Georgia Swan, planificatrice spécialiste de la fiscalité et des successions, Gestion de patrimoine TD suggère habituellement d’ouvrir des comptes enregistrés, comme des régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER) et des comptes d’épargne libre d’impôt (CELI), dès que les enfants y sont admissibles, afin de leur permettre d’épargner dès leur jeune âge.

Quant au CELIAPP, elle estime qu’il vaut mieux réfléchir avant d’aider votre enfant à cotiser. De fait, il faut déterminer le bon moment pour profiter judicieusement du CELIAPP.

« Le CELIAPP d’une première propriété change la donne; les parents ont l’occasion de verser des cotisations qui vont fructifier à l’abri de l’impôt au profit de l’enfant, explique-t-elle. Ça évite aussi aux parents de retirer tout d’un coup un gros montant de leur épargne pour aider leur enfant à acheter une propriété à un moment où ce n’est peut-être pas pratique de le faire. »

L’an dernier, le gouvernement fédéral a lancé le CELIAPP, un compte d’épargne fiscalement avantageux destiné à financer l’achat d’une propriété. Mme Swan affirme qu’en raison du prix élevé des logements, le CELIAPP deviendra probablement l’un des outils de prédilection des parents désireux d’aider leurs enfants à épargner pour accéder à la propriété. En date de décembre, plus de 300 000 Canadiens avaient ouvert un CELIAPP pour constituer la mise de fonds nécessaire à l’achat de leur première propriété1. Étant donné qu’un parent ne peut pas ouvrir un CELIAPP au nom de son enfant, il doit lui remettre les fonds pour qu’il les transfère dans le CELIAPP.

Le CELIAPP présente des avantages et peut être combiné à d’autres façons d’aider ses enfants, mais Mme Swan souligne que les parents doivent réfléchir à l’aide qu’ils veulent leur apporter. Par exemple, avant de contribuer au CELIAPP, ils peuvent se demander s’ils veulent que l’argent leur soit remboursé à un moment donné, si un don risque de reporter leurs propres objectifs financiers et, peut-être tout aussi important, s’il vaut mieux attendre que leur enfant soit plus près d’accéder à la propriété avant d’ouvrir un CELIAPP. Selon elle, les montants transférés des parents aux enfants pour le logement sont si élevés – les médias rapportent qu’une aide de 125 000 $ est maintenant chose fréquente – que tout le monde devrait y penser à deux fois2.

Comme le CELIAPP est encore nouveau, les gens doivent se familiariser avec ses caractéristiques. Comme le REER, c’est un compte avantageux sur le plan fiscal; les cotisations réduisent le revenu imposable et les placements fructifient à l’abri de l’impôt. Et, comme le CELI, il n’y a aucune répercussion fiscale tant que les retraits servent à l’achat d’une propriété. Le plafond de cotisation annuel maximal est de 8 000 $ pour un total de 40 000 $ à vie, et il peut être ouvert dès l’âge de 18 ans. Toutefois, il faut savoir que le compte prévoit une période de participation maximale de 15 ans à la fin de laquelle il faut le fermer et en transférer les fonds dans un REER si aucune propriété n’a été achetée. Pour en savoir plus sur les personnes et les types de propriétés admissibles, cliquez ici.

Dans ce contexte, Mme Swan estime que les parents devraient tenir compte de certains aspects avant d’ouvrir un CELIAPP pour leurs enfants adultes.

Période de cotisation

Les parents doivent savoir qu’il importe de savoir comment, mais aussi quand cotiser. Prenons l’exemple d’un parent qui commence à contribuer au CELIAPP dès les 18 ans de son enfant – l’âge minimal pour ouvrir un compte – et qui continue de le faire chaque année. Le CELIAPP devra être fermé après 15 ans. Son enfant adulte aura alors 33 ans et ne sera peut-être pas encore prêt à acheter une propriété. Cet argent n’est pas perdu, mais les avantages libres d’impôt du CELIAPP, si.

« Il est peut-être préférable d’en ouvrir un à 20 ans, à 21 ans, ou plus tard, car la probabilité d’être prêt à acheter une propriété à 36, 37 ou 38 ans est plus grande », estime Mme Swan. Il pourrait même y avoir un moment idéal pour contribuer au CELIAPP d’un enfant. L’ouvrir trop tôt en réduit les avantages, mais trop attendre fait en sorte que les placements manqueront de temps pour fructifier. Selon elle, tout dépend de la situation de chacun. Il pourrait être utile de consulter un conseiller.

Dons en argent

Il est courant de donner de l’argent à ses enfants pour les aider à voler de leurs propres ailes. Mais certains parents ne disent pas clairement si le montant est un don, un prêt ou un mélange des deux. Il leur arrive parfois de ne pas le savoir eux-mêmes.

Mme Swan explique que les gens ont souvent du mal à bien préciser les conditions d’un transfert d’argent à un membre de la famille, ce qui peut porter à confusion. Une solution est de rédiger, avec l’aide d’un notaire ou d’un avocat, un acte de donation, qui indique la somme donnée à un enfant adulte, pour lever les doutes quant aux obligations de chaque partie. Les parents font don de l’argent et l’enfant n’a pas à les rembourser. L’acte de donation servira aussi à clarifier la situation en cas de contestation de l’opération par d’autres membres de la famille après le décès des parents. Par exemple, si un frère ou une sœur croit que l’argent était en fait un prêt remboursable à la succession, l’acte prouvera qu’il s’agissait bel et bien d’un don sans aucune obligation de remboursement.

Dès que l’enfant adulte reçoit les fonds, il peut ouvrir un CELIAPP ou les verser dans un CELIAPP déjà ouvert.

Rédiger une convention de prêt

« Un CELIAPP peut être une bonne façon d’aider un enfant à épargner pour l’achat d’une propriété, mais seulement si vous n’avez ni attente ni désir de vous faire rembourser », prévient Mme Swan. Si un parent souhaite se faire rembourser, il pourrait faire rédiger une convention de prêt. Dans ce cas, mieux vaut éviter le CELIAPP, qui risquerait de compliquer la situation.

En effet, les fonds dans le CELIAPP sont immobilisés et réservés à l’achat d’une propriété. Même après l’achat d’une propriété avec les fonds du CELIAPP, un éventuel défaut de paiement du prêt pourrait compliquer la situation. Des questions juridiques, financières et pratiques pourraient entraîner d’autres difficultés de remboursement, surtout si la propriété est partagée avec un conjoint.

Selon Mme Swan, les parents qui tiennent à se faire rembourser doivent faire préparer par un notaire ou un avocat un document qui consigne le montant du prêt, le taux d’intérêt, la fréquence des versements, la date à laquelle le prêt doit avoir été remboursé, plus les garanties offertes (le cas échéant). Les versements doivent être effectués et consignés, car un tribunal pourrait statuer que les fonds transférés étaient en réalité un don si les deux parties ne respectent pas les modalités du prêt.

Mme Swan souligne qu’avant de faire don d’importantes sommes d’argent, tout le monde devrait consulter un planificateur ou un conseiller afin de comprendre tout ce que cette opération implique. Faire don d’une somme importante à un enfant qui démarre dans la vie peut être gratifiant sur le coup, mais ne doit pas se faire au détriment d’un autre enfant ou des projets de retraite des parents.

« L’aspect émotionnel joue énormément sur les relations familiales, sans parler de la dynamique. Je conseille souvent à mes clients de ne donner à personne s’ils ne peuvent pas donner à tout le monde. »

DON SUTTON

PARLONS ARGENT

ILLUSTRATION

DANESH MOHIUDDIN