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La hausse des taux d’intérêt a contribué à stimuler l’attrait des marchés obligataires. Hafiz Noordin, gestionnaire de portefeuille, Titres à revenu fixe mondiaux, Gestion de Placements TD, affirme à Greg Bonnell que ceux qui cherchent à diversifier encore plus leurs placements pourraient trouver des occasions dans les marchés émergents.
La hausse des taux d’intérêt a rendu le marché obligataire un peu plus intéressant pour la première fois depuis des années. Et notre invité d’aujourd’hui affirme que si vous cherchez à diversifier vos placements, il existe de bonnes occasions dans les marchés émergents. Hafiz Noordin, gestionnaire de portefeuille, Titres à revenu fixe mondiaux, Gestion de Placements TD, se joint à nous. C’est un plaisir de vous accueillir à l’émission.
Chaque émission, beaucoup de gens nous posent des questions sur les titres à revenu fixe ou non. Parlez-moi de ce que vous voyez sur les marchés émergents.
Eh bien, tout d’abord, c’est un plaisir d’être ici, Greg. Et le contexte a certainement été difficile pour les marchés émergents. L’inflation mondiale augmente en raison de la hausse des taux d’intérêt à l’échelle mondiale et, en plus de ça, on entrevoit maintenant une période où la croissance va probablement ralentir un peu.
Et donc, par le passé, le contexte a été difficile. Mais ce qu’on voit maintenant, c’est qu’il y a un certain nombre de gagnants et de perdants dans les pays émergents. Certains sont plus touchés par l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Par contre, un certain nombre de pays ont pris des mesures proactives pour relever les taux d’intérêt, et leurs banques centrales l’ont fait bien avant les mesures prises par la Réserve fédérale et la Banque du Canada.
De plus, certains de ces pays sont également des exportateurs de produits de base. Ils sont donc vraiment liés à ce cycle qu’on a observé dans la hausse des prix des produits de base et qui a été bénéfique, ce qui a fourni des occasions intéressantes d’améliorer le taux d’un portefeuille de titres à revenu fixe.
D’accord, c’est donc ce qu’on prévoit pour les occasions dans les marchés émergents. Bien sûr, dans les marchés émergents, il n’y a pas qu’un seul groupe ayant les mêmes caractéristiques. Expliquez-nous un peu plus en détail les différentes catégories que vous voyez.
Bien sûr. Eh bien, je pense qu’il est bon d’adopter une approche régionale. Selon moi, l’Amérique latine est l’une de ces régions où les exportations de produits de base ont vraiment contribué à stimuler les recettes budgétaires et à stabiliser les monnaies. Mais à l’autre bout du spectre, il y a un certain nombre d’importateurs de produits de base qui ont été perdants : l’Inde, beaucoup de pays asiatiques et certains pays d’Europe de l’Est. Quand ils importent des produits de base, ça exerce beaucoup plus de pression sur leurs équilibres budgétaires. Et cela a simplement entraîné une nouvelle hausse de l’inflation. Donc je crois que les produits de base sont l’un des facteurs de différenciation.
Mais l’autre facteur, c’est dans quelle mesure certains de ces pays ont progressé ou pris du retard par rapport à la hausse des taux. Certains pays qui avaient pris du retard, comme en Europe de l’Est cette année, ont éprouvé beaucoup plus de difficultés. Leurs obligations ont reculé d’environ 40 % cette année, simplement parce qu’ils doivent maintenant vraiment rattraper la hausse de leurs taux et, en plus, il y a le sentiment à l’égard de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Je crois donc que ça a à voir avec les liens avec les produits de base et la façon dont les banques centrales relèvent leurs taux d’intérêt face à l’inflation.
Oui, on parle beaucoup de la Fed, évidemment, parce que le monde entier surveille la Réserve fédérale américaine, la banque centrale la plus puissante du monde. Chez nous, on parle de la Banque du Canada. C’est intéressant que vous mentionniez que certaines banques centrales de ces marchés émergents ont peut-être été un peu plus proactives que nous.
Tout à fait. Et je pense que ce qui se passe dans certains marchés émergents, et le Mexique et le Brésil sont probablement de bons exemples de pays où l’inflation a rapidement augmenté l’an dernier, les cycles passés leur ont appris qu’ils doivent prendre les devants. Sinon, leurs devises pourraient perdre le contrôle, parce que les crises surviennent souvent dans les marchés émergents.
Et donc, ce qu’ils ont fait en moyenne en Amérique latine... en moyenne, il y a eu environ 650 points de base de hausse entre le début de 2021 et aujourd’hui. En comparaison, la Fed et la Banque du Canada ont relevé leurs taux d’environ 100 à 150 points de base au cours des derniers mois seulement. Et donc, beaucoup plus de capitaux étrangers sont entrés dans les pays, convaincus que leurs taux étaient suffisamment élevés pour atténuer un peu l’inflation. Ils ont donc été en mesure de profiter de ces entrées de capitaux et de maintenir une certaine stabilité économique.
On a parlé des marchés émergents. On a parlé des occasions liées aux titres à revenu fixe. Est-on sur le point de parler de titres à rendement élevé, ou est-ce qu’on va un peu trop loin?
Eh bien, il y a une distinction à faire. Il existe certainement de solides sociétés de qualité investissement sur les marchés émergents, dont certaines sont cotées A, comme la Chine, le Chili ou le Pérou, qui ont un très faible niveau d’endettement et qui ont historiquement eu de très bonnes équipes de direction. Leurs gouvernements gèrent bien leurs équilibres budgétaires.
Et puis il y a une sorte de zone DDD. Je dirais donc que ce sont des sociétés de qualité investissement plutôt solides, comme au Mexique ou en Indonésie. La qualité de leur crédit est plutôt bonne. Mais il y a d’autres risques à surveiller pour s’assurer qu’ils ne seront pas rétrogradés au niveau des titres à rendement élevé. Mais entre-temps, on a une compensation pour ces risques-là.
Et puis, il y a certainement les titres à rendement élevé, qui peuvent devenir beaucoup plus risqués. Si on fait de bonnes recherches ascendantes, alors il y a de bonnes occasions. Mais il y a certainement des titres où les choses peuvent déraper assez rapidement sans le bon gouvernement en place. Et ils peuvent se retrouver en situation de défaut de paiement.
Tout comme pour le marché des obligations de sociétés, il faut faire une recherche ascendante. Je ne crois vraiment pas que les marchés émergents soient un placement passif. De nombreux indices des marchés émergents ont tendance à affecter des capitaux aux plus grands emprunteurs, ce qui n’est probablement pas la règle à suivre lorsqu’il y a une telle différenciation dans la qualité du crédit.
D’accord, j’ai l’impression que l’auditoire est probablement intrigué. Alors parlons de ça, de faire nos devoirs, du processus d’évaluation des différents marchés émergents. Quelles sont les mesures d’analyse que vous mettez en place?
Eh bien, ça commence certainement par un sentiment de macrostabilité. Ce que je veux dire par là, c’est : existe-t-il des règles en place pour gérer les équilibres budgétaires? Les marchés émergents ont l’avantage d’être des pays à forte croissance, parce que leur population croît plus rapidement. L’amélioration de la productivité peut donner lieu à plus de gains. Mais, habituellement, le piège dans lequel ils tombent, c’est la mauvaise gestion de leurs équilibres budgétaires.
Dans certains pays, leur ratio endettement/PIB est de 80 % à 90 %, ce qui est très élevé, et même plus élevé que dans certains marchés développés. Et c’est là qu’il faut se demander, s’ils atteignent ces niveaux d’endettement élevés, est-ce qu’ils mettent en place des règles, des plafonds de dépenses budgétaires, par exemple, pour s’assurer que ça ne va pas trop haut?
L’autre aspect qu’on surveille, ce sont les réserves. Quand la volatilité des devises est élevée, comme c’est le cas actuellement, il faut s’assurer que les marchés émergents qui empruntent en dollars américains et en euros disposent des réserves de change nécessaires pour rembourser certaines de leurs dettes externes. Il faut donc vraiment comprendre les données et aussi la façon dont les gouvernements gèrent ces équilibres, et vérifier qu’ils ne les consacrent pas à des mesures non productives.
Oui, je voulais vous demander comment les réserves de change américaines sont gérées, parce que, de toute évidence, si le monde entier surveille la Réserve fédérale américaine, c’est simplement en raison de son influence. Et si la Fed maintenait ces mesures énergiques? Qu’est-ce que ça ferait aux occasions liées aux marchés émergents?
Eh bien, je pense que c’est un excellent point, car c’est vraiment le principal risque en ce moment. Pour l’instant, le marché a tenu compte des hausses de taux qui, selon nous, vont obliger la Fed à dépasser une zone neutre. Il s’agit donc d’un taux directeur de 3,5 % à 4 %. Et donc, pour l’instant, les marchés émergents en ont en quelque sorte tenu compte, mais le risque, c’est que ça s’accélère si l’inflation continue de prendre de la vitesse.
Et je pense que ça fera en sorte que les marchés émergents qui n’ont pas suffisamment de réserves vont commencer à se retrouver avec des dettes en dollars américains plus élevées qu’ils vont devoir commencer à rembourser. La Turquie est un très bon exemple de pays dont les réserves sont très faibles, et elle a une politique monétaire peu orthodoxe, et a tendance à connaître des difficultés dans des périodes comme celle-ci, avec le dollar américain qui a déjà commencé à grimper, et les taux obligataires américains aussi.
En revanche, certains pays, comme le Brésil, je tiens à le souligner, ont des réserves très solides. Oui, leurs niveaux d’endettement sont élevés, mais ils ont tellement de réserves qu’ils ont tiré parti des exportations de produits de base au fil des ans qu’ils peuvent probablement amortir certains de ces chocs en raison de la hausse des taux d’intérêt aux États-Unis.
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