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Dans une semaine, l’OPEP+ commencera à ajouter près d’un demi-million de barils par jour sur le marché. Kim Parlee et Hussein Allidina, chef, Produits de base, Gestion de Placements TD, discutent des répercussions des prix du pétrole sur les marchés et l’ensemble de l’économie.
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On a vu les prix du pétrole descendre beaucoup en raison simplement, j’imagine, des préoccupations liées à l’offre qui s’en vient sur le marché. Mais vous ne croyez pas qu’elle résoudra le problème de la demande.
Oui, Kim, merci de m’avoir invité. Vous voyez, je crois que la faiblesse des prix du pétrole est survenue à un mauvais moment. On a vu la courbe des taux s’aplatir, les taux des obligations chuter, et le tout s’est produit en même temps que l’OPEP tenait la réunion de l’OPEP+. Au final, les membres ont décidé, comme vous l’avez mentionné, d’augmenter la production de 400 000 barils par jour dès le 1er août, et ce, tous les mois jusqu’en septembre 2022.
Mais je ne crois pas que ce soit suffisant. Si on se penche sur l’évolution de la demande qui est attendue dans la deuxième moitié de l’année, on voit que l’Agence internationale de l’énergie prévoit une augmentation de la demande de 4,6 millions de barils par jour entre la première et la deuxième moitié de l’année. Donc, la hausse du nombre de barils par l’OPEP aidera, mais seulement de façon marginale. Et je m’attends à ce qu’on continue de voir des diminutions assez importantes des inventaires dans la majorité de la deuxième moitié de l’année.
Et quel est l’effet du variant Delta sur la demande? Cette estimation de la demande tient-elle compte de ce qui pourrait se produire? Y a-t-il des préoccupations de ce côté-là?
Oui, très bonne question. De toute évidence, le variant Delta cause des préoccupations. Je pense que les variations qu’on voit dans le marché des taux d’intérêt reflètent ces préoccupations, tout comme du côté des actifs à risque en général. Je pense que ce qui est différent, et je ne suis pas un docteur, je ne veux pas prétendre que je le sais, mais ce qui est différent dans les données qu’on voit, c’est que malgré l’augmentation du nombre de cas, le nombre d’hospitalisations et de morts demeure plutôt bas.
Et c’est particulièrement vrai pour les populations qui ont été vaccinées. Cela dit, je ne veux pas mettre de côté le risque que le variant Delta, s’il empirait de façon significative, poserait pour la demande. Si on regarde les prévisions que j’ai mentionnées quant à la demande, donc pour 4,6 millions de barils par jour de plus dans la deuxième moitié de l’année, on voit que la plus grande partie de cette demande viendra des pays membres de l’OCDE, où le taux de vaccination est plus élevé.
On s’attend aussi à une certaine hausse du côté des économies hors de l’OCDE, dans les marchés émergents. Mais vraiment, le plus gros de l’augmentation de la demande vient des pays de l’OCDE. En toute honnêteté, je trouve que les prévisions sont plutôt équilibrées.
Mais qu’est-ce que ces prévisions signifient pour les prix? Comment est-ce que la situation évoluera, selon vous?
Oui, les inventaires continuent de diminuer. On le voit dans la forme de la courbe du pétrole brut. C’est pour cette raison que le brut est en situation de déport. Je pense que les prix du pétrole peuvent probablement dépasser 75 et aller un peu au-delà de 80 s’il n’y a pas de perturbation de l’offre et de la demande. Je pense que ce qui pourrait être une histoire plus intéressante, et le marché ne se concentre par là-dessus, c’est ce qui arrivera à l’équilibre quand on sera en 2022, en 2023 et par la suite.
Et on en a déjà parlé, Kim : il y a un grand manque d’investissement du côté de l’offre. Et je pense que l’offre commence à mal se porter. On ne s’attend pas à une grande croissance de la production en dehors de l’OPEP et à l’avenir. Et je pense que ça constitue un défi parce qu’on ne réussit pas assez rapidement à suivre la demande.
Donc, on a arrêté d’investir dans l’offre. On a encore besoin d’une immense quantité de pétrole pour alimenter le PIB. Et on s’attend à ce que le PIB poursuive sa croissance jusqu’à la fin de l’année et jusqu’en 2022.
On dirait que tout ça renvoie, on en a déjà parlé, à l’écart entre la réalité et ceux qui disent qu’avec les facteurs ESG, le pétrole ne sera plus utilisé d’ici quelques années. Mais il y a une période de transition qui pourrait être imprévisible.
Oui, si je peux vous ennuyer avec quelques chiffres… Si on jette un coup d’œil à la demande globale de pétrole, on s’aperçoit qu’environ 2/3 du pétrole consommé à l’échelle mondiale est utilisé pour le transport. Donc, si on veut se sevrer du pétrole, on devra vraiment résoudre les problèmes liés au transport. Et on a commencé à le faire, bien sûr.
Mais, même aujourd’hui, si on regarde l’ensemble des voitures à l’échelle mondiale, on voit qu’il y a 1,3 milliard de véhicules sur les routes. Moins de 1 % de ces véhicules sont électriques. Du point de vue des ventes, environ 4 % de tous véhicules vendus actuellement dans le monde sont des véhicules électriques. Donc, franchement, c’est une goutte d’eau dans l’océan pour le marché du pétrole.
Même si on regarde des prévisions pour 2030 et 2035, les ventes de ces véhicules devraient représenter 30 % des ventes mondiales. Donc, en 2030, 30 % des véhicules qui seront vendus seront électriques.
Et cette statistique ne tient pas compte des voitures actuellement sur la route. Je conduis encore un véhicule à essence. C’est le cas de la plupart des gens. En vérité, 99 % des gens dans le monde utilisent encore des voitures qui fonctionnent avec de l’essence ou du carburant diésel conventionnel.
Et on a arrêté d’investir dans l’offre. La demande, elle, est encore là. Je suis inquiet d’une possible augmentation marquée des prix dans les deux à cinq prochaines années puisque les inventaires et la capacité de réserve de l’OPEP diminueront, et l’offre des pays non membres de l’OPEP ne sera pas au rendez-vous.
Il nous reste à peine 30 secondes, mais je sens que je dois vous poser cette question. Quelles sont les implications de tout ça pour le secteur de l’énergie canadien? Je vais m’arrêter. Dites-moi quelles sont vos perspectives peut-être à court et à moyen terme.
Oui, bien sûr. Je crois que l’augmentation des prix du pétrole est positive en général pour les producteurs d’énergie, y compris au Canada. Les producteurs canadiens ont des coûts de production un peu plus élevés que les autres. Donc, ils utiliseront un levier d’exploitation quand les prix du pétrole augmenteront. Mais le secteur de l’énergie canadien fait face à des défis en raison de choses dont on a déjà parlé : la capacité de transport, la capacité insuffisance des pipelines, les réalisations qui sont faites sur les sites de forage et un contexte quelque peu marqué par l’incertitude.
Quand je pense à l’énergie en termes d’actions par comparaison à l’énergie comme produit de base, je pense que le produit de base est supérieur. Et ses rendements supérieurs sont en grande partie attribuables à ce qui ne se produit pas du côté des actions. Le manque d’investissement joue vraiment un rôle central dans l’augmentation des prix de l’énergie, et les sociétés énergétiques n’investissent pas, et ce n’est pas nécessairement parce qu’elles ne veulent pas le faire, c’est plutôt parce qu’elles sont punies par leurs actionnaires quand elles le font.
On vit à une époque intéressante. Je suis contente que vous puissiez nous guider. Hussein, merci beaucoup.
Merci de m’avoir invité.
[MUSIQUE]
Oui, Kim, merci de m’avoir invité. Vous voyez, je crois que la faiblesse des prix du pétrole est survenue à un mauvais moment. On a vu la courbe des taux s’aplatir, les taux des obligations chuter, et le tout s’est produit en même temps que l’OPEP tenait la réunion de l’OPEP+. Au final, les membres ont décidé, comme vous l’avez mentionné, d’augmenter la production de 400 000 barils par jour dès le 1er août, et ce, tous les mois jusqu’en septembre 2022.
Mais je ne crois pas que ce soit suffisant. Si on se penche sur l’évolution de la demande qui est attendue dans la deuxième moitié de l’année, on voit que l’Agence internationale de l’énergie prévoit une augmentation de la demande de 4,6 millions de barils par jour entre la première et la deuxième moitié de l’année. Donc, la hausse du nombre de barils par l’OPEP aidera, mais seulement de façon marginale. Et je m’attends à ce qu’on continue de voir des diminutions assez importantes des inventaires dans la majorité de la deuxième moitié de l’année.
Et quel est l’effet du variant Delta sur la demande? Cette estimation de la demande tient-elle compte de ce qui pourrait se produire? Y a-t-il des préoccupations de ce côté-là?
Oui, très bonne question. De toute évidence, le variant Delta cause des préoccupations. Je pense que les variations qu’on voit dans le marché des taux d’intérêt reflètent ces préoccupations, tout comme du côté des actifs à risque en général. Je pense que ce qui est différent, et je ne suis pas un docteur, je ne veux pas prétendre que je le sais, mais ce qui est différent dans les données qu’on voit, c’est que malgré l’augmentation du nombre de cas, le nombre d’hospitalisations et de morts demeure plutôt bas.
Et c’est particulièrement vrai pour les populations qui ont été vaccinées. Cela dit, je ne veux pas mettre de côté le risque que le variant Delta, s’il empirait de façon significative, poserait pour la demande. Si on regarde les prévisions que j’ai mentionnées quant à la demande, donc pour 4,6 millions de barils par jour de plus dans la deuxième moitié de l’année, on voit que la plus grande partie de cette demande viendra des pays membres de l’OCDE, où le taux de vaccination est plus élevé.
On s’attend aussi à une certaine hausse du côté des économies hors de l’OCDE, dans les marchés émergents. Mais vraiment, le plus gros de l’augmentation de la demande vient des pays de l’OCDE. En toute honnêteté, je trouve que les prévisions sont plutôt équilibrées.
Mais qu’est-ce que ces prévisions signifient pour les prix? Comment est-ce que la situation évoluera, selon vous?
Oui, les inventaires continuent de diminuer. On le voit dans la forme de la courbe du pétrole brut. C’est pour cette raison que le brut est en situation de déport. Je pense que les prix du pétrole peuvent probablement dépasser 75 et aller un peu au-delà de 80 s’il n’y a pas de perturbation de l’offre et de la demande. Je pense que ce qui pourrait être une histoire plus intéressante, et le marché ne se concentre par là-dessus, c’est ce qui arrivera à l’équilibre quand on sera en 2022, en 2023 et par la suite.
Et on en a déjà parlé, Kim : il y a un grand manque d’investissement du côté de l’offre. Et je pense que l’offre commence à mal se porter. On ne s’attend pas à une grande croissance de la production en dehors de l’OPEP et à l’avenir. Et je pense que ça constitue un défi parce qu’on ne réussit pas assez rapidement à suivre la demande.
Donc, on a arrêté d’investir dans l’offre. On a encore besoin d’une immense quantité de pétrole pour alimenter le PIB. Et on s’attend à ce que le PIB poursuive sa croissance jusqu’à la fin de l’année et jusqu’en 2022.
On dirait que tout ça renvoie, on en a déjà parlé, à l’écart entre la réalité et ceux qui disent qu’avec les facteurs ESG, le pétrole ne sera plus utilisé d’ici quelques années. Mais il y a une période de transition qui pourrait être imprévisible.
Oui, si je peux vous ennuyer avec quelques chiffres… Si on jette un coup d’œil à la demande globale de pétrole, on s’aperçoit qu’environ 2/3 du pétrole consommé à l’échelle mondiale est utilisé pour le transport. Donc, si on veut se sevrer du pétrole, on devra vraiment résoudre les problèmes liés au transport. Et on a commencé à le faire, bien sûr.
Mais, même aujourd’hui, si on regarde l’ensemble des voitures à l’échelle mondiale, on voit qu’il y a 1,3 milliard de véhicules sur les routes. Moins de 1 % de ces véhicules sont électriques. Du point de vue des ventes, environ 4 % de tous véhicules vendus actuellement dans le monde sont des véhicules électriques. Donc, franchement, c’est une goutte d’eau dans l’océan pour le marché du pétrole.
Même si on regarde des prévisions pour 2030 et 2035, les ventes de ces véhicules devraient représenter 30 % des ventes mondiales. Donc, en 2030, 30 % des véhicules qui seront vendus seront électriques.
Et cette statistique ne tient pas compte des voitures actuellement sur la route. Je conduis encore un véhicule à essence. C’est le cas de la plupart des gens. En vérité, 99 % des gens dans le monde utilisent encore des voitures qui fonctionnent avec de l’essence ou du carburant diésel conventionnel.
Et on a arrêté d’investir dans l’offre. La demande, elle, est encore là. Je suis inquiet d’une possible augmentation marquée des prix dans les deux à cinq prochaines années puisque les inventaires et la capacité de réserve de l’OPEP diminueront, et l’offre des pays non membres de l’OPEP ne sera pas au rendez-vous.
Il nous reste à peine 30 secondes, mais je sens que je dois vous poser cette question. Quelles sont les implications de tout ça pour le secteur de l’énergie canadien? Je vais m’arrêter. Dites-moi quelles sont vos perspectives peut-être à court et à moyen terme.
Oui, bien sûr. Je crois que l’augmentation des prix du pétrole est positive en général pour les producteurs d’énergie, y compris au Canada. Les producteurs canadiens ont des coûts de production un peu plus élevés que les autres. Donc, ils utiliseront un levier d’exploitation quand les prix du pétrole augmenteront. Mais le secteur de l’énergie canadien fait face à des défis en raison de choses dont on a déjà parlé : la capacité de transport, la capacité insuffisance des pipelines, les réalisations qui sont faites sur les sites de forage et un contexte quelque peu marqué par l’incertitude.
Quand je pense à l’énergie en termes d’actions par comparaison à l’énergie comme produit de base, je pense que le produit de base est supérieur. Et ses rendements supérieurs sont en grande partie attribuables à ce qui ne se produit pas du côté des actions. Le manque d’investissement joue vraiment un rôle central dans l’augmentation des prix de l’énergie, et les sociétés énergétiques n’investissent pas, et ce n’est pas nécessairement parce qu’elles ne veulent pas le faire, c’est plutôt parce qu’elles sont punies par leurs actionnaires quand elles le font.
On vit à une époque intéressante. Je suis contente que vous puissiez nous guider. Hussein, merci beaucoup.
Merci de m’avoir invité.
[MUSIQUE]