
La hausse du taux des obligations du Trésor américain à 10 ans a capté l’attention des marchés boursiers, et l’indice NASDAQ a fluctué brusquement à chaque mouvement des taux. Kim Parlee discute avec Michael Craig, chef, Répartition des actifs, et Scott Colbourne, directeur général, de Gestion de Placements TD.
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[MUSIQUE]
Le rendement des bons du Trésor américain à 10 ans grimpe depuis des semaines et sème l’inquiétude sur les marchés, aux dépens surtout des actions du NASDAQ, de la technologie et axées sur le momentum. Alors, est-ce que cette tendance va se poursuivre? Doit-on s’attendre à d’autres évolutions? Qu’est-ce que tout cela signifie?
Michael Craig est chef, Répartition de l’actif. Scott Colbourne est directeur général. Tous deux à Gestion de Placements TD. Ils sont avec moi aujourd’hui.
Michael, commençons par ce qui se passe en ce moment. La hausse des taux obligataires a secoué les marchés. Le NASDAQ est presque à terre, avec une chute de près de 10 %. À votre avis, qu’est-ce qui se passe?
Cette hausse reflète en fait l’attente d’un contexte de croissance plus robuste. Le déploiement de la vaccination aux États-Unis a été beaucoup plus rapide que prévu. Des mesures de relance vont sans doute être confirmées ce mois-ci ou cette semaine, et on attend des annonces sur le plan des infrastructures.
On a manifestement un très fort facteur de croissance. Par conséquent, on a une pentification du marché obligataire, avec un taux du financement à un jour stable. Mais les obligations d’État à long terme se vendent massivement. Et tout cela est le reflet d’une économie en voie de guérison... d’une économie qui émerge d’une récession. Les taux de chômage sont en baisse.
Tout cela indique une embellie. Ce n’est pas une mauvaise chose. C’est une bonne nouvelle. Et les marchés obligataires se sont empressés de réagir.
J’aimerais vous demander – vous dites que c’est une bonne chose, parce que c’est une question de croissance. Mais je pense à tous ceux qui détiennent des titres technologiques et axés sur le momentum. Ils ne voient peut-être pas les choses de cet œil.
Pourriez-vous nous expliquer les raisons de ce repli? Pourquoi les marchés boursiers sont-ils en baisse quand l’économie semble se redresser?
Certains marchés boursiers se portent bien. D’autres éprouvent quelques difficultés. Dans le secteur des technologies, il y a eu des excès. C’est certain que début février, on a atteint un sommet un peu parabolique. Les gens ont fait monter les enchères sur les titres technologiques assez agressivement. C’est donc une simple correction. Et c’est une correction saine – qui remédie aux excès.
Mais fondamentalement, si le secteur des technologies et le NASDAQ sont malmenés, c’est parce que la croissance se redresse et qu’elle pourrait se situer cette année entre 5 et 9 %. La croissance n’est donc plus si raréfiée. Et quand quelque chose n’est plus rare, sa valeur baisse.
Par ailleurs, bon nombre des sociétés du NASDAQ ne font pas vraiment d’argent. On achète leurs titres dans l’espoir qu’elles fassent de l’argent un jour. Il y a donc de l’incertitude. Et si vous mettez ça en perspective avec un taux plus élevé, comme celui du marché obligataire, le jeu en vaut moins la chandelle.
En revanche, il y a des occasions plus intéressantes. Avec l’ouverture de l’économie et la forte croissance économique cette année – ça ne durera pas éternellement – mais les sociétés qui sont plus sensibles à une forte croissance se portent très bien. Les services financiers, les produits industriels, l’énergie, les matériaux... On voit des rendements très solides depuis le début de l’année. Bon nombre de ces titres étaient à la traîne l’an dernier, mais leurs résultats sont assez bons et reflètent une croissance plus vigoureuse.
Nous reviendrons sur cette idée de rotation. Scott, j’aimerais que vous nous parliez des taux obligataires. Comme on l’a dit, les gens s’y intéressent plus que jamais. Mais cette hausse des taux obligataires, cette hausse rapide est-elle vraiment saine? Est-ce que tout fonctionne normalement?
Oui, quand je regarde les taux d’intérêt actuels, je vois trois choses. D’abord, les niveaux historiques. En valeur absolue, les taux étaient très faibles ces 25 dernières années. Aux États-Unis, 1,6 % pour les taux à 10 ans. C’est très faible.
Qu’est-ce qui nous amène à cette situation? Comme Mike l’a très bien expliqué, c’est la croissance. C’est un phénomène mondial. On assiste à une normalisation. C’est sain. C’est une excellente nouvelle. Les taux devraient donc augmenter.
Et vous faites allusion au dernier problème, la rapidité de ce changement. L’an dernier, les taux à 10 ans ont touché le fond à 50 points de base aux États-Unis. Ils sont remontés à environ 90 points de base à la fin de 2020. C’est une belle hausse graduelle. Cette année, au cours des deux premiers mois, nous avons vu une augmentation d’environ 110, 120 points de base.
C’est ce qui a retenu l’attention des gens. La rapidité de ce changement. Je crois qu’il y a quelques inquiétudes concernant le contexte réglementaire et la microstructure du marché obligataire.
Mais essentiellement, quand on prend du recul, c’est une excellente nouvelle. Et les marchés, de façon générale, ainsi que les marchés du crédit et les marchés boursiers réagissent raisonnablement bien à ce rajustement. La vitesse à laquelle on a atteint ces niveaux est un peu préoccupante mais de façon générale, c’est une bonne nouvelle.
Oui, c’est intéressant. Il y a beaucoup de manchettes sur l’envolée des marchés, mais pour en revenir à ce que disait Mike, il faut regarder les secteurs des services financiers, des produits industriels et même les marchés boursiers mondiaux. Ils ont affiché d’assez bons résultats récemment. Tout dépend, je crois, de ce sur quoi on se concentre.
J’aimerais revenir au rythme de ce changement, Scott, si vous me le permettez. Vous avez dit que c’était un catalyseur dans la situation actuelle. Avez-vous une idée du rythme des changements pour la suite?
Je crois que le rythme va ralentir. C’est très difficile de maintenir un tel rythme. Si vous réfléchissez en termes d’ancrage, où allons-nous? Où se situeront les taux d’intérêt? Un point d’ancrage raisonnable pour les taux d’intérêt à 30 ans, à long terme, se situe historiquement au niveau de ce que la Fed appelle son taux final. C’est le taux que la Fed anticipe à long terme d’après les taux à court terme. Et c’est entre 2,25 % et 2,5 %. Et vous savez quoi? Les taux sur 30 ans sont d’environ 2,3 % aux États-Unis.
Donc on arrive à des niveaux où c’est un choix logique, dans le contexte de ce que nous voulons faire à long terme. Je ne crois pas que les marchés soient en mesure d’afficher une hausse de 1 %, une hausse de 1 – de 50 points de base toutes les deux semaines. Je crois que la réaction naturelle au marché nous fera ralentir un peu.
Michael, j’aimerais parler du Comité de répartition des actifs de Gestion de patrimoine. Vous avez changé un peu vos prévisions pour les marchés. Mais avant d’aborder ce sujet, pourriez-vous me parler un peu de la rotation qu’on observe? Et en général, des secteurs qui semblent plus attractifs en ce moment.
Je crois que c’est vraiment une décision tactique. Il faut être prudent. Ce n’est pas une décision pour les 10 prochaines années, mais pour ce que l’on vit en ce moment. Et je crois que ça va continuer jusqu’à la fin de l’année. Mais ça ne devrait en aucun cas être une position à long terme.
Je crois que la technologie continuera d’offrir de très bons rendements au cours des 10 prochaines années. Mais cette année va être plus difficile. Nous aimons les secteurs qui sont très sensibles à la croissance. Quand les choses vont bien, les gens empruntent de l’argent.
C’est généralement très avantageux pour les services financiers, en particulier avec la pentification de la courbe. L’écart entre les taux de prêt et d’emprunt est donc très intéressant. Et je pense qu’il y aura de très bons rendements.
L’énergie fait aussi partie des secteurs complètement anéantis l’an dernier, mais qui connaît une belle remontée. Le marché est tendu. L’OPEP n’a pas augmenté ses quotas la semaine dernière. C’est donc une bonne nouvelle pour le pétrole.
Et ce qui est aussi intéressant, c’est qu’avec la reprise, le nombre d’installations de forage n’a pas remonté dans le bassin permien. C’est donc très différent des cycles précédents : dès que les prix du pétrole se raffermissaient, l’activité repartait en flèche aux États-Unis. Là, ce n’est pas le cas. On observe beaucoup plus de discipline du côté de l’offre, et c’est sans doute positif pour le secteur de l’énergie.
Quant aux produits industriels, tous les regards sont braqués sur le plan de dépenses d’infrastructures aux États-Unis. Mais une autre façon d’envisager cela et d’investir davantage sur une base tactique, c’est que le secteur des produits industriels sera le bénéficiaire net de ce plan, qui pourrait représenter 10 % du PIB... Un plan d’une ampleur considérable. Et on s’attend à ce qu’il soit annoncé cette année.
Parlons un peu de ces changements tactiques. Vous venez d’aborder certains de ces changements. J’aimerais qu’on les passe en revue. Encore une fois, votre message est très clair. Il s’agit de changements tactiques à court terme qui seront réévalués au fil de la progression dans le cycle du marché.
Les actions canadiennes sont en bonne position pour afficher des rendements supérieurs. Vous êtes passé d’une modeste surpondération à une surpondération maximale. Pourquoi?
Trois faits intéressants sur les actions canadiennes. D’abord, elles sont bon marché. Le Canada a – La dernière décennie n’a pas été reluisante pour les actions canadiennes, avec des rendements nettement inférieurs à ceux des actions américaines. L’évaluation n’est pas si mauvaise. Les rendements en dividendes vont de 4 % à 5 % dans le secteur des services financiers.
Deuxièmement, la préférence pour les matériaux, l’énergie et les services financiers. Tout cela pointe vers le Canada. Et troisièmement, c’est intéressant de voir que ces dernières semaines, il y a eu des turbulences sur le marché. Mais vous n’avez pas vraiment vu de dépréciation du dollar canadien. C’est une dynamique différente de celle de l’an dernier.
À chaque fois qu’il y a eu des turbulences, le dollar canadien a baissé. Nous pensons que le dollar canadien va continuer d’augmenter. Sans l’effet positif du taux de change, c’est moins attractif d’investir aux États-Unis cette année. Le Canada est donc plutôt un bon choix pour les 12 à 18 prochains mois.
Très bien. Parlons un peu des marchés émergents. Vous êtes passé d’une pondération modeste à neutre. Scott, pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez? Je reviendrai ensuite à Michael. Mais Scott, allez-y.
Oui, tout comme sur le marché boursier, il y a une rotation sous-jacente, entre les bonnes nouvelles et le contexte plus difficile sur les marchés émergents. Les marchés émergents axés sur les produits de base affichent et continueront d’afficher de meilleurs résultats dans le contexte d’une reprise de la croissance mondiale.
Certains marchés émergents vont connaître des difficultés en raison des taux de rendement plus élevés, en particulier aux États-Unis. Et certaines devises ont été un peu malmenées. Il faut donc choisir son marché, choisir son pays, de la même façon qu’on sélectionne des titres sur le marché boursier.
Michael, des commentaires?
Oui, encore une fois, on s’attend à une dépréciation progressive du dollar, ce qui est généralement positif pour les pays émergents. Les pays émergents ont vraiment réglé leurs problèmes de balance des paiements. Ils sont mieux placés. Fondamentalement et sur le plan budgétaire, ils sont en bien meilleure position qu’il y a, disons, 10 ans.
Le Canada est un bon marché pour les produits de base. Les marchés émergents permettent aussi d’obtenir cette exposition aux produits de base. C’est un secteur à la traîne depuis maintenant 10 ans, et qui est donc relativement bon marché.
En ce moment, nous surpondérons les actions. Mais la grande différence entre cette année et l’année prochaine – L’an dernier, on a misé sur les actions de croissance, sur le NASDAQ qui a vraiment donné de bons résultats. Nous pensons qu’il est maintenant plus logique de répartir et de diversifier un peu les risques, de surpondérer les actions mais sans s’exposer aux baisses vertigineuses comme celles du NASDAQ ce mois-ci.
Bien, je vais essayer d’aborder les derniers volets – D’en savoir plus sur ces changements de tactiques. Scott, le dollar canadien... Vous êtes passé d’une pondération modeste à neutre.
Oui, c’est ce qu’a très bien expliqué Mike, on est dans un contexte favorable au dollar canadien. Donc oui, la reprise est au rendez-vous et c’est une bonne nouvelle pour le Canada.
Et les liquidités, vous êtes passé d’une sous-pondération à une sous-pondération maximale.
Oui. Les liquidités ne rapportent pas grand-chose. C’est donc logique d’investir dans les actions ou de sous-pondérer les obligations d’État.
Nous n’en sommes qu’au début du cycle, Kim. De façon générale, en tout début de cycle, c’est parfois plus judicieux d’investir à long terme. Nous pensons que les investisseurs devraient bénéficier d’un contexte très favorable sur le plan monétaire et budgétaire, et le taux de chômage est élevé mais s’améliore progressivement. Le contexte est donc très favorable au risque.
C’est le moment d’investir pleinement, selon nous. On pourra augmenter la part des liquidités plus tard dans le cycle, mais ce n’est pas le moment d’adopter une position défensive.
Eh bien, nous sommes heureux que vous nous en parliez dès maintenant. Merci beaucoup, Michael et Scott.
Ça fait plaisir, Kim.
Merci.
[MUSIQUE]
Le rendement des bons du Trésor américain à 10 ans grimpe depuis des semaines et sème l’inquiétude sur les marchés, aux dépens surtout des actions du NASDAQ, de la technologie et axées sur le momentum. Alors, est-ce que cette tendance va se poursuivre? Doit-on s’attendre à d’autres évolutions? Qu’est-ce que tout cela signifie?
Michael Craig est chef, Répartition de l’actif. Scott Colbourne est directeur général. Tous deux à Gestion de Placements TD. Ils sont avec moi aujourd’hui.
Michael, commençons par ce qui se passe en ce moment. La hausse des taux obligataires a secoué les marchés. Le NASDAQ est presque à terre, avec une chute de près de 10 %. À votre avis, qu’est-ce qui se passe?
Cette hausse reflète en fait l’attente d’un contexte de croissance plus robuste. Le déploiement de la vaccination aux États-Unis a été beaucoup plus rapide que prévu. Des mesures de relance vont sans doute être confirmées ce mois-ci ou cette semaine, et on attend des annonces sur le plan des infrastructures.
On a manifestement un très fort facteur de croissance. Par conséquent, on a une pentification du marché obligataire, avec un taux du financement à un jour stable. Mais les obligations d’État à long terme se vendent massivement. Et tout cela est le reflet d’une économie en voie de guérison... d’une économie qui émerge d’une récession. Les taux de chômage sont en baisse.
Tout cela indique une embellie. Ce n’est pas une mauvaise chose. C’est une bonne nouvelle. Et les marchés obligataires se sont empressés de réagir.
J’aimerais vous demander – vous dites que c’est une bonne chose, parce que c’est une question de croissance. Mais je pense à tous ceux qui détiennent des titres technologiques et axés sur le momentum. Ils ne voient peut-être pas les choses de cet œil.
Pourriez-vous nous expliquer les raisons de ce repli? Pourquoi les marchés boursiers sont-ils en baisse quand l’économie semble se redresser?
Certains marchés boursiers se portent bien. D’autres éprouvent quelques difficultés. Dans le secteur des technologies, il y a eu des excès. C’est certain que début février, on a atteint un sommet un peu parabolique. Les gens ont fait monter les enchères sur les titres technologiques assez agressivement. C’est donc une simple correction. Et c’est une correction saine – qui remédie aux excès.
Mais fondamentalement, si le secteur des technologies et le NASDAQ sont malmenés, c’est parce que la croissance se redresse et qu’elle pourrait se situer cette année entre 5 et 9 %. La croissance n’est donc plus si raréfiée. Et quand quelque chose n’est plus rare, sa valeur baisse.
Par ailleurs, bon nombre des sociétés du NASDAQ ne font pas vraiment d’argent. On achète leurs titres dans l’espoir qu’elles fassent de l’argent un jour. Il y a donc de l’incertitude. Et si vous mettez ça en perspective avec un taux plus élevé, comme celui du marché obligataire, le jeu en vaut moins la chandelle.
En revanche, il y a des occasions plus intéressantes. Avec l’ouverture de l’économie et la forte croissance économique cette année – ça ne durera pas éternellement – mais les sociétés qui sont plus sensibles à une forte croissance se portent très bien. Les services financiers, les produits industriels, l’énergie, les matériaux... On voit des rendements très solides depuis le début de l’année. Bon nombre de ces titres étaient à la traîne l’an dernier, mais leurs résultats sont assez bons et reflètent une croissance plus vigoureuse.
Nous reviendrons sur cette idée de rotation. Scott, j’aimerais que vous nous parliez des taux obligataires. Comme on l’a dit, les gens s’y intéressent plus que jamais. Mais cette hausse des taux obligataires, cette hausse rapide est-elle vraiment saine? Est-ce que tout fonctionne normalement?
Oui, quand je regarde les taux d’intérêt actuels, je vois trois choses. D’abord, les niveaux historiques. En valeur absolue, les taux étaient très faibles ces 25 dernières années. Aux États-Unis, 1,6 % pour les taux à 10 ans. C’est très faible.
Qu’est-ce qui nous amène à cette situation? Comme Mike l’a très bien expliqué, c’est la croissance. C’est un phénomène mondial. On assiste à une normalisation. C’est sain. C’est une excellente nouvelle. Les taux devraient donc augmenter.
Et vous faites allusion au dernier problème, la rapidité de ce changement. L’an dernier, les taux à 10 ans ont touché le fond à 50 points de base aux États-Unis. Ils sont remontés à environ 90 points de base à la fin de 2020. C’est une belle hausse graduelle. Cette année, au cours des deux premiers mois, nous avons vu une augmentation d’environ 110, 120 points de base.
C’est ce qui a retenu l’attention des gens. La rapidité de ce changement. Je crois qu’il y a quelques inquiétudes concernant le contexte réglementaire et la microstructure du marché obligataire.
Mais essentiellement, quand on prend du recul, c’est une excellente nouvelle. Et les marchés, de façon générale, ainsi que les marchés du crédit et les marchés boursiers réagissent raisonnablement bien à ce rajustement. La vitesse à laquelle on a atteint ces niveaux est un peu préoccupante mais de façon générale, c’est une bonne nouvelle.
Oui, c’est intéressant. Il y a beaucoup de manchettes sur l’envolée des marchés, mais pour en revenir à ce que disait Mike, il faut regarder les secteurs des services financiers, des produits industriels et même les marchés boursiers mondiaux. Ils ont affiché d’assez bons résultats récemment. Tout dépend, je crois, de ce sur quoi on se concentre.
J’aimerais revenir au rythme de ce changement, Scott, si vous me le permettez. Vous avez dit que c’était un catalyseur dans la situation actuelle. Avez-vous une idée du rythme des changements pour la suite?
Je crois que le rythme va ralentir. C’est très difficile de maintenir un tel rythme. Si vous réfléchissez en termes d’ancrage, où allons-nous? Où se situeront les taux d’intérêt? Un point d’ancrage raisonnable pour les taux d’intérêt à 30 ans, à long terme, se situe historiquement au niveau de ce que la Fed appelle son taux final. C’est le taux que la Fed anticipe à long terme d’après les taux à court terme. Et c’est entre 2,25 % et 2,5 %. Et vous savez quoi? Les taux sur 30 ans sont d’environ 2,3 % aux États-Unis.
Donc on arrive à des niveaux où c’est un choix logique, dans le contexte de ce que nous voulons faire à long terme. Je ne crois pas que les marchés soient en mesure d’afficher une hausse de 1 %, une hausse de 1 – de 50 points de base toutes les deux semaines. Je crois que la réaction naturelle au marché nous fera ralentir un peu.
Michael, j’aimerais parler du Comité de répartition des actifs de Gestion de patrimoine. Vous avez changé un peu vos prévisions pour les marchés. Mais avant d’aborder ce sujet, pourriez-vous me parler un peu de la rotation qu’on observe? Et en général, des secteurs qui semblent plus attractifs en ce moment.
Je crois que c’est vraiment une décision tactique. Il faut être prudent. Ce n’est pas une décision pour les 10 prochaines années, mais pour ce que l’on vit en ce moment. Et je crois que ça va continuer jusqu’à la fin de l’année. Mais ça ne devrait en aucun cas être une position à long terme.
Je crois que la technologie continuera d’offrir de très bons rendements au cours des 10 prochaines années. Mais cette année va être plus difficile. Nous aimons les secteurs qui sont très sensibles à la croissance. Quand les choses vont bien, les gens empruntent de l’argent.
C’est généralement très avantageux pour les services financiers, en particulier avec la pentification de la courbe. L’écart entre les taux de prêt et d’emprunt est donc très intéressant. Et je pense qu’il y aura de très bons rendements.
L’énergie fait aussi partie des secteurs complètement anéantis l’an dernier, mais qui connaît une belle remontée. Le marché est tendu. L’OPEP n’a pas augmenté ses quotas la semaine dernière. C’est donc une bonne nouvelle pour le pétrole.
Et ce qui est aussi intéressant, c’est qu’avec la reprise, le nombre d’installations de forage n’a pas remonté dans le bassin permien. C’est donc très différent des cycles précédents : dès que les prix du pétrole se raffermissaient, l’activité repartait en flèche aux États-Unis. Là, ce n’est pas le cas. On observe beaucoup plus de discipline du côté de l’offre, et c’est sans doute positif pour le secteur de l’énergie.
Quant aux produits industriels, tous les regards sont braqués sur le plan de dépenses d’infrastructures aux États-Unis. Mais une autre façon d’envisager cela et d’investir davantage sur une base tactique, c’est que le secteur des produits industriels sera le bénéficiaire net de ce plan, qui pourrait représenter 10 % du PIB... Un plan d’une ampleur considérable. Et on s’attend à ce qu’il soit annoncé cette année.
Parlons un peu de ces changements tactiques. Vous venez d’aborder certains de ces changements. J’aimerais qu’on les passe en revue. Encore une fois, votre message est très clair. Il s’agit de changements tactiques à court terme qui seront réévalués au fil de la progression dans le cycle du marché.
Les actions canadiennes sont en bonne position pour afficher des rendements supérieurs. Vous êtes passé d’une modeste surpondération à une surpondération maximale. Pourquoi?
Trois faits intéressants sur les actions canadiennes. D’abord, elles sont bon marché. Le Canada a – La dernière décennie n’a pas été reluisante pour les actions canadiennes, avec des rendements nettement inférieurs à ceux des actions américaines. L’évaluation n’est pas si mauvaise. Les rendements en dividendes vont de 4 % à 5 % dans le secteur des services financiers.
Deuxièmement, la préférence pour les matériaux, l’énergie et les services financiers. Tout cela pointe vers le Canada. Et troisièmement, c’est intéressant de voir que ces dernières semaines, il y a eu des turbulences sur le marché. Mais vous n’avez pas vraiment vu de dépréciation du dollar canadien. C’est une dynamique différente de celle de l’an dernier.
À chaque fois qu’il y a eu des turbulences, le dollar canadien a baissé. Nous pensons que le dollar canadien va continuer d’augmenter. Sans l’effet positif du taux de change, c’est moins attractif d’investir aux États-Unis cette année. Le Canada est donc plutôt un bon choix pour les 12 à 18 prochains mois.
Très bien. Parlons un peu des marchés émergents. Vous êtes passé d’une pondération modeste à neutre. Scott, pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez? Je reviendrai ensuite à Michael. Mais Scott, allez-y.
Oui, tout comme sur le marché boursier, il y a une rotation sous-jacente, entre les bonnes nouvelles et le contexte plus difficile sur les marchés émergents. Les marchés émergents axés sur les produits de base affichent et continueront d’afficher de meilleurs résultats dans le contexte d’une reprise de la croissance mondiale.
Certains marchés émergents vont connaître des difficultés en raison des taux de rendement plus élevés, en particulier aux États-Unis. Et certaines devises ont été un peu malmenées. Il faut donc choisir son marché, choisir son pays, de la même façon qu’on sélectionne des titres sur le marché boursier.
Michael, des commentaires?
Oui, encore une fois, on s’attend à une dépréciation progressive du dollar, ce qui est généralement positif pour les pays émergents. Les pays émergents ont vraiment réglé leurs problèmes de balance des paiements. Ils sont mieux placés. Fondamentalement et sur le plan budgétaire, ils sont en bien meilleure position qu’il y a, disons, 10 ans.
Le Canada est un bon marché pour les produits de base. Les marchés émergents permettent aussi d’obtenir cette exposition aux produits de base. C’est un secteur à la traîne depuis maintenant 10 ans, et qui est donc relativement bon marché.
En ce moment, nous surpondérons les actions. Mais la grande différence entre cette année et l’année prochaine – L’an dernier, on a misé sur les actions de croissance, sur le NASDAQ qui a vraiment donné de bons résultats. Nous pensons qu’il est maintenant plus logique de répartir et de diversifier un peu les risques, de surpondérer les actions mais sans s’exposer aux baisses vertigineuses comme celles du NASDAQ ce mois-ci.
Bien, je vais essayer d’aborder les derniers volets – D’en savoir plus sur ces changements de tactiques. Scott, le dollar canadien... Vous êtes passé d’une pondération modeste à neutre.
Oui, c’est ce qu’a très bien expliqué Mike, on est dans un contexte favorable au dollar canadien. Donc oui, la reprise est au rendez-vous et c’est une bonne nouvelle pour le Canada.
Et les liquidités, vous êtes passé d’une sous-pondération à une sous-pondération maximale.
Oui. Les liquidités ne rapportent pas grand-chose. C’est donc logique d’investir dans les actions ou de sous-pondérer les obligations d’État.
Nous n’en sommes qu’au début du cycle, Kim. De façon générale, en tout début de cycle, c’est parfois plus judicieux d’investir à long terme. Nous pensons que les investisseurs devraient bénéficier d’un contexte très favorable sur le plan monétaire et budgétaire, et le taux de chômage est élevé mais s’améliore progressivement. Le contexte est donc très favorable au risque.
C’est le moment d’investir pleinement, selon nous. On pourra augmenter la part des liquidités plus tard dans le cycle, mais ce n’est pas le moment d’adopter une position défensive.
Eh bien, nous sommes heureux que vous nous en parliez dès maintenant. Merci beaucoup, Michael et Scott.
Ça fait plaisir, Kim.
Merci.
[MUSIQUE]