Une séparation ou un divorce peut être une période belliqueuse remplie de disputes à propos de la maison, de l’argent et même de la vaisselle. Un REEE (régime enregistré d’épargne-études) qu’une famille a établi il y a plusieurs années pour un enfant peut venir compliquer les choses, surtout s’il est considéré comme un actif familial important.

Si vous avez des enfants, vous avez peut-être ouvert un REEE pour épargner en vue de leurs études. Il s’agit d’un placement qui permet aux cotisants d’épargner de l’argent pour payer les études postsecondaires d’un enfant (le bénéficiaire). Les cotisations à un REEE peuvent être complétées par des bourses ou des incitatifs du gouvernement fédéral et de certains gouvernements provinciaux. Il peut s’agir d’un moyen judicieux d’investir et de faire fructifier de l’argent dans le but d’épargner pour des études.

« Un REEE peut être une très bonne façon d’épargner pour les études d’un enfant », selon Zeljka Walker, conseillère en placement à Gestion de patrimoine TD et Certified Divorce Financial Analyst. « L’argent peut fructifier à l’abri de l’impôt et le gouvernement fédéral peut y ajouter des bourses allant jusqu’à 7 200 $ par bénéficiaire selon le montant des cotisations. »

Si vous étiez un couple lorsque le REEE a été établi, vous et votre conjoint ou partenaire pourriez être cosouscripteurs du régime, ce qui signifie que vous pouvez tous les deux cotiser au REEE. Si vous avez ouvert le compte par vous-même, il pourrait plutôt s’agir d’un compte à souscripteur unique.

À qui appartient cet argent?

« En dépit du fait que les enfants sont les bénéficiaires du REEE, ce sont les souscripteurs qui possèdent et contrôlent les fonds, explique Mme Walker. Les souscripteurs peuvent donc faire ce qu’ils veulent de cet argent. »

Cela peut poser un problème lorsqu’un couple se sépare. Si le REEE a un souscripteur unique, celui-ci peut prendre toutes les décisions et retirer l’argent s’il le désire. Un souscripteur n’a pas besoin d’attendre que l’enfant soit admis dans un établissement d’études postsecondaires pour retirer les fonds, mais toute bourse devra être remboursée en partie ou en totalité au gouvernement. Le retrait du revenu produit par le régime fera quant à lui l’objet de certaines conditions ou de pénalités éventuelles. S’il s’agit d’un compte conjoint, tout retrait pourrait devoir être approuvé par les deux cosouscripteurs, selon l’entente avec le fournisseur du REEE.

En cas de divorce, comment le REEE sera-t-il partagé?

S’il y a rupture de mariage, il y a différentes manières de traiter le REEE. En vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, il n’est pas nécessaire qu’un REEE soit partagé entre les parties1. Une personne et son ex conjoint peuvent donc continuer à être cosouscripteurs du REEE de leur enfant et poursuivre leurs cotisations. On ne peut cependant pas ouvrir de compte conjoint après un divorce.

Le REEE peut aussi être partagé également entre les deux parties. « Si le bénéficiaire demeure le même, les fonds peuvent être transférés d’un REEE à un autre, explique Mme Walker. Le partage du placement au moment de la séparation et le transfert de votre part dans votre propre REEE au bénéfice de l’enfant n’entraîneraient pas de pénalité. »

Soulignons qu’un REEE est un actif qui n’est pas à l’abri des créanciers. Par conséquent, si votre ex-conjoint devait déclarer faillite, les créanciers pourraient demander à saisir une partie ou la totalité de la valeur du régime.

Cotiser après le divorce

Si vous avez opté pour un REEE conjoint, même si vous restez tous deux souscripteurs après la séparation, toute cotisation au REEE ne sera probablement pas conjointe et appartiendra au cotisant, sous réserve des modalités de l’entente de séparation. Mme Walker précise qu’« il est important de tenir un registre du montant cotisé au REEE durant et après le mariage pour que la propriété des fonds soit entendue ».

Si vous avez décidé d’ouvrir un REEE distinct à souscripteur unique, sachez que vous devrez coordonner vos cotisations avec votre ex-conjoint. Aucun bénéficiaire ne peut recevoir plus que le montant maximal de toute bourse applicable. Des cotisations mal calculées pourraient amener le versement en trop d’un montant de bourse et entraîner une pénalité mensuelle sur le montant excédentaire.

En vertu de la loi ontarienne, chaque parent ainsi que l’étudiant pourraient devoir payer une part raisonnable des coûts d’études postsecondaires2. Le montant épargné dans un REEE pendant la durée du mariage est souvent utilisé en priorité pour payer les études d’un enfant, avant que chaque parent paie une partie des coûts supplémentaires, généralement proportionnelle à ses revenus.

« Même si vous avez un REEE, poursuit Mme Walker, il serait judicieux de continuer à épargner hors du régime pour assumer tout coût supplémentaire, le moment venu. »

Si vous souhaitez épargner pour les études de votre enfant, consultez votre conseiller. Un REEE pourrait ne pas être votre seule option de placement pour épargner en vue de payer des études postsecondaires. En fait, une fois que le montant maximal des bourses a été obtenu, il pourrait être bon d’envisager d’autres placements avantageux sur le plan fiscal.

Selon Domenic Tagliola, LL.B., planificateur spécialiste de la fiscalité et des successions, Gestion de patrimoine TD, une entente de séparation bien rédigée devrait:

  • Prendre en compte le type de REEE; les régimes personnels, familiaux, conjoints ou à souscripteur unique pourraient devoir être gérés différemment. Consultez un professionnel.
  • Inclure une obligation de continuer à cotiser au REEE selon les modalités ayant fait l’objet d’une entente ou d’une ordonnance d’un tribunal.
  • Contenir des lignes directrices relatives aux circonstances dans lesquelles les souscripteurs peuvent retirer des fonds du REEE.
  • Protéger les fonds; empêcher (ou permettre) le transfert de fonds dans un nouveau REEE et ne pas permettre le retrait de fonds hormis pour payer les études postsecondaires du bénéficiaire.
  • Établir qui est responsable du paiement des impôts ou des pénalités, le cas échéant, pour tout REEE conjoint.
  • Imposer des restrictions en cas de décès quant à la personne pouvant être désignée dans un testament comme souscripteur remplaçant.
  • Si vous préparez une entente de séparation, consultez des conseillers juridiques et financiers professionnels qui connaissent le droit familial et fiscal de votre province.

— Denise O’Connell, Parlons argent et vie