Les titres du Trésor américain ont fait face à une volatilité accrue ces derniers temps, tandis que le contexte de placement lié aux obligations de sociétés a été un peu plus favorable. Benjamin Chim, vice-président et directeur, chef de l’équipe Recherche sur les titres à rendement élevé à Gestion de Placements TD, discute des perspectives pour les titres à revenu fixe.
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Beaucoup de volatilité sur le marché des bons du trésor américain récemment. Les rendements du bon à 10 ans ont atteint des niveaux jamais vus depuis 2007. Comment le marché des titres de créance de société se maintient-il? Ben Chim de Gestion de placements TD commente. Bonjour, Ben. Bonjour Greg. Ça me fait plaisir de passer à votre mission. Nous suivons de très près les rendements obligataires qui crèvent le plafond de 2007. Parlez-nous du marché des titres de créance. À quoi ressemble-t-il? La volatilité qui règne sur le marché des obligations du gouvernement, "volatilité" est en fait un mot très faible compte tenu de la tempête qui souffle sur ce marché, il y a eu un faiblissement des marchés de titres de créance de société en raison de préoccupations relatives à la croissance, mais généralement parlant, c'est plutôt le calme qui règne sur ce marché. Vu l'ensemble des choses, surtout depuis deux mois, les rendements demeurent... au sein d'une fourchette assez étroite. Il y a deux raisons pour lesquelles le marché des obligations de société a manifesté une certaine sérénité malgré les inquiétudes relatives aux obligations de gouvernement. Tout d'abord la résilience de l'économie américaine, et de l'économie mondiale, d'ailleurs, a donné aux sociétés tout le temps de s'adapter à un contexte de financement, un contexte de prix de revient beaucoup plus délicat. Ils ont pu réduire leurs dépenses, ajuster leurs profils de dépenses en conséquence, et leur profil d'endettement. Il y a maintenant des situations dans lesquelles le profil de crédit s'est bien maintenu, malgré la faiblesse des bénéfices pour l'avenir. Cela a donné beaucoup de confiance au marché obligataire qui considère qu'il n'y aura sans doute pas d'effondrement du marché des obligations de société comme ça a été le cas pendant les périodes antérieures de baisse de l'activité économique. Ensuite, l'équilibre offre-demande devient favorable en ce qui concerne les obligations de société, surtout celles de première qualité. C'est-à-dire qu'il y a toujours plus d'acheteurs que de vendeurs d'obligations de société. Les flux de fonds sont demeurés relativement stables, surtout compte tenu du fait que le rendement du marché obligataire a été assez médiocre cette année, ce qui témoigne de l'attrait exercé par les obligations de société, globalement, 6 % pour les obligations de première qualité, 9 % pour les titres à rendement élevé. Cela paraît donc très intéressant pour les investisseurs. Ayant une certaine exposition aux taux d'intérêt dans un portefeuille diversifié, cela a du bon sens. Le marché des obligations de première qualité, spécifiquement, joue donc un rôle utile dans un portefeuille, ce qui est favorable à la demande. Quant aux investisseurs institutionnels, les rendements plus élevés des obligations donnent à beaucoup de régimes de retraite et de compagnies d'assurances la capacité d'immuniser leur flux de trésorerie pour l'avenir. Il y a également une demande venant de ce secteur-là. La demande est donc très robuste. Au niveau de l'offre, la situation devient plus favorable pour les obligations de société. C'est parce que les rendements ont tellement augmenté, beaucoup d'émetteurs qui envisageaient il y a deux mois d'émettre des titres de créance constatent que cela va leur coûter davantage, 50 ou 75 points de base aujourd'hui. Si vous êtes un émetteur qui a une bonne liquidité, une bonne qualité de crédit, vous pouvez vous permettre d'attendre qu'une meilleure occasion se présente. Les perspectives pour les émissions, pour le reste de cette année, seront sans doute à la baisse, ce qui va être favorable au cours des obligations de société. Voilà les deux principaux facteurs qui maintiennent les écarts relativement élevés malgré la volatilité. Une dynamique très intéressante sur le marché. Si c'est notre contexte, quels sont les secteurs du marché obligataire qui commencent à sembler intéressants? Bon nombre des inquiétudes portent sur un éventuel faiblissement. Il y a donc plusieurs secteurs qui deviennent de plus en plus intéressants pour l'avenir. Nous nous reposons sur les recherches très approfondies sur les titres de créance de société, ce qui nous amène à chercher des occasions dans des secteurs qui sont peut-être en défaveur des entreprises, qui présentent certains risques qui sont mal compris au niveau global. Il y a le secteur de l'immobilier, surtout des fiducies de revenu immobilières qui sont très en défaveur aujourd'hui. La baisse de l'immobilier de bureau affecte la valeur de leurs actifs sous-jacents. Le secteur de l'immobilier de bureau, en particulier, fait l'objet d'une forte dislocation. C'est vraiment un secteur où il y a beaucoup de dégâts. Nous évitons ce secteur, il y a beaucoup de questions, plus de questions que de réponses, mais il y a des créneaux de valeurs qui se sont créés dans le domaine de l'immobilier de détail, l'immobilier industriel. Ce sont des secteurs dans lesquels les taux d'occupation demeurent très élevés. La croissance des loyers est bonne. Il y a des situations où les baux de location sont arrivés à échéance. Il a été possible de les renouveler à des niveaux égaux ou supérieurs à l'inflation, parfois avec une augmentation des loyers de plus de 10 %. Donc les bénéfices se portent bien et les flux de trésorerie sont réguliers. Les fiducies de revenu immobilières de type BBB, BBB-, donc de première qualité, ont pu assainir progressivement leur bilan. Les obligations à deux ou trois ans, dans ce secteur du marché, nous intéressent beaucoup. Certes il pourrait y avoir une certaine volatilité au niveau de l'économie dans l'avenir, mais étant à court terme, cela permet d'atténuer beaucoup la volatilité au niveau de ces titres. Voilà une occasion: Le secteur des oléoducs et gazoduc est très intéressant, mais en fait il y a une bifurcation sur les marchés. Pour nous, c'est dans le créneau des obligations BB ou B sur le marché. Ce sont des équipes de directions qui sont très solides, des actifs d'assez grande qualité, mais des entreprises qui doivent toujours investir dans leur activité, alimenter leur croissance, assainir leur bilan. Nous constatons une amélioration régulière compte tenu du flux de trésorerie très sain tiré de la hausse des cours du pétrole. Inversement, nous sommes un peu plus inquiets à l'égard des produits de grande qualité, genre BBB+ ou A. Ce sont des entreprises dont le bilan est déjà dans l'état souhaité, il n'y aura pas d'amélioration à cet égard. La plus grande partie des flux de trésorerie est consacrée à des fusions-acquisitions ou à des restitutions aux investisseurs. Ça nous inquiète un peu plus. Quand on recherche des opportunités sur le marché des titres à haut rendement, nous préférons les titres défensifs par rapport aux titres cycliques. Les secteurs comme les hôpitaux, les produits de consommation, les services publics, les services de télécommunications... Tout cela a donné des résultats décevants par rapport aux télécommunications cette année. Cela crée des occasions, parce que, surtout au niveau des obligations, un flux de trésorerie stable et prévisible est très important. Donc les occasions que nous offrent les secteurs défensifs nous intéressent. Et puis, au niveau des métaux et des minerais, il y a des occasions intéressantes. Encore une fois un secteur qui a été assez décevant à cause de la croissance plus faible en Chine, plus faible que prévu. Quand on songe au long terme, le cuivre, en particulier, présente des données fondamentales très intéressantes. Offre limitée... ...demande très élevée à long terme à cause de la transition énergétique. Beaucoup de ces émetteurs d'obligations BBB et BBB- versent généralement 8 à 10 % de coupons dans le secteur du cuivre. Voilà les secteurs où nous voyons le plus de valeur. À l'heure actuelle, il y a un potentiel, quels seraient les risques globalement? Est-ce que ce serait l'environnement du crédit? Ce qui pourrait faire augmenter les rendements? Au fur et à mesure que les rendements augmentent, et que l'économie ralentit, la plupart des entreprises sont suffisamment solides. Celles que nous suivons vont subir l'évolution de l'économie, mais s'il y a un choc, que quelque chose casse, ce qui est souvent le cas quand les conditions de crédit se resserrent, certains de ces titres pourraient donner des résultats décevants.