augmenté toutes les notes. Et on a répondu que les titres étaient tous trop bon marché. C’était le moment de les acheter. La logique, c’était que je ne croyais pas qu’elles allaient réduire leurs dividendes ou faire appel au marché public.
La Banque Scotia a participé à la hausse comme tout le monde. Oui, son titre a progressé, mais son rendement a été à la traîne. Et en abaissant la note de la Banque Scotia ce matin, en la faisant passer d’une position d’achat à une de conservation, j’ai observé certaines choses. Premièrement, elle n’est plus à un cours inférieur à celui du groupe sur une base prospective, par rapport au ratio C/B.
En fait, elle effectue des opérations de négociation par l’intermédiaire de la CIBC et de la BMO, deux banques qui, selon moi, affichent de meilleurs bénéfices que la Banque Scotia. Mais j’ai observé deux ou trois autres choses. Je ne crois pas que ses marges vont augmenter autant dans ses activités bancaires internationales que celles des banques canadiennes dans leurs activités aux États-Unis. Et ça pourrait faire une grande différence en 2022 et en 2023.
Si les marges dans les activités internationales n’augmentent pas, comme c’est le cas des activités aux États-Unis des banques homologues, les bénéfices de ces banques pourraient être nettement supérieurs à ceux de la Banque Scotia. Enfin, il convient de souligner que la Banque Scotia n’a pas tout à fait le même capital excédentaire que des banques comme la Banque Royale et la BMO, par exemple. Et je pense que le manque de capital excédentaire va lui être défavorable au cours des prochaines années, comme en 2024 ou 2025. Ce capital excédentaire va jouer un rôle important dans la croissance des bénéfices de la BMO et de la Banque Royale. Et cela pourrait ne pas se produire de la même façon pour la Banque Scotia. C’est ce que je voulais démontrer en abaissant le titre.
Intéressant. On ne peut pas parler de la TD pour des raisons évidentes. Mais la Banque Royale, vous avez mentionné qu’elle perdait une part de marché dans certaines catégories de prêts. Qu’en est-il du reste de ses activités? Est-ce que c’est une préoccupation pour vous?
La Banque Royale a donc clairement perdu une part de 50 à 100 points de base dans les secteurs des prêts personnels et des prêts commerciaux au cours des 12 derniers mois. Elle a perdu une petite part de marché du côté des prêts hypothécaires. Et ça ne ressemble pas à la Banque Royale que j’ai surveillée au fil des ans. Je vais vous dire ceci... Par le passé, lorsque la Banque Royale semblait avoir décéléré ou perdu une part de marché, comme on l’a vu au cours des années précédentes, elle revenait habituellement en grande force. Cette banque-là prend très mal le fait de perdre une part de marché. Je m’attends donc à ce que la Banque Royale revienne en grande force et reprenne cette part de marché en restructurant sa gamme de produits.
Mais au-delà de la croissance des prêts, il faut reconnaître que la Banque Royale réussit extrêmement bien dans l’acquisition de dépôts. Ses activités de gestion de patrimoine sont très solides. Et je dirais que lorsque les taux d’intérêt vont augmenter, la sensibilité de la Banque Royale aux taux d’intérêt plus élevés pourrait vraiment avoir un effet positif sur la croissance du revenu d’intérêts net et la croissance des bénéfices avant impôts et provisions. À mon avis, la Banque Royale est très bien positionnée pour commencer le deuxième semestre de cette année.
Eh bien, c’était la question suivante : compte tenu de la hausse des taux, qui avantage de façon disproportionnée la Banque Royale? Qui d’autre?
La Banque Royale... je crois que la BMO, dans une certaine mesure, dans ses activités aux États-Unis. Je place ces deux-là peut-être à l’extrémité la plus haute. Évidemment, on ne va pas faire de commentaire sur la TD. Mais la Banque Royale et la BMO seraient complètement en haut. Je crois que la Banque Scotia, et la Banque Nationale, sont plus près de l’autre extrémité, en ce sens qu’elles sont moins sensibles à la hausse des taux, et la CIBC se situe quelque part entre les deux.
Qu’est-ce que vous surveillez... je veux dire, quand vous songez à tous les facteurs de croissance? On observe des acquisitions dans ce secteur en ce moment, et une partie de ce capital est déployée. Mais d’autres facteurs défavorables, favorables, je veux dire... le monde est compliqué en ce moment, alors, Mario, que se passe-t-il?
Eh bien, je vais quand même partir du principe que, malgré ce qui se passe en Europe, les taux continuent d’augmenter et que les banques centrales du monde entier continuent de relever les taux. Et si c’est le cas, la hausse des taux et l’amélioration des marges vont être les thèmes dominants en 2022 tout comme l’accélération de la croissance des prêts commerciaux, et aussi la croissance des cartes de crédit. Ça devrait être déterminant.
Mais quand on pense au-delà de 2022, on devrait commencer à se préparer à un ralentissement. En 2023, il est tout à fait concevable que les pertes sur créances reviennent à la normale. Les pertes sur créances sont incroyablement faibles en ce moment en raison de tout le soutien offert par le gouvernement aux consommateurs et aux sociétés. D’ici 2023, on s’attend à ce que le crédit se normalise, même qu’il commence à se détériorer.
Ça pourrait jouer un rôle dans le ralentissement de la croissance des bénéfices en 2023 et en 2024, ce qui signifie que les acquisitions actuelles des banques vont jouer un rôle très important dans la croissance des bénéfices, parce qu’une normalisation du crédit va réduire une partie de la croissance de nos banques canadiennes. C’est ce que je crois fermement pour 2023 et 2024.
Oui.
Ça nuit à la croissance pour tout le monde. Mario, merci beaucoup pour votre temps aujourd’hui.
Merci, Kim.
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