Le secteur du transport aérien a été un des secteurs les plus touchés durant la pandémie, mais avec l’assouplissement des restrictions de voyage partout dans le monde, la demande de voyages est en hausse. Anthony Okolie s’entretient avec David Mau, gestionnaire de portefeuille, Gestion de Placements TD, qui présente ses perspectives à long terme pour le secteur.
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Depuis le début de la crise de la COVID-19, le transport aérien est l’un des secteurs les plus durement touchés, car les voyages d’affaires et les voyages d’agrément sont mis sur pause. Mais avec l’assouplissement des restrictions de voyage à l’échelle mondiale et la reprise de la demande de voyages, les compagnies aériennes peuvent-elles enfin remonter la pente?
David Mau m’accompagne aujourd’hui pour en parler davantage. Il est gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD. David, comme je l’ai mentionné, partout dans le monde, les pays commencent à assouplir leurs restrictions de voyage, et de plus en plus de gens réservent des voyages d’agrément pour la première fois depuis des mois, voire des années. La grande question est donc la suivante : le moment est-il bien choisi pour les investisseurs à long terme qui souhaitent investir dans le secteur du transport aérien?
Bonjour, Tony. Oui, eh bien, écoutez, aux États-Unis, la plupart des actions des compagnies aériennes ont reculé de 20 % à 40 % par rapport à la période précédant la COVID. Ici au Canada, Air Canada a reculé de plus de 50 % par rapport à son sommet de 2020. Vous avez donc tout à fait raison de dire que les gens commencent à voyager davantage, surtout au cours des derniers mois, alors que les craintes entourant le variant Omicron commencent à s’estomper. Mais si on examine le graphique de l’IATA qui montre le trafic réel de passagers aériens à l’échelle mondiale, on peut voir que le volume de passagers réels a encore fortement diminué et qu’il reste encore beaucoup à faire pour revenir aux niveaux d’avant la pandémie de COVID.
On sait que le trafic varie selon la région. On sait que l’Amérique du Nord a fait mieux que la plupart des autres régions du monde. L’Europe a fait bonne figure. L’Asie a connu certaines difficultés. Comme on le sait, la Chine a récemment connu des difficultés en raison des éclosions de COVID là-bas. Mais, de façon générale, il y a encore beaucoup de chemin à faire en ce qui a trait à la reprise du transport de passagers à l’échelle mondiale.
Ça signifie donc que les compagnies aériennes en général vont encore avoir beaucoup de revenus et de croissance des bénéfices au cours des prochaines années, à mesure que ces volumes-là vont augmenter. Je pense donc que pour ce qui est des actions des compagnies aériennes, qui se négocient à des niveaux d’évaluation encore très raisonnables, le moment est bien choisi pour se pencher sur certains de ces titres, surtout pour les investisseurs à long terme, qui vont être en mesure d’ignorer en quelque sorte les fluctuations à court terme.
Récemment, un tribunal américain a rendu une nouvelle ordonnance abandonnant le mandat national relatif aux masques pour les voyages en avion. Quelle est l’importance de cette décision pour le secteur du transport aérien aux États-Unis? Et pourrait-on voir plus de gens prendre l’avion, maintenant qu’ils peuvent retirer leur masque?
Oui, on a vu cette nouvelle sortir la semaine dernière. Et il est probablement trop tôt pour dire exactement quelle va être l’ampleur de cette décision. Mais on sait que les compagnies aériennes elles-mêmes étaient très favorables au retrait de ce mandat relatif aux masques.
Et je pense que c’est généralement une bonne nouvelle pour les compagnies aériennes. Comme vous l’avez dit, les gens qui auparavant ne voulaient pas ou ne pouvaient pas voyager parce qu’ils devaient porter un masque sur un vol peuvent maintenant commencer à planifier des voyages.
L’autre bonne chose pour les compagnies aériennes en général, c’est qu’elles n’ont plus besoin que leur personnel fasse appliquer ces mandats relatifs aux masques à bord des avions, ce qui, comme on l’a vu, peut être difficile et parfois perturbateur. Évidemment, il va y avoir des passagers qui ne seront pas à l’aise de voyager dans un avion où ce n’est pas tout le monde qui porte un masque. Mais, encore une fois, il n’y a aucune règle qui empêche une personne de porter un masque si elle le souhaite. Donc quiconque le souhaite peut encore porter un masque à bord de l’avion. Dans l’ensemble, il me semble que c’est une bonne nouvelle pour les compagnies aériennes.
D’accord, parlons maintenant des derniers résultats trimestriels des compagnies aériennes américaines. Et surtout, quelles sont leurs perspectives pour le printemps et les mois d’été très rentables à venir?
Oui, alors écoutez, je dirais que les résultats du premier trimestre des compagnies aériennes sont généralement un peu meilleurs que prévu. Les compagnies aériennes ont tout de même subi des pertes, mais elles ont été un peu moindres que ce à quoi le marché s’attendait. Ce qui est vraiment plus important, et comme vous l’avez mentionné, ce sont les perspectives des sociétés pour le deuxième trimestre, soit la saison de voyage estivale, qui représente habituellement les mois les plus importants de l’année pour ces compagnies aériennes.
Et les perspectives de ces sociétés étaient excellentes. Beaucoup de chefs de la direction et d’entreprises s’attendent à ce que les volumes au deuxième trimestre dépassent en fait ce qu’ils ont connu en 2019. Je pense que cela reflète une grande partie de la demande accumulée du grand public, qui n’a pas pu voyager depuis deux ans. L’autre grande tendance qu’on observe au deuxième trimestre, dont les sociétés ont parlé, c’est qu’elles prévoient limiter leur capacité.
Ce que ça signifie, c’est qu’elles veulent effectuer moins de vols. Mais chaque vol va être encore plus complet. C’est une excellente nouvelle pour les compagnies aériennes, car cela les aide sur le plan de la rentabilité, mais pas tellement pour vous, si vous réservez un voyage cet été et que vous espérez que le siège à côté de vous va être vide.
Il ne fait aucun doute que le secteur du transport aérien semble connaître des tendances très positives. Parlons maintenant des difficultés auxquelles le secteur du transport aérien est toujours confronté. Quelles principales difficultés entrevoyez-vous pour le secteur du transport aérien à l’avenir?
Oui, eh bien, le facteur qui touche tout le monde, et pas seulement les compagnies aériennes, c’est la hausse des prix du pétrole, n’est-ce pas? La hausse des prix du pétrole se traduit par une hausse des coûts du carburéacteur pour les compagnies aériennes. Et le coût du carburant d’une compagnie aérienne représente habituellement de 25 % à 40 % de ses coûts d’exploitation, selon l’âge de sa flotte aérienne. Les nouveaux appareils ont donc tendance à être plus écoénergétiques. Donc, selon la compagnie aérienne et sa flotte aérienne, les coûts plus élevés du carburant pourraient avoir des répercussions plus ou moins importantes. Ça dépend donc de chaque cas.
Mais l’aspect positif, c’est que les compagnies aériennes transfèrent généralement le coût du carburant à la clientèle. Donc, quand les prix du pétrole augmentent, les compagnies aériennes augmentent le prix de leurs billets. Elles transfèrent ces coûts au voyageur. Et la bonne nouvelle, c’est qu’on n’a pas observé d’effets négatifs sur la demande jusqu’à présent, même depuis que les compagnies aériennes augmentent leurs prix. Il semble donc que la demande soit suffisamment forte du côté des voyageurs, pour que les compagnies aériennes puissent transférer ces coûts. Et ils ne seront pas absorbés par les compagnies aériennes elles-mêmes.
L’autre facteur défavorable, je suppose, et vous l’avez mentionné un peu plus tôt, c’est le fait que ça a pris beaucoup de temps pour que les voyages d’affaires et les voyages internationaux reprennent. On pourrait donc considérer ça comme un facteur défavorable. Selon moi, il s’agit d’un facteur favorable, car les voyages d’affaires et les voyages internationaux permettent de dégager une marge beaucoup plus élevée. C’est beaucoup plus rentable pour les compagnies aériennes. Alors que ces deux segments-là vont se redresser au cours des deux prochaines années, ça va avoir des répercussions plus importantes sur la rentabilité du transport aérien, par rapport à ce qu’on a vu jusqu’à maintenant dans le segment de l’économie nationale, qui s’est le plus redressé. Mais c’est aussi la plus faible rentabilité.
Compte tenu de ce qu’on sait aujourd’hui, quand les compagnies aériennes devraient-elles revenir aux niveaux d’avant la pandémie?
Oui, eh bien, je n’ai pas de boule de cristal. Mais si on examine l’évolution de cette reprise et ce que les sociétés elles-mêmes disent, en ce moment, il semble qu’on ait généralement l’impression que le secteur du transport aérien va revenir aux niveaux précédant la COVID, donc aux niveaux de 2019, vers 2024, 2025. Il va donc falloir encore deux, peut-être trois ans pour revenir aux niveaux d’avant la pandémie.
David, merci beaucoup de vous être joint à nous.
Merci de m’avoir invité.
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