
Alors que le déploiement des vaccins est en cours partout dans le monde, la trajectoire de la pandémie continuera sans aucun doute de transformer le secteur du commerce de détail. Anthony Okolie et Anita Bruinsma, analyste de la consommation discrétionnaire, Gestion de Placements TD, discutent des tendances en matière de commerce de détail à surveiller en 2021.
Anita, commençons par une vue d’ensemble du commerce de détail. Plus précisément, qu’en est-il des dépenses de consommation pendant la pandémie?
Les dépenses de consommation et les ventes au détail ont été étonnamment élevées pendant la pandémie. Pour l’ensemble de l’année 2020, les ventes au détail ont en fait été plus élevées aux États-Unis et au Canada qu’en 2019. Et c’est vraiment surprenant, compte tenu du taux de chômage, du manque de confiance des consommateurs et du manque d’accès aux magasins.
Mais il y a deux nuances auxquelles nous devons vraiment prêter attention. D’abord, bien sûr, les dépenses étaient davantage axées sur les biens, parce que les services n’étaient pas disponibles. Et ensuite, nous ne devrions pas considérer ces chiffres comme une indication que les consommateurs sont nécessairement dans une situation favorable. Nous avons ici deux groupes de consommateurs, ceux qui ont gardé leur emploi et ont vu leurs taux d’épargne augmenter, et les personnes à faible revenu, qui ont subi la plupart des pertes d’emplois et ont vraiment souffert de cette situation.
Ce qui a vraiment soutenu les dépenses, ce sont des gens qui ont gardé leur emploi et qui avaient de l’épargne, et les consommateurs à faible revenu ont utilisé les chèques de relance qu’ils ont reçus du gouvernement. Et ils recevaient aussi des prestations de chômage plus généreuses. C’est ce qui a vraiment aidé à dépenser en 2020.
Pour revenir sur ce que vous avez dit, l’année dernière, comme vous l’avez mentionné, les gens travaillaient à la maison, et ils ont probablement dépensé de l’argent pour rénover leur maison et retardé des activités comme les voyages. Pensez-vous que ces mêmes tendances se maintiendront en 2021 ou croyez-vous que cela va changer avec le lancement prochain du vaccin?
Eh bien, je crois que la première partie de 2021 ressemble beaucoup à 2020. Nous sommes toujours à la maison. Les gens continuent de dépenser dans les mêmes catégories. Celles dont vous avez parlé : mobilier, décoration, animaux de compagnie, électronique. Je pense qu’elles vont continuer à être importantes au début de l’année.
Mais au fil de l’année, nous verrons des éclaircies avec le déploiement du vaccin, ça changera. Les catégories vont certainement revenir aux services quand les restaurants rouvriront leurs portes et que les autres services se rétabliront. Avec la reprise des voyages aussi. Je pense donc que nous allons certainement voir ce changement. Le parcours sera sûrement un peu chaotique. Je pense que les dépenses globales peuvent très bien se porter.
Et ça sera dû à l’épargne réalisée par les consommateurs les plus aisés, mais les consommateurs à faible revenu ont certainement subi des dommages financiers pendant la récession, et il leur faudra plus de temps pour s’en remettre. Cela pourrait donc peser un peu sur les ventes, mais nous allons certainement assister à un retour aux services cette année.
D’accord. Dans cette perspective, qui sont les prochains gagnants du secteur de la consommation?
Oui, nous avons parlé des gagnants de l’année dernière, de ceux qui restent à la maison. Mais c’était hier. Et en tant qu’investisseurs, bien sûr, nous sommes toujours tournés vers l’avenir. Qui sont les prochains gagnants? Je vois trois gagnants, et ils sont tous liés au fait de quitter la maison, plutôt que d’y rester.
Le premier gagnant, ce sont les restaurants. Les gens dépensent beaucoup pour l’épicerie et font beaucoup de cuisine. Honnêtement, je crois qu’ils en ont assez. Assez de manger leur plat à emporter à leur table de salle à manger. Et les sondages montrent qu’ils veulent retourner au restaurant. Ils veulent l’ambiance et ils veulent voir leurs amis. Je crois donc que les restaurants seront une catégorie très importante cette année.
Le deuxième gagnant, ce sont les hôtels. Je pense que les voyages nationaux peuvent reprendre assez bien en 2021, les personnes voyageant dans leur propre pays. Et ce sera vraiment une bonne chose pour les hôtels. Et il y a la reprise des voyages internationaux, et enfin, les voyages d’affaires, qui pourraient prendre plus de temps, fin 2021, voire 2022 et 2023. Le cycle de reprise pour les hôtels est plus long.
La troisième catégorie, qui est intéressante, est celle des vêtements et des chaussures. En retournant au restaurant et en revoyant leurs amis, les gens voudront certainement de nouveaux vêtements, plus habillés. On en a tous marre de nos chandails à capuche et de nos leggings. Les gens vont vouloir aller magasiner. Pareil pour les chaussures, lorsque vous êtes sur Zoom, personne ne s’occupe de vos pieds. Mais quand on va sortir, on va vouloir acheter de nouvelles chaussures. Je suis donc très enthousiaste pour cette catégorie, surtout au printemps et à l’été.
Oui, je pense que nous avons tous hâte. Comment ces actions se sont-elles comportées à la lumière des attentes de réouverture? Et que pensez-vous de l’investissement dans le secteur de la consommation actuellement?
Le marché est toujours tourné vers l’avenir. On cherche toujours la prochaine tendance. Ainsi, lorsque Pfizer a annoncé que son vaccin devrait être très efficace à l’automne, tous ces secteurs et toutes ces actions ont reçu comme une piqûre dans le bras. Pardon pour la mauvaise blague. Bon nombre de ces actions sont aujourd’hui à leurs niveaux d’avant COVID, voire au-dessus.
Il est donc un peu difficile de choisir des actions. Mais est-ce que ces actions pourront se négocier à la hausse d’ici deux ou trois ans? Absolument. Je le pense. Je crois que la demande accumulée est énorme. Nous avons une épargne considérable que les gens ont accumulée. Et je crois que les investisseurs seront très enthousiasmés par la reprise des revenus et des gains qui en découlent.
Il pourrait y avoir des soubresauts tout au long de l’année. Mais si vous êtes un investisseur avec un horizon plus lointain, deux à trois ans, et que vous savez faire preuve de patience, je crois qu’il y a d’excellentes occasions dans le secteur de la consommation cette année.
Anita, merci beaucoup pour vos explications.
De rien, Tony.
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