Il y a 119 postes frontaliers entre les États-Unis et le Canada. Des professionnels comme des infirmiers, des travailleurs de l’automobile et même des dirigeants en demande traversent régulièrement la frontière pour travailler à Détroit, à Seattle ou dans d’autres villes frontalières. Chris Gandhu s’entretient avec Kim Parlee de l’effet de leurs déplacements sur les plans de l’immigration et des finances.
Mais, quelles sont les conséquences de ces allers-retours du point de vue de l’immigration et des questions financières? Pour en discuter, je reçois Chris Gandhu, planificateur pour les clients à valeur nette élevée à Gestion de patrimoine TD. Bienvenue.
Merci de m’avoir invité, Kim.
Voyons d’abord à qui s’appliquent ces règles. Qui sont les personnes visées. Et quelles sont les villes frontalières en cause.
Ce peut être des Canadiens en poste dans la région de Buffalo-Niagara ou, par exemple, dans un hôpital du corridor Detroit-Windsor, ou qui occupent un emploi technique dans l’Ouest entre la Colombie-Britannique et Seattle. En fait, n’importe quel travailleur qui déniche un meilleur poste aux États-Unis.
Et que doivent-ils savoir? Commençons par l’immigration. S’ils traversent la frontière chaque jour, j’imagine qu’il ne suffit pas de repérer un poste vacant et de poser sa candidature.
Vous avez bien raison. Vous ne pouvez pas vous présenter comme un visiteur. Il vous faut un visa de travail. Vous connaissez peut-être les visas de type H-1B, H-2B ou E-1. Mais, pour un citoyen canadien, la démarche la plus facile consiste à demander un visa en vertu de l’ALENA. L’ALENA dresse une liste des professionnels qui peuvent présenter une demande de visa. Si vous en faites partie et qu’un emploi vous attend aux États-Unis, vous pouvez demander un visa TN. C’est la démarche la plus facile pour pouvoir travailler aux États-Unis.
J’ai donc mon visa. Tout est en règle. J’ai reçu une offre d’emploi. Je travaille aux États-Unis pour un employeur qui me paie en dollars américains. Quelles sont les conséquences pour moi sur le plan des avantages sociaux, ou que faut-il prendre en compte?
Oui. Bien évidemment, votre rémunération est en dollars américains. Mais, vous êtes résidente canadienne et vos dépenses sont en dollars canadiens. Vous devez être à l’aise avec les fluctuations du taux de change. Actuellement, le taux de change vous avantage. Mais, cela n’a pas toujours été le cas. Et, la situation pourrait changer ultérieurement. C’est un aspect avec lequel vous devez pouvoir composer.
Second aspect à considérer, au Canada, les employeurs proposent souvent aux travailleurs d’autres avantages en plus du salaire. Ce peut être de cotiser à votre REER en complément, par exemple. Aux États-Unis, le régime équivalent s’appelle le 401(k). Votre employeur américain peut y cotiser en votre nom. Mais, comme vous franchissez la frontière chaque jour, votre situation est unique parce que le régime est situé aux États-Unis et que vous résidez au Canada. Par conséquent, votre planificateur financier canadien ne peut pas vous aider puisque les actifs ne se trouvent pas au Canada, mais bien aux États-Unis.
Votre planificateur financier américain ne peut non plus vous prêter assistance parce que vous n’êtes pas une personne ou une résidente des États-Unis. Vous résidez au Canada. Vous êtes à cheval sur deux territoires.
Qui peut donc m’aider, maintenant que je sais qui ne peut rien faire pour moi?
Il faut garder l’oeil ouvert. Vous pouvez prendre en main votre propre planification financière ou retenir les services d’un conseiller transfrontalier qui comprend la situation. Mais, il ne pourra quand même pas gérer votre argent à votre place.
Très bien. Il faut faire appel à quelqu’un qui comprend les complexités des deux côtés de la frontière.
Oui, très exactement. Par exemple, il faut savoir que le régime 401(k), parce qu’il est enregistré aux États-Unis, constitue un actif au même titre, disons, que le fait de posséder une maison ou des actions dans ce pays. Vous devriez alors avoir vérifié si vous êtes assujettie aux droits successoraux américains.
Oui, c’est une vérification qu’il vaudrait probablement mieux faire. Vous avez tout à fait raison. Qu’en est-il des impôts? Aucun gouvernement ne dédaigne ponctionner les contribuables. Quel est le mécanisme fiscal pour un travailleur transfrontalier?
D’accord. En vertu de notre convention avec les États-Unis, si vous touchez un revenu de source américaine, ce qui est le cas d’un travailleur transfrontalier, vous devez produire une déclaration au fisc américain, l’IRS. Les règles pour un résident canadien sont claires : vous devez déclarer à l’ARC vos revenus touchés à l’échelle mondiale. Le même dollar doit donc être déclaré autant à l’IRS qu’à l’ARC. Vous devez vous conformer aux deux exigences. Ce qui ne veut pas dire que vous serez imposée en double, parce que notre convention avec les États-Unis stipule que l’impôt payé à l’IRS donne lieu à un dégrèvement au Canada.
Par exemple, sur 100 dollars, si vous versez 25 dollars à l’IRS et que vous devez 30 dollars d’impôt au Canada, vous obtiendrez un crédit de 25 dollars et ne remettrez que cinq dollars au Canada. Il faut donc respecter les deux exigences, mais l’imposition n’est pas double.
Il faut aussi savoir que les provinces ne sont pas liées par la convention entre le Canada et les États-Unis en matière d’impôts et qu’elles n’offrent pas de crédit pour les impôts payés aux États-Unis. Il y a donc une certaine perte de ce point de vue.
Intéressant. Tout compte fait, que faut-il retenir si l’on songe à devenir un travailleur transfrontalier?
D’accord. Il faut donc garder l’oeil ouvert. Le poste offert peut être bien rémunéré. Mais, il faut se demander si le taux de change et la double exigence de déclaration fiscale ne posent pas un obstacle en fin de compte. Il vaut mieux faire appel à un professionnel qui connaît les deux côtés de la médaille.
Merci beaucoup, Chris.
Je vous en prie.