Toute personne fortunée doit avoir conscience du rôle que joue l’éventuel processus d’homologation auprès de leur patrimoine. Étant donné que les frais ou les impôts pourraient retrancher une part importante d’une succession – par exemple, pour une succession de 1 M$ en Ontario, on paierait 14 500 $ –, il serait bon d’en savoir plus sur l’homologation et sur la façon d’atténuer ses répercussions potentielles au transfert de votre patrimoine . Heureusement, il existe plusieurs stratégies qui valent la peine d’être envisagées.

Treva Newton, planificatrice spécialiste de la fiscalité et des successions, Gestion de patrimoine TD à Victoria (C.-B.), explique qu’au Canada, les gens les plus fortunés en particulier ont tout intérêt à mieux comprendre le processus d’homologation. Travailler en entrepreneuriat ou avoir d’importants placements ou un patrimoine familial complexe signifie que les actifs peuvent être davantage exposés à des frais et impôts.

« C’est un processus laborieux. Chaque type d’actif est régi par des règles différentes. Vous devez planifier avec soin », explique-t-elle.

Voici un rappel du rôle de l’homologation lorsque vous décédez et de la façon de gérer les coûts pour vos héritiers.

Qu’est-ce que l’homologation?

L’homologation est la confirmation par un tribunal qu’un testament est le testament définitif d’une personne décédée. Elle atteste que le document est valide et que le liquidateur (l’exécuteur testamentaire) est autorisé à gérer la succession. Ce processus commence peu après le décès. Avant qu’un liquidateur puisse gérer les actifs de la succession et transférer ces actifs aux bénéficiaires, les institutions financières demanderont que le testament soit homologué.

Ce processus nécessite une évaluation de la succession et une recherche testamentaire pour prouver qu’il n’y a pas d’autres testaments. Une fois le testament homologué, le liquidateur peut accéder aux comptes bancaires et autres actifs.

Quels actifs font l’objet d’une homologation?

Les biens immobiliers, à moins qu’ils ne soient transférés par droit de survie, font toujours l’objet d’une homologation. Par contre, il est important de comprendre le rôle que les conjoints peuvent jouer dans l’homologation. Si un couple détient la totalité de ses actifs conjointement (biens immobiliers ou comptes non enregistrés) et qu’il n’y a pas d’autres bénéficiaires que le conjoint survivant, les actifs seront transférés au conjoint survivant, et la succession sera transférée sans homologation. Quand le conjoint survivant décède (en supposant que les actifs sont à son nom), la succession suit alors le processus d’homologation.

Les comptes enregistrés comme les régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER), les fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR) et les comptes d’épargne libre d’impôt (CELI) pour lesquels un bénéficiaire a été désigné ne sont pas considérés comme faisant partie de la succession et seront directement transférés aux bénéficiaires. Les actions d’une société privée peuvent également échapper à l’homologation, dans la mesure où elles constituent le seul actif d’une succession transmise, selon la province où vous vous trouvez.

Coûts et stratégies d’homologation

Bien que le Manitoba et le Québec n’imposent pas de frais d’homologation et que certaines provinces imposent des frais fixes, en Ontario, en Colombie-Britannique et dans d’autres provinces, les coûts sont importants. Selon Mme Newton, des options s’offrent à vous, en particulier si vous êtes propriétaire d’entreprise, si vous avez des actifs financiers diversifiés ou complexes ou si vous avez une situation familiale atypique. Par exemple, une fiducie est souvent une solution qui, malgré les frais juridiques, peut aider à compenser les frais d’homologation.

Placer les actifs dans une fiducie. Pour les gens fortunés au Canada, une méthode populaire pour réduire les frais d’homologation consiste à placer des fonds et des biens dans une fiducie en faveur de soi-même (dans le cas d’une seule personne) ou une fiducie mixte au profit du conjoint (dans le cas d’un couple).

« Si vous placez des actifs dans une fiducie avant votre décès, ils sont exclus de votre testament et ne seront pas assujettis aux frais d’homologation », explique Mme Newton.

Contrairement à certains types de fiducies, aucun impôt n’est exigible lors du transfert d’actifs dans une fiducie en faveur de soi-même ou une fiducie mixte. Ces fiducies ne sont possibles qu’après l’âge de 65 ans, l’objectif étant d’éviter l’homologation. Une fois la fiducie créée, le ou les bénéficiaires, soit unique ou conjoints, sont les seuls à pouvoir profiter du revenu et utiliser le capital de la fiducie, et ce, pour le reste de leurs vies. Lorsqu’ils décèdent, les gains en capital réalisés sur les actifs transférés sont assujettis à l’impôt. Ainsi, la fiducie agit comme un testament : les actifs sont remis aux bénéficiaires désignés, mais l’homologation est évitée.

Une fiducie dite familiale ou discrétionnaire fonctionne de la même façon, mais les actifs transférés à la fiducie sont assujettis à l’impôt sur les gains en capital. Lorsque la personne qui crée la fiducie décède, les actifs sont transmis aux bénéficiaires sans homologation.

Pour les personnes détenant des actifs très variés, ces fiducies peuvent offrir d’autres avantages. Par exemple, contrairement aux testaments ou à l’homologation, la fiducie n’a pas à rendre de comptes publiquement, ce qui peut offrir une certaine confidentialité. Si vous croyez que votre testament pourrait être contesté, vous pourriez atténuer vos inquiétudes en plaçant vos actifs dans une fiducie plutôt que dans votre succession.

Même si les fiducies sont attrayantes, Mme Newton explique qu’il faut être à l’aise à l’idée que vos actifs, une fois dans la fiducie, ne vous appartiennent plus légalement. Le transfert de fonds à des membres de la famille peut donc être complexe.

La mise en place et la gestion d’une fiducie entraînent des coûts et des complications. Néanmoins, Mme Newton dit qu’une fiducie est utile comme stratégie fiscale et peut aider les familles à régler des problèmes successoraux complexes, sans homologation.

Désigner les bénéficiaires des comptes enregistrés. Les fonds détenus dans les REER et FERR peuvent contourner l’homologation uniquement si des bénéficiaires sont nommés dans le compte. S’il n’y en a aucun, les fonds passent dans la succession et sont assujettis à l’homologation. Il faut donc vérifier chaque année que les bénéficiaires de vos comptes enregistrés sont à jour.

Les couples devraient envisager la propriété conjointe. Pour les couples, une banque n’a probablement aucune raison de demander l’homologation si les actifs sont détenus conjointement et si tout passe au conjoint survivant dans un testament. Toutefois, si les conjoints ont des comptes bancaires distincts et détiennent des biens à leur nom, ou s’il y a d’autres bénéficiaires, une institution financière peut demander une homologation. Selon Mme Newton, la situation de chaque couple est différente, et il peut y avoir de bonnes raisons de détenir des actifs individuellement Il peut être avantageux de parler à un avocat, à un notaire ou à un conseiller.

Procéder à un don d’actifs. « Le Canada n’applique pas d’impôt sur les dons. Si vous ne détenez pas l’actif à votre décès, il ne fera pas partie de votre succession. Beaucoup de gens donnent de l’argent et d’autres actifs de leur vivant s’ils estiment qu’ils n’en auront pas besoin », poursuit Mme Newton.

Ces facteurs peuvent généralement être pris en compte plus tard dans la vie lorsque le patrimoine est plus que suffisant pour leur permettre de bien vivre le reste de leurs jours. En outre, la documentation d’un don à un membre de la famille peut garantir que le don ne sera pas perdu en cas de divorce ou d’une action d’un créancier, et peut aussi aider à préciser les intentions d’un testament. Selon Mme Newton, il faut faire preuve de prudence en ce qui concerne les dons, pour diverses raisons. En effet, même s’il est possible de faire des plans, on ne sait pas exactement ce que l’avenir nous réserve. Si vous donnez trop d’argent à votre famille, vous pourriez avoir des surprises, surtout en ce qui concerne le coût des soins de santé, précise-t-elle.

Comment se préparer au processus d’homologation?

Mme Newton souligne que, bien que le processus d’homologation puisse être inévitable, cela ne signifie pas que vous ne pouvez pas organiser vos affaires pour atténuer certains coûts. Les familles fortunées sont peut-être déjà au fait des stratégies fiscales et de la planification successorale, mais une discussion avec un avocat-fiscaliste, un planificateur successoral ou un agent fiduciaire peut permettre de comprendre les mesures à prendre pour le transfert intergénérationnel de patrimoine. Il peut s’agir notamment de discuter des frais et des services requis, de l’incidence fiscale et, en fin de compte, des conséquences de la succession après sa liquidation.

DON SUTTON

PARLONS ARGENT ET VIE

ILLUSTRATION

DANESH MOHIUDDIN