Il n’y a pas si longtemps, la principale source d’incertitude pour les marchés résidait dans la pandémie de COVID-19 et ses répercussions sur l’économie mondiale. Beaucoup de choses ont changé ces derniers mois. Outre le conflit entre la Russie et l’Ukraine, l’économie mondiale doit composer avec des niveaux d’inflation record, des prix élevés pour les produits de base et la montée en flèche des taux de contagion à la COVID en Chine, ce qui a paralysé une grande partie de son économie.

Ces risques nous rappellent l’importance de garder du recul et d’avoir un plan de placement.

En avril, Gestion de patrimoine TD a organisé un événement qui a rassemblé certains de ses meilleurs leaders d’opinion en placement pour discuter de l’état des marchés mondiaux, des occasions, des risques et des répercussions pour votre portefeuille.

Voici les points saillants de cette discussion. Pour mieux comprendre les récents développements mondiaux, il peut être utile de prendre un peu de recul afin d’appréhender une période d’incertitude comme celle-ci.

Les conditions de placement ont changé

« Je pense que nous avons subi plusieurs chocs susceptibles de changer la donne de manière prolongée, affirme Michael Craig, chef, Répartition des actifs et Produits dérivés, Gestion de Placements TD Inc. (GPTD).

« Ce contexte oblige les investisseurs à ajuster leur vision du monde. Avant, les investisseurs avaient les yeux rivés sur ce que faisait la Réserve fédérale américaine (la Fed). Maintenant, la situation géopolitique et les produits de base préoccupent davantage les esprits. Le début de l’année a été mouvementé. »

Brad Simpson, stratège en chef, Gestion de patrimoine TD partage ce sentiment et ajoute que la peur semble régner sur les marchés en ce moment. « On entend tous les jours parler du conflit, et puis bien sûr de l’inflation et des taux d’intérêt qui augmentent… Cela fait vraiment monter le niveau d’anxiété. »

Les taux d’intérêt continuent d’augmenter, mais à un rythme probablement plus rapide

« Par le passé, nous étions habitués à des hausses d’un quart de point., poursuit M. Craig. Maintenant, nous verrons des hausses successives de 50 points de base. La Fed veut relever son taux au-delà de la fourchette neutre. En pratique, il devrait dépasser 2 % d’ici la fin de l’année. Reste à savoir comment l’économie réagira. »

Craig a également souligné que les répercussions des taux plus élevés pourraient être plus importantes aujourd’hui qu’il y a plusieurs années. « Comme la dette est beaucoup plus importante, affirme-t-il, ces hausses risquent de ralentir la croissance beaucoup plus que par le passé… À l’heure actuelle, la Fed est très ferme. Elle n’a jamais été aussi ferme depuis le début de ma carrière. »

Le pétrole était déjà en passe de bondir avant le conflit entre la Russie et l’Ukraine

« Aujourd’hui, les stocks sous-jacents sont serrés, commente Hussein Allidina, chef, Produits de base, GPTD.

Il y a très peu de capacité disponible. Nous n’avions pas besoin des perturbations supplémentaires issues de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Quand les stocks sont serrés, la volatilité est plus élevée. Je pense aussi que le prix des produits de base devrait progresser. Cependant, je doute que ce soit une bonne chose dans l’ensemble. »

Allidina souligne également que le manque d’investissement qui perdure depuis des années est l’un des défis du secteur pétrolier. Il estime que le pétrole brut pourrait atteindre 180 $ US le baril si toutes les conditions se réunissent. Pas obligatoirement dans les prochains mois, mais peut-être d’ici quelques années.

Lorsque les marchés sont volatils, il faut prendre du recul

Même si le prix du pétrole tourne actuellement autour de 100 $ US le baril, M. Allidina estime qu’il est important de replacer la fluctuation de son prix dans un contexte historique.

« L’une des mesures que j’aime examiner est le poids du pétrole dans l’économie, c’est-à-dire le pourcentage des dépenses en pétrole par rapport au PIB. Aujourd’hui, même si le prix du pétrole est élevé en termes nominaux, en termes réels, il se situe toujours loin des sommets atteints en 2008, 1979 et 1974. En termes de poids du pétrole dans l’économie, nous nous situons à 4,5 % ou 5 %. Durant les crises passées, c’était 6 %. »

Selon M. Allidina, tant que l’économie mondiale continuera de croître, le prix du pétrole a de bonnes chances de suivre le mouvement.

Les produits de base ne sont pas les seuls à être touchés par la volatilité.

Craig reprend : « La situation va être compliquée pendant 12 à 24 mois. Le plus important, c’est de ne pas réagir à cela, et de ne pas commettre une erreur qui nuirait à la création de richesse à long terme. Les manchettes criardes sont inévitables, et il y aura peut-être un trimestre difficile ici et là, mais vous devez absolument rester concentré sur vos objectifs. »

C’est pourquoi Michael Craig souligne l’importance de privilégier les sociétés de qualité, surtout en période de volatilité.  « Ce sont les sociétés qui survivent et surperforment, des sociétés de qualité qui peuvent résister à la volatilité qui s’annonce… tant du point de vue des revenus que du domaine d’activité et du financement. »

En période d’incertitude, certaines occasions peuvent se présenter

« Nous aimons les actions canadiennes, qui sont à la traîne depuis un certain temps, poursuit M. Craig. De plus, compte tenu de la situation actuelle dans les secteurs de l’énergie, du gaz naturel, des matériaux et des produits chimiques, nous estimons que le marché canadien sera avantagé. C’est donc un volet de la répartition des actions que nous privilégions. » Il ajoute également les banques canadiennes à cette liste, car elles devraient profiter de la hausse des taux d’intérêt.

Simpson précise qu’il pourrait également y avoir des occasions dans le secteur des placements dits alternatifs, qui comprend les infrastructures immobilières au Canada et à l’étranger. « Nous sommes entrés dans ce climat de crise mondiale et de guerre en Ukraine. Les dépenses destinées aux actifs physiques étaient déjà insuffisantes, ce qui a entraîné une augmentation des dépenses en infrastructures. Au bout du compte, il faudra reconstruire ce qui a été défait, ce qui représente un coût. »

Il ajoute également que l’économie semble tourner rondement, ce qui pourrait être de bon augure pour les actions.

« Malgré le côté sombre de la situation générale, au final, les gens continuent de fonctionner dans l’économie. Nos vies se poursuivent. Nous continuons de consommer. Nous achetons des produits et services. Selon moi, il faut donc continuer avec une légère surpondération des actions. Même si les rendements ne sont pas aussi élevés qu’au cours des deux dernières années, il y a encore des possibilités de rendements modestes. »

DERRICK MCELHERON

SENIOR PRODUCER

ILLUSTRATION

DUSHAN MILIC