Avec la hausse des taux d’intérêt, la possibilité de réaliser des économies d’impôt au moyen d’une stratégie de prêt familial se réduit. La stratégie de prêt à taux prescrit est-elle toujours valable, alors que le taux prescrit passe à 3 % le 1er octobre? Georgia Swan, planificatrice spécialiste de la fiscalité et des successions à Gestion de patrimoine TD, donne son point de vue sur la question.
Print Transcript
[LOGO AUDIO]
Les taux d’intérêt ont augmenté et avec eux, ce qu’on appelle le taux prescrit. C’est une nouvelle très intéressante pour ceux qui utilisent la stratégie de prêt au taux prescrit pour fractionner des revenus de placement avec leur conjoint. Voici Georgia Swan, planificatrice spécialiste de la fiscalité et des successions à GPTD. Ravie de vous retrouver.
Ravie d’être enfin là en personne.
C’est mieux, non? C’est bien mieux en personne.
Commençons par les bases. Qu’est-ce qu’un prêt au taux prescrit et comment fractionne-t-on les revenus? OK. Un prêt au taux prescrit, c’est un prêt entre conjoints. Le but, comme vous l’avez dit, c’est de fractionner le revenu. C’est avantageux à cause de la Loi de l’impôt sur le revenu et de ses règles d’attribution. Disons que je gagne 100 000 $ et que je dépose cette somme dans un compte de placement que je détiens avec mon conjoint. Si ces 100 000 $ gagnent 5 %, le revenu de 5 000 $ me revient entièrement, car c’est moi qui l’aie gagné.
On cherche donc des moyens légitimes et autorisés de fractionner ce revenu de sorte à bénéficier de taux inférieurs sur ce revenu de placement. Pour ce faire, l’Agence du revenu du Canada publie le taux prescrit, qui correspond à la moyenne sur trois mois des bons du Trésor canadiens à court terme. On peut considérer ce taux comme étant le plus bas auquel on peut prêter de l’argent, tout en faisant un prêt valide.
Le fractionnement du revenu fonctionne comme suit : je prête ces 100 000 $ à mon mari, puis il les investit. Tant qu’il me verse des intérêts au taux prescrit, il peut déclarer le reste de ce revenu à son taux d’imposition marginal. Normalement, son taux est inférieur au mien, et on peut fractionner le revenu.
Voyons si j’ai bien compris. Prenons deux conjoints. L’un a un taux d’imposition élevé, l’autre un taux faible. Celui qui a le taux d’imposition élevé prête de l’argent à l’autre. L’autre lui verse des intérêts, mais reçoit le revenu ou les dividendes, car c’est son placement. Et c’est plus avantageux sur le plan fiscal?
Exactement. Exactement.
Super. J’ai tout bon sur cette question.
Oui.
Reprenons votre exemple, parce qu’il est très parlant. Pouvez-vous nous parler du changement de taux. De quoi faut-il tenir compte?
D’accord. Au premier semestre de cette année, le taux était de 1 %. Au troisième trimestre, il est passé à 2 %. Au quatrième trimestre, il sera de 3 %. Ça fait une différence si on reprend l’exemple où j’ai donné 100 000 $ à mon conjoint. Disons que mon taux d’imposition est de 50 %, et que le sien est de 25 %.
Si j’investis l’argent à 5 %, je reçois 5 000 $. Comme mon taux est de 50 %, je n’empoche au final que 2 500 $.
Voyons si je prête cette somme à mon conjoint, qui est assujetti à un taux de 25 %. Sur ces 5 000 $, il doit me verser 1 000 $, si on prend le taux d’intérêt en vigueur à l’époque, au début de l’année. Le taux était de 1 %. Il doit donc me verser 1 000 $. Je déclare ce montant avec mes revenus. Il me reste 500 $, parce que mon taux est de 50 %. Par contre, mon conjoint déclare les 4 000 $ restants à son taux de 25 %. Il lui reste 3 000 $. Ensemble, on empoche 3 500 $. Par contre, si j’avais investi seule, on n’aurait gagné que 2 500 $.
Donc, dans cet exemple, ce qui est important, c’est l’écart entre nos deux taux d’imposition. Ensuite, il y a d’autres facteurs auxquels il faut également réfléchir.
À un taux de 1 %, on y gagne à tous les coups. La question ne se pose même pas. Plus le taux d’intérêt est élevé, plus l’écart doit être important entre les conjoints pour que ça fonctionne. OK. La première chose, c’est l’écart entre les taux d’imposition des conjoints. Ensuite, vous dites qu’il faut tenir compte du revenu futur des conjoints.
Oui, parce que cette stratégie de planification fiscale n’est intéressante que si l’écart entre les deux taux d’imposition est important. Mais à l’approche de la retraite, il faut peut-être réévaluer le bien-fondé de cette stratégie. Bien souvent, la retraite donne accès à d’autres options comme le fractionnement des prestations de retraite, ce qui rapproche les taux d’imposition.
Il faut aussi se demander d’où provient cet argent. Par exemple, si l’argent provient d’un placement à long terme que je dois liquider pour faire le prêt, je risque de déclencher des gains en capital sur lesquels je dois payer de l’impôt avant même de faire le prêt. Il faut donc tenir compte des économies d’impôt que l’on doit réaliser pour revenir à zéro et vraiment commencer à épargner parce qu’on a déclenché un gain en capital.
Il faut aussi payer des frais, car c’est un prêt en bonne et due forme. Il faut une convention de prêt. Le prêt doit être assorti de conditions. Il faut s’assurer que l’argent est remboursé. Il peut y avoir des frais juridiques et des frais comptables. Il faut étudier tous ces facteurs pour déterminer si c’est judicieux à un taux de 3 %. De plus, le rendement du placement doit être assez élevé.
Oui, c’est drôle parce que... Enfin, pas vraiment. Les marchés ne sont pas au beau fixe en ce moment. Si vous prêtez de l’argent à votre conjoint et que le placement ne rapporte rien, tout le monde y perd, dans ce cas.
Exactement.
Est-ce qu’il faut s’attendre à des frais juridiques et comptables importants pour ce type de prêt? Peut-on simplement rédiger quelque chose? Je m’engage à faire ceci ou cela.
Eh bien, non. Je ne dirais pas que les frais sont excessivement élevés, mais ce n’est pas quelque chose que l’on peut faire autour de la table de cuisine. C’est une stratégie de planification fiscale sophistiquée. Et pour discuter des différentes variables qu’on vient d’évoquer, il faut se faire accompagner de quelqu’un qui va étudier votre situation. C’est donc important de faire appel aux bons professionnels. Oui, la convention de prêt est assez simple, mais tout dépend de la situation préalable.
D’accord.
C’est pour ça que vous êtes là, Georgia. Et que ce n’est pas moi qui m’en charge. C’est un travail pour Georgia. Autre chose, vous avez parlé d’une autre stratégie intéressante pour financer par exemple les frais de scolarité, les dépenses liées aux petits-enfants, les écoles privées, les activités parascolaires. Il s’agit de la fiducie familiale. Comment est-ce que ça marche?
Oui. Souvent, les gens établissent des fiducies familiales, mais elles ne génèrent pas toujours de revenus importants. Tout dépend de la valeur des actifs. Et quand on en vient à l’étape où les bénéficiaires les plus jeunes, ceux qui sont à cet âge crucial entre 18 et 24 ans et qui font des études supérieures mais ne gagnent pas encore d’argent par leurs propres moyens... on regrette que la fiducie ne fasse pas plus d’argent.
Vous pouvez faire un prêt au taux prescrit pour prêter de l’argent à la fiducie au taux prescrit. C’est la même idée qu’auparavant. De cette façon, vous versez plus d’actifs dans la fiducie, qui génère alors un revenu qui peut être versé aux bénéficiaires. On ne peut pas simplement verser de l’argent dans une fiducie. Ça entraîne toutes sortes de problèmes fiscaux. Mais avec un prêt au taux prescrit, vous pouvez parvenir au même résultat et peut-être gagner un revenu plus élevé pendant cette période cruciale où vous en avez vraiment besoin.
[LOGO AUDIO]
[MUSIQUE]
Les taux d’intérêt ont augmenté et avec eux, ce qu’on appelle le taux prescrit. C’est une nouvelle très intéressante pour ceux qui utilisent la stratégie de prêt au taux prescrit pour fractionner des revenus de placement avec leur conjoint. Voici Georgia Swan, planificatrice spécialiste de la fiscalité et des successions à GPTD. Ravie de vous retrouver.
Ravie d’être enfin là en personne.
C’est mieux, non? C’est bien mieux en personne.
Commençons par les bases. Qu’est-ce qu’un prêt au taux prescrit et comment fractionne-t-on les revenus? OK. Un prêt au taux prescrit, c’est un prêt entre conjoints. Le but, comme vous l’avez dit, c’est de fractionner le revenu. C’est avantageux à cause de la Loi de l’impôt sur le revenu et de ses règles d’attribution. Disons que je gagne 100 000 $ et que je dépose cette somme dans un compte de placement que je détiens avec mon conjoint. Si ces 100 000 $ gagnent 5 %, le revenu de 5 000 $ me revient entièrement, car c’est moi qui l’aie gagné.
On cherche donc des moyens légitimes et autorisés de fractionner ce revenu de sorte à bénéficier de taux inférieurs sur ce revenu de placement. Pour ce faire, l’Agence du revenu du Canada publie le taux prescrit, qui correspond à la moyenne sur trois mois des bons du Trésor canadiens à court terme. On peut considérer ce taux comme étant le plus bas auquel on peut prêter de l’argent, tout en faisant un prêt valide.
Le fractionnement du revenu fonctionne comme suit : je prête ces 100 000 $ à mon mari, puis il les investit. Tant qu’il me verse des intérêts au taux prescrit, il peut déclarer le reste de ce revenu à son taux d’imposition marginal. Normalement, son taux est inférieur au mien, et on peut fractionner le revenu.
Voyons si j’ai bien compris. Prenons deux conjoints. L’un a un taux d’imposition élevé, l’autre un taux faible. Celui qui a le taux d’imposition élevé prête de l’argent à l’autre. L’autre lui verse des intérêts, mais reçoit le revenu ou les dividendes, car c’est son placement. Et c’est plus avantageux sur le plan fiscal?
Exactement. Exactement.
Super. J’ai tout bon sur cette question.
Oui.
Reprenons votre exemple, parce qu’il est très parlant. Pouvez-vous nous parler du changement de taux. De quoi faut-il tenir compte?
D’accord. Au premier semestre de cette année, le taux était de 1 %. Au troisième trimestre, il est passé à 2 %. Au quatrième trimestre, il sera de 3 %. Ça fait une différence si on reprend l’exemple où j’ai donné 100 000 $ à mon conjoint. Disons que mon taux d’imposition est de 50 %, et que le sien est de 25 %.
Si j’investis l’argent à 5 %, je reçois 5 000 $. Comme mon taux est de 50 %, je n’empoche au final que 2 500 $.
Voyons si je prête cette somme à mon conjoint, qui est assujetti à un taux de 25 %. Sur ces 5 000 $, il doit me verser 1 000 $, si on prend le taux d’intérêt en vigueur à l’époque, au début de l’année. Le taux était de 1 %. Il doit donc me verser 1 000 $. Je déclare ce montant avec mes revenus. Il me reste 500 $, parce que mon taux est de 50 %. Par contre, mon conjoint déclare les 4 000 $ restants à son taux de 25 %. Il lui reste 3 000 $. Ensemble, on empoche 3 500 $. Par contre, si j’avais investi seule, on n’aurait gagné que 2 500 $.
Donc, dans cet exemple, ce qui est important, c’est l’écart entre nos deux taux d’imposition. Ensuite, il y a d’autres facteurs auxquels il faut également réfléchir.
À un taux de 1 %, on y gagne à tous les coups. La question ne se pose même pas. Plus le taux d’intérêt est élevé, plus l’écart doit être important entre les conjoints pour que ça fonctionne. OK. La première chose, c’est l’écart entre les taux d’imposition des conjoints. Ensuite, vous dites qu’il faut tenir compte du revenu futur des conjoints.
Oui, parce que cette stratégie de planification fiscale n’est intéressante que si l’écart entre les deux taux d’imposition est important. Mais à l’approche de la retraite, il faut peut-être réévaluer le bien-fondé de cette stratégie. Bien souvent, la retraite donne accès à d’autres options comme le fractionnement des prestations de retraite, ce qui rapproche les taux d’imposition.
Il faut aussi se demander d’où provient cet argent. Par exemple, si l’argent provient d’un placement à long terme que je dois liquider pour faire le prêt, je risque de déclencher des gains en capital sur lesquels je dois payer de l’impôt avant même de faire le prêt. Il faut donc tenir compte des économies d’impôt que l’on doit réaliser pour revenir à zéro et vraiment commencer à épargner parce qu’on a déclenché un gain en capital.
Il faut aussi payer des frais, car c’est un prêt en bonne et due forme. Il faut une convention de prêt. Le prêt doit être assorti de conditions. Il faut s’assurer que l’argent est remboursé. Il peut y avoir des frais juridiques et des frais comptables. Il faut étudier tous ces facteurs pour déterminer si c’est judicieux à un taux de 3 %. De plus, le rendement du placement doit être assez élevé.
Oui, c’est drôle parce que... Enfin, pas vraiment. Les marchés ne sont pas au beau fixe en ce moment. Si vous prêtez de l’argent à votre conjoint et que le placement ne rapporte rien, tout le monde y perd, dans ce cas.
Exactement.
Est-ce qu’il faut s’attendre à des frais juridiques et comptables importants pour ce type de prêt? Peut-on simplement rédiger quelque chose? Je m’engage à faire ceci ou cela.
Eh bien, non. Je ne dirais pas que les frais sont excessivement élevés, mais ce n’est pas quelque chose que l’on peut faire autour de la table de cuisine. C’est une stratégie de planification fiscale sophistiquée. Et pour discuter des différentes variables qu’on vient d’évoquer, il faut se faire accompagner de quelqu’un qui va étudier votre situation. C’est donc important de faire appel aux bons professionnels. Oui, la convention de prêt est assez simple, mais tout dépend de la situation préalable.
D’accord.
C’est pour ça que vous êtes là, Georgia. Et que ce n’est pas moi qui m’en charge. C’est un travail pour Georgia. Autre chose, vous avez parlé d’une autre stratégie intéressante pour financer par exemple les frais de scolarité, les dépenses liées aux petits-enfants, les écoles privées, les activités parascolaires. Il s’agit de la fiducie familiale. Comment est-ce que ça marche?
Oui. Souvent, les gens établissent des fiducies familiales, mais elles ne génèrent pas toujours de revenus importants. Tout dépend de la valeur des actifs. Et quand on en vient à l’étape où les bénéficiaires les plus jeunes, ceux qui sont à cet âge crucial entre 18 et 24 ans et qui font des études supérieures mais ne gagnent pas encore d’argent par leurs propres moyens... on regrette que la fiducie ne fasse pas plus d’argent.
Vous pouvez faire un prêt au taux prescrit pour prêter de l’argent à la fiducie au taux prescrit. C’est la même idée qu’auparavant. De cette façon, vous versez plus d’actifs dans la fiducie, qui génère alors un revenu qui peut être versé aux bénéficiaires. On ne peut pas simplement verser de l’argent dans une fiducie. Ça entraîne toutes sortes de problèmes fiscaux. Mais avec un prêt au taux prescrit, vous pouvez parvenir au même résultat et peut-être gagner un revenu plus élevé pendant cette période cruciale où vous en avez vraiment besoin.
[LOGO AUDIO]
[MUSIQUE]