Selon les plus récentes données sur l’emploi aux États-Unis, le secteur montre des signes de ralentissement. Rannella Billy-Ochieng’, économiste principale à la TD, discute des répercussions sur l’économie américaine avec Anthony Okolie.
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[LOGO SONORE] Les données sur l’emploi arrivent vendredi, l’économie américaine est dans le collimateur. En début de semaine, un rapport montrait que les offres d’emploi aux États-Unis avaient augmenté de façon inattendue au cours du mois dernier. Ce matin, on a reçu le rapport sur les emplois dans le secteur privé États-Unis de l’ADP et ils sont plus faibles que prévu. Ces résultats montrent à quel point il est difficile de prévoir quand l’économie va montrer des signes de ralentissement. On en discute avec Rannella Billy-Ochieng, économiste principale, TD. Rannella, bienvenue à l’émission. Merci d’être là. Merci de m’avoir invitée. Commençons par vos perspectives globales sur l’économie américaine. Comment vont les États-Unis à l’heure actuelle? L’économie américaine fait preuve d’une résilience exceptionnelle, malgré le fait que la Fed resserre ses taux depuis plus d’un an. Elle devrait enregistrer une croissance de près de 4 % ce trimestre, c’est très élevé. Cette vigueur est due en grande partie aux consommateurs. Ils font preuve d’une résilience exceptionnelle. Mais au-delà de ce trimestre, on s’attend à voir le rythme de la croissance ralentir à cause de l’impact du resserrement monétaire dans différents secteurs de l’économie. Ce sont nos perspectives pour l’année à venir. OK, parlons des emplois maintenant. On a obtenu le rapport sur les offres d’emploi aux États-Unis du mois d’août et il témoigne de la vigueur soutenue du marché de l’emploi. Mais, ce matin, le rapport sur les emplois dans le secteur privé aux États-Unis de l’ADP fait état d’une faiblesse. Quelles sont les tendances actuelles? Le rapport mensuel sur l’emploi peut être un peu volatile. Il est important de regarder au-delà des fluctuations mensuelles. Si on examine le rapport JOLTS, par exemple, la tendance sur trois mois, on voit des signes de ralentissement dans ce rapport. De plus, les données sur les emplois salariés ont montré un ralentissement important depuis le début de l’année. La moyenne sur trois mois était d’environ 300 000 nouveaux emplois. Mais ces derniers mois, ce nombre a été réduit de moitié. C’est un changement important. Et c’est normal, étant donné le stade du cycle économique dans lequel on se trouve et des changements apportés aux politiques avec un resserrement très fort des taux d’intérêt par la Fed. On s’attend à ce que cette tendance se poursuive. On s’attend à voir des pertes d’emplois l’an prochain. Une autre mesure qu’on examine est l’ampleur de l’embauche. Par exemple, on sait que les employeurs prennent des décisions d’embauche en fonction de l’état de l’économie. Avec l’indice de diffusion qui mesure l’ampleur de l’embauche au sein des entreprises, on voit depuis que la Fed a commencé à relever ses taux l’an dernier, que l’ampleur de l’embauche a considérablement ralenti. À son sommet, elle était d’environ 85. Les derniers chiffres se situent autour de 60. Ah oui, j’ai vu cette tendance! On observe donc une tendance généralisée, des signes de ralentissement. Et ça prend un certain temps… c’est clair. Mais on observe des signes de ralentissement, et c’est ce qui permettra à la Fed de rester sur le qui-vive. Parce que la Fed a besoin d’un ralentissement important du marché de l’emploi. La croissance des salaires doit beaucoup ralentir avant qu’on puisse crier victoire sur le plan de l’inflation. Oui, c’est un véritable défi. Parlons un peu de l’inflation, de la croissance des salaires… L’inflation persiste. Bien qu’elle soit à la baisse, elle n’est toujours pas au niveau souhaité par la Fed. D’après vous, quelle direction prendra l’inflation? L’inflation a été très rigide et c’est quelque chose qui ennuie la Fed. D’un mois à l’autre, l’inflation a légèrement augmenté et on ne prend pas ça à la légère. Si on regarde de plus près, ce qu’on voit c’est que l’inflation des services alimente certaines de ces pressions sur les prix. Et notre inflation refuge est l’une des principales causes de cette situation. Les représentants de la Fed ont parlé de la rigidité de l’inflation et ils la surveillent depuis un certain temps. Mais il y a encore lieu d’être optimiste. Parce que si on examine notre situation par rapport au début de l’année, les pressions sur les prix se sont considérablement atténuées. Mais il nous semble prématuré de dire que le travail est terminé. Et c’est ce que la Fed ne cesse de répéter. Elle laisse constamment entendre qu’elle n’a pas terminé, qu’elle est déterminée à calmer l’inflation de façon permanente et qu’elle va freiner le plus longtemps possible. Et les marchés réagissent à cela. C’est pourquoi les taux obligataires ont bondi hier. Parce qu’ils réévaluent en fonction des taux d’intérêt qui vont augmenter plus longtemps, et une partie de l’impact a atteint les actions. Une autre question que les gens se posent, c’est de savoir s’il y aura une récession. Est-ce qu’elle va venir? On n’arrête pas d’entendre dire que c’est le cas. Mais on n’a encore vu aucune preuve [RIRE]. On commence à voir s’intensifier les craintes d’une récession sur le marché, en particulier si la Fed maintient les taux à la hausse plus longtemps. Qu’est-ce que vous en pensez? Pensez-vous qu’une récession pourrait avoir lieu l’an prochain ou est-ce qu’un atterrissage en douceur est toujours envisageable? Il est difficile de répondre à cette question. Et le risque de récession par rapport à l’atterrissage en douceur dépend de la façon dont on définit l’ampleur et la durée du ralentissement. Selon nous, aux Services économiques TD, l’économie américaine va ralentir. Et c’est normal, étant donné que les banques centrales resserrent leur politique monétaire. On ne parle pas de récession, mais d’un ralentissement généralisé de la croissance. On prévoit un ralentissement de l’activité économique. Nos prévisions comportent des risques, et on en est conscients. Certains facteurs pourraient modifier l’état futur de l’économie américaine. Premièrement, si l’inflation est encore plus persistante que ce que la Fed ou nous prévoyons, la Fed devra relever les taux d’intérêt davantage. Et cela augmentera la probabilité que l’économie perde pied. Et il y a d’autres facteurs : la fin du cycle, les problèmes de confiance. Il s’est passé beaucoup de choses aux États-Unis. Il y a eu des grèves, des perturbations politiques, le Congrès américain a évité une paralysie du gouvernement. Indépendamment, ces facteurs ne changent pas tout. Mais ensemble, ils perturbent considérablement la croissance économique. [LOGO SONORE] [MUSIQUE]