
Des investisseurs croient que d’autres hausses de taux sont à prévoir, selon des données. Mais y a-t-il des arguments en faveur d’un maintien aux niveaux actuels? Greg Bonnell de Parlons Argent en direct discute avec Alexandra Gorewicz, gestionnaire de portefeuille, Titres à revenu fixe à gestion active, à Gestion de Placements TD.
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Le coût de la vie continue de baisser au Canada. L’inflation globale s’est établie à 5,9 % en janvier. Mais comme le marché de l’emploi et les consommateurs continuent d’être résilients, qu’est-ce que tout cela signifie pour l’évolution des taux d’intérêt?
J’accueille Alexandra Gorewicz, gestionnaire de portefeuille, Titres à revenu fixe à gestion active à Gestion de Placements TD pour en savoir plus. Alex, c’est un plaisir de vous retrouver.
Merci, Greg. C’est un plaisir d’être là.
Alors, parlons un peu de ce rapport. De toute évidence, l’inflation globale va dans la bonne direction depuis un certain temps, mais d’autres aspects nous laissent perplexes, du moins pour ma part. Quelles ont été les répercussions des hausses de taux jusqu’à maintenant, et vers quoi nous dirigeons-nous? Qu’en pensez-vous?
OK. Avec l’inflation globale à 5,9 %, nous observons toujours une hausse du prix des aliments, mais cela ne concerne pas que le Canada. C’est une tendance à l’échelle mondiale. Les prix des aliments continuent d’augmenter à un rythme raisonnable.
Mais si nous regardons l’inflation sous-jacente, qui exclut l’énergie et le prix des aliments, nous observons une tendance déflationniste qui se poursuit depuis plusieurs mois. Le problème, c’est que le rythme du ralentissement est un peu plus lent que les prévisions, et pas seulement les nôtres, mais probablement aussi celles de la Banque du Canada.
De plus, ces derniers mois, nous avons constaté certaines révisions à la hausse concernant les chiffres de l’inflation sous-jacente. Ce n’est probablement pas ce que nous voulons voir. À cette période de l’année, les hausses saisonnières surprises de l’inflation sous-jacente sont assez importantes, mais si nous cherchons quelles sont les composantes solides et les plus faibles, les composantes liées au logement sont les plus résilientes.
Et nous nous y attendions. Loyers, prêts hypothécaires, frais d’administration… ils sont tous supérieurs à ceux de l’an dernier. Nous savons qu’ils réagissent plus lentement au resserrement de la politique monétaire. Donc je pense que ce qui se joue actuellement n’est pas une surprise, et que ça ne modifie en rien les perspectives de la Banque du Canada.
Oui, parce que l’inflation globale s’atténue. Vous avez fait une belle analyse de l’inflation globale, mais nous avons également reçu un rapport sur les ventes au détail. Nous avons dépensé, en décembre, mais c’est habituellement un mois de dépenses.
Mais ce que les statistiques n’expliquent pas, C’est que nous avons aussi dépensé en janvier. Le marché de l’emploi a été vigoureux. Alors oui, la Banque du Canada a dit faire une pause. Elle veut voir comment ça se passe sur le plan économique.
C’est intéressant ces derniers temps, la conversation est passée de « Quand va-t-elle réduire les taux? » à « Va-t-elle finalement augmenter les taux une nouvelle fois? » Que voit-elle dans les données?
Oui, les données sont contradictoires, n’est-ce pas? C’est effectivement ce que vous soulignez. Le fait que le marché du travail, en particulier, ait été si résilient et que nous continuions de créer des emplois à un rythme effréné suggère que la consommation, bien qu’elle ralentisse par rapport à l’année précédente, demeure assez résiliente. Elle pourrait même nous aider à entrevoir une légère croissance économique positive au premier trimestre de cette année.
Mais cela ne change rien au fait que la tendance de décélération de la consommation se poursuit, notamment dans les composantes liées au logement, qui contribuent grandement à l’économie canadienne. Et ce, avant que nous ayons observé le plein effet des hausses que la Banque du Canada a effectué ces 12 derniers mois.
Il est donc temps de réfléchir à ce qui est vraiment nécessaire. Nous devons voir le plein effet du resserrement de la Banque du Canada au cours des prochains mois, peut-être même des prochains trimestres, au niveau actuel des taux d’intérêt. C’est une des raisons pour lesquelles la Banque du Canada a déclaré être à l’aise de faire une pause et d’attendre. Très bien.
Parlons de ce qui se passe au sud de la frontière. Il semble y avoir eu un changement dans les attentes de ce que nous pouvons obtenir, sans doute, de la banque centrale la plus puissante du monde. Certains commencent à parler de 50 points de base pour la prochaine hausse. Comment interprétons-nous cette situation?
La situation est semblable à celle du Canada en raison du ralentissement de l’inflation, ou du processus déflationniste. C’est ce que le président Powell a répété à plusieurs reprises dans son dernier discours. Il a souvent parlé de déflation.
Ce processus est toujours en cours. Encore une fois, est-ce que le rythme est plus lent que prévu? Oui. Mais nous savons depuis un bon moment que, par exemple, se rendre de 8 % d’inflation globale à environ 4 % serait relativement rapide.
Nous pouvons encore y arriver d’ici la fin du premier trimestre, disons mars ou avril. Mais d’après les données, notamment sur les indices des directeurs d’achats des services, le marché de l’emploi qui continue manifestement de faire preuve d’une grande résilience –et pas seulement d’une résilience, peut-être. Il pourrait même y avoir une accélération, bien qu’il soit encore trop tôt pour l’appeler ainsi.
Tout cela montre que de passer de 4 % d’inflation à la cible de la Fed de 2 % sera probablement plus importante ardu. Ce sera plus lent. Et ce que cela signifie vraiment pour le marché obligataire est Qu’il faut prendre en compte ce que la Fed a déclaré, à savoir qu’elle ne réduirait pas les taux cette année.
Est-ce que cela signifie que la Fed doit augmenter son taux directeur? Je ne pense pas que les données appuient la thèse selon laquelle l’économie redémarre, mais plutôt que la décélération ralentit.
Il est intéressant de vous entendre dire que le marché obligataire actuel doit tenir compte de ce que dit la Fed, car je crois que nous avons abordé l’année et certainement l’année dernière, avec un léger désaccord entre la Fed, qui a dit : « Nous faisons ça, ça et ça », et le marché qui désapprouve. Mais je regarde l’écran à l’instant. J’ai un taux obligataire américain à 10 ans de 3,9 %. Ce pourcentage est en hausse constante.
Il a grimpé, mais croyez-le ou non, c’est plus ou moins là où nous avons commencé l’année. Les taux d’intérêt ont donc sensiblement diminué en janvier. Et ils ont réaugmenté, en particulier grâce à la vigueur sur le marché du travail.
Toutefois, cette idée d’anticiper le virage de la Fed, à savoir la réduction des taux au deuxième semestre de l’année, aucune donnée économique des dernières semaines n’appuie ce scénario. Le marché obligataire a donc essentiellement dû encaisser cette baisse des taux d’intérêt, pour ainsi dire. Nous sommes donc plus ou moins au même point qu’au début de l’année.
Encore une fois, de notre point de vue, cela revient simplement à soutenir l’idée selon laquelle la Fed a raison de ne pas réduire les taux cette année. Mais doit-elle vraiment les augmenter davantage? Doit-elle les augmenter pour atteindre 5,25 ou 5,5 %? Le fait est, encore une fois, que nous devons maintenir les taux à ce niveau pendant un certain temps pour voir les effets sur le système et mesurer le plein effet du resserrement de la politique monétaire sur l’économie.
Le fait que le marché obligataire croit finalement la Fed maintenant change-t-il les thèses de placement par rapport aux fluctuations des obligations que nous avons pu observer cette année? De toute évidence, l’an dernier, en raison des fortes hausses de taux, les portefeuilles d’obligations n’avaient pas un très bon rendement. Mais maintenant, ces taux sont offerts, et peut-être même une pause. Cela change-t-il vraiment notre idée du rendement des obligations cette année?
Cela dépend des obligations. Prenons le cas des obligations à court terme avec des taux d’intérêt sur un ou deux ans : Ces taux peuvent encore augmenter. En fait, ils devraient augmenter si nous suivons la Fed, c’est-à-dire atteindre 5,25 % et faire une pause pour le reste de l’année.
Mais si nous regardons plus loin sur la courbe des taux, par exemple, les taux d’intérêt à 10 ans ou à 30 ans, la vraie question que nous devons nous poser est la suivante : Pensons-nous que la Fed réduira de nouveau les taux d’intérêt? Et si la réponse est oui, à quel niveau les réduira-t-elle?
Si nous pensons que des taux d’intérêt de 4 % sur 10 ans sont audacieux par rapport au taux que la Fed continue de vouloir atteindre pour que l’économie américaine soit à l’équilibre, soit environ 2,5 %, alors le taux actuel est relativement élevé par rapport au taux directeur que la Fed souhaite atteindre.
C’est donc une façon simpliste de dire qu’il est possible, avec le temps et à mesure que l’économie continue de décélérer, que les taux d’intérêt à long terme baissent.
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[MUSIQUE]
Le coût de la vie continue de baisser au Canada. L’inflation globale s’est établie à 5,9 % en janvier. Mais comme le marché de l’emploi et les consommateurs continuent d’être résilients, qu’est-ce que tout cela signifie pour l’évolution des taux d’intérêt?
J’accueille Alexandra Gorewicz, gestionnaire de portefeuille, Titres à revenu fixe à gestion active à Gestion de Placements TD pour en savoir plus. Alex, c’est un plaisir de vous retrouver.
Merci, Greg. C’est un plaisir d’être là.
Alors, parlons un peu de ce rapport. De toute évidence, l’inflation globale va dans la bonne direction depuis un certain temps, mais d’autres aspects nous laissent perplexes, du moins pour ma part. Quelles ont été les répercussions des hausses de taux jusqu’à maintenant, et vers quoi nous dirigeons-nous? Qu’en pensez-vous?
OK. Avec l’inflation globale à 5,9 %, nous observons toujours une hausse du prix des aliments, mais cela ne concerne pas que le Canada. C’est une tendance à l’échelle mondiale. Les prix des aliments continuent d’augmenter à un rythme raisonnable.
Mais si nous regardons l’inflation sous-jacente, qui exclut l’énergie et le prix des aliments, nous observons une tendance déflationniste qui se poursuit depuis plusieurs mois. Le problème, c’est que le rythme du ralentissement est un peu plus lent que les prévisions, et pas seulement les nôtres, mais probablement aussi celles de la Banque du Canada.
De plus, ces derniers mois, nous avons constaté certaines révisions à la hausse concernant les chiffres de l’inflation sous-jacente. Ce n’est probablement pas ce que nous voulons voir. À cette période de l’année, les hausses saisonnières surprises de l’inflation sous-jacente sont assez importantes, mais si nous cherchons quelles sont les composantes solides et les plus faibles, les composantes liées au logement sont les plus résilientes.
Et nous nous y attendions. Loyers, prêts hypothécaires, frais d’administration… ils sont tous supérieurs à ceux de l’an dernier. Nous savons qu’ils réagissent plus lentement au resserrement de la politique monétaire. Donc je pense que ce qui se joue actuellement n’est pas une surprise, et que ça ne modifie en rien les perspectives de la Banque du Canada.
Oui, parce que l’inflation globale s’atténue. Vous avez fait une belle analyse de l’inflation globale, mais nous avons également reçu un rapport sur les ventes au détail. Nous avons dépensé, en décembre, mais c’est habituellement un mois de dépenses.
Mais ce que les statistiques n’expliquent pas, C’est que nous avons aussi dépensé en janvier. Le marché de l’emploi a été vigoureux. Alors oui, la Banque du Canada a dit faire une pause. Elle veut voir comment ça se passe sur le plan économique.
C’est intéressant ces derniers temps, la conversation est passée de « Quand va-t-elle réduire les taux? » à « Va-t-elle finalement augmenter les taux une nouvelle fois? » Que voit-elle dans les données?
Oui, les données sont contradictoires, n’est-ce pas? C’est effectivement ce que vous soulignez. Le fait que le marché du travail, en particulier, ait été si résilient et que nous continuions de créer des emplois à un rythme effréné suggère que la consommation, bien qu’elle ralentisse par rapport à l’année précédente, demeure assez résiliente. Elle pourrait même nous aider à entrevoir une légère croissance économique positive au premier trimestre de cette année.
Mais cela ne change rien au fait que la tendance de décélération de la consommation se poursuit, notamment dans les composantes liées au logement, qui contribuent grandement à l’économie canadienne. Et ce, avant que nous ayons observé le plein effet des hausses que la Banque du Canada a effectué ces 12 derniers mois.
Il est donc temps de réfléchir à ce qui est vraiment nécessaire. Nous devons voir le plein effet du resserrement de la Banque du Canada au cours des prochains mois, peut-être même des prochains trimestres, au niveau actuel des taux d’intérêt. C’est une des raisons pour lesquelles la Banque du Canada a déclaré être à l’aise de faire une pause et d’attendre. Très bien.
Parlons de ce qui se passe au sud de la frontière. Il semble y avoir eu un changement dans les attentes de ce que nous pouvons obtenir, sans doute, de la banque centrale la plus puissante du monde. Certains commencent à parler de 50 points de base pour la prochaine hausse. Comment interprétons-nous cette situation?
La situation est semblable à celle du Canada en raison du ralentissement de l’inflation, ou du processus déflationniste. C’est ce que le président Powell a répété à plusieurs reprises dans son dernier discours. Il a souvent parlé de déflation.
Ce processus est toujours en cours. Encore une fois, est-ce que le rythme est plus lent que prévu? Oui. Mais nous savons depuis un bon moment que, par exemple, se rendre de 8 % d’inflation globale à environ 4 % serait relativement rapide.
Nous pouvons encore y arriver d’ici la fin du premier trimestre, disons mars ou avril. Mais d’après les données, notamment sur les indices des directeurs d’achats des services, le marché de l’emploi qui continue manifestement de faire preuve d’une grande résilience –et pas seulement d’une résilience, peut-être. Il pourrait même y avoir une accélération, bien qu’il soit encore trop tôt pour l’appeler ainsi.
Tout cela montre que de passer de 4 % d’inflation à la cible de la Fed de 2 % sera probablement plus importante ardu. Ce sera plus lent. Et ce que cela signifie vraiment pour le marché obligataire est Qu’il faut prendre en compte ce que la Fed a déclaré, à savoir qu’elle ne réduirait pas les taux cette année.
Est-ce que cela signifie que la Fed doit augmenter son taux directeur? Je ne pense pas que les données appuient la thèse selon laquelle l’économie redémarre, mais plutôt que la décélération ralentit.
Il est intéressant de vous entendre dire que le marché obligataire actuel doit tenir compte de ce que dit la Fed, car je crois que nous avons abordé l’année et certainement l’année dernière, avec un léger désaccord entre la Fed, qui a dit : « Nous faisons ça, ça et ça », et le marché qui désapprouve. Mais je regarde l’écran à l’instant. J’ai un taux obligataire américain à 10 ans de 3,9 %. Ce pourcentage est en hausse constante.
Il a grimpé, mais croyez-le ou non, c’est plus ou moins là où nous avons commencé l’année. Les taux d’intérêt ont donc sensiblement diminué en janvier. Et ils ont réaugmenté, en particulier grâce à la vigueur sur le marché du travail.
Toutefois, cette idée d’anticiper le virage de la Fed, à savoir la réduction des taux au deuxième semestre de l’année, aucune donnée économique des dernières semaines n’appuie ce scénario. Le marché obligataire a donc essentiellement dû encaisser cette baisse des taux d’intérêt, pour ainsi dire. Nous sommes donc plus ou moins au même point qu’au début de l’année.
Encore une fois, de notre point de vue, cela revient simplement à soutenir l’idée selon laquelle la Fed a raison de ne pas réduire les taux cette année. Mais doit-elle vraiment les augmenter davantage? Doit-elle les augmenter pour atteindre 5,25 ou 5,5 %? Le fait est, encore une fois, que nous devons maintenir les taux à ce niveau pendant un certain temps pour voir les effets sur le système et mesurer le plein effet du resserrement de la politique monétaire sur l’économie.
Le fait que le marché obligataire croit finalement la Fed maintenant change-t-il les thèses de placement par rapport aux fluctuations des obligations que nous avons pu observer cette année? De toute évidence, l’an dernier, en raison des fortes hausses de taux, les portefeuilles d’obligations n’avaient pas un très bon rendement. Mais maintenant, ces taux sont offerts, et peut-être même une pause. Cela change-t-il vraiment notre idée du rendement des obligations cette année?
Cela dépend des obligations. Prenons le cas des obligations à court terme avec des taux d’intérêt sur un ou deux ans : Ces taux peuvent encore augmenter. En fait, ils devraient augmenter si nous suivons la Fed, c’est-à-dire atteindre 5,25 % et faire une pause pour le reste de l’année.
Mais si nous regardons plus loin sur la courbe des taux, par exemple, les taux d’intérêt à 10 ans ou à 30 ans, la vraie question que nous devons nous poser est la suivante : Pensons-nous que la Fed réduira de nouveau les taux d’intérêt? Et si la réponse est oui, à quel niveau les réduira-t-elle?
Si nous pensons que des taux d’intérêt de 4 % sur 10 ans sont audacieux par rapport au taux que la Fed continue de vouloir atteindre pour que l’économie américaine soit à l’équilibre, soit environ 2,5 %, alors le taux actuel est relativement élevé par rapport au taux directeur que la Fed souhaite atteindre.
C’est donc une façon simpliste de dire qu’il est possible, avec le temps et à mesure que l’économie continue de décélérer, que les taux d’intérêt à long terme baissent.
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