Vous avez assurément entendu parler des superhéros. Mais avez-vous entendu parler des superaînés? Ils ne possèdent pas de pouvoirs surnaturels et pourtant, des études scientifiques indiquent qu’ils ont la faculté de rester mentalement alertes et en santé jusqu’à un âge très avancé.

Le terme « SuperAger », ou « superaîné » en français, a été inventé par le neurologue Marsel Mesulam pour désigner une personne de plus de 80 ans dont les capacités cognitives sont comparables à celles d’une personne de 50 ou 60 ans. 1 En 2008, M. Mesulam a mis sur pied un programme de recherche sur les superaînés à l’Université Northwestern de Chicago. Son but : étudier des populations d’octogénaires vifs d’esprit pour mieux comprendre quels facteurs liés à l’état de santé, à la génétique et au style de vie contribuent à de meilleures capacités cognitives. Ces recherches interviennent alors que l’espérance de vie augmente depuis près d’un siècle. Au Canada, par exemple, elle a augmenté de 24 ans en l’espace d’un siècle. La plupart d’entre nous ont de fortes chances de souffler leurs 82 bougies. 2 Et ce n’est pas tout : les nonagénaires et les centenaires figurent parmi les groupes démographiques dont la croissance est la plus rapide. 3 Il pourrait donc y avoir de plus en plus de superaînés.

On peut en déduire que vous pourriez vous aussi conserver votre vivacité d’esprit, mener une vie active et rester en santé bien après l’âge de la retraite. Qui n’aurait pas envie de devenir un superaîné à 80 ans?

On peut laisser la chaise berçante au grenier le plus longtemps possible, mais personne n’est malheureusement à l’abri de l’affaiblissement des facultés mentales… pas même les superaînés. D’après Natasha Kovacs, planificatrice financière principale, Gestion de patrimoine TD, la confusion mentale entraîne parfois des conséquences démesurées sur les finances.

Elle cite l’exemple d’un de ses clients qui avait retiré et caché une somme en espèces de 26 000 $ en raison de sa peur, non fondée, de manquer d’argent. Comme elle l’explique, en vieillissant, nous sommes plus à risque de prendre de mauvaises décisions et de faire des dépenses qui nous éloignent de nos objectifs.

On peut tous aspirer à devenir des superaînés en découvrant ce qui fait en sorte que plusieurs personnes conservent leurs facultés à 80 ans. Toutefois, Mme Kovacs souligne que la vulnérabilité augmente avec l’âge et qu’il est important de protéger sa santé financière. La première étape peut être de faire appel à un planificateur ou à un conseiller et de s’en tenir à son plan financier. Nul besoin d’attendre ses vieux jours pour commencer. Voici quelques pistes pour garder son cerveau et ses finances en santé.

Comment entrer dans le club des superaînés?

L’image n’est pas très plaisante, mais au fil des ans, « nos cellules cérébrales commencent à se détériorer », explique Taryn Grieder, professeure adjointe spécialiste des neurosciences à l’Université de Toronto. Le déclin des capacités cognitives est un phénomène naturel : on commence à oublier des choses, notre cerveau ralentit et on se fatigue plus facilement.

Si les petits oublis occasionnels sont tout à fait normaux, la perte de lucidité peut avoir des conséquences. Souvent, nous n’avons même pas conscience que nous perdons nos capacités et nous risquons alors de prendre de mauvaises décisions. Vous avez peut-être grimpé des milliers de fois sur un escabeau pour changer une ampoule, mais saurez-vous quand il sera temps de demander l’aide d’un ami? Est-ce une bonne idée de faire don de sommes importantes à des enfants adultes quand on touche un revenu fixe? Et si oui, en fonction de quels critères allez-vous évaluer votre décision?

Heureusement, les recommandations de base pour conserver de bonnes facultés mentales plus longtemps sont simples : mangez sainement, évitez de fumer et faites de l’exercice régulièrement. « L’activité physique quotidienne est le seul moyen connu pour déclencher la production de nouveaux neurones dans le cerveau d’une personne adulte », dit Mme Grieder. Mais vous pouvez aussi porter attention à d’autres aspects de votre vie pour garder un cerveau en santé.

Moins le stress est grand, mieux c’est

« Le stress détruit le cerveau », affirme Mme Grieder. Le cortisol, la principale hormone produite par le corps en situation de stress, peut atrophier les neurones. Selon certaines études, le stress chronique provoque même des ulcères à l’estomac et écourte l’espérance de vie des animaux. Mais comment évacuer les tensions? En se bâtissant un solide réseau de soutien social. Vous pensez peut-être qu’il vaut mieux garder ses états d’âme pour soi, mais selon Mme Grieder, il est en réalité plus bénéfique « de se plaindre et de parler de ce qui ne va pas à quelqu’un qui fait preuve d’empathie ».

Les secrets des superaînés : comment garder l’esprit vif

« Lorsque vous commencez à prendre de mauvaises décisions et à faire des dépenses qui vous éloignent de vos objectifs, il est peut-être temps de demander de l’aide. »

NATASHA KOVACS,
PLANIFICATRICE FINANCIÈRE PRINCIPALE, GESTION DE PATRIMOINE TD

En vieillissant, on peut se fatiguer plus facilement et avoir tendance à rester à la maison et à réduire ses activités sociales. Plutôt que de s’engager sur cette pente potentiellement dangereuse sur le plan intellectuel, on peut tirer les leçons des « zones bleues », ces régions du monde où les études montrent que les gens vivent plus longtemps et en meilleure santé. 4 Pourquoi? En effet, dans ces cinq régions (la Sardaigne en Italie, Okinawa au Japon, Nicoya au Costa Rica, Ikaria en Grèce et Loma Linda en Californie), les gens ont bâti des communautés tricotées serrées où tout le monde se connaît. Pensez à de grands repas de famille où les jeunes donnent un coup de main et passent du temps avec les personnes âgées. Pour vous rapprocher du mode de vie de ces zones bleues, vous pouvez par exemple vous fixer l’objectif de prendre un café avec des amis une fois par semaine, de vous joindre à un club ou de souper plus souvent en famille. Si ce n’est pas envisageable pour vous, Mme Grieder indique que le simple fait d’appeler plus souvent vos proches peut s’avérer bénéfique.

Nourrir sa réflexion… et sa mémoire

Selon Devon Peart, diététiste-nutritionniste à la Cleveland Clinic de Toronto, « on ne saurait trop insister sur l’importance d’une alimentation saine. Et c’est encore plus important en vieillissant. » En effet, nos organismes absorbent et transforment de moins en moins efficacement certains nutriments que l’on trouve dans l’alimentation, comme la vitamine B12 et la coenzyme Q10.

Pour une santé cognitive optimale, elle recommande le régime MIND, qui combine des éléments du régime méditerranéen et du régime DASH contre l’hypertension, pour retarder la neurodégénérescence. Ce régime préconise de consommer des bleuets, des noix, des graines et de l’huile d’olive extra-vierge – des aliments anti-inflammatoires qui, selon des études récentes, réduisent nettement le risque de démence. 5 Selon Mme Peart, les gens ont tendance à se concentrer sur un seul repas à la fois : après un repas gras comme un hamburger et des frites, la tentation peut être de compenser en mangeant des bleuets. Malheureusement, un repas sain n’efface pas les dégâts d’un repas mauvais pour la santé. Elle soutient que pour améliorer ses facultés cognitives, il faut plutôt maintenir une alimentation globalement saine – notamment en mangeant des repas équilibrés contenant des protéines maigres, des glucides de haute qualité comme des grains entiers, et de nombreuses portions de fruits et légumes tout au long de la journée.

Des muscles d’acier pour un cerveau d’acier

Sans aller jusqu’à viser une force herculéenne nous permettant de projeter des voitures comme Superman, il est tentant de penser qu’on ne devient un superaîné qu’au prix d’un programme d’entraînement physique vigoureux. En réalité, l’efficacité des séances d’exercice à faible intensité est étonnante. Selon une étude menée auprès de 80 000 participants, un peu moins de 10 000 pas par jour suffisent à réduire le risque de démence de 50 %. 6 Encore là, c’est le nombre de pas à faire pour obtenir des résultats optimaux. Il est prouvé qu’il suffit de faire ne serait-ce que 3 800 pas par jour pour réduire le risque de démence de 25 %. Conclusion? Continuez de bouger.

Entraînement cérébral

Tout comme l’exercice physique, les activités qui nous poussent à réfléchir peuvent améliorer nos facultés cognitives. Selon une étude parue dans The Gerontologist, les exercices cérébraux comme les casse-tête peuvent stimuler la mémoire et nous aider à traiter l’information plus rapidement. 7 Vous pouvez notamment apprendre une nouvelle langue, résoudre des problèmes mathématiques ou vous adonner à une activité créative comme la peinture. Après tout, il n’est jamais trop tard pour commencer quelque chose de nouveau.

Soigner sa santé financière

En suivant ces conseils, on augmente nos chances de vieillir en restant en bonne santé physique et mentale. Qui sait? On a même une chance de faire partie des superaînés. Mais personne ne peut prédire l’avenir. Même en faisant de notre mieux pour rester en santé, tôt ou tard, l’âge nous rattrape. On ne sait jamais quand viendra le moment où l’on aura de la difficulté à payer nos factures, à investir correctement, ou même à se souvenir des mots de passe de nos comptes bancaires. C’est là que la relation établie avec votre planificateur financier peut jouer en votre faveur.

« En vieillissant, il arrive que les gens s’inquiètent de plus en plus et se mettent à dépenser moins par crainte de ce qui pourrait arriver », constate Mme Kovacs. Si vous commencez à prendre de mauvaises décisions et à faire des dépenses qui vous éloignent de vos objectifs, il est peut-être temps de demander de l’aide. Par exemple, elle explique que, dans le contexte d’inflation actuel, « il faut adopter une approche proactive assez tôt pour voir si on épargne suffisamment, si on obtient un bon taux de rendement et si on surpasse l’inflation ». Selon elle, il y a une question que tout le monde devrait se poser : Est-ce que j’ai une approche à long terme? Cette question s’applique tant à la santé qu’aux finances – non seulement pour profiter de votre argent, mais aussi pour vous préparer aux imprévus.

Adopter une approche proactive, c’est aussi s’assurer de constituer des dossiers contenant tous vos renseignements importants, sans oublier d’y ajouter le nom d’une personne-ressource de confiance. L’une des plus grandes craintes des gens qui vieillissent, c’est le risque d’exploitation financière. C’est là qu’un conseiller ou un planificateur financier peut vous aider à prévoir des mesures pour parer aux imprévus. S’il lui semble que vous êtes victime d’exploitation ou que vos capacités mentales sont affaiblies, il communiquera avec votre personne-ressource de confiance pour faire le point sur votre situation sans divulguer de renseignements financiers.

Si vous aimez prévoir à long terme, Mme Kovacs suggère de demander l’aide d’un planificateur financier pour prendre quelques dispositions importantes, notamment les suivantes :

Un plan financier clair : Pour établir des objectifs financiers à long terme et mettre en place des mesures qui vous aideront à les atteindre.

Un plan successoral solide : Avec votre avocat ou votre notaire, vérifiez que votre testament est à jour et qu’il va dans le sens de votre plan financier. Vous assurez ainsi un transfert de patrimoine sans heurts et fiscalement avantageux.

Une procuration en bonne et due forme : Rencontrez la personne désignée dans votre procuration pour déterminer plus précisément comment vous voulez que votre argent soit géré.

Mme Kovacs affirme qu’en fin de compte, même si les gens ont plein de bonnes raisons de vouloir rester en santé, l’une d’entre elles est sans aucun doute de profiter de leur argent si durement gagné. Selon elle, il faudrait ajouter « des finances saines » à l’expression « Un esprit sain dans un corps sain ».

KANWAL RAFIQ

PARLONS ARGENT

ILLUSTRATION

DUSHAN MILIC