Cela fait près de 20 ans que Jo-Anne Ryan, vice-présidente, Services des conseils philanthropiques, Gestion de patrimoine TD, a participé au lancement de la Fondation de dons particuliers (FDP). Depuis, plus d’un demi-milliard de dollars ont été distribués à des organismes de bienfaisance. Mme Ryan, qui est également directrice générale de la fondation, a discuté avec l’équipe de Parlons Argent de l’attrait continu de la fondation pour la population canadienne et de la façon dont elle change les choses, tant au pays qu’à l’étranger.

Parlons Argent : Comment la FDP est-elle née et quel rôle avez-vous joué dans ce processus?

Jo-Anne Ryan : La FDP est structurée comme un fonds à vocation arrêtée par le donateur. Ce type de fonds a été introduit aux États-Unis dans les années 1990. J’ai commencé à entendre parler de ces instruments de dons lors de conférences sur les dons de bienfaisance au Canada. J’ai préparé une proposition et j’ai demandé à la TD d’être la première institution financière au Canada à lancer un fonds à vocation arrêtée par le donateur. Je me suis embarquée dans l’aventure et nous avons lancé la FDP en octobre 2004.

La FDP a son propre numéro d’organisme de bienfaisance enregistré et son propre conseil d’administration. Elle est indépendante de la TD, mais c’est la Banque qui a fourni les capitaux de démarrage nécessaires à sa constitution. Il y a aussi une entente de service entre la fondation et la TD qui précise que c’est la TD qui s’occupe de toute l’administration associée à son exploitation.

De façon générale, et selon la structure établie, les gens qui souhaitent faire des dons ouvrent un compte auprès de la FDP et lui attribuent un nom (par exemple, « Fondation de la famille Smith »). Ils peuvent donner de l’argent ou des titres cotés en bourse à la FDP. Ensuite, ils peuvent faire des dons à des organismes de bienfaisance à partir de leur fonds en tout temps. Les fonds sont investis et fructifient à l’abri de l’impôt, ce qui permet de maximiser le montant à distribuer aux organismes de bienfaisance.

Parlons Argent : C’était il y a presque 20 ans. Comment décririez-vous votre parcours?

Jo-Anne Ryan : Ça a été extrêmement gratifiant. J’ai eu la chance de rencontrer des donateurs ainsi que des philanthropes et de les aider à concrétiser leur passion pour des causes qui leur tiennent à cœur. Voici un excellent exemple : David et Christine Anderson, un couple de philanthropes de l’Alberta, ont une maison sur Bequia, une petite île qui fait partie de Saint-Vincent-et-les Grenadines dans les Caraïbes. Même s’ils profitaient des bienfaits d’une retraite tropicale, ils voulaient aussi aider à remédier à la pauvreté systémique sur l’île. Grâce à la FDP, les Anderson ont pu établir leur fonds, la Fondation DC Anderson. Mais voilà, les projets de bienfaisance à l’étranger sont habituellement difficiles à mettre sur pied. Par chance, les Anderson ont pu s’associer à un organisme de bienfaisance international spécialisé dans les pays en développement. Ce partenariat a permis aux Anderson de financer des projets comme l’éducation d’enfants ayant des besoins spéciaux, des bourses d’études, des programmes de sécurité alimentaire et la vaccination contre la COVID-19 à Bequia. Ils ont même fait transporter des terrains de jeu entiers pour les enfants sur l’île.

Parlons Argent : Faire des dons de bienfaisance peut manifestement apporter son lot de complications. Au Canada, comment les gens peuvent-ils changer les choses de la meilleure façon qui soit avec leur argent?

Jo-Anne Ryan : Tout comme les Anderson, les personnes au Canada ont les organismes de bienfaisance à cœur. La façon traditionnelle de créer une fondation de bienfaisance implique toutefois des frais juridiques et une certaine surveillance de la gouvernance et de l’administration. Tout ça peut prendre beaucoup de temps. Il peut s’écouler un an avant que la fondation ne soit enregistrée auprès de l’Agence du revenu du Canada (ARC). Si vous siégez au conseil d’administration de votre propre organisme de bienfaisance, vous aurez également la responsabilité fiduciaire de veiller au respect de toutes les règles de l’ARC en matière de réglementation des organismes de bienfaisance, ainsi que de la Loi de l’impôt sur le revenu. Pour la plupart des gens, ce n’est pas réaliste.

Grâce à la FDP, vous pouvez créer votre propre fondation immédiatement avec 10 000 dollars et l’aide d’un conseiller TD. Nous avons rendu les dons de bienfaisance de cette envergure accessibles à beaucoup plus de personnes. De plus, vous n’avez pas à décider immédiatement où ira votre don de bienfaisance. Grâce à la FDP, vous pouvez prendre le temps de faire des recherches pour déterminer quels organismes vous semblent appropriés parmi les nombreux organismes de bienfaisance du Canada. Entre-temps, votre argent est investi et continue de fructifier, et vous pouvez bénéficier d’avantages fiscaux immédiats. Vous n’aurez pas besoin de vous dépêcher pour respecter la date limite du 31 décembre pour recevoir un reçu fiscal, comme vous le feriez si vous faisiez un don directement à un organisme de bienfaisance.

Parlons Argent : Des catastrophes naturelles ont récemment frappé l’est du Canada et le sud des États-Unis. Si notre compte est déjà ouvert, est-il possible d’ajouter rapidement un autre organisme de bienfaisance lorsque l’urgence se fait sentir?

Jo-Anne Ryan : Absolument. Après avoir établi un fonds auprès de la FDP, vous n’êtes pas tenu de désigner immédiatement un organisme de bienfaisance ou un bénéficiaire de dons. De cette façon, les fonds sont accessibles en cas d’urgence ou de besoins immédiats.

Grâce à cette souplesse, chaque membre d’une famille pourrait opter annuellement pour l’organisme de bienfaisance de son choix, selon ses valeurs ou ses champs d’intérêts personnels. Le compte de la famille pourrait ensuite verser un don à chaque organisme désigné. De cette façon, les membres plus âgés d’une famille peuvent servir de modèle et initier leurs enfants à la philanthropie en les faisant participer au processus.

Parlons Argent : Peut-on faire des dons autres qu’en argent?

Jo-Anne Ryan : La FDP offre une souplesse intégrée qui profite à la fois aux donateurs et à leurs organismes de bienfaisance. Ces personnes peuvent faire des dons de titres cotés en bourse. Elles reçoivent un reçu de don pour la valeur marchande des titres et l’impôt sur les gains en capital est éliminé. Dans le cadre de leur plan successoral, elles peuvent également faire don de leurs actifs dans leur testament ou faire de la FDP le bénéficiaire de leur régime enregistré, ou de leur compte d’épargne libre d’impôt.

Parlons Argent : En conclusion, avez-vous un champ d’intérêt caritatif préféré?

Jo-Anne Ryan : J’en ai plusieurs. L’Université Carleton offre un programme de maîtrise en philanthropie et en leadership dans le secteur à but non lucratif et c’est le seul en son genre au Canada. Je fais partie du conseil consultatif, qui célébrera ses 10 ans cette année. Pourquoi c’est important pour moi? La population canadienne qui fait des dons à des organismes de bienfaisance souhaite que ces organismes soient bien gérés. En investissant dans un programme comme celui de l’Université Carleton, qui permet de former des leaders capables de guider efficacement les organismes, c’est l’ensemble du secteur caritatif qui en sort gagnant.

DON SUTTON

PARLONS ARGENT ET VIE

ILLUSTRATION

INNA GERTSBERG