La Réserve fédérale américaine a une nouvelle fois relevé son taux directeur de 25 points de base et laisse entrevoir une approche plus prudente à l’égard de nouvelles hausses de taux. Anthony Okolie discute avec Andrew Foran, économiste à la TD, de la décision de la Fed et de son engagement à réduire l’inflation.
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[MUSIQUE] * Avec un point en plus en un trimestre, le taux de la Fed est au plus haut depuis 22 ans. Andrew Foran, économiste à la TD, est avec moi aujourd’hui. Andrew, y a-t-il quelque chose qui vous a surpris aujourd’hui? * Dans l’ensemble, la décision correspond aux attentes. Les cours boursiers envisageaient à environ 100 % que ce serait le résultat de la décision d’aujourd’hui. L’annonce est également conforme à ce que la Réserve fédérale a indiqué dans ses communications à l’État. Et bien sûr, on a aussi le résumé des projections économiques de juin, qui ont montré que les membres du comité prévoyaient le besoin d’augmenter les taux de 50 points de plus cette année. * En plus de tout cela, on a reçu les données économiques qui soutiennent largement la décision prise par la Fed aujourd’hui. On a constaté une baisse de l’inflation globale au cours des derniers mois. Mais comme elle est due aux prix de l’énergie, les prix de base demeurent élevés. * Ensuite, pour ce qui est du marché du travail, on y observe une grande vigueur. On a vu, dans les données sur l’emploi les plus récentes, qu’environ un demi-million d’emplois avaient été créés en mai et en juin. Le taux de chômage est demeuré stable et faible, à 3,6 %. Et puis, bien sûr, les données les plus récentes des offres d’emploi sont d’un peu moins de 10 millions dans l’économie, ce qui équivaut à environ 1,7 offre par chômeur. Cela a fourni les bases sur lesquelles la Réserve fédérale a décidé la hausse supplémentaire de 25 points de base aujourd’hui. * D’accord, donc pour parler de la réunion, certains investisseurs espéraient que la Fed suspendrait sa campagne de hausse des taux d’intérêt. Jusqu’où pensez-vous que la Fed ira avant de faire une pause dans ses hausses de taux? * On prévoit que la Réserve fédérale conservera les taux au niveau actuel après la décision d’aujourd’hui afin de se donner plus de temps pour bien évaluer les effets cumulatifs et décalés des hausses de taux précédentes sur l’économie. On a eu une hausse de taux importante de 525 points de base depuis mars 2022. Et la Réserve fédérale veut se donner plus de temps pour évaluer pleinement les répercussions sur l’économie. * On a vu des indications que l’inflation commence à diminuer, mais pas suffisamment pour justifier une pause jusqu’à la décision d’aujourd’hui. La Réserve fédérale continuera donc de surveiller la situation. * D’accord, alors elle va continuer de surveiller la situation, mais d’après vous, quels autres risques potentiels envisage-t-elle? * Oui, alors. Le principal risque à ce stade est que la résilience observée au premier semestre de cette année pourrait continuer au deuxième semestre de cette année, ce qui aurait pour effet de protéger la chute de la demande dans l’économie, encourageant des pressions inflationnistes, et ensuite que la Réserve fédérale américaine doive augmenter ses taux et les maintenir à ce niveau plus longtemps. * Et il y a d’autres risques à l’horizon, avec la fin du moratoire sur la dette étudiante, qui est prévu à la fin de l’été. On prévoit que cela réduira d’environ 0,3 point de pourcentage la consommation d’ici le milieu de l’année prochaine. Toutefois, il est possible que cela ait un impact plus important, compte tenu du contexte de hausse des prix dans lequel se trouvent de nombreux consommateurs. * De plus, on est toujours dans une économie dynamique et la tendance à la baisse de l’inflation ne se fera pas dans une bulle. Il est encore possible qu’on voit des chocs externes faire dérailler les progrès dans le rétablissement de l’inflation vers la cible de 2 % de la Fed. * D’accord. On sait que la prochaine réunion de la Fed n’aura lieu qu’en septembre. Quels sont les indicateurs que vous surveillerez de près en attendant sa prochaine mesure? * Oui, alors. On aura une foule d’indicateurs économiques au cours de la semaine prochaine. On aura demain une estimation avancée du PIB pour le deuxième trimestre. On verra si la résilience qu’on voit dans les indicateurs à haute fréquence se traduit dans les données globales également. * De plus, vendredi, on reçoit les données sur le revenu personnel et les dépenses, qui indiqueront l’inflation des DPC en juin. L’IPC de base a diminué en juin. On verra si cela influe aussi sur la base des DPC. Elle est particulièrement persistante depuis le début de l’année, avec un taux de croissance d’environ 4,6 sur 12 mois. Il serait donc positif de voir une baisse sur ce front. * De plus, les données sur l’emploi seront publiées vendredi prochain. À l’heure actuelle, tout le monde s’attend à ce que ce soit la première augmentation mensuelle inférieure à 200 000 emplois en deux ans et un demi. Ce serait donc une autre bonne nouvelle si on observe un ralentissement modéré et continu du marché de l’emploi. * D’accord, et enfin, j’aimerais parler un peu du dollar américain. Quelles perspectives voyez-vous à ce niveau prochainement? * Oui, alors. Pour ce qui est de la situation actuelle, on prévoit un ralentissement de la croissance économique mondiale. Et, historiquement, cela correspond à une vigueur relative du dollar américain. Notre prévision de base est que le taux de change du dollar canadien en dollars américains sera de l’ordre de 0,75 à 0,73 au cours de la prochaine année. * Toutefois, il est important de noter que la position relative du dollar américain dépendra du succès des banques centrales, leur succès relatif à ramener l’inflation à la cible et aussi à minimiser des résultats économiques potentiellement défavorables, qui pourraient être engendrés par cette politique monétaire agressive. * Andrew, merci beaucoup d’avoir répondu à ces questions. * Merci de l’invitation. [MUSIQUE]