La semaine dernière, l’Agence du revenu du Canada a suspendu l’obligation de déclaration des simples fiducies pour l’année d’imposition 2023. Cette nouvelle sera peut-être un soulagement si vous avez un compte conjoint avec un membre de votre famille. Mais que nous réserve la suite? Et que faire si vous avez déjà produit votre déclaration? Nicole Ewing, directrice, Planification fiscale et successorale à Gestion de patrimoine TD, se joint à Kim Parlee pour nous aider à mieux comprendre ce changement.
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La semaine dernière, l’Agence du revenu du Canada a fait volte-face en annonçant que les simples fiducies seront exemptées des obligations de déclaration des fiducies pour l’année d’imposition 2023, quelques jours à peine avant la date limite du 2 avril. C’est un soulagement pour ceux qui partagent des comptes bancaires avec des parents âgés et qui sont un peu perdus sur la question des simples fiducies, mais c’est frustrant pour ceux qui ont fait leur déclaration avant la date limite.
Alors, et maintenant? Nicole Ewing, directrice de Planification fiscale et successorale à GPTD se joint à nous pour en discuter. On fait toujours appel à elle pour nous éclairer sur ces sujets complexes. Nicole, revenons d’abord sur ce qui s’est passé.
D’accord. Pour résumer, une loi est entrée en vigueur il y a quelques mois. La communauté des fiscalistes a cherché à mieux comprendre et a fait part d’une certaine confusion quant à la façon dont l’ARC allait appliquer ces nouvelles règles et quant à la définition des simples fiducies soumises à l’obligation de déclaration. Après moult réflexion et considération, l’ARC a annoncé qu’elle allait exempter les particuliers de l’obligation de déclaration d’une simple fiducie.
Essentiellement, l’ARC a concédé que la définition d’une simple fiducie n’était pas suffisamment claire pour appliquer ces règles, et elle a dit aux contribuables qu’ils n’étaient pas tenus de produire une déclaration en vertu de la législation en vigueur. Dans les faits, il s’agit d’une concession administrative.
Et si vous avez produit votre déclaration avant cette annonce?
C’est là que ça se complique. On peut se demander comment cette information sera utilisée. Est-ce qu’elle pourrait ou devrait être utilisée à d’autres fins? Est-ce que la position que vous avez prise dans votre déclaration sera irrévocable, ou pourra-t-on revoir l’interprétation quand on recevra de nouvelles directives? Est-ce que les renseignements que vous avez fournis correspondront à la position que vous auriez adoptée?
Si cette information figure maintenant officiellement à votre dossier, qu’est-ce que vous devez faire en tant que contribuable? Comment corriger cette déclaration? Par ailleurs, un certain nombre de numéros de fiducie ont été attribués et ne feront l’objet d’aucune déclaration. Si vous avez maintenant un numéro de fiducie dont vous n’avez plus besoin, comment faire pour s’en débarrasser?
Avant, il fallait indiquer dans votre déclaration que vous aviez établi une fiducie et vous n’avez plus besoin de ce numéro. Il ne semble pas que l’ARC ait encore réfléchi à ces questions. On ne sait pas exactement ce qui va se produire.
Par contre, si vous avez engagé des frais pour vous conformer à ces règles, si vous avez encouru des frais juridiques ou comptables, ils seront normalement déductibles – non pas récupérables, mais déductibles. Il n’y aura donc pas d’impôt à payer là-dessus. Ceci dit, on se pose une question plus générale au sein de la communauté, à savoir qui doit assumer le coût du travail effectué?
Beaucoup de comptables et cabinets d’avocats ont, jusqu’à la dernière minute, travaillé d’arrache-pied pour comprendre comment se conformer à ces règles. Maintenant que cette déclaration n’est plus obligatoire, qu’advient-il de ce travail? Peut-on le facturer? Et à quoi vont servir tous ces efforts? Il reste donc des questions à régler.
À vrai dire, on a eu cette conversation à Pâques, pendant le souper de famille. C’est une question qui préoccupait beaucoup de Canadiens. La notion de simple fiducie a créé de la confusion. Qu’est-ce qu’une simple fiducie, au juste, d’après ce qu’on en comprend?
Le fond du problème, c’est qu’on ne sait pas – par « on », j’entends l’ensemble de la communauté fiscale, juridique et financière – on ne sait pas précisément ce que l’ARC... De toute évidence, l’ARC n’a pas de définition claire non plus de ce qui constitue une simple fiducie aux fins de la déclaration des revenus. Je vais revenir en arrière un instant. Il existe une disposition dans la loi qui définit, aux fins de l’article précis, ce qu’on entend par le terme « simple fiducie ».
Mais plus généralement, dans les différentes lois sur la fiscalité et les fiducies, les termes « fiducie », voire « simple fiducie » ont des sens différents selon qu’il s’agit du droit des fiducies ou du droit fiscal. Et même dans la Loi de l’impôt sur le revenu, le terme « fiducie » prend un sens différent selon l’article dans lequel il se trouve.
La définition d’une simple fiducie dans cette loi ne s’applique qu’à cet article. Mais dans le texte de loi, on peut lire qu’une simple fiducie est « une fiducie qui... ». S’il faut d’abord savoir quelle est la définition d’une fiducie avant de déterminer si on a établi ou non une simple fiducie, ça soulève quelques interrogations. De façon plus générale, lorsqu’on pense à une fiducie, on sait qu’il faut réunir trois certitudes.
D’abord, la certitude quant à l’intention de créer une fiducie, celle sur la nature des biens et enfin celle sur les bénéficiaires. Bref, le qui, le quoi et le pourquoi. Beaucoup de gens n’arrivaient pas à déterminer si oui ou non, ils avaient établi une fiducie, et encore moins une simple fiducie.
Ce qui a fait défaut dans la conversation au cours des derniers mois, c’est que cette loi devait s’appliquer explicitement aux fiducies expresses. En droit des fiducies, il existe différents types de fiducies, dont la fiducie expresse. Il y a aussi les fiducies résultoires, entre autres. Je crois donc qu’il faut se remettre au travail pour analyser ce à quoi cette législation était censée s’appliquer, en espérant qu’on recevra plus de précisions sur la définition d’une simple fiducie aux fins de la déclaration de revenu.
Une petite question – Il ne nous reste que quelques minutes, Nicole. Pouvez-vous nous donner des exemples où, selon vous, il est clair qu’une fiducie est une simple fiducie et d’autres où – aux fins de la déclaration du revenu – il n’y a pas de simple fiducie. Je devais préciser « aux fins de déclaration du revenu ».
Merci. Merci. Super. Oui. La situation est très claire si une simple fiducie ou une société prête-nom a été établie pour faciliter le transfert de titres de propriété par des promoteurs. Si on a un fiduciaire d’une simple fiducie établie par un avocat avec les documents appropriés, on est en présence d’une simple fiducie qui n’est pas soumise à l’obligation de déclaration. C’est aussi assez clair si un enfant figure sur le titre de propriété de la maison de ses parents et que pour préserver l’exemption pour résidence principale, des documents ont été remplis par un avocat et déclarent qu’il s’agit d’une simple fiducie. Dans ce cas, on est en présence d’une simple fiducie et il n’y a pas d’obligation de produire une déclaration.
En général, la situation est claire pour les comptes conjoints entre époux. De façon générale, sauf preuve du contraire, il n’existe pas de fiducie ou de simple fiducie à proprement parler. Là où la question reste toujours très floue, c’est lorsque des parents ont ajouté leurs enfants adultes au titre de propriété. Le fait de figurer sur le titre ne permet pas en soi de déterminer s’il s’agit d’une fiducie ou d’une simple fiducie.
Tout dépend de l’intention. Il se peut très bien que des comptes conjoints encore détenus par le parent âgé constituent en réalité des fiducies. Ce ne sont plus de simples fiducies, mais des fiducies à part entière. Et dans ce cas, il faut produire une déclaration malgré les concessions administratives de l’ARC.
Encore un dernier point. Il ne me reste qu’une trentaine de secondes, Nicole. L’ARC a annoncé que les simples fiducies ne nécessitent pas de déclaration, mais il y a de nouvelles règles sur la déclaration des autres fiducies.
Tout à fait, et ces règles ont pris beaucoup d’ampleur. Avant, les cas dans lesquels il fallait déclarer les fiducies étaient assez restreints. En gros, il fallait les déclarer en cas de revenu, de gain en capital ou de distribution d’immobilisations. Les règles ont été élargies aux fiducies expresses, à moins qu’elles n’entrent dans le cadre d’une des exemptions. Vous en avez peut-être entendu parler. Les fiducies qui détiennent moins de 50 000 $ de liquidités, celles qui existent depuis moins de trois mois, etc.
Dans ce cas, il n’y a pas besoin de les déclarer. Mais sinon, les règles de déclaration s’étendent à beaucoup de fiducies. On doit toujours produire nos feuillets T3 et l’annexe 15 qui contient des renseignements supplémentaires sur les bénéficiaires, les fiduciaires et tout ce qui a trait aux parties intéressées. Il faut tout de même les déclarer à l’ARC.
Nicole Ewing, vous êtes une mine de renseignements. Merci beaucoup.
Je vous en prie.
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La semaine dernière, l’Agence du revenu du Canada a fait volte-face en annonçant que les simples fiducies seront exemptées des obligations de déclaration des fiducies pour l’année d’imposition 2023, quelques jours à peine avant la date limite du 2 avril. C’est un soulagement pour ceux qui partagent des comptes bancaires avec des parents âgés et qui sont un peu perdus sur la question des simples fiducies, mais c’est frustrant pour ceux qui ont fait leur déclaration avant la date limite.
Alors, et maintenant? Nicole Ewing, directrice de Planification fiscale et successorale à GPTD se joint à nous pour en discuter. On fait toujours appel à elle pour nous éclairer sur ces sujets complexes. Nicole, revenons d’abord sur ce qui s’est passé.
D’accord. Pour résumer, une loi est entrée en vigueur il y a quelques mois. La communauté des fiscalistes a cherché à mieux comprendre et a fait part d’une certaine confusion quant à la façon dont l’ARC allait appliquer ces nouvelles règles et quant à la définition des simples fiducies soumises à l’obligation de déclaration. Après moult réflexion et considération, l’ARC a annoncé qu’elle allait exempter les particuliers de l’obligation de déclaration d’une simple fiducie.
Essentiellement, l’ARC a concédé que la définition d’une simple fiducie n’était pas suffisamment claire pour appliquer ces règles, et elle a dit aux contribuables qu’ils n’étaient pas tenus de produire une déclaration en vertu de la législation en vigueur. Dans les faits, il s’agit d’une concession administrative.
Et si vous avez produit votre déclaration avant cette annonce?
C’est là que ça se complique. On peut se demander comment cette information sera utilisée. Est-ce qu’elle pourrait ou devrait être utilisée à d’autres fins? Est-ce que la position que vous avez prise dans votre déclaration sera irrévocable, ou pourra-t-on revoir l’interprétation quand on recevra de nouvelles directives? Est-ce que les renseignements que vous avez fournis correspondront à la position que vous auriez adoptée?
Si cette information figure maintenant officiellement à votre dossier, qu’est-ce que vous devez faire en tant que contribuable? Comment corriger cette déclaration? Par ailleurs, un certain nombre de numéros de fiducie ont été attribués et ne feront l’objet d’aucune déclaration. Si vous avez maintenant un numéro de fiducie dont vous n’avez plus besoin, comment faire pour s’en débarrasser?
Avant, il fallait indiquer dans votre déclaration que vous aviez établi une fiducie et vous n’avez plus besoin de ce numéro. Il ne semble pas que l’ARC ait encore réfléchi à ces questions. On ne sait pas exactement ce qui va se produire.
Par contre, si vous avez engagé des frais pour vous conformer à ces règles, si vous avez encouru des frais juridiques ou comptables, ils seront normalement déductibles – non pas récupérables, mais déductibles. Il n’y aura donc pas d’impôt à payer là-dessus. Ceci dit, on se pose une question plus générale au sein de la communauté, à savoir qui doit assumer le coût du travail effectué?
Beaucoup de comptables et cabinets d’avocats ont, jusqu’à la dernière minute, travaillé d’arrache-pied pour comprendre comment se conformer à ces règles. Maintenant que cette déclaration n’est plus obligatoire, qu’advient-il de ce travail? Peut-on le facturer? Et à quoi vont servir tous ces efforts? Il reste donc des questions à régler.
À vrai dire, on a eu cette conversation à Pâques, pendant le souper de famille. C’est une question qui préoccupait beaucoup de Canadiens. La notion de simple fiducie a créé de la confusion. Qu’est-ce qu’une simple fiducie, au juste, d’après ce qu’on en comprend?
Le fond du problème, c’est qu’on ne sait pas – par « on », j’entends l’ensemble de la communauté fiscale, juridique et financière – on ne sait pas précisément ce que l’ARC... De toute évidence, l’ARC n’a pas de définition claire non plus de ce qui constitue une simple fiducie aux fins de la déclaration des revenus. Je vais revenir en arrière un instant. Il existe une disposition dans la loi qui définit, aux fins de l’article précis, ce qu’on entend par le terme « simple fiducie ».
Mais plus généralement, dans les différentes lois sur la fiscalité et les fiducies, les termes « fiducie », voire « simple fiducie » ont des sens différents selon qu’il s’agit du droit des fiducies ou du droit fiscal. Et même dans la Loi de l’impôt sur le revenu, le terme « fiducie » prend un sens différent selon l’article dans lequel il se trouve.
La définition d’une simple fiducie dans cette loi ne s’applique qu’à cet article. Mais dans le texte de loi, on peut lire qu’une simple fiducie est « une fiducie qui... ». S’il faut d’abord savoir quelle est la définition d’une fiducie avant de déterminer si on a établi ou non une simple fiducie, ça soulève quelques interrogations. De façon plus générale, lorsqu’on pense à une fiducie, on sait qu’il faut réunir trois certitudes.
D’abord, la certitude quant à l’intention de créer une fiducie, celle sur la nature des biens et enfin celle sur les bénéficiaires. Bref, le qui, le quoi et le pourquoi. Beaucoup de gens n’arrivaient pas à déterminer si oui ou non, ils avaient établi une fiducie, et encore moins une simple fiducie.
Ce qui a fait défaut dans la conversation au cours des derniers mois, c’est que cette loi devait s’appliquer explicitement aux fiducies expresses. En droit des fiducies, il existe différents types de fiducies, dont la fiducie expresse. Il y a aussi les fiducies résultoires, entre autres. Je crois donc qu’il faut se remettre au travail pour analyser ce à quoi cette législation était censée s’appliquer, en espérant qu’on recevra plus de précisions sur la définition d’une simple fiducie aux fins de la déclaration de revenu.
Une petite question – Il ne nous reste que quelques minutes, Nicole. Pouvez-vous nous donner des exemples où, selon vous, il est clair qu’une fiducie est une simple fiducie et d’autres où – aux fins de la déclaration du revenu – il n’y a pas de simple fiducie. Je devais préciser « aux fins de déclaration du revenu ».
Merci. Merci. Super. Oui. La situation est très claire si une simple fiducie ou une société prête-nom a été établie pour faciliter le transfert de titres de propriété par des promoteurs. Si on a un fiduciaire d’une simple fiducie établie par un avocat avec les documents appropriés, on est en présence d’une simple fiducie qui n’est pas soumise à l’obligation de déclaration. C’est aussi assez clair si un enfant figure sur le titre de propriété de la maison de ses parents et que pour préserver l’exemption pour résidence principale, des documents ont été remplis par un avocat et déclarent qu’il s’agit d’une simple fiducie. Dans ce cas, on est en présence d’une simple fiducie et il n’y a pas d’obligation de produire une déclaration.
En général, la situation est claire pour les comptes conjoints entre époux. De façon générale, sauf preuve du contraire, il n’existe pas de fiducie ou de simple fiducie à proprement parler. Là où la question reste toujours très floue, c’est lorsque des parents ont ajouté leurs enfants adultes au titre de propriété. Le fait de figurer sur le titre ne permet pas en soi de déterminer s’il s’agit d’une fiducie ou d’une simple fiducie.
Tout dépend de l’intention. Il se peut très bien que des comptes conjoints encore détenus par le parent âgé constituent en réalité des fiducies. Ce ne sont plus de simples fiducies, mais des fiducies à part entière. Et dans ce cas, il faut produire une déclaration malgré les concessions administratives de l’ARC.
Encore un dernier point. Il ne me reste qu’une trentaine de secondes, Nicole. L’ARC a annoncé que les simples fiducies ne nécessitent pas de déclaration, mais il y a de nouvelles règles sur la déclaration des autres fiducies.
Tout à fait, et ces règles ont pris beaucoup d’ampleur. Avant, les cas dans lesquels il fallait déclarer les fiducies étaient assez restreints. En gros, il fallait les déclarer en cas de revenu, de gain en capital ou de distribution d’immobilisations. Les règles ont été élargies aux fiducies expresses, à moins qu’elles n’entrent dans le cadre d’une des exemptions. Vous en avez peut-être entendu parler. Les fiducies qui détiennent moins de 50 000 $ de liquidités, celles qui existent depuis moins de trois mois, etc.
Dans ce cas, il n’y a pas besoin de les déclarer. Mais sinon, les règles de déclaration s’étendent à beaucoup de fiducies. On doit toujours produire nos feuillets T3 et l’annexe 15 qui contient des renseignements supplémentaires sur les bénéficiaires, les fiduciaires et tout ce qui a trait aux parties intéressées. Il faut tout de même les déclarer à l’ARC.
Nicole Ewing, vous êtes une mine de renseignements. Merci beaucoup.
Je vous en prie.
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