
Après de solides gains en début d’année, les marchés semblent en perte de vitesse. Greg Bonnell discute avec Michael O’Brien, gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD, de l’évolution de la confiance et de son incidence sur les investisseurs.
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* Après un début d’année sur les chapeaux de roues, les marchés s’essoufflent en raison d’inquiétudes entourant les taux d’intérêt. Les conditions actuelles laissent-elles présager d’autres épisodes de volatilité?
* Pour le savoir, j’accueille Michael O’Brien, gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD. Michael, c’est un plaisir de vous retrouver.
* Toujours heureux d’être ici.
* Très bien. On a entamé l’année en se disant que bientôt, les banques centrales mettraient fin aux hausses de taux et on discutait de la durée pendant laquelle les taux resteraient au niveau actuel. Les marchés se sont redressés. La déflation était sur toutes les lèvres. Nous voici en février, et on est en perte de vitesse. Que se passe-t-il?
* Si on revient sur ce début de l’année, on peut dire que les marchés ont atteint des sommets. On a connu un mois de janvier exceptionnel. Avec du recul, qu’est-ce qui a mené à cette situation? Il y avait des signes légitimement encourageants.
* D’abord, l’hiver a été clément en Europe. C’est extrêmement important. La météo a considérablement allégé la pression sur l’économie européenne. À l’heure actuelle, l’économie européenne se porte mieux qu’on ne l’anticipait. C’est positif.
* Deuxième facteur positif : on se demandait quand la Chine abandonnerait sa politique zéro COVID, quand elle réouvrirait. Elle a réouvert son économie plus tôt et plus largement que prévu. Encore une nouvelle positive pour les marchés.
* Le troisième point que vous avez effleuré plus tôt et qui a vraiment catapulté les marchés en janvier, ce sont les données plutôt encourageantes sur les prix. L’inflation commençait à se calmer, on semblait s’engager vers une modération. Je crois que les investisseurs ont vraiment saisi la balle au bond et ont commencé à spéculer sur le moment où la Fed allait cesser d’intervenir.
* Et même à spéculer sur de futures baisses de taux d’intérêt au second semestre de cette année. Cette perspective a vraiment mis le feu aux poudres dans la frange la plus spéculative et la plus volatile du marché. Je crois que c’est ce qui s’est produit en janvier.
* Qu’est-ce qui a changé? Eh bien, les données sur l’emploi ont été meilleures que prévu tant au Canada qu’aux États-Unis, où les chiffres sont ahurissants. Dans le même temps, cette tendance déflationniste a marqué une pause selon les dernières données de l’IPC, en particulier au sud de la frontière. Les investisseurs ont été forcés de réévaluer à quel rythme ou avec quelle facilité ce processus de désinflation allait se dérouler.
* Ils ont commencé à exclure des baisses de taux, qui me semblaient de toute façon un peu optimistes. On commence à voir un changement. Le marché obligataire a été le premier à remettre en question la vitesse à laquelle l’inflation allait se résorber, ce qui commence à se répercuter sur le marché boursier.
* Pour répondre à votre question, est-ce qu’on en a vu le bout? Combien de temps est-ce que ça va durer? À mon avis, on a fortement anticipé les rendements de 2023 durant les quatre ou cinq premières semaines de l’année. Il est donc naturel de s’attendre à un ralentissement. Il ne faudra pas être surpris.
* Un autre aspect intéressant, c’est que la nature des chefs de file du marché change sous nos yeux. Comme je l’ai dit, dans les premières semaines de l’année, on était à l’affût des sociétés en grande difficulté au deuxième semestre 2022. C’est une approche plus spéculative. Les sociétés dont les meilleurs jours sont encore bien loin devant elles sont celles qui bénéficient vraiment des baisses de taux d’intérêt. C’est ce qui a animé le marché au cours des premières semaines de l’année.
* Mais les taux recommencent à grimper, et la situation évolue assez rapidement. Je pense qu’il est temps pour le marché de reprendre un peu son souffle, mais surtout, les chefs de file du marché sont en train de changer en ce moment même.
* Justement, parlons-en. Si on se retrouve dans un contexte - comme vous l’avez dit, les marchés commencent à changer leurs perspectives et à rejoindre les perspectives initiales de la Fed. Le marché semblait incrédule au début. On doit hausser les taux jusqu’à un certain point et les maintenir à ce niveau un certain temps. D’accord. Mais maintenant, ils rejoignent ces déclarations.
* Si on se trouve dans ce contexte, si c’est effectivement ce qui se passe, il y aura quelques autres hausses de taux, qui sait combien et de quelle ampleur. La Fed trouvera un point d’équilibre et n’en bougera plus pendant quelque temps. Quelle approche envisagez-vous pour votre portefeuille?
* Mon approche pour mon portefeuille, c’est de moins tenter de deviner quelle société se démarquera à l’échelle mondiale en 2035 et de me concentrer sur le moment présent. Dans quelles sociétés ai-je le plus confiance? Lesquelles seront capables de produire des résultats dans un contexte assez difficile? La croissance est toujours bonne, mais elle ralentit et les coûts exercent de fortes pressions.
* Il faut donc miser sur la qualité des équipes de gestion, à mon avis. Qui est le mieux placé pour contrôler ses coûts? Qui peut produire les bénéfices escomptés? Je me concentre sur les sociétés les plus performantes en réduisant un peu le bêta et la cyclicité. Je privilégie les valeurs sûres que tout le monde a ignorées pendant les trois ou quatre premières semaines de l’année, et je reviens à des noms sur lesquels je peux vraiment compter et qui, selon moi, répondront aux attentes.
* Les valeurs sûres sont-elles aussi synonyme de patience? Pendant la pandémie, les banques centrales ont mis le paquet, tout comme les gouvernements, avec des mesures de relance. Le marché a décollé. Tout le monde pensait pouvoir faire fortune en quelques mois, quand le marché s’envolait. De toute évidence, le contexte actuel est différent. Doit-on adopter un horizon à long terme? Faut-il un peu de patience pour obtenir des résultats à long terme?
* Je crois que vous êtes en plein dans le mille. On est dans un monde très différent de celui de 2020. Les gouvernements prenaient des mesures de relance budgétaire extrêmes et envoyaient des chèques de relance d’urgence. Il y avait des mesures de relance monétaire massives, avec des taux à zéro.
* Le contexte actuel ne pourrait pas être plus différent. Il y a un resserrement des liquidités. Les liquidités deviennent rares. Et le contexte n’est pas favorable aux placements qui vous enrichissent rapidement. Il faut voir les choses en face. En même temps, si l’économie tient bon, beaucoup de ces entreprises fiables et qui ont fait leurs preuves produiront des résultats à long terme. Mais il ne faut pas s’attendre aux feux d’artifice d’il y a un an ou deux. Ce n’est pas le monde d’aujourd’hui. Ce n’est pas le contexte actuel des marchés boursiers.
[MUSIQUE]
* Après un début d’année sur les chapeaux de roues, les marchés s’essoufflent en raison d’inquiétudes entourant les taux d’intérêt. Les conditions actuelles laissent-elles présager d’autres épisodes de volatilité?
* Pour le savoir, j’accueille Michael O’Brien, gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD. Michael, c’est un plaisir de vous retrouver.
* Toujours heureux d’être ici.
* Très bien. On a entamé l’année en se disant que bientôt, les banques centrales mettraient fin aux hausses de taux et on discutait de la durée pendant laquelle les taux resteraient au niveau actuel. Les marchés se sont redressés. La déflation était sur toutes les lèvres. Nous voici en février, et on est en perte de vitesse. Que se passe-t-il?
* Si on revient sur ce début de l’année, on peut dire que les marchés ont atteint des sommets. On a connu un mois de janvier exceptionnel. Avec du recul, qu’est-ce qui a mené à cette situation? Il y avait des signes légitimement encourageants.
* D’abord, l’hiver a été clément en Europe. C’est extrêmement important. La météo a considérablement allégé la pression sur l’économie européenne. À l’heure actuelle, l’économie européenne se porte mieux qu’on ne l’anticipait. C’est positif.
* Deuxième facteur positif : on se demandait quand la Chine abandonnerait sa politique zéro COVID, quand elle réouvrirait. Elle a réouvert son économie plus tôt et plus largement que prévu. Encore une nouvelle positive pour les marchés.
* Le troisième point que vous avez effleuré plus tôt et qui a vraiment catapulté les marchés en janvier, ce sont les données plutôt encourageantes sur les prix. L’inflation commençait à se calmer, on semblait s’engager vers une modération. Je crois que les investisseurs ont vraiment saisi la balle au bond et ont commencé à spéculer sur le moment où la Fed allait cesser d’intervenir.
* Et même à spéculer sur de futures baisses de taux d’intérêt au second semestre de cette année. Cette perspective a vraiment mis le feu aux poudres dans la frange la plus spéculative et la plus volatile du marché. Je crois que c’est ce qui s’est produit en janvier.
* Qu’est-ce qui a changé? Eh bien, les données sur l’emploi ont été meilleures que prévu tant au Canada qu’aux États-Unis, où les chiffres sont ahurissants. Dans le même temps, cette tendance déflationniste a marqué une pause selon les dernières données de l’IPC, en particulier au sud de la frontière. Les investisseurs ont été forcés de réévaluer à quel rythme ou avec quelle facilité ce processus de désinflation allait se dérouler.
* Ils ont commencé à exclure des baisses de taux, qui me semblaient de toute façon un peu optimistes. On commence à voir un changement. Le marché obligataire a été le premier à remettre en question la vitesse à laquelle l’inflation allait se résorber, ce qui commence à se répercuter sur le marché boursier.
* Pour répondre à votre question, est-ce qu’on en a vu le bout? Combien de temps est-ce que ça va durer? À mon avis, on a fortement anticipé les rendements de 2023 durant les quatre ou cinq premières semaines de l’année. Il est donc naturel de s’attendre à un ralentissement. Il ne faudra pas être surpris.
* Un autre aspect intéressant, c’est que la nature des chefs de file du marché change sous nos yeux. Comme je l’ai dit, dans les premières semaines de l’année, on était à l’affût des sociétés en grande difficulté au deuxième semestre 2022. C’est une approche plus spéculative. Les sociétés dont les meilleurs jours sont encore bien loin devant elles sont celles qui bénéficient vraiment des baisses de taux d’intérêt. C’est ce qui a animé le marché au cours des premières semaines de l’année.
* Mais les taux recommencent à grimper, et la situation évolue assez rapidement. Je pense qu’il est temps pour le marché de reprendre un peu son souffle, mais surtout, les chefs de file du marché sont en train de changer en ce moment même.
* Justement, parlons-en. Si on se retrouve dans un contexte - comme vous l’avez dit, les marchés commencent à changer leurs perspectives et à rejoindre les perspectives initiales de la Fed. Le marché semblait incrédule au début. On doit hausser les taux jusqu’à un certain point et les maintenir à ce niveau un certain temps. D’accord. Mais maintenant, ils rejoignent ces déclarations.
* Si on se trouve dans ce contexte, si c’est effectivement ce qui se passe, il y aura quelques autres hausses de taux, qui sait combien et de quelle ampleur. La Fed trouvera un point d’équilibre et n’en bougera plus pendant quelque temps. Quelle approche envisagez-vous pour votre portefeuille?
* Mon approche pour mon portefeuille, c’est de moins tenter de deviner quelle société se démarquera à l’échelle mondiale en 2035 et de me concentrer sur le moment présent. Dans quelles sociétés ai-je le plus confiance? Lesquelles seront capables de produire des résultats dans un contexte assez difficile? La croissance est toujours bonne, mais elle ralentit et les coûts exercent de fortes pressions.
* Il faut donc miser sur la qualité des équipes de gestion, à mon avis. Qui est le mieux placé pour contrôler ses coûts? Qui peut produire les bénéfices escomptés? Je me concentre sur les sociétés les plus performantes en réduisant un peu le bêta et la cyclicité. Je privilégie les valeurs sûres que tout le monde a ignorées pendant les trois ou quatre premières semaines de l’année, et je reviens à des noms sur lesquels je peux vraiment compter et qui, selon moi, répondront aux attentes.
* Les valeurs sûres sont-elles aussi synonyme de patience? Pendant la pandémie, les banques centrales ont mis le paquet, tout comme les gouvernements, avec des mesures de relance. Le marché a décollé. Tout le monde pensait pouvoir faire fortune en quelques mois, quand le marché s’envolait. De toute évidence, le contexte actuel est différent. Doit-on adopter un horizon à long terme? Faut-il un peu de patience pour obtenir des résultats à long terme?
* Je crois que vous êtes en plein dans le mille. On est dans un monde très différent de celui de 2020. Les gouvernements prenaient des mesures de relance budgétaire extrêmes et envoyaient des chèques de relance d’urgence. Il y avait des mesures de relance monétaire massives, avec des taux à zéro.
* Le contexte actuel ne pourrait pas être plus différent. Il y a un resserrement des liquidités. Les liquidités deviennent rares. Et le contexte n’est pas favorable aux placements qui vous enrichissent rapidement. Il faut voir les choses en face. En même temps, si l’économie tient bon, beaucoup de ces entreprises fiables et qui ont fait leurs preuves produiront des résultats à long terme. Mais il ne faut pas s’attendre aux feux d’artifice d’il y a un an ou deux. Ce n’est pas le monde d’aujourd’hui. Ce n’est pas le contexte actuel des marchés boursiers.
[MUSIQUE]