Que vous ayez hâte au jour où vos enfants quitteront le nid familial ou que vous l’appréhendiez, ce sera un moment fort en émotions. La maison devient soudainement un peu trop tranquille et vos journées semblent moins remplies qu’avant. Êtes-vous libre pour autant?

Après tout, le départ des enfants s’est complexifié. Vous pourriez devoir soutenir vos enfants pendant des années, qu’ils vivent encore avec vous ou non. Selon Statistique Canada, bien plus du tiers des adultes de 20 à 34 ans vivent encore chez leurs parents en 2023 1 comparativement à 21 % dans les années 1980 2. Si on tient compte des enfants adultes qui continuent de dépendre fortement du soutien financier de leurs parents, la différence avec les générations précédentes est encore plus frappante. (Pas moins de 91,5 % des parents canadiens soutiennent financièrement leurs enfants adultes d’une manière ou d’une autre, selon un sondage informel réalisé par le Globe and Mail.) 3

S’adapter au départ des enfants : des réponses à vos questions, des idées et des occasions

Cependant, plutôt que de prendre le temps de s’ajuster à cette nouvelle réalité, « les parents ont tendance à poursuivre leur vie normalement sans penser aux répercussions potentielles sur leur plan financier global », indique Tannis Dawson, planificatrice pour les clients à valeur nette élevée à Gestion de patrimoine TD.

C’est pourquoi Mme Dawson suggère à tous les parents dont les enfants ont quitté le nid ou le quitteront sous peu de se poser les questions financières suivantes avant que la réalité ne les rattrape.

Quel impact le départ de mes enfants aura-t-il sur mes finances?

« L’une de mes clientes dont le conjoint avait un bon salaire aidait encore financièrement ses trois enfants adultes, confie Mme Dawson. J’ai dû lui dire qu’une fois que son conjoint prendrait sa retraite, elle n’aurait plus les moyens de le faire. Alors, soit il continue de travailler, soit il faudra faire des choix. »

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Autrement dit, si le départ des enfants ne ressemble pas au scénario que vous vous en êtes fait, sachez que vous n’êtes pas seuls. Bon nombre de parents se sentent obligés de continuer à soutenir leurs enfants bien après leur 18e anniversaire. Après tout, le loyer, la nourriture et les droits de scolarité coûtent cher et il peut falloir près de deux décennies pour amasser une petite mise de fonds 4.

« Notre principale préoccupation est le prix élevé des maisons », affirme Don, un préretraité dont les enfants en âge de fréquenter l’université vivent avec sa femme et lui à Toronto. « Subvenir aux besoins de nos garçons nous coûte beaucoup moins cher que si nous les aidions à acheter une maison. Au bout du compte, l’argent qu’ils économisent maintenant servira à financer l’achat d’une maison. Ce serait illogique de leur demander de subvenir entièrement à leurs besoins alors que nous avons deux chambres vides et un réfrigérateur bien garni. »

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Malgré la culpabilité générationnelle que ressentent bien des gens en raison des coûts exorbitants (particulièrement en ce qui a trait au logement), Mme Dawson affirme qu’il est important d’être réaliste quant au montant que vous coûte l’aide financière et combien de temps vous pouvez raisonnablement continuer à en fournir une. Une fois la limite atteinte, une discussion s’impose.

Avez-vous eu une conversation sérieuse à ce sujet?

Il peut être très utile d’avoir une conversation ouverte avec vos enfants sur la forme que prendra votre soutien pour les années à avenir, affirme Mme Dawson. Cela vaut aussi bien pour les ménages où les enfants adultes vivent encore à la maison que pour ceux dont les enfants ont déjà quitté la maison ou sont entre les deux.

En plus des éléments de base (loyer, droits de scolarité, nourriture, etc.), ces conversations devraient aussi aborder les futurs prêts ou cadeaux en argent. Par exemple, votre enfant s’attend-il à ce que vous payiez pour son mariage? Si l’un de vos enfants souhaite obtenir un deuxième diplôme, paierez-vous les droits de scolarité? Continuerez-vous de soutenir vos enfants s’ils dépensent sans compter, sans mettre un sou de côté? S’attendront-ils à ce que vous contribuiez à la mise de fonds pour une maison?

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De plus en plus de parents aident leurs enfants à acheter leur première propriété, un soutien qui pourrait leur coûter des centaines de milliers de dollars. Avant de fournir une telle aide, il est important de planifier et d’avoir une conversation approfondie 5.

« Dites à vos enfants ce pour quoi vous êtes prêt à payer et pendant combien de temps. Quel que soit le type d’aide que vous comptez leur offrir, vous devez être honnête avec eux pour leur permettre de planifier, eux aussi », indique Mme Dawson.

Quelle est l’incidence du soutien continu que j’offre à mes enfants sur mes objectifs et mon plan à long terme?

Une fois que votre famille comprendra mieux comment vous comptez les soutenir, Mme Dawson explique que la prochaine étape consiste à revoir et à mettre à jour votre plan financier en conséquence. « Peu importe ce que vous voulez faire, il est important que nous examinions les dépenses associées au fait d’aider financièrement les enfants et en tenir compte dans le plan. » Selon Mme Dawson, il arrive parfois que des ajustements doivent être faits.

« Nous prenons toutes sortes d’éléments en compte lorsque nous examinons votre plan, mais certains des plus importants sont le moment auquel vous souhaitez prendre votre retraite et l’inflation. Nous utilisons ces renseignements pour déterminer si votre budget est toujours raisonnable. »

Pour Don, il allait de soi que l’aide financière pour ses enfants serait intégrée au plan financier familial. « Plus les logements coûtent cher, plus cela bénéficie aux propriétaires, au détriment de la jeune génération, déclare-t-il. Par conséquent, nous n’allons pas seulement devoir aider nos enfants un peu, mais beaucoup. Selon moi, c’est l’une des grandes différences entre la situation actuelle et celle d’il y a 20 ans. »

Est-ce une occasion d’économiser davantage?

Les parents dont les enfants ont quitté la maison (ou sont plutôt indépendants financièrement) pourraient avoir plus d’argent à mettre de côté en vue de la retraite et d’autres objectifs personnels. Une fois qu’on n’a plus besoin d’acheter les souliers à la dernière mode et de financer des activités parascolaires coûteuses, on peut même arriver à atteindre nos principaux objectifs plus tôt.

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Ne présumez pas que des économies supplémentaires tomberont du ciel. Selon une étude menée par le Centre for Retirement Research du Boston College, les parents américains dont les enfants avaient quitté le nid familial n’avaient que légèrement augmenté leur taux d’épargne, mais pas suffisamment pour améliorer leurs perspectives de retraite 6. Les auteurs de l’étude suggèrent entre autres qu’après le départ des enfants, il pourrait y avoir un délai avant que les dépenses parentales ne cessent. Si vous croyez être en mesure d’accroître légèrement vos économies ou vos dépenses après le départ de vos enfants, consultez un conseiller ou un planificateur financier pour vous éclairer.

Suis-je toujours sur la bonne voie pour ma retraite?

Bien des gens commencent à songer sérieusement à la planification de la retraite une fois que leurs enfants ont quitté le nid familial. C’est la suite logique des choses : un chapitre de votre vie se termine, alors vous portez votre attention sur le suivant. Selon Mme Dawson, c’est la bonne chose à faire et elle suggère de faire des suivis réguliers pour vous aider à garder le cap. Vous pourriez notamment vouloir revoir votre plan de retraite, jeter un coup d’œil à vos régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER) et examiner votre budget pour la retraite. Vous devrez aussi vous assurer de tenir compte des futures dépenses liées à vos enfants dans votre plan.

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Par exemple, si vous donnez 30 000 $ à vos deux enfants pour financer leur retour aux études ou leur mariage et que ce montant équivaut à 5 % de votre épargne-retraite, quelle serait l’incidence de cette dépense sur votre plan? Pour obtenir les fonds nécessaires, feriez-vous un retrait anticipé d’un REER ou ouvririez-vous une ligne de crédit sur valeur domiciliaire? Votre décision aura-t-elle des conséquences fiscales imprévues?

Pour sa part, Don ne songe actuellement pas à prendre sa retraite. Pour l’instant, sa femme et lui veulent continuer à travailler et ils ont mis en place un plan solide, qu’ils revoient régulièrement, en vue du moment où ce ne sera plus le cas. Cependant, Don affirme être prêt à le modifier, au besoin, pour s’assurer que ses enfants ne manquent de rien : « En tant que parents, nous faisons des pieds et des mains pour nos enfants. Du moins, c’est notre façon de voir les choses. Ainsi, même s’ils ne se trouvent pas un emploi bien rémunéré dès le départ, ils recevront de l’aide de notre part. Dans les limites de ce qui est raisonnable, bien sûr. »

Bien que la signification du départ des enfants ait changé considérablement au fil des ans, ce départ demeure un jalon important auquel on doit accorder une attention particulière. Que cette transition se produise dans un proche avenir ou qu’elle soit déjà en cours, il n’est jamais trop tard pour tenir compte de l’incidence de cet important changement sur votre vie et vos finances.

« Planifiez, planifiez, planifiez, martèle Mme Dawson. J’ai parfois l’impression de radoter, mais on ne peut jamais insister assez sur l’importance d’avoir un plan solide. Les choses changent. C’est normal. Mais pour être efficace, votre plan doit refléter ces changements. »

TAMARA YOUNG

MONEYTALK

ILLUSTRATION DE

DANESH MOHIUDDIN