Le prix de l’argent s’est redressé cette année, surpassant même parfois l’or. Daniel Ghali, stratège principal, Produits de base à Valeurs Mobilières TD, discute des tendances de la demande mondiale et des raisons pour lesquelles le prix de ce métal pourrait continuer de grimper.
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Beaucoup d'investisseurs observent la hausse de l'or cette année. L'argent a connu une progression encore plus importante. Pour discuter des raisons de ce mouvement et de sa prolongation, Daniel Ghali de Valeurs mobilières TD, nous rejoint. Un graphique assez éloquent quant à la remontée de l'or qui a fait les manchettes, mais l'argent également. Qu'est-ce qui propulse cette remontée? L'argent a extrêmement bien progressé jusqu'ici cette année. Les données fondamentales de l'argent sont parmi les plus emballantes dans le complexe des produits de base aujourd'hui. Il s'agit d'un marché qui est déficitaire de plus ou moins trois ans. La plupart des analystes dans le monde prévoient qu'il continuera d'afficher un déficit structurel pour l'avenir prévisible. Depuis une dizaine d'années, personne ne s'en préoccupe. Personne ne se préoccupe des données fondamentales d'offres et de demandes, car il y a d'énormes stocks d'argent métal qui étaient toujours suffisamment importants pour éponger tout déséquilibre de l'offre et de la demande. Or, cette hypothèse sera remise en question d'ici un an ou deux. C'est le résultat de la transition énergétique. L'énergie solaire exige davantage d'argent. Le boom des véhicules électriques également, à cause de l'usage accru de circuits électroniques dans les véhicules. La demande est forte, l'offre, limitée: le marché est excitant. Pendant une dizaine d'années, personne ne se préoccupait d'un déficit structurel, et tout à coup, les marchés se sont réveillés. C'est la transition énergétique. On s'est dit: Attention. L'argent jouera un rôle clé? Oui, il s'agit d'un environnement très porteur pour les métaux précieux. L'or a beaucoup progressé. On s'attendrait à ce que l'argent métal progresse également aussi. Dans cet environnement. Mais ce qui est particulièrement intéressant dans les données fondamentales de l'argent à l'heure actuelle, c'est que ces stocks dont nous parlions commencent à s'amenuiser depuis 10 ans. Il y avait environ 1,6 milliards d'onces d'argent dans des coffres-forts un peu partout dans le monde. Aujourd'hui, nous constatons qu'il y a sans doute une quantité substantielle d'argent métal qui demeure dans ces coffres-forts, qui a été capturé par des FNB, par exemple. Donc, la quantité d'argent librement disponible pour achat dans le plus grand réseau de coffres du marché de métaux précieux à Londres est beaucoup moins importante. Nous pensons que 300 millions d'onces sont disponibles pour achat. Dans le contexte, un déficit moyen de 200 millions depuis trois ans. Alors, il ne reste pas beaucoup de temps avant que ces inventaires ne soient entièrement épuisés. Cela crée une tension assez intéressante. On parle de l'or qui est détenu dans des coffres pour une raison, et joue un rôle dans le système financier. L'argent, on parle de l'or du pauvre, mais si les gens veulent l'argent pour fabriquer des choses, c'est une tension à laquelle je n'avais pas songée. Oui. Depuis 10 ans, on considère l'argent comme un actif financier, comme l'or. Mais le profil de demande de l'argent est essentiellement attribuable à l'industrie. Il est beaucoup utilisé dans la fabrication de bijoux, d'argenterie, dans des applications industrielles également. Mais surtout, surtout, la flambée de la demande est attribuable à la transition énergétique. L'or est de plus en plus déphasé par rapport à l'argent, ou le sera en conséquence de cela. Vous avez parlé de l'offre brièvement. Si la demande d'argent va augmenter, tandis que nous progressons dans la transition, que dire de la situation minière? Est-ce que l'industrie réagit? L'industrie ne peut pas ne pas répondre. Oui. Nous avons passé beaucoup de temps à parler du sous-investissement structurel dans les mines et les métaux, et les autres industries à forte intensité de carbone depuis une décennie. L'argent est essentiellement un sous-produit de l'extraction d'autres minerais: le plomb, le zinc, l'or... Mais il n'y a pas tellement d'argent qui est exploité à partir d'une mine d'argent. La conséquence, c'est que les sous-investissements structurels du secteur minier, dont nous avons parlé pour le cuivre par exemple, affectent également l'offre d'argent. Est-ce que cela crée une situation de spéculation? Oui. Nous pensons que nous sommes dans un environnement où il est plausible que l'argent fasse l'objet d'une spéculation. En effet, les coffres de la bourse des métaux de Londres, qui contient 75 % des stocks d'argent visible au monde, sont en cours d'épuisement. En cours d'épuisement à cause de la forte demande venant du thème de transition énergétique, comme nous en avons parlé. Mais aussi, il y a un glissement considérable de métal de l'ouest à l'est, l'Inde et la Chine notamment. Affichons ce graphique une nouvelle fois, que nous avons montré au début. Montrons l'or et l'argent. L'or a beaucoup progressé, mais que voyons-nous? Le fait que l'or surclasse l'argent, cela peut prendre plusieurs personnes par surprise. Il est fréquent que l'argent surclasse l'or à cause de sa volatilité. Si vous ajustiez le rendement de ces deux actifs en fonction de la volatilité, vous constateriez que ce n'est que depuis quelques semaines et quelques mois que l'argent a commencé à dépasser l'or. Mais la volatilité de l'argent est le double de celle de l'or. Au fur et à mesure que les cours de l'or augmentent de 1 %, on peut s'attendre à une fluctuation plus importante des cours de l'argent. L'or a beaucoup progressé, a légèrement reculé par rapport au sommet. On avait dit qu'on ne serait pas étonnés de voir un recul. Il a eu lieu. Et que dire de l'argent? Est-ce que la remontée va se poursuivre à court et moyen terme? Voici ce qui est intéressant dans le cours de l'argent. L'argent est négocié près de sommets jamais vus depuis plusieurs années, tandis que l'or a légèrement reculé. Ce qui souligne le fait que le cours de l'or est assez ferme. Le fait que la baisse de l'or n'a pas tiré l'argent vers le bas montre qu'il y a une véritable évolution dans la demande d'argent métal. Nous pensons que cela pourrait représenter une forte demande en provenance de Chine. Il y a eu certains signes d'une rotation dans les activités de métaux précieux dans le commerce de détail. Il y a eu beaucoup d'opérations sur l'or en avril, mais une possible transition vers l'argent aujourd'hui. Mais aussi parce que les installations solaires de Chine dépassent les attentes. L'an dernier a été une année exceptionnelle pour la croissance de la capacité d'énergie solaire en Chine. On s'attend cette année qu'au mieux, elle ne pourra faire qu'autant que l'an dernier. Mais les résultats jusqu'ici cette année sont très impressionnants. Donc, la demande d'argent métal physique en Chine est très forte. Je pense que nous connaissons bien les raisons fondamentales de la remontée de l'argent. Dans mon dernier entretien avec vous, et avec Bart Melek, votre collègue également, il y avait l'acheteur mystère de l'or. On s'est rendu compte que c'était essentiellement les banques centrales? En partie, nous pensons que cela pourrait être associé par des banques centrales ou d'autres secteurs officiels. Mais ce qui vaut la peine d'être évoqué pour les métaux précieux aujourd'hui, c'est qu'ils se transforment en un élément de dépréciation de la monnaie. Les marchés sont mondiaux. De nature et à l'heure actuelle, il existe une très forte pression sur les monnaies asiatiques qui donnent des raisons aux investisseurs institutionnels et aux pouvoirs public de se diversifier, en délaissant les monnaies qui se déprécient, et l'or est parfait pour cela. Avant de clore cet entretien, nous avons vu la remontée de l'or, le recul de l'or. Est-ce que la même chose attend l'argent? Nous pensons que le risque est assez limité. Bien sûr, il existe un risque, mais le risque nous paraît limité, car la marge de sécurité par rapport à une liquidation substantielle par des investisseurs est assez considérable. Il faudrait une forte baisse des prix avant que les investisseurs ne soient obligés de liquider. La demande émane des marchés physiques. Il nous semble que la situation à l'heure actuelle est très solide.