Lorsque les températures baissent à la fin de l’automne et que les premières gelées arrivent, des milliers de snowbirds déploient leurs ailes proverbiales et commencent à se préparer à quitter le Canada pour des climats plus chauds. Malheureusement, le prix d’un séjour au sud de la frontière a augmenté sur presque tous les plans.

L’inflation a notamment fait grimper le coût de l’hébergement, des billets d’avion, de la nourriture et de la plupart des biens de consommation – et le phénomène est exacerbé par la hausse du dollar américain.

Janet et Adrian, un couple de retraités, étaient des snowbirds, mais Janet explique que depuis le début de la pandémie de COVID-19, les choses ont changé.

« On avait toujours hâte de délaisser la pluie de Vancouver au profit de la chaleur sèche de Phoenix, mais la pandémie et la hausse du coût de la vie ont changé la donne, affirme-t-elle. Même quand ils ont rouvert la frontière, beaucoup de personnes âgées de notre communauté tricotée serrée ont décidé de ne pas y retourner. Compte tenu de tous les changements et de l’inflation, on a fini par vendre notre propriété aux États-Unis pour découvrir autre chose. »

Janet et son mari ne retourneront pas dans le désert, mais la belle-sœur de Janet, si : « Elle aime ça là-bas et elle va sûrement continuer à y aller encore longtemps. »

Selon Natasha Kovacs, planificatrice financière principale, Gestion de patrimoine TD, l’histoire de Janet et Adrian est très courante.

« On voit les deux extrêmes. J’ai des clients que la COVID-19 ou l’inflation inquiètent beaucoup et qui ont décidé de ne plus partir dans le Sud et j’en ai d’autres pour qui c’est tout l’inverse. J’en ai un qui est parti en Floride hier », raconte-t-elle.

Si vous tergiversez, elle vous suggère de chercher le bon équilibre.

« C’est vrai que le taux de change n’est pas idéal et que les prix ont augmenté, mais en fin de compte, si voyager faisait partie de vos objectifs à long terme pour la retraite, il ne faut pas que ça vous arrête. »

Si vous préparez votre premier exode hivernal depuis 2019, voici cinq questions à vous poser avant de faire vos valises.

Comment faire pour gérer la hausse des prix?

En juin 2022, l’inflation a atteint un sommet de 8,1 % au Canada, contre 9,1 % aux États-Unis. L’affaiblissement du dollar canadien par rapport au dollar américain accentue les effets de la flambée des prix et contribue à comprimer le pouvoir d’achat des snowbirds du Canada cet hiver.

« J’ai un client qui va en Arizona chaque année et qui m’a dit que les billets d’avion avaient augmenté de 40 % », indique Jocelyn Willoughby, conseillère en placement, Gestion de patrimoine TD.

Ce phénomène ne touche pas seulement les vols.

« Tout était moins cher avant, alors beaucoup de mes clients snowbirds font plus attention à leurs dépenses. »

Selon Nicole Ewing, directrice, Planification fiscale et successorale, Gestion de patrimoine TD, pour veiller à ce que vos dépenses respectent votre plan financier global, la première chose à faire est de consulter votre conseiller ou votre planificateur financier.

Faire le point peut vous aider à comprendre ce que vous pouvez raisonnablement vous permettre. Même si vous avez les fonds nécessaires pour assumer une dépense supplémentaire, votre conseiller vous expliquera les répercussions qu’elle pourrait avoir sur votre budget à court terme ou sur vos objectifs à long terme, et vous dira si vous devriez modifier votre plan en conséquence.

Comment puis-je économiser?

Les snowbirds ont peut-être intérêt à se demander avec quel argent ils paieront leurs dépenses et si leur approche offre un bon rapport coût-efficacité.

Par exemple, il peut être avantageux d’avoir un compte bancaire en dollars américains ici au Canada, un compte bancaire aux États-Unis ou les deux. Selon votre type de compte, vous pourriez éviter d’avoir à payer des frais élevés de virement interbancaire tout en faisant fructifier votre épargne.

« On recommande généralement d’avoir un compte bancaire transfrontalier pour pouvoir payer facilement les factures aux États-Unis en dollars américains, » confirme Mme Ewing.

Autre possibilité : évitez d’utiliser votre carte de crédit canadienne habituelle pour vos achats courants aux États-Unis, puisque vous pourriez devoir payer des frais de conversion ou d’opération élevés pour chaque opération. Beaucoup de snowbirds prennent plutôt une carte de crédit en dollars américains.

Si vous préférez régler vos grosses dépenses par chèque, un compte bancaire aux États-Unis pourrait vous être utile. En effet, la compensation dans le système bancaire américain est plus longue pour les chèques tirés sur des comptes au Canada que pour ceux tirés sur des comptes aux États-Unis.

Mme Kovacs conseille souvent à ses clients de faire des achats périodiques par sommes fixes tout au long de l’année pour provisionner leurs comptes bancaires transfrontaliers ou américains en dollars américains. Il s’agit d’en acheter régulièrement de petits montants de façon à en avoir en réserve, tout en étalant les placements afin de réduire au minimum l’exposition aux fluctuations importantes du marché.

En outre, elle leur recommande habituellement d’ouvrir un compte d’épargne libre d’impôt pour y conserver leurs fonds qui restent au Canada tant qu’ils n’en ont pas besoin.

Avoir un compte bancaire transfrontalier ou américain peut s’accompagner de certaines difficultés et entraîner des conséquences fiscales à la fois au Canada et aux États-Unis. Votre conseiller pourra répondre à vos questions.

Quelle est la durée de mon séjour?

Les snowbirds du Canada doivent également songer à la durée de leur séjour à l’étranger. Si vous allez aux États-Unis, les critères indiqués sur la page Substantial Presence Test vous permettent de calculer la durée réelle de votre séjour. Et attention : Si vous dépassez les limites fixées, il pourrait y avoir des conséquences fiscales.

« Les gens croient souvent à tort que tant qu’ils ne passent pas plus de 182 jours par année aux États-Unis, tout va bien, prévient Mme Ewing. En réalité, l’Internal Revenue Agency des États-Unis applique une formule sur trois années consécutives. »

Par conséquent, le temps que vous avez passé aux États-Unis au cours des deux dernières années s’ajoutera à la durée de votre séjour de cette année.

Si vous respectez les exigences indiquées sur la page Closer Connection Exemption et remplissez le formulaire 8840 de l’IRS, vous pourriez être en mesure de demander une exemption au Substantial Presence Test. Toutefois, comme le processus (et les documents connexes) relève du système juridique et fiscal des États-Unis, il peut être judicieux de consulter un avocat.

Peu importe le temps que vous comptez passer aux États-Unis ou ailleurs, il est important de connaître les lois et les règlements en vigueur – aussi bien dans le pays en question qu’au Canada. Si votre séjour est trop long, vous risquez de devoir payer de l’impôt à l’étranger et de perdre vos droits à l’assurance maladie dans votre province de résidence.

De quel type d’assurance maladie est-ce que j’ai besoin?

Les soins de santé sont sans doute ce à quoi il faut accorder le plus d’attention avant de partir. Normalement, quand vous êtes dans votre pays, l’assurance maladie offerte par le gouvernement vous couvre, mais à l’étranger, vos soins de santé seront très peu, voire pas du tout pris en charge, sauf si vous avez souscrit une assurance au préalable. C’est pourquoi, avant le départ, il est essentiel de bien vérifier de quelle protection vous disposez.

En plus de vous assurer d’avoir une couverture adéquate pour les soins de santé pendant votre séjour, voici quelques recommandations importantes : 1) apportez une quantité suffisante de médicaments sur ordonnance importants dont vous pourriez avoir besoin (la règle d’or est d’en prévoir pour 200 jours), 2) vérifiez où se situe l’hôpital le plus proche de l’endroit où vous séjournez afin de savoir où aller en cas d’urgence, 3) gardez avec vous une copie des principaux documents médicaux auxquels vous devrez avoir accès et 4) prenez soin de conserver tous les reçus médicaux qui vous seront remis à l’étranger.

Enfin, prévoyez d’établir ou de mettre à jour vos procurations aux États-Unis. Bien que plusieurs documents juridiques canadiens, notamment votre testament, soient valides aux États-Unis, ce n’est pas le cas des procurations.

Or, il est tout aussi important d’avoir des procurations valides quand vous vous trouvez aux États-Unis que quand vous êtes au Canada. Si vous devenez inapte, votre mandataire au Canada pourrait ne pas pouvoir accéder à votre argent si votre procuration n’est pas valide dans les banques aux États-Unis.

La première chose à faire est de trouver un avocat américain qui connaît bien les préoccupations et les situations des snowbirds. Mme Ewing vous recommande d’en faire une priorité à votre arrivée à destination.

Comment faire pour protéger ma maison pendant mon absence?

Passer l’hiver à l’étranger est une grande aventure et vous allez naturellement consacrer beaucoup de temps à ce qui pourrait se passer une fois que vous serez là-bas. Néanmoins, comme le souligne Joshua Wiedemann, planificateur financier, Gestion de patrimoine TD, il ne faut pas négliger ce que vous allez laisser derrière vous.

Par exemple, pensez à couper l’eau chez vous pour éviter que les tuyaux gèlent, à faire réacheminer votre courrier, à prendre des dispositions pour vos animaux de compagnie et à activer le système de vidéosurveillance ou la minuterie qui allumera les lumières de temps en temps.

Après près de trois ans de mesures sanitaires, de restrictions de voyage et de confinement, bien des snowbirds du Canada ont la bougeotte. Même s’il y a un certain nombre de nouveautés à prendre en considération avant de réserver votre billet d’avion ou de remplir votre voiture, les grandes lignes demeurent plus ou moins les mêmes.

Si vous avez des questions, Mme Ewing vous invite à communiquer avec votre conseiller : « Il a probablement d’autres clients qui sont dans une situation semblable. Il pourra vous dire ce que font les autres et vous donner ses recommandations. »

Repartir vers le Sud pour la première fois sera peut-être un peu stressant, mais un bon plan devrait vous permettre de résister aux turbulences.

TAMARA YOUNG

PARLONS ARGENT

ILLUSTRATION

DANESH MOHUIDDIN