Le nouveau plafond des prix du pétrole russe imposé par les pays du G7 entre en vigueur et l’impact potentiel sur les marchés de l’énergie est au cœur de l’attention. Anthony Okolie discute avec Bart Melek, chef, Stratégie relative aux produits de base à Valeurs Mobilières TD, des derniers développements et des perspectives pour les prix du pétrole.
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Le prix du pétrole tourne autour de 76 $ le baril et les négociateurs évaluent l’impact du plafonnement des prix du pétrole russe pour le marché. Mais dans un contexte d’offre mondiale serrée, les prix resteront-ils bas plus longtemps, ou est-il possible qu’ils augmentent? Bart Melek est chef, Stratégie relative aux produits de base, Valeurs Mobilières TD. Bart, merci beaucoup d’avoir répondu présent.
Oh. Ça me fait plaisir. Je suis toujours très content d’être ici. Merci beaucoup de l’invitation.
Et pour répondre à votre question, je pense que le pétrole se porte mieux. Selon moi, le facteur qui a le plus nui au pétrole est l’incertitude et maintenant l’OPEP confirme qu’elle ne réduira pas l’offre à l’avenir. Et cela s’explique en partie, par le plafonnement des prix du pétrole russe.
On ne sait toujours pas exactement quelles seront les répercussions sur l’offre. Il y a diverses écoles de pensée, certains pensent que cette limite pourrait entraîner une forte diminution. D’autres sont d’avis qu’une grande partie des répercussions seront évitées par la flotte clandestine russe d’une centaine de pétroliers et d’autres moyens de contourner ces sanctions.
Pensez-vous que les Russes pourraient arrêter les exportations de pétrole en raison de l’embargo?
Je crois que le risque est faible. Bien sûr, les Russes menacent de le faire, mais ils sont en conflit avec l’Ukraine. Ils sont positionnés contre les États-Unis et l’OTAN qui soutiennent l’Ukraine.
Ils vont avoir besoin de cette source de revenus, et je pense qu’ils exagèrent beaucoup. Avec ces menaces, ils espèrent peut-être convaincre les alliés de ne pas prendre cette mesure. Mais en fin de compte, je pense que c’est probablement dans l’intérêt des Russes de continuer, même s’ils reçoivent moins de revenus. Moins de revenus, c’est toujours mieux que pas de revenus du tout.
OK. Parlons de l’autre grande annonce. L’OPEP et ses alliés ont convenu de maintenir la production au niveau actuel. Est-ce que cette décision vous surprend?
On pensait que c’est ce qui allait se produire. L’OPEP est généralement très prudente quand elle modifie sa politique, et c’est le cas depuis un moment, car elle tente d’équilibrer l’offre et la demande et de s’assurer que les budgets nationaux sont adéquats. Je ne suis donc pas surpris, compte tenu de l’incertitude entourant ce plafonnement et son incidence sur l’offre. On pensait qu’ils maintiendraient leur quota de réduction de deux millions de barils par jour de la dernière réunion, qui a entraîné… qui cible idéalement une offre d’environ 1,1 million de barils. Je pense qu’ils vont attendre de voir comment la demande évolue, les répercussions de la réouverture de la Chine sur ces marchés et les performances des économies macroéconomiques en Occident.
Ils vont donc adopter une approche plus stratégique à l’avenir sur la façon dont ils gèrent leur production.
Certainement. Je pense qu’ils sont stratégiques depuis un bon moment et la raison pour laquelle ils sont en mesure de le faire, c’est qu’il n’y a pas vraiment d’importants concurrents qui se profilent à l’horizon. Si l’OPEP supprime un autre demi-million de barils, après avoir réduit les quotas de deux millions de barils la dernière fois, la production excédentaire de gaz de schiste ne pourra pas combler ce vide et constituer une nouvelle offre. L’OPEP est libre de faire ce qu’elle veut, du moins pour l’instant.
OK. Quels sont les risques géopolitiques pour l’avenir? Il semble que les États-Unis ne souhaitent plus exploiter leurs réserves de pétrole pour reconstituer leurs stocks. Vous avez mentionné le manque de demande en provenance de la Chine. Quels sont selon vous les risques pour le pétrole?
Le risque le plus important, bien sûr, concerne le gaz naturel, et ça peut paraître étrange de parler de gaz naturel, alors qu’on essaie de répondre à une question sur le pétrole. Mais on est toujours au début de l’hiver et les températures pourraient chuter, peut-être beaucoup plus que prévu. On ne peut pas savoir. Il est difficile de faire des prévisions météorologiques.
Jusqu’à présent, les stocks sont restés abondants, mais il y a toujours un risque que les stocks de gaz naturel soient considérablement réduits. Et cela pourrait signifier qu’on utilisera l’offre de distillat plus que jusqu’à présent. Or, ces stocks sont faibles par rapport aux niveaux historiques, tout comme le pétrole. Il y a une capacité excédentaire de raffinage en Chine et si on constate que la demande de distillat est beaucoup plus élevée qu’on le pensait, en raison des conditions hivernales, on pourrait voir ce marché du pétrole devenir beaucoup plus restreint qu’on ne le prévoit à l’heure actuelle.
OK. Compte tenu de tous ces risques sur le marché, quelles sont vos perspectives pour le prix du pétrole à l’approche de 2023?
Eh bien, on est plutôt optimistes pour le pétrole. Je pense que maintenant tout le monde connaît notre logique, mais je vais la répéter. On pense que l’OPEP continuera de se comporter de façon assez stratégique, et même si on prévoit que la croissance de la demande se détériorera l’an prochain… à cause de la récession dans le monde occidental, mais également dans de nombreuses régions du monde… L’Europe n’ira probablement pas très bien. Les États-Unis risquent fort de connaître une contraction à un moment donné. Mais on s’attend toujours à ce que la demande soit positive, bien au-delà d’un million de barils par jour.
En même temps, on observe une crise sur le marché du gaz naturel, avec, comme je viens de le dire, une demande qui pourrait être beaucoup plus forte. Je pense que l’OPEP continue de se comporter de façon assez stratégique, et elle ajustera sa production pour s’assurer qu’il n’y a pas une offre excédentaire qui ferait grimper les prix. L’autre grand risque pour moi, c’est le changement de la politique de la Réserve fédérale, on ne pense pas qu’il aura lieu avant le milieu de l’année. C’est à ce moment-là que les marchés commenceront à le refléter.
La spéculation monétaire pourrait le stimuler. Les données fondamentales devraient donc rester serrées et, à mon avis, quand on commencera à penser que cette contraction de la croissance de la demande est inversée, le pétrole ira beaucoup mieux. Peut-être pas aussi rapidement qu’on l’aurait souhaité. On a rédigé ces perspectives il y a quelques semaines, et comme je l’ai dit…
les choses changent.
Les choses changent, et il est difficile d’établir des prévisions pour l’avenir. Mais je pense que le thème général demeure.
Vous avez participé à une table ronde sur vos perspectives pour les produits de base. Y a-t-il des thèmes clés dont les investisseurs devraient être au courant, selon vous?
Oui. Je pense que l’un des principaux thèmes est que l’offre est assez restreinte. De plus, même si on prévoit un type de repli cyclique, on ne s’attend pas à ce qu’il soit aussi profond qu’il l’a été dans le passé. Historiquement, on a connu 40, peut-être même jusqu’à 70 %, pour certains cycles, certains produits de base, comme le pétrole ou le cuivre.
On ne prévoit pas de telles corrections, et c’est principalement parce que… pour les métaux de base, par exemple… on observe des contraintes sur les sites miniers. Les fonderies ont des contraintes en raison des problèmes énergétiques mondiaux. Et on observe une baisse moins importante de la demande que ce à quoi on pourrait normalement s’attendre en période de contraction.
Et pour le cuivre, on observe les premiers signes que les véhicules électriques… et les données chinoises le montrent, le cuivre est soutenu par la demande pour les véhicules électriques. Si on continue dans cette logique, qui consiste à utiliser plus de métal par véhicule, à mesure que cette initiative mondiale de décarbonisation se développe, on verra une forte augmentation de la demande de cuivre due aux facteurs ESG.
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Le prix du pétrole tourne autour de 76 $ le baril et les négociateurs évaluent l’impact du plafonnement des prix du pétrole russe pour le marché. Mais dans un contexte d’offre mondiale serrée, les prix resteront-ils bas plus longtemps, ou est-il possible qu’ils augmentent? Bart Melek est chef, Stratégie relative aux produits de base, Valeurs Mobilières TD. Bart, merci beaucoup d’avoir répondu présent.
Oh. Ça me fait plaisir. Je suis toujours très content d’être ici. Merci beaucoup de l’invitation.
Et pour répondre à votre question, je pense que le pétrole se porte mieux. Selon moi, le facteur qui a le plus nui au pétrole est l’incertitude et maintenant l’OPEP confirme qu’elle ne réduira pas l’offre à l’avenir. Et cela s’explique en partie, par le plafonnement des prix du pétrole russe.
On ne sait toujours pas exactement quelles seront les répercussions sur l’offre. Il y a diverses écoles de pensée, certains pensent que cette limite pourrait entraîner une forte diminution. D’autres sont d’avis qu’une grande partie des répercussions seront évitées par la flotte clandestine russe d’une centaine de pétroliers et d’autres moyens de contourner ces sanctions.
Pensez-vous que les Russes pourraient arrêter les exportations de pétrole en raison de l’embargo?
Je crois que le risque est faible. Bien sûr, les Russes menacent de le faire, mais ils sont en conflit avec l’Ukraine. Ils sont positionnés contre les États-Unis et l’OTAN qui soutiennent l’Ukraine.
Ils vont avoir besoin de cette source de revenus, et je pense qu’ils exagèrent beaucoup. Avec ces menaces, ils espèrent peut-être convaincre les alliés de ne pas prendre cette mesure. Mais en fin de compte, je pense que c’est probablement dans l’intérêt des Russes de continuer, même s’ils reçoivent moins de revenus. Moins de revenus, c’est toujours mieux que pas de revenus du tout.
OK. Parlons de l’autre grande annonce. L’OPEP et ses alliés ont convenu de maintenir la production au niveau actuel. Est-ce que cette décision vous surprend?
On pensait que c’est ce qui allait se produire. L’OPEP est généralement très prudente quand elle modifie sa politique, et c’est le cas depuis un moment, car elle tente d’équilibrer l’offre et la demande et de s’assurer que les budgets nationaux sont adéquats. Je ne suis donc pas surpris, compte tenu de l’incertitude entourant ce plafonnement et son incidence sur l’offre. On pensait qu’ils maintiendraient leur quota de réduction de deux millions de barils par jour de la dernière réunion, qui a entraîné… qui cible idéalement une offre d’environ 1,1 million de barils. Je pense qu’ils vont attendre de voir comment la demande évolue, les répercussions de la réouverture de la Chine sur ces marchés et les performances des économies macroéconomiques en Occident.
Ils vont donc adopter une approche plus stratégique à l’avenir sur la façon dont ils gèrent leur production.
Certainement. Je pense qu’ils sont stratégiques depuis un bon moment et la raison pour laquelle ils sont en mesure de le faire, c’est qu’il n’y a pas vraiment d’importants concurrents qui se profilent à l’horizon. Si l’OPEP supprime un autre demi-million de barils, après avoir réduit les quotas de deux millions de barils la dernière fois, la production excédentaire de gaz de schiste ne pourra pas combler ce vide et constituer une nouvelle offre. L’OPEP est libre de faire ce qu’elle veut, du moins pour l’instant.
OK. Quels sont les risques géopolitiques pour l’avenir? Il semble que les États-Unis ne souhaitent plus exploiter leurs réserves de pétrole pour reconstituer leurs stocks. Vous avez mentionné le manque de demande en provenance de la Chine. Quels sont selon vous les risques pour le pétrole?
Le risque le plus important, bien sûr, concerne le gaz naturel, et ça peut paraître étrange de parler de gaz naturel, alors qu’on essaie de répondre à une question sur le pétrole. Mais on est toujours au début de l’hiver et les températures pourraient chuter, peut-être beaucoup plus que prévu. On ne peut pas savoir. Il est difficile de faire des prévisions météorologiques.
Jusqu’à présent, les stocks sont restés abondants, mais il y a toujours un risque que les stocks de gaz naturel soient considérablement réduits. Et cela pourrait signifier qu’on utilisera l’offre de distillat plus que jusqu’à présent. Or, ces stocks sont faibles par rapport aux niveaux historiques, tout comme le pétrole. Il y a une capacité excédentaire de raffinage en Chine et si on constate que la demande de distillat est beaucoup plus élevée qu’on le pensait, en raison des conditions hivernales, on pourrait voir ce marché du pétrole devenir beaucoup plus restreint qu’on ne le prévoit à l’heure actuelle.
OK. Compte tenu de tous ces risques sur le marché, quelles sont vos perspectives pour le prix du pétrole à l’approche de 2023?
Eh bien, on est plutôt optimistes pour le pétrole. Je pense que maintenant tout le monde connaît notre logique, mais je vais la répéter. On pense que l’OPEP continuera de se comporter de façon assez stratégique, et même si on prévoit que la croissance de la demande se détériorera l’an prochain… à cause de la récession dans le monde occidental, mais également dans de nombreuses régions du monde… L’Europe n’ira probablement pas très bien. Les États-Unis risquent fort de connaître une contraction à un moment donné. Mais on s’attend toujours à ce que la demande soit positive, bien au-delà d’un million de barils par jour.
En même temps, on observe une crise sur le marché du gaz naturel, avec, comme je viens de le dire, une demande qui pourrait être beaucoup plus forte. Je pense que l’OPEP continue de se comporter de façon assez stratégique, et elle ajustera sa production pour s’assurer qu’il n’y a pas une offre excédentaire qui ferait grimper les prix. L’autre grand risque pour moi, c’est le changement de la politique de la Réserve fédérale, on ne pense pas qu’il aura lieu avant le milieu de l’année. C’est à ce moment-là que les marchés commenceront à le refléter.
La spéculation monétaire pourrait le stimuler. Les données fondamentales devraient donc rester serrées et, à mon avis, quand on commencera à penser que cette contraction de la croissance de la demande est inversée, le pétrole ira beaucoup mieux. Peut-être pas aussi rapidement qu’on l’aurait souhaité. On a rédigé ces perspectives il y a quelques semaines, et comme je l’ai dit…
les choses changent.
Les choses changent, et il est difficile d’établir des prévisions pour l’avenir. Mais je pense que le thème général demeure.
Vous avez participé à une table ronde sur vos perspectives pour les produits de base. Y a-t-il des thèmes clés dont les investisseurs devraient être au courant, selon vous?
Oui. Je pense que l’un des principaux thèmes est que l’offre est assez restreinte. De plus, même si on prévoit un type de repli cyclique, on ne s’attend pas à ce qu’il soit aussi profond qu’il l’a été dans le passé. Historiquement, on a connu 40, peut-être même jusqu’à 70 %, pour certains cycles, certains produits de base, comme le pétrole ou le cuivre.
On ne prévoit pas de telles corrections, et c’est principalement parce que… pour les métaux de base, par exemple… on observe des contraintes sur les sites miniers. Les fonderies ont des contraintes en raison des problèmes énergétiques mondiaux. Et on observe une baisse moins importante de la demande que ce à quoi on pourrait normalement s’attendre en période de contraction.
Et pour le cuivre, on observe les premiers signes que les véhicules électriques… et les données chinoises le montrent, le cuivre est soutenu par la demande pour les véhicules électriques. Si on continue dans cette logique, qui consiste à utiliser plus de métal par véhicule, à mesure que cette initiative mondiale de décarbonisation se développe, on verra une forte augmentation de la demande de cuivre due aux facteurs ESG.
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