
On s’attend à ce que la Réserve fédérale américaine relève son taux directeur lors de sa prochaine réunion, la semaine prochaine. Hafiz Noordin, gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD, indique à Greg Bonnell que, selon le marché obligataire, cette hausse pourrait être la dernière et qu’une baisse de taux pourrait survenir peu de temps après.
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Bien qu’on soit en pleine période d’annonce des bénéfices, les taux d’intérêt restent dans l’esprit des investisseurs. Certaines banques centrales vont faire des annonces au cours des prochains jours, notamment la Réserve fédérale américaine dans une semaine. Notre invité vient discuter de ce que le marché obligataire nous indique. Hafiz Noordin est gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD. Hafiz, c’est un plaisir de vous retrouver. Ravi d’être là. Alors, j’ai l’impression qu’on est dans une période d’annonce de bénéfices avec beaucoup de choses qui se passent au niveau des titres individuels et le contexte demeure cette importante préoccupation macroéconomique, à savoir que vont faire les banques centrales. Qu’est-ce que le marché obligataire nous indique? Oui. Alors, on tente de déterminer la fin du cycle de hausse des taux. On s’en approche. La situation est assez simple au Canada. On sait que la Banque du Canada maintient le taux à 4,5 % depuis janvier. Et d’après les cours du marché, ça va durer jusqu’au deuxième semestre de l’année. Mais à l’extérieur du Canada, il reste des banques centrales, de grandes banques, qui tentent de faire passer les dernières hausses de taux. Et donc, la suivante, c’est la Banque du Japon, nous aurons l’annonce pendant la nuit de jeudi. Et, comme vous l’avez dit, la Fed la semaine prochaine, et aussi la BCE. Et pourquoi est-il important, pour un investisseur canadien, de surveiller tout ça? Alors, on sait que la Banque du Canada peut influer sur les taux à court terme au Canada. Mais les taux obligataires à long terme, les taux à 10 ou 30 ans peuvent être très volatils en fonction de ce que font certaines grandes banques centrales mondiales. Parlons de la plus importante, avec une annonce dans une semaine. Il s’agit de la Réserve fédérale américaine. Tout indique qu’elle n’a pas encore terminé. Mais en même temps, on a des facteurs de stress dans le système bancaire au sud de la frontière. Cela concerne les banques régionales. Mais ce n’est pas quelque chose que la Fed peut négliger. Elle a reconnu le phénomène la dernière fois. Mais cela ne l’a pas arrêté. C’est vrai. Et le premier objectif demeure l’inflation. On a eu des nouvelles encourageantes, du moins dans la dernière édition de l’IPC aux États-Unis, certes l’inflation est élevée, mais l’un des principaux moteurs de l’inflation, l’inflation du logement, a ralenti. On commence à voir ce que le marché espérait et ce à quoi il s’attendait, c’est-à-dire une sorte de déclin graduel de l’inflation liée au logement. Et c’est habituellement la macroéconomie… c’est la grande tendance macroéconomique de l’IPC aux États-Unis. Mais l’ampleur de l’inflation, c’est-à-dire le nombre de catégories qui sont toujours élevées dans le panier de l’IPC demeure élevée. Donc la Fed, à l’heure actuelle, doit maintenir sa crédibilité en ce qui concerne la lutte contre l’inflation qui demeure essentielle, c’est pourquoi on pense qu’elle procédera à cette hausse de 25 points de base la semaine prochaine, malgré les problèmes concernant First Republic, comme vous l’avez mentionné. Mais elle doit le faire. Et je pense qu’on aura une incertitude après cela, les marchés indiquent un revirement, peut-être en septembre, peut-être même dès juillet, en raison de… Donc une fois que les hausses sont terminées, le marché pense qu’on pourrait voir une volte-face aussi rapidement, le fameux revirement? Oui, oui. Les gens en ont parlé constamment l’an dernier. Il y avait des espoirs de revirement, qui se sont ensuite estompés. N’est-ce pas? Oui, c’est intéressant. Comment on définit cela? C’est presque une erreur de politique. À quoi servirait cette dernière hausse alors? En fait, à mon avis, le marché pense qu’au cours des prochains mois, cette dernière hausse de taux vise à réduire l’inflation de façon plus durable. Mais il y a aussi maintenant plus de risques de baisse pour la croissance. Ça s’est produit dans le secteur manufacturier, mais toutes les tensions dans le secteur bancaire accentuent le risque de croissance à la baisse, ce qui explique qu’on verra des réductions, peut-être même cet été. Ça devient un peu ésotérique pour ceux qui sont à l’extérieur des titres à revenu fixe. Mais l’idée du contrôle de la courbe des taux. J’ai l’impression, et corrigez-moi si je me trompe, qu’avec l’annonce de la Banque du Japon, on en saura un peu plus à ce niveau. C’est certainement d’actualité avec la Banque du Japon. Et on a eu environ sept ans de politique de contrôle de la courbe des taux, pour essayer de maintenir le taux des obligations à 10 ans près de zéro. Cette politique n’a pas pu être soutenue, surtout avec la hausse de l’inflation mondiale, et parce que la Banque du Japon, avec cette politique et l’assouplissement quantitatif, possède maintenant plus de la moitié du marché des obligations d’État japonaises. C’est donc un parfait exemple de distorsion du marché. Et on voit ces pressions pour s’éloigner de cette politique. Mais il faut le faire très graduellement, parce que c’est une politique de longue date, très ancrée dans la façon dont les investisseurs, les grands investisseurs au Japon, affectent des capitaux. Ce que l’on verra probablement, pas forcément à cette réunion, mais on ne sait pas vraiment quand, c’est une augmentation de la fourchette permise augmente. À l’heure actuelle, c’est un demi pour cent de ce que les taux des obligations japonaises à 10 ans peuvent varier de la cible de 0 %. Si le taux passe d’un demi pour cent à 75 points de base, il y aura beaucoup de volatilité sur le marché obligataire japonais. Et cela pourrait se répercuter sur notre marché obligataire national. Le contrôle de la courbe des taux pourrait-il devenir un problème ou un outil que… la Réserve fédérale américaine aimerait utiliser, ou d’autres banques centrales? Ou est-ce un phénomène qui touche uniquement le Japon en ce moment? C’est spécifique au Japon et lié à l’ampleur des mesures d’assouplissement quantitatif. Ils avaient besoin d’autre chose pour aider les marchés à maintenir des conditions d’emprunt très souples. Et cela remonte à sept ans, lorsque l’inflation était complètement inexistante. Quand on regarde les États-Unis, le Canada et l’Europe,on voit ce cycle d’inflation vigoureuse. Et pour le prochain cycle, les outils standard, le taux directeur et l’assouplissement quantitatif sont les facteurs qui nous intéressent. Je pense que la barre est très haute pour le contrôle de la courbe des taux. Lorsqu’on parle des effets, l’effet cumulatif de toutes ces hausses de taux importantes et le fait que le marché pense qu’il y aura peut-être un changement de direction, un abandon rapide des hausses pour se précipiter sur les baisses, presque tout de suite, qu’est-ce que ça nous dit sur la façon dont nous sommes censés envisager la politique des banques centrales? Alors, l’idée c’est que, OK, on a augmenté aujourd’hui, et on ne connaîtra pas les effets sur l’économie avant 12 ou 18 mois. Ces règles doivent-elles être rejetées si on a cette réactivité? Eh bien, je crois qu’elles doivent dépendre des données. Et la réalité, c’est que même si elles aiment faire des prévisions, elles ne savent pas où vont les choses. Elles peuvent fournir un scénario de base dans leurs prévisions. Et la Fed l’a fait lors de sa dernière réunion. Le marché est une combinaison de différents résultats. Donc, oui, il y a un scénario de base selon lequel elles augmenteront. Ensuite, la croissance diminuera graduellement et l’inflation aussi. Mais on a aussi le scénario de l’atterrissage brutal, selon lequel elles pourraient devoir baisser plus rapidement que ce à quoi le marché s’attend. Il y a aussi un scénario selon lequel l’inflation demeure plus marquée que le niveau auquel elle est prise en compte et que nous n’atteignons pas un IPC de 3 % à 4 % d’ici la fin de l’année. Cela signifierait que les réductions de taux ne se produiraient pas cette année. Je pense donc qu’il existe encore un large éventail de scénarios. Les banques centrales doivent simplement s’assurer qu’elles dépendent des données, ne pas trop s’engager envers une politique particulière et faire preuve de souplesse. [LOGO SONORE] [MUSIQUE]