Le Canada accuse un retard sur ses pairs sur le plan de la croissance de la productivité et de l’innovation : le niveau d’investissements en recherche et développement au pays se classe au dernier rang parmi les grandes économies. Anthony Okolie s’entretient avec James Marple, Économiste principal à la TD, pour discuter des raisons pour lesquelles le Canada est à la traîne et des mesures que le pays peut prendre pour combler l’écart en matière d’innovation.
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ANTHONY OKOLIE [00:00:03] James, tu es l’auteur d’un excellent rapport qui parle des difficultés d’innover au Canada et explique pourquoi nous prenons du retard. Mais d’abord, où se situe la productivité de notre main-d’œuvre par rapport à celle des autres pays?
JAMES MARPLE [00:00:13] Bien sûr, tout dépend d’à qui on se compare. On a tendance à se comparer aux États-Unis. Et malheureusement, l’écart s’est creusé. Si on remonte 50 ans en arrière, dans les années 1970, le Canada accusait un retard de productivité de 15 % par rapport aux États-Unis. En 2019, cet écart s’est creusé pour atteindre 25 %. Ce qui veut dire qu’à peu près tous les travailleurs des États-Unis génèrent 25 % de PIB en plus par personne. C’est vraiment un écart important. Malheureusement, le fossé se creuse aussi par rapport aux autres économies avancées, en particulier par rapport à des pays européens comme l’Allemagne, la France, les pays nordiques, et l’Australie. Notre productivité s’est détériorée en termes relatifs, par rapport à ces autres pays. Avant, nous dépassions la moyenne du G7. Mais nous sommes maintenant 15 % en dessous de la moyenne. Donc si on compare le Canada aux autres économies avancées, nous sommes à la traîne. Le taux de productivité a grimpé plus rapidement dans bon nombre de ces pays. L’écart s’est creusé au cours des dernières décennies.
ANTHONY OKOLIE [00:01:28] Pourquoi le Canada se classe-t-il si bas en matière d’innovation et de productivité?
JAMES MARPLE [00:01:32] C’est une excellente question. C’est le sujet de nombreuses recherches économiques depuis plusieurs décennies. Je sais que l’ancien économiste en chef de la TD, Don Drummond a beaucoup écrit à ce sujet. C’est une question sur laquelle nous continuons d’écrire et de réfléchir. Il est difficile de pointer du doigt un facteur en particulier pour expliquer la faiblesse de la productivité. Mais on peut certainement souligner le fait que les sociétés canadiennes investissent moins dans la recherche et le développement, dans les technologies de l’information et de la communication, et c’est là que l’innovation se produit par rapport aux autres pays. Quant à la question de comprendre pourquoi, plusieurs explications ont été avancées. Notre marché de consommation est relativement petit, du moins par rapport aux États-Unis. Nous avons déjà signalé la question du capital de risque, en particulier pour les petites entreprises. Tout cela a changé au cours des dernières années. En fait, l’année dernière, le montant de capital de risque levé au Canada a battu des records. Et nous devançons largement nos homologues européens sur ce front. Il faut donc commencer à chercher des réponses ailleurs. Et l’une des pistes de réflexion, ce sont les barrières réglementaires et juridictionnelles qui entravent le commerce, malgré l’absence de tarifs sur les échanges commerciaux avec les autres pays. Il existe beaucoup d’autres obstacles au commerce, comme des règlements différents d’une province à l’autre, différentes accréditations pour divers types de secteurs. Si on regarde les règlements sur le transport, le camionnage et l’envoi de marchandises à l’étranger, ne serait-ce que pour les produits alimentaires et l’alcool, les échanges commerciaux transfrontaliers sont impossibles dans bien des cas. D’après des estimations publiées par Statistique Canada, le coût de toutes ces barrières autres que les barrières géographiques – bien sûr, le Canada est immense et il y a forcément des obstacles naturels – mais si on exclut ces obstacles, c’est comme s’il y avait des tarifs d’environ 7 % sur tous les biens échangés entre les provinces partout au pays. Et si l’on suit une méthodologie comparable et que l’on fait le calcul pour les États-Unis, on s’aperçoit qu’il n’y a pas de barrières. On a donc imposé l’équivalent d’une TPS supplémentaire sur tous les produits échangés au pays. Et c’est sans un doute un facteur qui nuit à la productivité et à l’innovation, parce que ça limite la croissance des entreprises. D’après une autre étude des économistes du FMI, si on parvenait à lever toutes ces barrières, le PIB par habitant grimperait probablement d’environ 4 %. C’est donc loin d’être négligeable. Ça ne comblerait pas complètement l’écart en matière de productivité ou d’innovation, mais ça aiderait certainement.
ANTHONY OKOLIE [00:04:27] Compte tenu de ces difficultés, comme les tarifs et les autres coûts, que peut faire le Canada pour combler l’écart en matière d’innovation?
JAMES MARPLE [00:04:35] Si on se penche sur le cadre réglementaire, il y a eu des pressions pour favoriser le libre-échange entre les provinces canadiennes. En 2017, nous avons signé un accord de libre-échange entre les provinces. Elles ont accepté de travailler ensemble pour tenter de réduire certaines barrières non tarifaires. Malheureusement, il en existe encore beaucoup. On peut aussi citer l’initiative de Alberta, qui a décidé unilatéralement de reconnaître les accréditations des professionnels de partout au pays, et qui essaie de permettre à des entreprises de tout le pays de soumissionner lorsque le gouvernement fait des appels d’offres, pour éviter cette sorte de protectionnisme provincial. Mais il reste quand même des progrès à faire dans ce domaine. Je crois qu’en général, il faut s’assurer que la réglementation est logique. Beaucoup de règlements sont nécessaires et existent pour une bonne raison, comme assurer la sécurité, mais il ne faut pas qu’ils imposent des barrières inutiles, en particulier en ce qui a trait à la croissance des entreprises, à la capacité d’accroître les activités dans tout le pays sans être limité par l’endroit où l’on est implanté. Ce serait formidable. Et bien sûr, ça permettrait peut-être à certaines de nos entreprises, en particulier les petites entreprises, de s’aventurer au-delà des frontières du Canada et de se développer à l’international.
ANTHONY OKOLIE [00:06:05] Peux-tu nous parler de l’énergie et de la route vers la carboneutralité? Comment le Canada peut-il promouvoir l’innovation dans le domaine des technologies vertes?
JAMES MARPLE [00:06:14] Oui, Anthony, c’est une question cruciale. C’est certainement le plus grand défi économique des 20 à 30 prochaines années. Comment décarboniser l’économie, comment passer à une économie qui n’est pas fondée sur l’extraction ou la consommation de combustibles fossiles. C’est une démarche à entreprendre à l’échelle mondiale. D’abord, bien sûr, il faut instaurer une taxe sur le carbone pour que la pollution ait un prix. C’est important. Une autre chose dont parle le rapport, c’est l’importance d’établir avec certitude le prix actuel du carbone, mais aussi son prix futur pour permettre aux entreprises d’investir maintenant en tenant compte d’une forte hausse du prix du carbone. Elles doivent savoir que leurs investissements seront rentables parce qu’elles peuvent anticiper la hausse du prix. Et les gouvernements peuvent en faire plus pour partager le risque, pour que les entreprises soient rentables malgré la hausse du prix du carbone, en assumant le risque si le prix augmente. Les entreprises feront de l’argent et le gouvernement aussi. On peut prendre l’exemple de la Banque de l’infrastructure du Canada pour voir comment ce système pourrait fonctionner. Si le prix du carbone change ou n’évolue pas comme on l’avait promis aux entreprises, le gouvernement perd de l’argent et les entreprises bénéficient d’une forme de protection. Bien sûr, il faut un soutien direct et constant, en particulier pour la recherche et le développement. Nous pensons qu’il faudrait vraiment un soutien au tout début du processus pour faire avancer les recherches dans des domaines qui n’ont peut-être pas encore de valeur marchande, dont l’avenir n’est pas encore tout tracé, mais qui seront très certainement sources d’importantes innovations technologiques et qui nous permettront d’arriver là où nous devrons être dans 10, 20 ou 30 ans. Il faut brandir davantage la carotte et le bâton et, bien sûr, permettre la concurrence et l’encourager dans ce domaine et dans les autres, pour répartir les fonds le plus efficacement possible.
ANTHONY OKOLIE [00:08:14] Tu dis aussi dans le rapport qu’il est encore difficile de se prononcer sur l’efficacité des initiatives de soutien aux supergrappes au Canada, comme celle d’IA à Montréal. Pourquoi?
JAMES MARPLE [00:08:24] L’idée derrière les grappes, c’est en fait de réunir tout l’écosystème d’innovation en un seul endroit. On regroupe des entreprises qui travaillent dans l’intelligence artificielle, par exemple, à proximité des établissements postsecondaires, des universités et des chercheurs. Le but, c’est de rapprocher au maximum les entreprises, de favoriser les échanges de connaissances et de réaliser des progrès significatifs en tirant parti de la synergie entre les gens qui travaillent sur un même projet au même endroit. Et ça existe déjà. C’est cette idée qui sous-tend la Silicon Valley, où l’on a vu fleurir les toutes premières entreprises technologiques. On a de bonnes raisons de penser que ces grappes sont bénéfiques. C’est encore trop tôt pour le dire. Nous n’avons pas encore beaucoup de preuves de leur efficacité. Le gouvernement a dépensé pas mal d’argent dans ce domaine. Près de mille milliards de dollars sur 5 ans pour soutenir ces initiatives. Je pense que cette logique tient la route. Mais encore une fois, nous n’en sommes qu’aux balbutiements. Il reste à voir si cette stratégie est payante. Mais je pense que les supergrappes sont prometteuses et que dans les prochaines années, elles pourront aider à dynamiser l’innovation.
ANTHONY OKOLIE [00:09:36] Compte tenu de la situation actuelle, que doit surtout faire le Canada pour stimuler l’innovation?
JAMES MARPLE [00:09:43] D’abord, je voudrais souligner que le Canada a pris beaucoup de bonnes mesures. On a réduit l’impôt sur le revenu des sociétés. Nous offrons un bon environnement d’affaires pour les entreprises en démarrage. Nous avons des institutions solides, l’inflation est faible et stable. Les gouvernements se sont engagés à limiter les déficits. Toutes ces choses ont été mises en avant par le passé comme des facteurs d’innovation et elle garderont leur importance à l’avenir. Nous pensons qu’il faut se concentrer davantage sur la réglementation, et surtout donner des certitudes pour que les entreprises puissent se développer, pour réduire les obstacles à la croissance. Et aussi favoriser la concurrence pour éviter d’avoir beaucoup de secteurs protégés où l’incitation à innover est moins forte, simplement du fait que la concurrence est limitée. Si nous parvenons à faire tout cela et, bien sûr, si nous investissons dans les compétences de la population et dans la recherche primaire, nous devrions être en mesure d’innover davantage.
ANTHONY OKOLIE [00:10:50] Merci de t’être joint à nous.
JAMES MARPLE [00:10:52] Tout le plaisir est pour moi. Merci.
JAMES MARPLE [00:00:13] Bien sûr, tout dépend d’à qui on se compare. On a tendance à se comparer aux États-Unis. Et malheureusement, l’écart s’est creusé. Si on remonte 50 ans en arrière, dans les années 1970, le Canada accusait un retard de productivité de 15 % par rapport aux États-Unis. En 2019, cet écart s’est creusé pour atteindre 25 %. Ce qui veut dire qu’à peu près tous les travailleurs des États-Unis génèrent 25 % de PIB en plus par personne. C’est vraiment un écart important. Malheureusement, le fossé se creuse aussi par rapport aux autres économies avancées, en particulier par rapport à des pays européens comme l’Allemagne, la France, les pays nordiques, et l’Australie. Notre productivité s’est détériorée en termes relatifs, par rapport à ces autres pays. Avant, nous dépassions la moyenne du G7. Mais nous sommes maintenant 15 % en dessous de la moyenne. Donc si on compare le Canada aux autres économies avancées, nous sommes à la traîne. Le taux de productivité a grimpé plus rapidement dans bon nombre de ces pays. L’écart s’est creusé au cours des dernières décennies.
ANTHONY OKOLIE [00:01:28] Pourquoi le Canada se classe-t-il si bas en matière d’innovation et de productivité?
JAMES MARPLE [00:01:32] C’est une excellente question. C’est le sujet de nombreuses recherches économiques depuis plusieurs décennies. Je sais que l’ancien économiste en chef de la TD, Don Drummond a beaucoup écrit à ce sujet. C’est une question sur laquelle nous continuons d’écrire et de réfléchir. Il est difficile de pointer du doigt un facteur en particulier pour expliquer la faiblesse de la productivité. Mais on peut certainement souligner le fait que les sociétés canadiennes investissent moins dans la recherche et le développement, dans les technologies de l’information et de la communication, et c’est là que l’innovation se produit par rapport aux autres pays. Quant à la question de comprendre pourquoi, plusieurs explications ont été avancées. Notre marché de consommation est relativement petit, du moins par rapport aux États-Unis. Nous avons déjà signalé la question du capital de risque, en particulier pour les petites entreprises. Tout cela a changé au cours des dernières années. En fait, l’année dernière, le montant de capital de risque levé au Canada a battu des records. Et nous devançons largement nos homologues européens sur ce front. Il faut donc commencer à chercher des réponses ailleurs. Et l’une des pistes de réflexion, ce sont les barrières réglementaires et juridictionnelles qui entravent le commerce, malgré l’absence de tarifs sur les échanges commerciaux avec les autres pays. Il existe beaucoup d’autres obstacles au commerce, comme des règlements différents d’une province à l’autre, différentes accréditations pour divers types de secteurs. Si on regarde les règlements sur le transport, le camionnage et l’envoi de marchandises à l’étranger, ne serait-ce que pour les produits alimentaires et l’alcool, les échanges commerciaux transfrontaliers sont impossibles dans bien des cas. D’après des estimations publiées par Statistique Canada, le coût de toutes ces barrières autres que les barrières géographiques – bien sûr, le Canada est immense et il y a forcément des obstacles naturels – mais si on exclut ces obstacles, c’est comme s’il y avait des tarifs d’environ 7 % sur tous les biens échangés entre les provinces partout au pays. Et si l’on suit une méthodologie comparable et que l’on fait le calcul pour les États-Unis, on s’aperçoit qu’il n’y a pas de barrières. On a donc imposé l’équivalent d’une TPS supplémentaire sur tous les produits échangés au pays. Et c’est sans un doute un facteur qui nuit à la productivité et à l’innovation, parce que ça limite la croissance des entreprises. D’après une autre étude des économistes du FMI, si on parvenait à lever toutes ces barrières, le PIB par habitant grimperait probablement d’environ 4 %. C’est donc loin d’être négligeable. Ça ne comblerait pas complètement l’écart en matière de productivité ou d’innovation, mais ça aiderait certainement.
ANTHONY OKOLIE [00:04:27] Compte tenu de ces difficultés, comme les tarifs et les autres coûts, que peut faire le Canada pour combler l’écart en matière d’innovation?
JAMES MARPLE [00:04:35] Si on se penche sur le cadre réglementaire, il y a eu des pressions pour favoriser le libre-échange entre les provinces canadiennes. En 2017, nous avons signé un accord de libre-échange entre les provinces. Elles ont accepté de travailler ensemble pour tenter de réduire certaines barrières non tarifaires. Malheureusement, il en existe encore beaucoup. On peut aussi citer l’initiative de Alberta, qui a décidé unilatéralement de reconnaître les accréditations des professionnels de partout au pays, et qui essaie de permettre à des entreprises de tout le pays de soumissionner lorsque le gouvernement fait des appels d’offres, pour éviter cette sorte de protectionnisme provincial. Mais il reste quand même des progrès à faire dans ce domaine. Je crois qu’en général, il faut s’assurer que la réglementation est logique. Beaucoup de règlements sont nécessaires et existent pour une bonne raison, comme assurer la sécurité, mais il ne faut pas qu’ils imposent des barrières inutiles, en particulier en ce qui a trait à la croissance des entreprises, à la capacité d’accroître les activités dans tout le pays sans être limité par l’endroit où l’on est implanté. Ce serait formidable. Et bien sûr, ça permettrait peut-être à certaines de nos entreprises, en particulier les petites entreprises, de s’aventurer au-delà des frontières du Canada et de se développer à l’international.
ANTHONY OKOLIE [00:06:05] Peux-tu nous parler de l’énergie et de la route vers la carboneutralité? Comment le Canada peut-il promouvoir l’innovation dans le domaine des technologies vertes?
JAMES MARPLE [00:06:14] Oui, Anthony, c’est une question cruciale. C’est certainement le plus grand défi économique des 20 à 30 prochaines années. Comment décarboniser l’économie, comment passer à une économie qui n’est pas fondée sur l’extraction ou la consommation de combustibles fossiles. C’est une démarche à entreprendre à l’échelle mondiale. D’abord, bien sûr, il faut instaurer une taxe sur le carbone pour que la pollution ait un prix. C’est important. Une autre chose dont parle le rapport, c’est l’importance d’établir avec certitude le prix actuel du carbone, mais aussi son prix futur pour permettre aux entreprises d’investir maintenant en tenant compte d’une forte hausse du prix du carbone. Elles doivent savoir que leurs investissements seront rentables parce qu’elles peuvent anticiper la hausse du prix. Et les gouvernements peuvent en faire plus pour partager le risque, pour que les entreprises soient rentables malgré la hausse du prix du carbone, en assumant le risque si le prix augmente. Les entreprises feront de l’argent et le gouvernement aussi. On peut prendre l’exemple de la Banque de l’infrastructure du Canada pour voir comment ce système pourrait fonctionner. Si le prix du carbone change ou n’évolue pas comme on l’avait promis aux entreprises, le gouvernement perd de l’argent et les entreprises bénéficient d’une forme de protection. Bien sûr, il faut un soutien direct et constant, en particulier pour la recherche et le développement. Nous pensons qu’il faudrait vraiment un soutien au tout début du processus pour faire avancer les recherches dans des domaines qui n’ont peut-être pas encore de valeur marchande, dont l’avenir n’est pas encore tout tracé, mais qui seront très certainement sources d’importantes innovations technologiques et qui nous permettront d’arriver là où nous devrons être dans 10, 20 ou 30 ans. Il faut brandir davantage la carotte et le bâton et, bien sûr, permettre la concurrence et l’encourager dans ce domaine et dans les autres, pour répartir les fonds le plus efficacement possible.
ANTHONY OKOLIE [00:08:14] Tu dis aussi dans le rapport qu’il est encore difficile de se prononcer sur l’efficacité des initiatives de soutien aux supergrappes au Canada, comme celle d’IA à Montréal. Pourquoi?
JAMES MARPLE [00:08:24] L’idée derrière les grappes, c’est en fait de réunir tout l’écosystème d’innovation en un seul endroit. On regroupe des entreprises qui travaillent dans l’intelligence artificielle, par exemple, à proximité des établissements postsecondaires, des universités et des chercheurs. Le but, c’est de rapprocher au maximum les entreprises, de favoriser les échanges de connaissances et de réaliser des progrès significatifs en tirant parti de la synergie entre les gens qui travaillent sur un même projet au même endroit. Et ça existe déjà. C’est cette idée qui sous-tend la Silicon Valley, où l’on a vu fleurir les toutes premières entreprises technologiques. On a de bonnes raisons de penser que ces grappes sont bénéfiques. C’est encore trop tôt pour le dire. Nous n’avons pas encore beaucoup de preuves de leur efficacité. Le gouvernement a dépensé pas mal d’argent dans ce domaine. Près de mille milliards de dollars sur 5 ans pour soutenir ces initiatives. Je pense que cette logique tient la route. Mais encore une fois, nous n’en sommes qu’aux balbutiements. Il reste à voir si cette stratégie est payante. Mais je pense que les supergrappes sont prometteuses et que dans les prochaines années, elles pourront aider à dynamiser l’innovation.
ANTHONY OKOLIE [00:09:36] Compte tenu de la situation actuelle, que doit surtout faire le Canada pour stimuler l’innovation?
JAMES MARPLE [00:09:43] D’abord, je voudrais souligner que le Canada a pris beaucoup de bonnes mesures. On a réduit l’impôt sur le revenu des sociétés. Nous offrons un bon environnement d’affaires pour les entreprises en démarrage. Nous avons des institutions solides, l’inflation est faible et stable. Les gouvernements se sont engagés à limiter les déficits. Toutes ces choses ont été mises en avant par le passé comme des facteurs d’innovation et elle garderont leur importance à l’avenir. Nous pensons qu’il faut se concentrer davantage sur la réglementation, et surtout donner des certitudes pour que les entreprises puissent se développer, pour réduire les obstacles à la croissance. Et aussi favoriser la concurrence pour éviter d’avoir beaucoup de secteurs protégés où l’incitation à innover est moins forte, simplement du fait que la concurrence est limitée. Si nous parvenons à faire tout cela et, bien sûr, si nous investissons dans les compétences de la population et dans la recherche primaire, nous devrions être en mesure d’innover davantage.
ANTHONY OKOLIE [00:10:50] Merci de t’être joint à nous.
JAMES MARPLE [00:10:52] Tout le plaisir est pour moi. Merci.