Les actions chinoises, particulièrement les actions technologiques, ont été confrontées à des vagues de volatilité accrue, les investisseurs s’inquiétant de l’incertitude économique et réglementaire. Anthony Okolie et Haining Zha, gestionnaire de portefeuille, Gestion de Placements TD, discutent des difficultés du secteur technologique chinois.
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[MUSIQUE]
Les actions chinoises sont de plus en plus volatiles en raison des inquiétudes suscitées par l’incertitude économique et réglementaire. Haining Zha se joint à nous pour en discuter. Il est vice-président et directeur à Gestion de Placements TD. Haining, qu’est-ce qui cause la récente volatilité des actions chinoises?
Je dirais que la tempête qu’on observe actuellement ne découle pas d’un seul facteur, mais plutôt d’une combinaison de différents facteurs. Tout d’abord, je pense que le contexte macroéconomique dans son ensemble est assez faible. Par exemple, en décembre 2021, les ventes au détail, habituellement un point de données économiques très stable, n’ont augmenté que de 1,7 % sur 12 mois. C’est assez faible.
De plus, le risque extrême du secteur immobilier plane en arrière-plan. Par exemple, le promoteur immobilier Evergrande n’a pas encore élaboré un plan de restructuration très efficace. De plus, il y a deux chocs importants pour l’économie. Le premier, c'est la COVID. Comme nous le savons, l’écart entre la Chine et le reste du monde par rapport à la COVID est assez important, et cette année, le nombre de cas est en hausse et s’est propagé dans plusieurs villes, en particulier dans certaines grandes villes ou plaques tournantes économiques, comme Shanghai et Shenzhen.
Et récemment, l’éclatement de la guerre entre la Russie et l’Ukraine inquiète aussi les gens. Bien que la Chine ne soit pas directement concernée, la perception d’un risque croissant de sanctions augmente parmi les investisseurs. C’est donc un autre risque extrême.
Et il y aura aussi deux risques liés à la réglementation. L’un d’eux, c’est que les États-Unis et les organismes de réglementation chinois peinent toujours à s’entendre sur certains règlements comptables. De plus, en raison de la non-conformité à la Holding Foreign Companies Accountable Act, certains investisseurs perdent confiance dans les CAAE chinois.
De plus, à l’échelle nationale, la réglementation du secteur des technologies ne montre aucun signe de diminution. Donc, comme vous pouvez le constater, la liste d’inquiétudes est longue. Bien que le gouvernement chinois tente d’être plus proactif en matière de politique monétaire, jusqu’à présent, l’assouplissement n’est pas assez important ni assez rapide. C’est pourquoi on observe cette volatilité en ce moment.
Il semble qu’une grande partie de la faiblesse macroéconomique qu’on observe en Chine soit attribuable aux perturbations économiques liées à la COVID. La Chine continuera-t-elle de maintenir cette politique de tolérance zéro à l’égard de la COVID? Et sera-t-elle en mesure de gérer le risque de COVID à l’avenir?
Je pense qu’à court terme, elle va probablement maintenir la politique zéro-COVID. La raison, c’est que ce n’est jamais une bonne idée d’assouplir la politique face à une explosion des cas. En agissant de la sorte, vous risquez de perdre le contrôle complet de la situation liée à la COVID et d’exercer d’énormes pressions sur le système de soins de santé.
Mais on observe certains signes indiquant que le gouvernement chinois se prépare à abandonner la politique zéro-COVID. Par exemple, il a mis des trousses de dépistage rapide des antigènes à la disposition de tous, y compris sur des canaux en ligne, de sorte qu’elles puissent être utilisées à la maison. La Chine a également approuvé la pilule antivirale contre la COVID de Pfizer. Elle a aussi abaissé la norme en ce qui concerne les congés de l’hôpital. Elle a pris beaucoup d’autres mesures qui montrent qu’elle veut faire la transition. Et je pense qu’après cet épisode de pandémie, elle va probablement sentir qu’il est urgent d’accélérer le rythme de la transition vers l’abandon de la politique zéro-COVID.
Et, bien sûr, le secteur immobilier représente un autre risque pour le marché chinois. Selon vous, quel sera l’effet du risque extrême dans le secteur immobilier?
Selon notre scénario de base, la crise de financement de ces promoteurs immobiliers va finir par se résoudre. Mais le problème, c’est que le gouvernement et la banque centrale doivent être beaucoup plus proactifs et offrir davantage de soutien pour créer de meilleures conditions financières, pour que ces sociétés puissent trouver des solutions. Et jusqu’à présent, on n’en avait vu aucun signe jusqu’à la récente réunion du Financial Stability Committee.
Qu’en est-il de la réglementation en matière de technologie? Y aura-t-il d’autres bonnes nouvelles dans un proche avenir?
Oui. Jusqu’à la réunion du Financial Stability Committee dont je viens de parler, la réglementation du secteur des technologies ne montre aucun signe de ralentissement. Pour vous donner quelques exemples, on a rapporté qu’Alibaba avait pratiquement terminé la phase d’autoinspection, mais qu’elle pourrait faire l’objet d’un examen réglementaire externe supplémentaire.
Et, selon la rumeur, Tencent fait face à une rupture de son unité de paiement. Et une autre grande société, Meituan, devrait réduire les frais imposés aux commerçants dans un contexte économique morose. Toutes ces nouvelles ont ébranlé la confiance des investisseurs.
On comprend très bien pourquoi le gouvernement chinois veut réglementer certaines de ces grandes sociétés technologiques, car certaines de ses pratiques commerciales passées affichaient effectivement un abus de pouvoir. Mais à l’heure actuelle, c’est probablement un peu exagéré. Et comme l’ancien premier ministre chinois l’a très bien dit, la confiance est plus précieuse que l’or. Donc, à ce stade-ci, il s’agit de préserver la confiance des investisseurs et des entreprises.
Vous avez parlé de la réunion du Financial Stability Committee. Quelle en est l’importance et quels sont les messages qui en découlent?
C’est un excellent point tournant. La réunion était dirigée par le vice-premier ministre Liu He, qui est essentiellement le plus important conseiller économique de la présidence. Et cette réunion a permis de répondre à de nombreuses préoccupations du marché à l’égard de diverses questions que je viens de mentionner. Par exemple, on y a mentionné que la banque centrale devait utiliser sa politique monétaire de façon plus proactive. Dans un proche avenir, on devrait donc s’attendre à ce que la banque centrale réduise davantage les taux d’intérêt, soutienne l’économie et maintienne une croissance stable du crédit.
Au cours de cette réunion, on a également mentionné qu’en ce qui concerne la réglementation des technologies, non seulement l’organisme de réglementation devrait imposer un feu rouge à ces sociétés, mais aussi donner le feu vert et viser à améliorer leur compétitivité internationale. C’est donc une excellente nouvelle. On y a également fait état de progrès entre la Chine et les organismes américains de réglementation des valeurs mobilières. Il semble qu’ils vont bientôt parvenir à une entente, et on verra probablement le plan détaillé en avril ou en mai.
Et j’aimerais aussi savoir ce que vous pensez des répercussions que certaines des politiques de la Chine auront sur d’autres économies émergentes ou développées?
On y pense en termes de croissance et d’inflation. Pour ce qui est de la croissance, jusqu’à maintenant, les répercussions ne sont pas très évidentes, car bon nombre des autres économies sont encore en phase de réouverture. Mais si l’économie chinoise ralentit davantage, ça aura certainement un impact sur l’économie mondiale.
Et en ce qui concerne l’inflation, la politique zéro-COVID cause beaucoup de perturbations économiques. C’est donc très probable que ça va créer de nouveaux goulots d’étranglement et augmenter l’inflation déjà élevée qu’on observe actuellement. Toutefois, après la réunion du Financial Stability Committee, on aura plus d’espoir que la Chine puisse effectuer une transition réussie et accélérer son économie dans un proche avenir.
Haining, merci beaucoup pour vos explications.
Je vous en prie. Merci de m’avoir invité.
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Les actions chinoises sont de plus en plus volatiles en raison des inquiétudes suscitées par l’incertitude économique et réglementaire. Haining Zha se joint à nous pour en discuter. Il est vice-président et directeur à Gestion de Placements TD. Haining, qu’est-ce qui cause la récente volatilité des actions chinoises?
Je dirais que la tempête qu’on observe actuellement ne découle pas d’un seul facteur, mais plutôt d’une combinaison de différents facteurs. Tout d’abord, je pense que le contexte macroéconomique dans son ensemble est assez faible. Par exemple, en décembre 2021, les ventes au détail, habituellement un point de données économiques très stable, n’ont augmenté que de 1,7 % sur 12 mois. C’est assez faible.
De plus, le risque extrême du secteur immobilier plane en arrière-plan. Par exemple, le promoteur immobilier Evergrande n’a pas encore élaboré un plan de restructuration très efficace. De plus, il y a deux chocs importants pour l’économie. Le premier, c'est la COVID. Comme nous le savons, l’écart entre la Chine et le reste du monde par rapport à la COVID est assez important, et cette année, le nombre de cas est en hausse et s’est propagé dans plusieurs villes, en particulier dans certaines grandes villes ou plaques tournantes économiques, comme Shanghai et Shenzhen.
Et récemment, l’éclatement de la guerre entre la Russie et l’Ukraine inquiète aussi les gens. Bien que la Chine ne soit pas directement concernée, la perception d’un risque croissant de sanctions augmente parmi les investisseurs. C’est donc un autre risque extrême.
Et il y aura aussi deux risques liés à la réglementation. L’un d’eux, c’est que les États-Unis et les organismes de réglementation chinois peinent toujours à s’entendre sur certains règlements comptables. De plus, en raison de la non-conformité à la Holding Foreign Companies Accountable Act, certains investisseurs perdent confiance dans les CAAE chinois.
De plus, à l’échelle nationale, la réglementation du secteur des technologies ne montre aucun signe de diminution. Donc, comme vous pouvez le constater, la liste d’inquiétudes est longue. Bien que le gouvernement chinois tente d’être plus proactif en matière de politique monétaire, jusqu’à présent, l’assouplissement n’est pas assez important ni assez rapide. C’est pourquoi on observe cette volatilité en ce moment.
Il semble qu’une grande partie de la faiblesse macroéconomique qu’on observe en Chine soit attribuable aux perturbations économiques liées à la COVID. La Chine continuera-t-elle de maintenir cette politique de tolérance zéro à l’égard de la COVID? Et sera-t-elle en mesure de gérer le risque de COVID à l’avenir?
Je pense qu’à court terme, elle va probablement maintenir la politique zéro-COVID. La raison, c’est que ce n’est jamais une bonne idée d’assouplir la politique face à une explosion des cas. En agissant de la sorte, vous risquez de perdre le contrôle complet de la situation liée à la COVID et d’exercer d’énormes pressions sur le système de soins de santé.
Mais on observe certains signes indiquant que le gouvernement chinois se prépare à abandonner la politique zéro-COVID. Par exemple, il a mis des trousses de dépistage rapide des antigènes à la disposition de tous, y compris sur des canaux en ligne, de sorte qu’elles puissent être utilisées à la maison. La Chine a également approuvé la pilule antivirale contre la COVID de Pfizer. Elle a aussi abaissé la norme en ce qui concerne les congés de l’hôpital. Elle a pris beaucoup d’autres mesures qui montrent qu’elle veut faire la transition. Et je pense qu’après cet épisode de pandémie, elle va probablement sentir qu’il est urgent d’accélérer le rythme de la transition vers l’abandon de la politique zéro-COVID.
Et, bien sûr, le secteur immobilier représente un autre risque pour le marché chinois. Selon vous, quel sera l’effet du risque extrême dans le secteur immobilier?
Selon notre scénario de base, la crise de financement de ces promoteurs immobiliers va finir par se résoudre. Mais le problème, c’est que le gouvernement et la banque centrale doivent être beaucoup plus proactifs et offrir davantage de soutien pour créer de meilleures conditions financières, pour que ces sociétés puissent trouver des solutions. Et jusqu’à présent, on n’en avait vu aucun signe jusqu’à la récente réunion du Financial Stability Committee.
Qu’en est-il de la réglementation en matière de technologie? Y aura-t-il d’autres bonnes nouvelles dans un proche avenir?
Oui. Jusqu’à la réunion du Financial Stability Committee dont je viens de parler, la réglementation du secteur des technologies ne montre aucun signe de ralentissement. Pour vous donner quelques exemples, on a rapporté qu’Alibaba avait pratiquement terminé la phase d’autoinspection, mais qu’elle pourrait faire l’objet d’un examen réglementaire externe supplémentaire.
Et, selon la rumeur, Tencent fait face à une rupture de son unité de paiement. Et une autre grande société, Meituan, devrait réduire les frais imposés aux commerçants dans un contexte économique morose. Toutes ces nouvelles ont ébranlé la confiance des investisseurs.
On comprend très bien pourquoi le gouvernement chinois veut réglementer certaines de ces grandes sociétés technologiques, car certaines de ses pratiques commerciales passées affichaient effectivement un abus de pouvoir. Mais à l’heure actuelle, c’est probablement un peu exagéré. Et comme l’ancien premier ministre chinois l’a très bien dit, la confiance est plus précieuse que l’or. Donc, à ce stade-ci, il s’agit de préserver la confiance des investisseurs et des entreprises.
Vous avez parlé de la réunion du Financial Stability Committee. Quelle en est l’importance et quels sont les messages qui en découlent?
C’est un excellent point tournant. La réunion était dirigée par le vice-premier ministre Liu He, qui est essentiellement le plus important conseiller économique de la présidence. Et cette réunion a permis de répondre à de nombreuses préoccupations du marché à l’égard de diverses questions que je viens de mentionner. Par exemple, on y a mentionné que la banque centrale devait utiliser sa politique monétaire de façon plus proactive. Dans un proche avenir, on devrait donc s’attendre à ce que la banque centrale réduise davantage les taux d’intérêt, soutienne l’économie et maintienne une croissance stable du crédit.
Au cours de cette réunion, on a également mentionné qu’en ce qui concerne la réglementation des technologies, non seulement l’organisme de réglementation devrait imposer un feu rouge à ces sociétés, mais aussi donner le feu vert et viser à améliorer leur compétitivité internationale. C’est donc une excellente nouvelle. On y a également fait état de progrès entre la Chine et les organismes américains de réglementation des valeurs mobilières. Il semble qu’ils vont bientôt parvenir à une entente, et on verra probablement le plan détaillé en avril ou en mai.
Et j’aimerais aussi savoir ce que vous pensez des répercussions que certaines des politiques de la Chine auront sur d’autres économies émergentes ou développées?
On y pense en termes de croissance et d’inflation. Pour ce qui est de la croissance, jusqu’à maintenant, les répercussions ne sont pas très évidentes, car bon nombre des autres économies sont encore en phase de réouverture. Mais si l’économie chinoise ralentit davantage, ça aura certainement un impact sur l’économie mondiale.
Et en ce qui concerne l’inflation, la politique zéro-COVID cause beaucoup de perturbations économiques. C’est donc très probable que ça va créer de nouveaux goulots d’étranglement et augmenter l’inflation déjà élevée qu’on observe actuellement. Toutefois, après la réunion du Financial Stability Committee, on aura plus d’espoir que la Chine puisse effectuer une transition réussie et accélérer son économie dans un proche avenir.
Haining, merci beaucoup pour vos explications.
Je vous en prie. Merci de m’avoir invité.
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