L’inflation atteint, au Canada et aux États-Unis, des niveaux inégalés depuis plusieurs décennies. Toutefois, malgré la hausse des prix, les consommateurs des deux côtés de la frontière continuent de dépenser. Kim Parlee discute de la santé financière des consommateurs avec Jacky He, analyste, Consommation discrétionnaire mondiale, Gestion de Placements TD.
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Comme nous le savons tous, l’inflation atteint, au Canada aux États-Unis, des sommets inégalés depuis plusieurs décennies. Toutefois, malgré la hausse des prix, les consommateurs semblent résilients. Est-ce que cette tendance va se poursuivre? Jacky He est analyste en consommation discrétionnaire à Gestion de Placements TD et nous donne maintenant son point de vue sur la question.
Jacky, c’est un plaisir de vous avoir avec nous. Pourquoi la consommation ne ralentit-elle pas, avec l’inflation qui grimpe en flèche?
Bonjour, Kim. Tout d’abord, merci de m’avoir invité. Oui, les consommateurs dépensent encore, tout simplement parce qu’ils le peuvent. On parle beaucoup de mesures de relance, d’inflation, ou comme vous l’avez mentionné, de la hausse des prix de l’essence. Certes, cela met la pression aux consommateurs. Mais si vous regardez les facteurs favorables, ils sont encore plus solides.
OK. Commençons par les emplois. Aux États-Unis, deux offres d’emploi se disputent un seul chômeur américain. Les gens ont confiance dans la sécurité de leurs emplois.
Ils sont rémunérés. Ils sont même mieux rémunérés. Si on regarde la croissance des salaires, elle est nettement supérieure à la tendance historique. Au premier trimestre, 70 % des sociétés américaines avaient déjà augmenté leurs salaires. Et puis, il y a les comptes bancaires des consommateurs. Ils contiennent beaucoup d’économies excédentaires. Cela peut aider les consommateurs à se protéger contre l’inflation.
Enfin, et surtout, les consommateurs sont plus riches que ce qu’on pensait. Ils sont sous-endettés. Leurs soldes de cartes de crédit sont encore faibles. De plus, très peu de gens n’ont pas payé leurs intérêts. Dans l’ensemble, les consommateurs sont en excellente forme.
Je sais que vous avez un graphique dont je veux parler, dans lequel vous examinez la santé financière des consommateurs. Vous avez parlé d’épargne excédentaire, le graphique le montre bien. Et il montre que, oui, les gens se sentent mieux grâce à ce qu’ils ont à la banque.
JACKY HE : Oui, Kim. Je suis heureux que le graphique vous semble intéressant avant même que j’en parle.
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Les ventes au détail aux États-Unis sont directement liées à la valeur nette des ménages. Les gens se sentent bien au niveau financier et ont tendance à dépenser davantage. Ce graphique illustre la croissance sur 12 mois des actifs des ménages par rapport à leur passif. Depuis la crise financière mondiale, vous constatez que cela a progressé à un rythme plus limité et récemment cela s’est redressé en raison de la hausse des prêts hypothécaires. Mais vous constatez que l’actif croît encore plus rapidement. La différence entre les deux renforce la valeur nette des consommateurs.
Et, fait intéressant, les consommateurs aujourd’hui sont fondamentalement différents de ceux des années 2000. À l’époque, le prêt hypothécaire surpassait l’actif. Mes filles pourraient probablement trouver un prêt hypothécaire. Maintenant, ces prêts et cette croissance sont le fait des Américains au crédit élevé. C’est donc une différence majeure.
KIM PARLEE : Mmm. C’est intéressant. Je sais que vous suivez certaines consommations discrétionnaires. Et le mot-clé ici est discrétionnaire. Il y a ce dont nous avons besoin et ce que nous voulons. Quelles sont vos perspectives à ce sujet? Parce qu’on peut avoir les bons chiffres et le bon contexte, mais les choses changent, et les gens peuvent ne pas avoir autant besoin du discrétionnaire.
Tout à fait, Kim. Ce secteur a été le moins apprécié. Et nous continuons de prévoir une année en dents de scie, non seulement parce que l’investisseur assimilera les difficultés et les facteurs favorables dont nous venons de parler, mais aussi du fait que ce secteur est davantage exposé à la Chine, qui, comme nous le savons tous, traverse malheureusement une période difficile avec des mesures de confinement.
Mais le fait est que la Chine rouvrira ses portes tôt ou tard. Et si l’on considère le long terme, c’est un secteur qui innove beaucoup. Et il est en mesure de surpasser l’ensemble du marché en matière de bénéfices sur une longue période. La volatilité n’est donc pas du tout un ennemi pour nous.
La volatilité est notre alliée parce que nous portons une attention particulière à deux types de sociétés, premièrement celles qui peuvent vraiment se démarquer pour profiter du changement de consommation des biens aux services. Par exemple, les sociétés liées aux voyages, aux hôtels, etc. Deuxièmement, des sociétés de grande qualité mais qui ont été malmenées, comme les autres. Je parle des sociétés qui ont un pouvoir d’établissement des prix supérieur, des coûts avantageux durables et un rendement du capital constant, comme les dividendes et les rachats d’actions, etc.
Je m’excuse, Jacky, il ne me reste qu’environ 45 secondes. Je sais que vous avez de bons exemples de ce dont vous parlez… L’un d’eux est Dollarama. Pourriez-vous nous donner le pour et le contre pour cet exemple.
JACKY HE : C’est intéressant. Dollarama importe beaucoup de la Chine, mais rien n’a impacté sa chaîne d’approvisionnement, en grande partie parce qu’elle est peu exposée aux ports de Shanghai. Ce qui est intéressant avec Dollarama, c’est les avantages durables sur le plan des coûts. Vous vous rendez dans le magasin. Les produits sont environ 40 % moins chers que ceux de Walmart ou même d’Amazon. Mais en même temps, Dollarama perçoit une marge plus élevée. Dans un contexte d’inflation persistante, la proposition de valeur de Dollarama est très populaire auprès des consommateurs.
KIM PARLEE : Jacky, nous allons devoir nous arrêter ici. Mais il s’agit d’un excellent exemple. Et nous rappelons aux gens qu’ils doivent faire leurs propres recherches. Mais c’est un bon exemple. Merci encore d’avoir été des nôtres.
Merci beaucoup, Kim.
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