Pour un investisseur, un repas gratuit, ça n’existe pas. Mais le compte d’épargne libre d’impôt (CELI) s’en approche. Il vous incombe de sélectionner des placements rentables pour votre CELI, mais sachez que vos gains sont à l’abri de l’impôt.
Lancé en 2009 par le gouvernement fédéral pour aider les Canadiens à atteindre leurs objectifs d’épargne, le CELI est « souvent le meilleur moyen de faire fructifier l’épargne à l’abri de l’impôt », selon Nicole Ewing, directrice, Planification fiscale et successorale, Gestion de patrimoine TD.
Ce compte enregistré gagne en popularité. Comme plus de 16 millions de Canadiens détenaient un CELI en 2020, son taux de participation dépasse celui du régime enregistré d’épargne-retraite (REER) depuis 2013. 1 Pourtant, bien des épargnants n’en profitent pas, s’étonne Mme Ewing. « En se privant de cet outil ou en négligeant d’optimiser son utilisation, on rate une belle occasion. »
Le CELI peut décupler l’épargne. Par exemple, si vous investissez en 2024 la cotisation maximale permise de 7 000 $ à un rendement annuel moyen de 5 %, vous disposerez de 18 573 $ après 20 ans si vous ne faites pas d’autres cotisations ou des retraits. Le gain libre d’impôt dépasse 11 000 $. En comparaison, si vous déteniez ce placement en dehors d’un compte avec avantage fiscal, jusqu’à 50 % de ce gain en capital pourrait être imposé à votre taux d’imposition marginal. Vous pouvez vérifier le résultat à l’aide du calculateur d’intérêts composés de la TD.
Tout détenteur de ce compte avantageux sur le plan fiscal sait que c’est une façon astucieuse d’accroître son patrimoine. Mais même les utilisateurs aguerris du CELI peuvent faire des erreurs. Mme Ewing invite à se méfier des pièges courants.
Trop cotiser au CELI
Le gouvernement fédéral limite la cotisation annuelle au CELI, et l’Agence du revenu du Canada (ARC) veille au grain. Vous paierez une pénalité de 1 % par mois sur tout montant déposé qui excède la limite annuelle. « Ça finit par coûter cher », estime Mme Ewing, qui conseille de noter avec soin les dépôts pour éviter les pénalités. Si vous détenez des CELI dans différentes institutions, vous risquez de trop cotiser sans vous en rendre compte.
Et si vous songez à assumer la pénalité de 1 % parce qu’un placement vous offre des rendements bien supérieurs, pensez-y à deux fois. L’ARC voit d’un mauvais œil les cotisations excédentaires intentionnelles et peut imposer à 100 % tout revenu ou gain réalisé. 2
Ne pas connaître votre plafond de cotisation
Les droits de cotisation inutilisés au CELI s’accumulent au fil des ans. Si vous n’avez pas atteint le plafond de 6 500 $ l’an dernier, il n’est pas trop tard. Vous pouvez ajouter la différence au plafond de 7 000 $ de cette année. Mieux encore, vous pouvez verser les cotisations maximales pour chaque année où vous êtes admissible au CELI et résident du Canada, même si vous venez tout juste d’ouvrir un compte. Si vous aviez plus de 18 ans en 2009 à la création du CELI, vous pourriez réclamer les droits de cotisation octroyés pour chacune de ces années, ce qui représente 95 000 $.
Effectuer des retraits et de nouvelles cotisations trop tôt
Vous pouvez retirer des fonds de votre CELI en tout temps, mais les rembourser compte comme un nouveau dépôt. C’est important. Vous ne perdez pas vos droits de cotisation, mais vous devez en attendre le rétablissement l’année suivante. En vous précipitant, vous risquez de cotiser trop si vous aviez déjà maximisé votre CELI avant le retrait. Quand Mme Ewing veut effectuer un retrait temporaire, elle attend souvent la fin de l’année en cours et rembourse les fonds dès janvier de l’année suivante au rétablissement du plafond.
Transférer des fonds entre CELI
Les fonds transférés entre CELI entrent dans le calcul de votre plafond de cotisation annuel. Pour éviter qu’une telle opération soit considérée comme une cotisation au CELI, demandez à la banque de s’en charger plutôt que de faire le retrait vous-même. Vous pourriez aussi réduire le nombre de vos comptes pour faciliter les dépôts et la tenue de dossiers.
Désigner votre conjoint comme bénéficiaire
En principe, ça semble une bonne idée, mais Mme Ewing conseille plutôt de nommer votre conjoint comme titulaire remplaçant. Sur le plan juridique, lorsque le compte est transféré à un bénéficiaire, le CELI doit être encaissé et fermé. En revanche, le titulaire remplaçant peut conserver le CELI; les placements continueront de fructifier à l’abri de l’impôt.
Céder à l’attrait de la spéculation sur séance
Oui, il est tentant de spéculer sans retenue pour encaisser des gains rapides sur les placements, mais l’ARC se méfie des investisseurs qui se servent de leur CELI pour faire des affaires. Il arrive souvent que des investisseurs autonomes s’essaient à spéculer, notamment sur des actions cotées en cents à la Bourse de croissance TSX, ce qui contrevient aux règles de l’ARC. Les règles relatives aux opérations excessives sur titres, ou spéculation sur séance, ne sont pas simples, mais l’ARC pourrait considérer que vous n’utilisez pas le CELI à bon escient. Si vos opérations s’apparentent à de la spéculation sur séance, tous vos gains seront imposés comme un revenu d’entreprise. 3
Détenir les mauvais placements
Les actions qui versent des dividendes peuvent être un excellent choix pour le CELI, comme le gouvernement canadien n’impose pas ces versements, même au retrait. Mais ils peuvent être assujettis à une retenue d’impôt à l’étranger. Les dividendes de placements américains, par exemple, sont imposables par l’Internal Revenue Service (IRS) aux États-Unis. Aussi, les titres étrangers à dividende pourraient ne pas être un choix judicieux pour certains détenteurs de CELI.
Vous devriez aussi vous demander si le CELI est le meilleur compte pour détenir des placements volatils. Vous adorerez votre CELI si vous faites des profits, mais vous aurez moins d’options pour atténuer une perte. Selon Mme Ewing, si vous envisagez d’investir dans des placements plus risqués, vous pourriez utiliser un compte non enregistré, où les pertes peuvent compenser les gains en capital. Une perte peut aussi se répercuter sur vos droits de cotisation. Les gains réalisés dans le compte sont non imposables, mais l’ARC n’accorde pas de nouveaux droits de cotisation en cas de perte.
- Statistique Canada, Série de documents de recherche – Revenu : Tendances récentes des cotisations des familles à trois comptes d’épargne enregistrés, https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/75f0002m/75f0002m2023008-fra.htm, consulté le 12 janvier 2024 ↩
- Agence du revenu du Canada, Guide du compte d’épargne libre d’impôt (CELI) pour les particuliers, dernière modification le 6 janvier 2023, https://www.canada.ca/fr/revenue-agency/services/forms-publications/publications/rc4466/tax-free-savings-account-tfsa-guide-individuals.html#P44_1131, consulté le 12 janvier 2024. ↩
- Clare O’Hara, Investors who day trade inside TFSAs to face tax bills after ruling, Globe and Mail, le 10 avril 2023, https://www.theglobeandmail.com/business/article-day-trading-tfsa-income-taxable/ ↩